mardi 28 juillet 2015

Éthique — Planned parenthood parle du prix de revente des enfants avortés et de comment maximiser celui-ci (M-à-j)

Mise à jour du 28 juillet

Accusé de trafic d’organes, le Planning Familial s’est défendu en expliquant que ces pratiques concernent la recherche médicale et que l’argent recueilli ne sert qu’à couvrir une partie des dépenses. La moitié du budget de Planned Parenthood vient de subventions par le contribuable américain. L’institution paie également ses huit principaux directeurs un salaire moyen de 300.000 $ américains.

En guise de réponse, le « Centre pour le progrès médical » a publié une seconde vidéo dans laquelle on voit une deuxième cadre du service médical (pour la Californie cette fois) « voudrait avoir une Lamborgini » (éclats de rire).



Une troisième vidéo en caméra cachée a été publiée ce matin dans laquelle un employé « médical » de Planned Parenthood sélectionne avec désinvolture des jambes de bébé, de la moelle épinière et d’autres parties du corps et les pose sur une assiette à tarte. Planned Parenthood suggère que cette vidéo pourrait violer le « secret médical ». De qui ? Des « tissus humains » écrasés ou non sur l’assiette à tarte ?

Troisième vidéo (en anglais non sous-titré)

Dans une quatrième vidéo, l'on voit une directrice d'une association affiliée à Planned Parenthood discuter de la manière de présenter cette collecte de tissus et d'organes : il faut mieux présenter la chose sous l'égide de la « recherche » plutôt que la fourniture de produits à des entreprises lucratives. La directrice ne veut pas que l'on se fasse « attraper » et parle des conseils juridiques qu'elle reçoit.



Plusieurs grandes entreprises ou associations comme American Express (carte de crédit), American Cancer Society, Coca-Cola, Xerox et Ford Motor Company ont décidé de ne plus subventionner Planned Parenthood.

Billet du 19 juillet

Une vidéo produite à l’aide d’une caméra cachée et publiée récemment révèle un chef de file du « Planning familial » américain qui admet que l’organisme utilise une procédure d’avortement illégale et très controversée de naissance partielle afin de vendre intactes des parties de corps de fœtus avortés.

Siroter du vin tout en discutant d'écraser certaines parties des foetus plutôt que d'autres

Le prix de vente moyen pour les parties du corps du fœtus ? Entre 30 $ et 100 $ par spécimen. Depuis février 2009, Deborah Nucatola est directrice principale des services médicaux à Planned Parenthood, où elle supervise les pratiques médicales de tous les affiliés de la « planification familiale » au pays. Elle a été employée par Planned Parenthood pendant plus de dix ans. Elle pratique également des avortements jusqu’à 24 semaines à Los Angeles.

Dans la vidéo datée du 25 juillet 2014, elle a rencontré des enquêteurs se faisant passer pour des acheteurs pour le compte d’une entreprise de produits biologiques humains. Tout en sirotant nonchalamment du vin et en mangeant de la salade, le Dr Nucatola a révélé qu’elle facture de 30 $ à 100 $ le spécimen, et que le foie de fœtus se vend particulièrement bien — ajoutant que « ces jours beaucoup de gens veulent des cœurs intacts ».

Elle aurait aussi reçu des demandes pour des poumons et des « extrémités inférieures. » Les affiliés de Planned Parenthood veulent « absolument » offrir de tels organes, dit-elle. Nucatola a admis que les avorteurs de Planned Parenthood prennent grand soin pour ne pas faire apparaître l’aspect lucratif de leur métier en vendant des parties du corps des fœtus. Elle a dit, « Ils veulent seulement le faire de manière à ce qu’ils ne soient pas perçus comme étant “cette clinique qui vend des tissus fœtaux, cette clinique qui en profite.” »



Le commerce des organes et des parties du corps est pourtant un crime fédéral

La question ne se limite pas au seul plan des relations publiques — il y a aussi cette petite chose qui s’appelle la loi fédérale. Le commerce des parties du corps humain est un crime fédéral passible de 10 ans de prison et une amende de 500 000 $. La méthode d’avortement décrite dans la vidéo semble également violer le droit fédéral.

