Après la seconde chute de Napoléon, quelques soldats français, que la proscription ou le désespoir chassaient de leur patrie, allèrent se réfugier en Amérique. Un acte du congrès législatif des États-Unis leur accorda quatre-vingt-douze mille acres dans le territoire d’Alabama, sur le Mohilé et le Tombeck-Bee, à raison de deux francs l’acre, payables en quatorze ans, sans intérêt, pour y former une colonie. Chaque soldat devait y recevoir une part de terre correspondante à son grade : mais en touchant le sol étranger, la plupart des exilés s’étaient trouvés dans la position la plus difficile, et dans un dénuement absolu.
Un séjour de quelques mois à New York, à Philadelphie, à Boston, les avait constitués débiteurs envers leurs hôtes. Des spéculateurs américains profitèrent de la circonstance et offrirent aux Français de leur acheter, à vil prix, les terres à eux concédées : ceux-ci, n’ayant pas la liberté du choix, acceptèrent, et cédèrent tous leurs droits.
Il en résulta que la colonie naissante se composa, pour les sept huitièmes, d’Américains, tandis que, dans le plan primitif, on ne devait y admettre que des Français. Quelques-uns de ceux qui avaient vendu leurs terres se rendirent à Galveston, où le général Humbert s’était établi ; d’autres, au nombre de cent cinquante à trois cents, allèrent, sous la direction des généraux Lallemand (François-Antoine et son frère Henri), fonder une colonie purement française, à dix ou douze lieues ouest de Galveston, entre les rivières de la Norte et de la Trinité, dans un territoire abandonné de la province du Texas, et dont la possession était incertaine entre les Espagnols, les Indiens et les Américains.
Le produit de la vente des terres de l’Alabama et quelques avances faites par les chefs de l’entreprise firent les frais de l’expédition et de l’établissement. Arrivés sur ce territoire, qu’ils appelèrent du nom de Champ-d’Asile, les exilés se donnèrent un gouvernement militaire, se distribuèrent en cohortes, dont chacune avait son chef, et dans lesquelles on ne pouvait admettre que des Français, ou des hommes qui eussent servi dans l’armée française. Dans le partage des terres, chaque officier eut vingt arpents, avec tous les instruments nécessaires au défrichement.
Champ-d’Asile : travaux des colons pour l’établissement de leur ville. Estampe de Charles-Abraham Chasselat (1782-1843) gravée par Joseph-Claude Pomel
Peu de jours après leur établissement, ils publièrent un manifeste, où, se déclarant état indépendant, ils annonçaient qu’ils respecteraient les nations voisines, mais qu’ils étaient disposés à se défendre au péril de leur vie contre toute agression injuste. Ce manifeste grossit encore le nombre des réfugiés. La fertilité du sol, la douceur du climat, et le voisinage d’une rivière favorisaient l’essor et la durée de leur colonie : mais ils n’avaient point de femmes pour adoucir les ennuis de l’exil ; ils étaient peu habitués aux rudes travaux du défrichement. Une centaine d’esclaves qu’ils avaient achetés désertèrent chez les sauvages : le découragement se répandit parmi les colons. D’ailleurs, leur arrivée avait excité, surtout chez les Espagnols du voisinage, des inquiétudes que leur manifeste n’était pas propre à dissiper. Le bruit se répandit que les réfugiés du Texas entretenaient des correspondances avec les mécontents du Mexique.
Le vice-roi de ce pays, Apodaca, résolut de détruire cet établissement, ainsi que celui de Galveston. Six ou sept cents Espagnols, conduits par le général Castenada, se présentèrent devant Galveston, qui fut évacué. Les colons du Texas, encore mal établis, divisés, découragés, assaillis par les Indiens, abandonnèrent le Champ-d’Asile, qui n’eut ainsi qu’une existence de quelques mois. Plusieurs Français retournèrent dans l’Alabama, où ils s’établirent et fondèrent une ville.
D’après « Éphémérides universelles, ou Tableau religieux, politique, littéraire, scientifique et anecdotique, présentant, pour chaque jour de l’année, un extrait des annales de toutes les nations et de tous les siècles, depuis les temps historiques jusqu’à nos jours » (Tome 10), paru en 1832).
Un séjour de quelques mois à New York, à Philadelphie, à Boston, les avait constitués débiteurs envers leurs hôtes. Des spéculateurs américains profitèrent de la circonstance et offrirent aux Français de leur acheter, à vil prix, les terres à eux concédées : ceux-ci, n’ayant pas la liberté du choix, acceptèrent, et cédèrent tous leurs droits.
François-Antoine Lallemand, l’un des deux bonapartistes fondateurs de la colonie française |
Il en résulta que la colonie naissante se composa, pour les sept huitièmes, d’Américains, tandis que, dans le plan primitif, on ne devait y admettre que des Français. Quelques-uns de ceux qui avaient vendu leurs terres se rendirent à Galveston, où le général Humbert s’était établi ; d’autres, au nombre de cent cinquante à trois cents, allèrent, sous la direction des généraux Lallemand (François-Antoine et son frère Henri), fonder une colonie purement française, à dix ou douze lieues ouest de Galveston, entre les rivières de la Norte et de la Trinité, dans un territoire abandonné de la province du Texas, et dont la possession était incertaine entre les Espagnols, les Indiens et les Américains.
Le produit de la vente des terres de l’Alabama et quelques avances faites par les chefs de l’entreprise firent les frais de l’expédition et de l’établissement. Arrivés sur ce territoire, qu’ils appelèrent du nom de Champ-d’Asile, les exilés se donnèrent un gouvernement militaire, se distribuèrent en cohortes, dont chacune avait son chef, et dans lesquelles on ne pouvait admettre que des Français, ou des hommes qui eussent servi dans l’armée française. Dans le partage des terres, chaque officier eut vingt arpents, avec tous les instruments nécessaires au défrichement.
Champ-d’Asile : travaux des colons pour l’établissement de leur ville. Estampe de Charles-Abraham Chasselat (1782-1843) gravée par Joseph-Claude Pomel
Peu de jours après leur établissement, ils publièrent un manifeste, où, se déclarant état indépendant, ils annonçaient qu’ils respecteraient les nations voisines, mais qu’ils étaient disposés à se défendre au péril de leur vie contre toute agression injuste. Ce manifeste grossit encore le nombre des réfugiés. La fertilité du sol, la douceur du climat, et le voisinage d’une rivière favorisaient l’essor et la durée de leur colonie : mais ils n’avaient point de femmes pour adoucir les ennuis de l’exil ; ils étaient peu habitués aux rudes travaux du défrichement. Une centaine d’esclaves qu’ils avaient achetés désertèrent chez les sauvages : le découragement se répandit parmi les colons. D’ailleurs, leur arrivée avait excité, surtout chez les Espagnols du voisinage, des inquiétudes que leur manifeste n’était pas propre à dissiper. Le bruit se répandit que les réfugiés du Texas entretenaient des correspondances avec les mécontents du Mexique.
Le vice-roi de ce pays, Apodaca, résolut de détruire cet établissement, ainsi que celui de Galveston. Six ou sept cents Espagnols, conduits par le général Castenada, se présentèrent devant Galveston, qui fut évacué. Les colons du Texas, encore mal établis, divisés, découragés, assaillis par les Indiens, abandonnèrent le Champ-d’Asile, qui n’eut ainsi qu’une existence de quelques mois. Plusieurs Français retournèrent dans l’Alabama, où ils s’établirent et fondèrent une ville.