Une proposition de loi actuellement étudiée au Sénat vise à restreindre la liberté de création d’écoles indépendantes. Il s’agit de la proposition de loi (PPL) 589, qui reprend pour l’essentiel, le projet de Najat Vallaud-Belkacem (socialiste féministe). La PPL a cette fois été déposée par une sénatrice centriste, et est également soutenue directement par le Ministère de l’Éducation nationale.
Anne Coffinier, directrice générale de la Fondation pour l’école répondait aux questions de Valeurs actuelles sur ce sujet. Retrouvez son entretien sur le site de Valeurs actuelles.
Directrice générale de la Fondation pour l’école, Anne Coffinier appelle à la vigilance face à une proposition de loi présentée au Sénat par les centristes et soutenue par le ministère de l’Éducation nationale, qui menace la liberté d’enseignement des écoles hors contrat.
Valeurs actuelles. — Vous êtes aujourd’hui inquiète alors qu’un texte sera lu au Sénat le 21 février prochain. De quoi s’agit-il ?
Anne Coffinier. — Il s’agit d’une proposition de loi centriste qui cherche à rendre beaucoup plus compliquée l’ouverture de classes hors contrat et à les soumettre au bon vouloir de l’Éducation nationale. L’idée n’est pas nouvelle, elle avait déjà été présentée à l’Assemblée nationale par Najat Vallaud-Belkacem avant d’être heureusement censurée par le Conseil constitutionnel. Mais si le projet de loi qui revient aujourd’hui au Sénat est proposé dans le cadre de la niche centriste, beaucoup s’accordent à dire que c’est bien le gouvernement, et le ministère de Jean-Michel Blanquer (ci-dessus) en particulier, qui est à la manœuvre. Le ministre parle beaucoup de liberté, mais ce texte vise à briser l’essor des écoles hors contrat qui sont précisément des lieux de liberté et d’innovation au service de tous.
— Pourquoi ces écoles indépendantes vous semblent-elles nécessaires aujourd’hui ?
— Il faudrait sans doute le demander en premier lieu aux parents des 65 000 élèves qui y sont scolarisés ! S’ils ont fait ce choix, c’est que l’école sous-contrat ne convenait manifestement pas à leurs enfants. La demande explose et 122 écoles ont encore ouvert cette année, on ne peut pas faire semblant de ne pas le voir ! C’est une demande démocratique.
Il faut une respiration, il est urgent d’innover. La technique, on la connaît parfaitement et le gouvernement s’en fait d’ailleurs l’écho : il faut s’appuyer sur la société civile, les entreprises, les bonnes pratiques internationales. C’est ainsi qu’on pourra donner un second souffle à notre école française.
— Mais vous le dites vous-même, c’est le discours du gouvernement !
C’est justement ce qui est inquiétant. D’un côté, le gouvernement, le ministre de l’Éducation nationale et le Président lui-même portent un discours libre et libérateur, prônent l’expérimentation, l’innovation et la différentiation. Et cela plait à chacun d’entre nous ! Mais force est de constater que ce n’est qu’un discours. Je le découvre aujourd’hui avec déception. Ce que nous constatons dans les faits, c’est l’action de l’administration qui se poursuit selon la même logique : éradiquer tout ce qui est différent. Ils continuent à ne soutenir que les initiatives qui émanent de cabinets ministériels, dans une logique archaïquement du haut vers le bas. Mais tout cela est sclérosé ! Nous n’avons qu’une seule question pour le gouvernement : comment compte-t-il rénover tout de l’intérieur avant que ça s’effondre ? Nous sommes bien obligés de leur rappeler que nous sommes déjà presque en queue de classement à l’international. Il faut que ça bouge, et vite.
— Que pourraient-ils faire concrètement ?
— Faire confiance aux professeurs sur le terrain et accepter que les écoles vraiment libres de leur pédagogie servent d’aiguillon au reste du système scolaire. Ces écoles n’ont pas le choix : elles sont connectées à la réalité des besoins de l’enfant et il serait temps de les observer. Sans compter qu’elles offrent le choix aux parents d’élèves qui ont des besoins spécifiques et qui sont souvent laissés sur le bord de la route dans l’Éducation nationale. Je pense aux enfants dyslexiques, précoces, etc. Pour eux, il n’y a que le hors-contrat. On peut également évoquer la question du sport-étude : c’est un fait, le système public est trop lourd pour créer des champions.
— Qu’espérez-vous aujourd’hui ?
La proposition a été rejetée en commission, en l’état, dans sa version modifiée par le rapporteur. Pour des raisons différentes, les socialistes et les Républicains s’y sont opposés. Elle sera en lecture le 21 février prochain. Désormais la question est : le gouvernement va-t-il être raisonnable ou poursuivre la vieille politique de guerre larvée à tout ce qui peut renouveler l’enseignement en France ?