Le Dr Nucatola affirme qu’elle participe à « une petite discussion informelle au début de chaque journée » pour savoir quelles parties du corps de fœtus les clients demandent, ainsi que pour savoir quelles patientes ce jour-là avorteront des bébés à partir desquels seront récoltés les organes. Puis les avorteurs de Planned Parenthood adaptent la procédure de l’avortement pour s’assurer qu’ils ne détruisent pas les organes demandés, maximisant ainsi la rentabilité. « C’est pour cela que la plupart des avorteurs avorteront dans ce cas [quand il y a un ou plusieurs organes à récolter] sous guidage échographique, pour savoir où placer leurs forceps, » dit-elle.

Elle a révélé que, lorsque les avorteurs démembrent les enfants à naître, ils décident, « je ne vais pas écraser cette partie. Je vais simplement écraser plus bas, ou je vais écraser plus haut, et je vais voir si je peux obtenir le tout intact. » Pour se procurer des organes intacts, elle semblait raconter qu’elle-même et les autres mettent en œuvre un procédé d’avortement illégal au pays, notamment l’avortement par naissance partielle.

L’avortement par naissance partielle pourtant interdit depuis 2003

« Certaines personnes, » dit-elle en prenant une autre gorgée de vin, « vont effectivement tenter de changer la présentation [du bébé] de sorte que ça ne sera pas le vertex [la tête, qui sort en premier], » poursuit-elle. « Donc, si vous le faites à partir de la présentation du siège [les pieds en premier]... souvent, à la fin, vous pouvez évacuer une calotte crânienne intacte [la tête]. »

Le président George W. Bush a signé une loi interdisant l’avortement par naissance partielle en 2003. Cette procédure constitue un crime fédéral passible de deux ans de prison et une amende de 250 000 $.

Mais, le Dr Nucatola dit aux enquêteurs qu’il y a des façons de contourner la loi. « L’interdiction de l’avortement par naissance partielle est de loi fédérale, et les lois sont sujettes à interprétation, » dit-elle. « Donc, si je vous dis dès le premier jour que je n’ai pas l’intention de le faire, ce qui se passe en fin de compte n’a pas d’importance. » « Au bureau national, nous avons un département juridique qui ne veut vraiment pas que nous soyons les intermédiaires officiels pour cette question en ce moment, » dit-elle.

« Mais, je vais vous dire qu’en aparté nous discutons de ces sujets avec nos affiliés. »

Dans une autre vidéo, les enquêteurs rencontrent le PDG de Planned Parenthood Cecile Richards, lui disant que le Dr Nucatola a été incroyablement utile dans leurs efforts pour se procurer des parties de corps de bébés à naître.

« Ah bon, » répond Richards. « Génial. Elle est incroyable. » En plus de superviser toutes les pratiques médicales du géant de l’avortement, le Dr Nucatola a souvent été un porte-parole auprès des médias pour la promotion des préoccupations politiques de l’organisme.

Trois ans d'infiltration

La vidéo a été le fruit d’une opération d’infiltration menée pendant près de trois ans par le Center for Medical Progress (Centre pour le progrès médical). « La conspiration criminelle de Planned Parenthood pour faire de l’argent sur le dos des enfants avortés atteint les plus hauts niveaux de leur organisation », a déclaré le chef de projet David Daleiden.

« Les élus doivent prendre acte de la clameur publique pour que Planned Parenthood soit tenu responsable d’avoir enfreint à la loi et pour que nos impôts cessent de financer leurs activités barbares. » Les dirigeants des divers groupes pro-vie nationaux ont immédiatement exigé que le Congrès mène une enquête. « Cette vidéo fournit une preuve de la réalité choquante du modèle d’entreprise inhumain et macabre de Planned Parenthood, » a déclaré le Dr Charmaine Yoest, président et chef de la direction des Américains unis pour la Vie (Americans United for Life).

