lundi 20 octobre 2008

Pensum du Devoir à la suite de la manifestation pour la liberté de choix

Voilà plusieurs semaines que le Devoir ne parle plus du cours d’éthique et de culture religieuse. Rien sur les deux procès qui se profilent en Cour supérieure du Québec au sujet de ce programme imposé, rien sur les déclarations critiques du nonce apostolique, rien sur la manifestation qui se préparait à Montréal contre l’imposition de ce cours, rien sur les mesures d’intimidation et les menaces de signalement à la DPJ qui frappent les parents récalcitrants au cours d’éthique et de culture religieuse imposé à tous au nom de la tolérance et de la diversité.

À reculons

Las! Ces procès existent bien, les autres médias que le Devoir en ont finalement parlé, ils ont même abordé dans leurs éditions régionales le sujet des menaces répétées contre les parents et leurs enfants qui refusent ce cours et enfin – goutte qui a fait déborder le vase – près de 2 000 personnes ont défilé dans les rues de Montréal pour demander le libre choix en matière d’éducation morale et religieuse. Le Devoir, à reculons, allait devoir à nouveau parler de l’opposition au cours ECR.

Et pourtant, Le Devoir pensait avoir réglé la question en faisant faire un sondage et en le publiant à sa une : une faible majorité (52 %) des Québécois approuverait le cours d’éthique et de culture religieuse et seule une petite minorité (16 %) voulait encore des anciens cours de religion confessionnels (souvent mal enseignés par des professeurs non-croyants ou même pas enseignés du tout dans certaines écoles publiques).

Le Devoir, chantre de la majorité silencieuse !

Or, voilà que pour défendre bec et ongles ce cours dont le Devoir a déjà pris la défense dans un éditorial (« Vain combat », le 27 février 2008), Mme Marie-Andrée Chouinard commet un nouvel éditorial pour condamner au nom de « la majorité silencieuse » les opposants à l’imposition du cours d’éthique et de culture religieuse.

On aura tout vu ! Le Devoir porte-voix de tous les combats progressistes et minoritaires comme le « mariage gay » qui se fait le chantre de cette majorité silencieuse trop souvent conservatrice à son goût !

Le Devoir devrait pourtant se souvenir qu’à force de pédagogie et de confrontation à la réalité de faibles majorités mal informées peuvent facilement changer d’avis.

Faut-il rappeler que les parents n’ont pas analysé le cours ECR de leurs enfants, n’ont pas entendu les voix discordantes, mais quasi uniquement celles des promoteurs de ce cours qui bénéficient de tout le poids du gouvernement, de son monopole en matière de programme et de médias partisans comme le Devoir ? Bref, il n’y a pas eu débat ; cette majorité est fragile.

Gageons même qu’il y a nettement plus de Québécois qui sont en faveur de liberté de choix entre le cours d’éthique et de culture religieuse et un cours confessionnel, qu’il y en a en faveur du seul cours d’ECR.

Et le respect dû aux minorités et aux droits fondamentaux ?

Rappelons enfin que, même si seule une infime minorité de la population trouvait que ses droits fondamentaux de décider de la formation morale et spirituelle étaient brimés par l’imposition de ce cours, il faudrait défendre ces personnes. Le Devoir a-t-il oublié la croisade qu’il a menée en faveur des « mariages gays » où une autre minorité (pro-gay) « vociférait » (pour reprendre les termes peu amènes du Devoir) alors que la majorité offrait d’abord « un consentement silencieux » à la préservation du mariage aux seuls hétérosexuels ?