Cet évènement peut sembler anecdotique, mais ce n’est pas rien : il concerne l’un des secteurs les plus dynamiques de la société civile. Cela illustre malheureusement la déconnexion entre le discours très séduisant de Jean-Michel Blanquer et la réalité des faits : la poursuite des bonnes vieilles habitudes technocratiques de l’Éducation nationale française.
Le ministre de l’Éducation français Blanquer |
Directrice générale de la Fondation pour l’école, Anne Coffinier appelle à la vigilance face à une proposition de loi présentée au Sénat par les centristes et soutenue par le ministère de l’Éducation nationale, qui menace la liberté d’enseignement des écoles hors contrat.
Valeurs actuelles. — Vous êtes aujourd’hui inquiète alors qu’un texte sera lu au Sénat le 21 février prochain. De quoi s’agit-il ?
Anne Coffinier. — Il s’agit d’une proposition de loi centriste qui cherche à rendre beaucoup plus compliquée l’ouverture de classes hors contrat et à les soumettre au bon vouloir de l’Éducation nationale. L’idée n’est pas nouvelle, elle avait déjà été présentée à l’Assemblée nationale par Najat Vallaud-Belkacem avant d’être heureusement censurée par le Conseil constitutionnel. Mais si le projet de loi qui revient aujourd’hui au Sénat est proposé dans le cadre de la niche centriste, beaucoup s’accordent à dire que c’est bien le gouvernement, et le ministère de Jean-Michel Blanquer (ci-dessus) en particulier, qui est à la manœuvre. Le ministre parle beaucoup de liberté, mais ce texte vise à briser l’essor des écoles hors contrat qui sont précisément des lieux de liberté et d’innovation au service de tous.
— Pourquoi ces écoles indépendantes vous semblent-elles nécessaires aujourd’hui ?
— Il faudrait sans doute le demander en premier lieu aux parents des 65 000 élèves qui y sont scolarisés ! S’ils ont fait ce choix, c’est que l’école sous-contrat ne convenait manifestement pas à leurs enfants. La demande explose et 122 écoles ont encore ouvert cette année, on ne peut pas faire semblant de ne pas le voir ! C’est une demande démocratique.
Il faut une respiration, il est urgent d’innover. La technique, on la connaît parfaitement et le gouvernement s’en fait d’ailleurs l’écho : il faut s’appuyer sur la société civile, les entreprises, les bonnes pratiques internationales. C’est ainsi qu’on pourra donner un second souffle à notre école française.
— Mais vous le dites vous-même, c’est le discours du gouvernement !
C’est justement ce qui est inquiétant. D’un côté, le gouvernement, le ministre de l’Éducation nationale et le Président lui-même portent un discours libre et libérateur, prônent l’expérimentation, l’innovation et la différentiation. Et cela plait à chacun d’entre nous ! Mais force est de constater que ce n’est qu’un discours. Je le découvre aujourd’hui avec déception. Ce que nous constatons dans les faits, c’est l’action de l’administration qui se poursuit selon la même logique : éradiquer tout ce qui est différent. Ils continuent à ne soutenir que les initiatives qui émanent de cabinets ministériels, dans une logique archaïquement du haut vers le bas. Mais tout cela est sclérosé ! Nous n’avons qu’une seule question pour le gouvernement : comment compte-t-il rénover tout de l’intérieur avant que ça s’effondre ? Nous sommes bien obligés de leur rappeler que nous sommes déjà presque en queue de classement à l’international. Il faut que ça bouge, et vite.
— Que pourraient-ils faire concrètement ?
— Faire confiance aux professeurs sur le terrain et accepter que les écoles vraiment libres de leur pédagogie servent d’aiguillon au reste du système scolaire. Ces écoles n’ont pas le choix : elles sont connectées à la réalité des besoins de l’enfant et il serait temps de les observer. Sans compter qu’elles offrent le choix aux parents d’élèves qui ont des besoins spécifiques et qui sont souvent laissés sur le bord de la route dans l’Éducation nationale. Je pense aux enfants dyslexiques, précoces, etc. Pour eux, il n’y a que le hors-contrat. On peut également évoquer la question du sport-étude : c’est un fait, le système public est trop lourd pour créer des champions.
— Qu’espérez-vous aujourd’hui ?
La proposition a été rejetée en commission, en l’état, dans sa version modifiée par le rapporteur. Pour des raisons différentes, les socialistes et les Républicains s’y sont opposés. Elle sera en lecture le 21 février prochain. Désormais la question est : le gouvernement va-t-il être raisonnable ou poursuivre la vieille politique de guerre larvée à tout ce qui peut renouveler l’enseignement en France ?
Cet évènement peut sembler anecdotique, mais ce n’est pas rien : il concerne l’un des secteurs les plus dynamiques de la société civile. Cela illustre malheureusement la déconnexion entre le discours très séduisant de Jean-Michel Blanquer et la réalité des faits : la poursuite des bonnes vieilles habitudes technocratiques de l’Éducation nationale française.
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