« Sous la direction de Cecile Richards, les mammographies sont en baisse, les avortements sont en hausse et les profits sont en hausse, et même les organes des enfants à naître deviennent pour elle un autre produit à vendre. Nous demandons à ce qu’une enquête du Congrès soit immédiatement conduite pour jeter la lumière sur ces atrocités. Et tout aussi important, le temps est arrivé pour que cesse le financement fédéral de Planned Parenthood. Le contribuable américain ne devrait pas faire des affaires avec ces profiteurs impitoyables. » Les organisateurs demandent que l’on partage cette information sur Twitter en utilisant le mot-dièse #PPSellsBabyParts. Ils demandent également que le public interpelle le Congrès américain afin qu’il mène une enquête complète sur ce scandale.

Les fœtus avortés dépecés après avoir été précautionneusement extraits


Tandis que les lecteurs des différents médias disent leur « écœurement » et leur « dégoût » devant ces pratiques immondes, le Planning familial aux États-Unis affirme que la pratique de la récolte d’organes sur les fœtus est « humanitaire ». Le principal fournisseur d’avortements du pays explique qu’elle « peut servir à la guérison de maladies, à sauver des vies, à alléger la souffrance ».

Des justifications en forme d’aveu : Eric Ferraro, vice-président de la communication de la fédération américaine de Planned Parenthood a reconnu que ses cliniques « aident les patients qui veulent donner des tissus pour la recherche scientifique », « avec le consentement entier et adéquat de la part des patients et dans le respect des normes éthiques et légales les plus strictes ». Quant aux sommes qui changent de mains, elles servent simplement à « couvrir le coût du transport des tissus vers des centres de recherches de premier plan ».

Mais comme le note David Daleiden, qui a mené son enquête secrète pendant 30 mois, le Planning familial reconnaît à travers ses divers communiqués avoir effectivement prélevé des organes fœtaux et que cela entraîne des paiements : les deux faits qu’il a cherché à mettre au jour et qui posent tous deux un problème légal.

Justification de Planned Parenthood dans les médias


Le Center for Medical Progress a réussi à se procurer une publicité envoyée au Planning familial de la part de la société StemExpress, qui fait partie des principaux acheteurs de tissus fœtaux auprès des cliniques de Planned Parenthood : le dépliant met en avant les avantages financiers de la fourniture d’organes au travers d’expressions sans ambiguïté : « Rentable », « profits financiers », « un bénéfice financier pour votre clinique », « croissance fiscale de votre clinique ». La « brochure » comporte un témoignage de satisfaction de la part d’un directeur médical du Planning, le Dr Dorothy Furgerson.

David Daleiden a déclaré à LifeSiteNews que les gains liés au prélèvement d’organes pouvaient atteindre 100.000 dollars par an pour une seule clinique. Il annonce de nouvelles révélations.


Bientôt une enquête parlementaire aux États-Unis


Dans le Guardian – journal « progressiste » londonien de référence –, l’éditorialiste Jessica Valenti tentait mercredi de noyer le poisson en rappelant que bien des « procédures médicales » sont souvent « déplaisantes ». « Pour la plupart des gens, il a probablement été difficile de voir Nucatola expliquer comment on pratique des avortements de deuxième trimestre pendant qu’elle mange de la salade et avale du vin rouge – mais je pense que la plupart d’entre nous seraient un peu dégoûtés d’entendre la description de la plupart des procédures médicales au cours d’un dîner. »

Elle reconnaît qu’elle a elle-même eu du mal a écouter le discours de Deborah Nucatola – ayant elle-même subi et revendiqué deux avortements.

Pour autant, martèle la journaliste, l’avortement n’est pas illégal, et le prélèvement d’organes sur des fœtus avortés ne l’est pas non plus : il est au contraire justifié par la recherche sur la maladie de Parkinson… L’art de faire pleurer Margot : c’est ainsi qu’on justifie toutes les transgressions en bioéthique, en faisant croire qu’elles vont servir aux gens ordinaires, à vous et à moi.

La manipulation est évidente – même si Jessica Valenti en rend coupable celui qui a joué sur les sentiments des spectateurs afin qu’ils rejoignent les opposants à l’avortement. Oubliée, la réalité : elle ne cherche qu’à faire oublier la réalité – à savoir que l’avortement tue un être humain.

Voir aussi

Caricaturistes commencent à parler de l’affaire Gosnell

Silence médiatique embarrassé autour d’un avortoir...

