Les résultats au concours 2022 de recrutement des professeurs des écoles sont tombés et, pour certains, ils ne sont pas bons du tout. Grammaire, orthographe, conjugaison, syntaxe et mathématiques : les correcteurs décrivent des candidats à « la langue pauvre », peu cultivés, qui citent des programmes de téléréalité ou des films Disney.
Alors qu’on se désole régulièrement de la baisse du niveau des élèves, les aspirants professeurs des écoles ne font pas beaucoup mieux, si l’on en croit les rapports des jurys du Concours de recrutement des professeurs des écoles (CRPE). Que ce soit à Lille, Besançon, Clermont-Ferrand, Strasbourg ou Marseille, les correcteurs s’inquiètent du manque de culture générale des candidats et de leurs lacunes de base en orthographe, grammaire ou encore en mathématiques. « Très peu de candidats citent des sources qui permettraient de démontrer une culture personnelle déplore par exemple le rapport de l’académie de Lille. Certains le font en se trompant d’auteur, en citant une émission de téléréalité ou des dessins animés de Disney. Une petite minorité est en mesure de citer quelques lectures personnelles. »
La forme n’est pas en reste : « Beaucoup de correcteurs s’étonnent encore du manque de maîtrise de la langue française, relèvent énormément d’erreurs orthographiques (accords de base), des fautes de syntaxe et des expressions familières, note le même rapport. La ponctuation est absente de certaines copies, les virgules, d’une manière générale, sont peu utilisées. »
Des connaissances « chancelantes »
Un exemple édifiant du niveau de certains candidats : la définition du mot « chancelant », que « très peu de candidats » sont en mesure de donner « au grand étonnement des correcteurs, puisque le contexte était fortement aidant ». Dans la grande majorité des cas, les candidats de l’Académie de Lille relient cet adjectif (qui signifie « vacillant ») au radical « chance » ou « chant » : « Il en découle donc que des enfants “chancelants” sont des enfants qui ont de la chance, qui sont joyeux, innocents, insouciants… » Le jury de Besançon fait, pour sa part, remarquer que « les mots familiers tels que “cool” n’ont pas lieu d’apparaître dans une copie de concours qui vise à recruter de futurs experts qui auront responsable d’enseigner la langue française aux plus jeunes élèves ».
À Marseille, la moyenne générale des aspirants professeurs des écoles dans la partie « lexique et compréhension lexicale » est de 1,84/4. Une note assez basse pour faire dire aux jurys « que le point faible des candidats demeure le lexique. Cela avait déjà été observé l’année dernière, mais le constat est à nouveau alarmant cette année, en atteste la moyenne obtenue à cette partie. » Ces mêmes correcteurs dénoncent l’« inculture littéraire et artistique » de « nombre de candidats ». À Limoges, les correcteurs alertent sur le nombre de pénalités infligées pour des problèmes de langue, « dans toutes les épreuves puisque toutes les copies sont pénalisées, avec des caractéristiques plus fortes en français (45 % obtiennent la pénalité maximale) et en épreuve d’application (41,4 % obtiennent la pénalité maximale) qu’en mathématiques (26,4 % obtiennent la pénalité maximale) ».
« Des propos vagues et sans consistance »
À Clermont-Ferrand, même constat. Un nombre « significatif » de copies accuse une expression qui « n’est pas bonne, voire fautive à l’excès » ; certaines « ont mis en évidence une faiblesse des connaissances dans le domaine de la langue française. » Des candidats, note le jury, répondent « à peu près au hasard aux questions posées. Ce sont aussi l’identification et l’analyse de l’emploi des temps verbaux qui ne sont pas du tout réussies, collectivement. » Les correcteurs se désolent que « plusieurs copies […] se soient contentées de généralités passe-partout, souvent empruntées à l’expérience personnelle, et donc sans réelle pertinence dans un développement de cette sorte » soit « de propos vagues et sans consistance, semblables à ceux que l’on pourrait entendre dans une conversation relâchée ».
En mathématiques, le niveau ne semble guère meilleur. Le jury de Besançon note même que « le nombre de copies affichant des non-réponses est en nette augmentation » ; alors que le sujet est jugé « accessible » et que les « formules de calcul sont données », les résultats très faibles des candidats interrogent les correcteurs « sur la qualité de maîtrise par les candidats des contenus des programmes de l’épreuve et des notions mathématiques convoquées ». Et même ici, le niveau de langue « relâché » semble poser problème, puisque « des expressions familières, une grande impropriété lexicale, une langue pauvre, au lexique répétitif et sans pertinence, ainsi qu’une mauvaise orthographe » émaillent les copies de mathématiques. À Strasbourg, de « très nombreux candidats ne connaissent pas la définition d’un nombre décimal ». Difficile dans ces conditions de faire monter le niveau.
Source : Marianne