Approximations et volonté de minimisation

Citons un passage assez typique de la prose de Mme Chouinard :
« Sa croisade [de Mgr Ouellet] trouve écho dans la lutte menée par la Coalition pour la liberté en éducation (CLE), qui manifestait samedi encore en opposition au cours, obligatoire de la première année à la cinquième secondaire. Dirigé par des croyants chrétiens, le mouvement a permis d’acheminer au ministère de l’Éducation 1200 demandes d’exemption – toutes refusées à ce jour. Il est également à la source du boycottage de ce contenu par 72 élèves retiré du cours par leurs parents. Il passera sous peu à Drummondville pour contester la validité du cours. »
  1. Admirez le cliché journalistique bon marché : « croisade ».
  2. Combien de gens ont manifesté samedi ? Ne cherchez pas dans le Devoir, vous ne le saurez pas.
  3. Le Devoir s’est un peu amélioré, auparavant il pensait que la CLÉ ne regroupait que des catholiques... Cela a pris du temps, mais à force de répétition et de pédagogie patiente.
  4. Les 1200 demandes d’exemption – exemptions qui ne sont bien sûr pas proposées par les écoles puisque la Ministre Courchesne a fait savoir qu’elle les refuserait toutes – ne comprennent pas les demandes d’exemption auprès des écoles privées confessionnelles, meilleur terreau que les écoles publiques. Or, dans ce réseau, la seule école Loyola a récolté plus de 600 demandes d’exemption et au moins une autre école, l’école chrétienne Emmanuel de Dollard-des-Ormeaux, a également demandé l’exemption à titre d’établissement confessionnel. Enfin d’autres écoles privées n’enseignent pas le programme mais n’osent s’y opposer officiellement de crainte de perdre des subsides ou leur permis quand celles-ci ne reçoivent aucune subvention. Nous sommes au courant d’au moins trois écoles dans cette situation de trois confessions différentes !
  5. La CLÉ n’est pas vraiment à la source du boycottage; elle n’a jamais appelé au boycottage, mais a accompagné les parents qui désiraient exercer le droit de retrait de leurs enfants. Elle n’a fait que suivre des parents une fois de plus totalement démunis devant le Monopole de l’Éducation et sa machine administrative.
  6. La poursuite à Drummondville ne porte pas sur la validité du cours, mais, d’une part, sur la validité du processus administratif suivi pour aboutir au refus de toutes les demandes d’exemption et, d’autre part, sur la validité de la loi 95 qui impose ce cours. La question n’a jamais porté sur la validité du contenu du cours ou même sur la possibilité de l'enseigner, car il existe certainement des parents qui approuvent ce cours et ils peuvent le choisir pour leurs enfants. Non le litige se fonde sur le processus utilisé pour imposer ce programme à tous les parents même quand ils disent que ce cours est contraire au droit fondamental de la liberté de conscience et de religion. Billet de rattrapage pour les lecteurs mal informés du Devoir sur la poursuite de Drummondville.
  7. Il existe une autre poursuite, celle du collège Loyola qui demande le droit de présenter un cours équivalent, mais conforme à sa vocation d’école catholique en vertu sur l’article 22 du règlement d’application de la Loi sur l’enseignement privé, R.Q. c. E-9.1, r.1. Les lecteurs du seul Devoir n’en savent rien, le Devoir n’a jamais parlé du cas de l’école Loyola, même pas pour déformer la teneur de sa « croisade » contre le cours ECR.
Amusante aussi cette scie sur la déconfessionalisation comme prétexte à l'imposition du cours d'ECR aux écoles... mêmes les écoles privées confessionnelles&thinsp!
« Tant le Cardinal Ouellet que la CLÉ peuvent exposer des craintes qu'ils jugent légitimes. [encore heureux!] Ils peuvent voir dans la poursuite de la déconfessionalisation de l'école une attaque à leurs droits et la négation du religieux plutôt qu'une manière de se l'approprier autrement. [euh, de manière relativiste ?] »
Et ça se veut un journal sérieux !

Cours « Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil »

Lu dans Pourquoi nos enfants sortent-ils de l'école ignorants ? de Patrick Moreau (Boréal, septembre 2008) :
« Le nouveau cours de culture religieuse qui entrera dans le programme du primaire et du secondaire à la prochaine rentrée est encore là pour en témoigner. Conçu dans l'urgence et sous la pression de l'actualité, il a moins pour but de faire acquérir aux élèves une connaissance des religions pratiquées dans le monde — il y a fort à parier qu'on ne leur fera pas lire d'extraits de l'Ancien Testament, des Upanishad ou du Livre de l'échelle de Mahomet — que de servir d'alibi à un discours naïvement moraliste sur le mode tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil. Malgré ces bons sentiments, je ne suis pas sûr qu'un tel moralisme puisse se targuer d'être progressiste&thinsp! »

(pp. 19-20)