Affaire Gosnell : l’absence des médias. Quand ça saigne, ça baigne, non ?

Avortement — « le débat est clos » selon les médias et l’intelligentsia autoproclamée

La Russie entend limiter l’avortement pour éviter une contraction démographique

De l’avortement à l’infanticide... pour le bien-être de la famille

Dérapage en ECR : enfant prône élimination des trisomiques, devant le frère d’un tel enfant, silence complice de l’enseignant

Le paiement de la contraception et de l’avortement imposé aux établissements confessionnels

« Taire le sexe des fœtus pour sauver des fillettes »

Cour de justice de l’Union européenne : respect de l’embryon humain dès fécondation

Débat sur l’avortement : l’ainée est pro-avortement et défend l’ordre établi, la cadette pro-vie veut dialoguer

Denise Bombardier : « On paie des avortements » et dans un cas d’espèce une même femme a avorté « 23 fois » aux frais du contribuable québécois

Seuls 30 % des Ontariens pensent que l’État devrait continuer à rembourser tous les avortements

Complément cours d’ECR — avortements tardifs en Russie, en Espagne et au Québec

Réactions à la suite des propos de Mgr Ouellet sur l’avortement

Erreurs et imprécisions dans le chapitre sur le clonage d’un livre d’ECR pour la 2e secondaire

Omissions et critiques pédagogiques du chapitre sur le clonage d’un livre d’ECR pour la 2e secondaire

Le 28 juillet 1755 — Le Grand Dérangement

Le peuple acadien naît tout au début du XVIIe siècle, lors de la fondation de Port-Royal en 1604, et s’implante principalement dans la Nouvelle-Écosse actuelle. Des Acadiens vont aussi s’établir sur l’Île-du-Prince-Édouard et le Cap-Breton (appelées respectivement, à l’époque, île Saint-Jean et île Royale). En 1713, à l’issue du traité d’Utrecht, les Français cèdent l’Acadie aux Anglais, mais conservent l’île Royale. La majorité des Acadiens demeurent sur place, mais exigent de rester neutres en cas de conflit contre la France. Pas question de tuer des soldats français.

Les historiens ont l’habitude de retenir 1755 comme la date charnière de l’histoire des Acadiens. Mais replacé dans le contexte global des provinces maritimes, le phénomène de la « Déportation » apparaît plutôt comme la suite d’une série d’événements remontant au moins à 1749, c’est-à-dire à la fondation de Halifax (Nouvelle-Écosse) par les Britanniques. Fondation qui enflamme les Micmacs. Ces derniers sentent que les Anglais se sont approprié leur territoire sans leur consentement, contrairement au traité de 1725/1726, et les officiers anglais refusent au départ la coutume qui veut que l’on échange des présents pour l’utilisation des terres. Cornwallis veut mettre le peuple micmac sous son autorité, mais essuie un refus. Par représailles, il offre des récompenses pour les scalps des micmacs. Les Micmacs répondent en déclarant la guerre aux Anglais en 1749.

Depuis 1749, « britanniser » l’Acadie

Il faut se rappeler que de 1713 à 1749 la Nouvelle-Écosse péninsulaire, quoiqu’appartenant légalement à l’Angleterre, n’en demeurait pas moins un territoire au visage français. Il y avait bien un gouvernement colonial anglais à Port-Royal, que l’on avait rebaptisé Annapolis Royal, mais son rayonnement ne dépassait pas beaucoup la petite capitale elle-même : les campagnes et ses habitants étaient restés français.

À maintes reprises, l’Angleterre leur avait demandé de devenir des sujets britanniques par un serment de fidélité inconditionnelle. Les Acadiens s’y opposaient avec ténacité et ne voulaient prêter qu’un serment de fidélité conditionnelle : alléguant que les Anglais les avaient empêchés d’émigrer en territoire français comme le prévoyait une directive de la Reine Anne d’Angleterre, les Acadiens ne voulaient consentir qu’à rester neutres en cas de conflit entre la France et l’Angleterre.

En 1749 cependant, l’Angleterre décide, une fois pour toutes, de « britanniser » sa colonie acadienne. Elle transfère sa capitale d’Annapolis Royal à Halifax, meilleur port de mer qui permet aux Britanniques de recommencer à neuf, loin des pressions acadiennes. En outre, elle entreprend, dès 1751, un effort d’immigration : elle mène sa campagne de publicité non seulement auprès des protestants de la Nouvelle-Angleterre, mais aussi dans les territoires allemands appartenant à la couronne britannique ainsi qu’en Suisse. On assiste ainsi en 1753, sur le site du village acadien de Mirliguèche, à la fondation de Lunenburg en Nouvelle-Écosse du nom de l’électorat de Brunswick-Lunebourg en Allemagne du Nord, possession du Roi d’Angleterre à l’époque. Enfin, elle ordonne à son gouverneur de mettre sur pieds des institutions de type britannique. Les nouveaux colons allemands et britanniques qui débarquent aimeraient bien mettre la main sur les excellentes terres des Acadiens. Mais la chose n’est pas si aisée. Les Anglais ne tiennent-ils pas pour sacré le droit de propriété ?

Tout cela ne réglait donc pas le « problème » acadien, mais indiquait clairement la détermination britannique d’en finir avec ces « French Neutrals ». C’est ainsi que l’Angleterre demande encore une fois aux Acadiens un serment de fidélité inconditionnelle. Nouveau refus des Acadiens. Mais les événements allaient se précipiter. Anglais et Français avaient en effet commencé à s’affronter dans la vallée de l’Ohio dès 1754, ce qui, joint aux pressions de la forteresse de Louisbourg, menaçait de prendre l’Angleterre comme dans un étau. Que feraient, en cas de conflit, les Acadiens ?

L’obligation de prêter serment, un prétexte ?

Mais un an avant la déclaration formelle de la guerre de Sept Ans (1756-1763), les autorités anglaises dépêchèrent en 1755 le colonel Monckton pour attaquer le fort Beauséjour qui tomba en juin 1755. Les événements devaient se précipiter par la suite : après la chute du dit fort Beauséjour, les autorités anglaises entreprirent de déporter toute la population de la Nouvelle-Écosse péninsulaire.

Le nouveau lieutenant-gouverneur anglais Charles Lawrence décide donc, le 28 juillet 1755 de déporter massivement les Acadiens. L’ordre de déportation sera lu officiellement (en anglais) à Grand-Pré, le 5 septembre 1755 (notre illustration).

À cette date, il semble bien que la prestation du serment de fidélité à la Couronne britannique ne fût plus qu’un prétexte. D’une part, le peuple acadien avait déjà prêté serment d’allégeance. D’autre part, Lawrence avait clairement indiqué son désir de déporter les Acadiens. Dans une lettre datée du 9 août 1755, il affirme : « Je leur proposerai le serment d’allégeance une dernière fois. S’ils refusent, nous aurons dans ce refus un prétexte pour les expulser. S’ils acceptent, je leur refuserai le serment, en appliquant le décret qui interdit à quiconque ayant déjà refusé de prêter serment d’allégeance de le prêter. Dans les deux cas, je les déporterai. »

Ainsi s’explique la Déportation commencée à Grand-Pré en 1755 et qui ne devait se terminer qu’en 1761 : un désir manifeste de l’Angleterre de « britanniser » sa colonie ; la persistance des Acadiens a gardé leur qualité de Français ; une conjoncture militaire qui apparaissait au départ défavorable aux Britanniques.

Déportations massives, y compris des territoires encore français

Sur les 8.000 à 10.000 Acadiens des provinces maritimes, les trois quarts furent soit déportés dans les colonies anglaises (États-Unis actuels), soit emprisonnées dans les prisons de Halifax ou de Londres. Le reste réussit à se réfugier dans les bois du Nouveau-Brunswick ou à fuir vers le Québec actuel.

Par la suite, la population de Louisbourg, composée d’environ 2,000 habitants, fut rapatriée en France, comme ce fut le cas de celle de l’Île Saint-Jean (île du Prince-Édouard actuelle), alors que ces deux colonies étant encore légalement des possessions françaises ! Dans le cas de l’île Saint-Jean toutefois, cette colonie comprenait, en plus des quelques centaines de colons qui s’y étaient établis depuis quelques années, près de 5,000 réfugiés acadiens qui avaient réussi à se soustraire aux recherches des troupes de Lawrence en Nouvelle-Écosse. La plupart seront rapatriés en France, mais une bonne partie aboutira dans les prisons de l’Angleterre.

Lawrence, lorsqu’il se résolut enfin à chasser les Acadiens de l’Acadie, ne craignait pas un blâme de l’Angleterre. Les événements devaient lui donner raison sur ce point : mise au courant de l’initiative de Lawrence, l’Angleterre ne fit rien pour l’en dissuader et les déportations se poursuivirent jusqu’en 1761. Quant à Lawrence lui-même, il fut promu au grade de Gouverneur en 1756. Le Gouverneur-général de la Nouvelle-France, Vaudreuil-Cavagnal, essaiera en 1760 de faire stopper les déportations : lorsqu’il soumit ses conditions de capitulation au général Jeffrey Amherst, il demanda qu’« aucun Canadien, Acadien, ni Français... ne puisse être déporté, ni transmigrer dans les colonies anglaises...». Le général anglais écrira dans la marge « Accordé, excepté à l’égard des Acadiens ».

Trois groupes d'exilés

À travers l’Acadie, on sépare les familles, on brûle des villages, on détruit les récoltes et on exproprie les colons. De 1755 à 1763, quelque 12 000 personnes seront forcées à l’exil vers plusieurs états américains, la France ou l’Angleterre. C’est l’époque du « Grand Dérangement ».

Les Acadiens déportés aux États-Unis ne furent pas toujours bien accueillis. En effet, les autorités coloniales américaines, pour la plupart, n’avaient pas été consultées quant à l’arrivée des Acadiens. Mal organisée, la Déportation représentait surtout pour une charge fiscale supplémentaire aux yeux des colons américains. De plus, l’arrivée de Français et de catholiques, dans des colonies farouchement protestantes, brisait une homogénéité religieuse que l’on avait établie parfois avec peine. Ainsi en 1762, cinq goélettes avec 1500 Acadiens en route vers Boston durent revenir à Halifax à cause du refus du Massachusetts de les accepter.

Un deuxième groupe d’Acadiens fut tout simplement gardé prisonniers à Halifax. On les employa à fortifier la capitale contre les attaques françaises pendant qu’un autre groupe était amené prisonnier en Grande-Bretagne. Mal nourri, mal soigné dans des prisons humides et froides, un bon nombre y mourut. Dans la prison de Bristol par exemple, 184 Acadiens sur 300 mourront. À la fin des hostilités, ces Acadiens prisonniers en Angleterre seront rapatriés en France ; certains s’établiront à Belle-Île en Mer (Bretagne) et d’autres tenteront de fonder une colonie dans le Poitou. Cette dernière sera vaine parce que la plupart des Acadiens préférèrent se diriger vers la Louisiane.

Un troisième groupe d’Acadiens réussit à échapper à la déportation. Certains s’enfuirent dans les forêts du Nouveau-Brunswick actuel où, pendant un certain temps, ils menèrent tant bien que mal une guérilla inefficace contre les soldats anglais, spécialement dans la région de la rivière Miramichi et de la baie des Chaleurs. D’ailleurs, c’est dans la baie des Chaleurs que fut tiré le dernier coup de canon de la France pour la conservation de son empire en Amérique. D’autres se réfugièrent à la rivière Saint-Jean près de Sainte-Anne notamment (aujourd’hui appelé Fredericton), mais les troupes de Monckton les en délogèrent et ils durent pousser plus loin au nord vers le Québec actuel. Les registres de baptême témoignent du passage de ces familles qui cherchaient un lieu sûr dans une Nouvelle-France elle-même déchirée par la guerre.

Beaucoup de familles réussissent toutefois à s’enfuir vers la Nouvelle-France comme les Landry, les Comeau, les Robichaud, les Cormier… Ils laisseront une descendance nombreuse.

Une proclamation royale de 2003, reconnaissant la déportation des Acadiens et ses conséquences tragiques, désignait, à compter de 2005, le 28 juillet comme journée de commémoration du Grand Dérangement.