vendredi 27 novembre 2020

France — L’instruction en famille pointée du doigt


Article d’Anne Coffinier paru dans Causeur le 26 novembre 2020

Il fallait oser le faire : interdire le régime déclaré de l’instruction en famille parce qu’on veut qu’il n’y ait plus en France d’enfants exposés à des formes non déclarées d’instruction, échappant de ce fait à tout contrôle de l’État ! C’est pourtant ce que proposent les articles 18 à 20 du projet de loi confortant les principes républicains, qui sera présenté le 9 décembre prochain en Conseil des ministres. Cela défie toute logique, puisque cette loi repose sur un raisonnement absurde : prétendre mieux contrôler les enfants non déclarés en supprimant l’un des quatre régimes d’instruction dûment déclarés et contrôlés, l’instruction en famille, instaurée par Jules Ferry lui-même en 1882 ! C’est sans doute pour cela que nos interlocuteurs des cabinets ou de la haute administration place Beauvau et rue de Grenelle se montrent jusqu’à présent incapables d’expliquer le but de cette mesure. Tout au plus, avancent-ils qu’il s’agirait de repérer des enfants qui seraient actuellement « hors de tout radar », qui ne seraient ni en école publique, ni en école privée sous ou hors contrat, ni dans le régime déclaré de l’instruction en famille. Il y aurait « des trous dans la raquette ». Il est facile alors de leur faire remarquer que les enfants scolarisés dans le cadre du régime légal et réglementé de l’instruction en famille ne peuvent pas être concernés par leur inquiétude puisque précisément ils sont déclarés et connus de l’administration qui peut donc les inspecter autant de fois qu’elle le souhaite.

Comment comprendre qu’aucune disposition dans ce projet de loi ne concerne l’Éducation nationale, en particulier les enfants absentéistes ou décrocheurs, qui ne sont scolarisés que de manière erratique ? L’État n’est alors pourtant plus capable de garantir leur accès à l’instruction. De plus, ils sont les premiers exposés aux influences islamistes. De même, on ne trouvera pas un mot sur les établissements scolaires musulmans, auxquels l’État a accordé un contrat donc des financements publics, alors qu’ils sont ouvertement rattachés aux très sulfureux Frères musulmans : l’école Éva de Vitray, le collège Al Kindi à Lyon, le lycée Averroès à Lille, le groupe scolaire Ibn Khaldoun à Marseille, etc.

Les mots « islamisme » et « séparatisme islamiste » ont disparu du projet de loi

Plus fondamentalement, on notera que les mots d’« islamisme » ou de « séparatisme islamiste » n’apparaissent même pas dans un projet de loi que le président de la République lui-même nous avait dit leur être consacré. Comment pourrait-on arriver à gagner une guerre contre un ennemi qu’on s’interdit de désigner précisément ? On risque de livrer inconsidérément les musulmans, en tant que personnes, à la vindicte populaire sans pour autant avancer d’un iota dans la lutte concrète contre le séparatisme islamiste. Par contre, et l’on peut se demander à l’intention de qui ce lot de consolation a été octroyé, c’est le mot « famille » que le projet de loi veut éradiquer dans le Code de l’éducation. Ainsi, s’il prévoit quelques cas de dérogations à l’obligation de scolarisation en école, ce n’est plus pour permettre « l’instruction en famille » d’enfants porteurs de handicap ou sportifs de haut niveau, mais pour leur accorder un droit, valable pour un an seulement, et sur autorisation expresse de l’État, à recourir à « l’instruction à domicile ». Même si cette loi affirmait ouvertement lutter contre les formes de séparatisme islamiste auxquelles certains enfants pourraient être exposés, nous ne pourrions pas davantage retirer à tous les parents le droit d’instruire leurs enfants en famille, de peur que ce droit ne soit dévoyé par certains, et encore moins de peur qu’il existe « quelque part » des enfants non déclarés ou scolarisés, mais absentéistes et décrocheurs.

Les atteintes contre les principes républicains et la propagande islamiste sont bien plus largement diffusées sur Internet que dans les lieux d’instruction des enfants

La mesure d’interdiction de l’instruction en famille, outre qu’elle est illogique, est manifestement disproportionnée. Dans un État de droit, on ne peut réduire qu’avec une infinie précaution les libertés des citoyens. S’il reconnaît le caractère constitutionnel de l’instruction en famille comme c’est hautement probable, le Conseil constitutionnel ne pourra que censurer de telles atteintes à un droit qui a reçu un baptême on ne peut plus républicain des mains de Jules Ferry lui-même et qui n’a jamais été remis en cause en 138 ans. Constitutionnelle ou simplement législative, l’interdiction de l’instruction en famille ne doit de toute manière pas conduire à des atteintes disproportionnées aux libertés. Est-il vraiment raisonnable de supprimer la liberté de tous par peur qu’une poignée de gens en mésusent ? Les atteintes contre les principes républicains et la propagande islamiste sont bien plus largement diffusées sur Internet que dans les lieux d’instruction des enfants ; nul n’a jamais pensé pour autant à interdire Internet ou à soumettre la publication des articles à un régime d’autorisation ! Nous parlons tout de même qu’un droit qui est consacré par l’article 26-3 de la Déclaration universelle des droits de l’homme, qui rappelle que « les parents ont, par priorité, le droit de choisir le genre d’éducation à donner à leurs enfants ».

La capacité de chaque parent à protéger son enfant

En se proposant de retirer ce droit aux parents, le gouvernement ne semble pas prendre la mesure de ce à quoi il s’en prend : il touche à ce qu’il y a de plus viscéralement sacré pour chaque homme et chaque femme : son enfant. Et si les parents ressentent le besoin pour le protéger ou mieux l’épanouir de ne pas ou de ne plus le confier au système scolaire, rien ni personne ne pourra les en empêcher. Nul doute qu’ils n’hésiteront pas à rechercher la responsabilité pénale de l’État devant les tribunaux avec une pugnacité supérieure à ce qu’on voit pour la Covid-19. Et vous qui me lisez, si demain votre enfant est harcelé à l’école, l’y laisserez-vous parce que la loi vous a retiré le droit de le déscolariser ? Si votre enfant à haut potentiel végète à l’école parce qu’elle ne répond pas à ses besoins cognitifs et psychologiques, l’y maintiendrez-vous au risque de le voir sombrer dans l’échec scolaire et la dépression ? Nous avons tous besoin d’alternative. En 1984, les Français sont descendus par millions défendre l’école libre que Mitterrand voulait éradiquer à l’absorbant dans un grand service public unique. Aujourd’hui, ce qui est en jeu est encore plus fondamental : c’est la place de la famille aux côtés de l’enfant, c’est la capacité de chaque parent à protéger son enfant.

Les parlementaires ne s’y trompent pas. Ils sont déjà 130 à s’être positionnés contre cette mesure liberticide. Les auditions, manifestations, et consultations juridiques se multiplient. La liberté d’enseignement inclut le choix d’instruire en école ou en famille son enfant. Il serait proprement irresponsable d’interdire l’instruction en famille alors que la crise sanitaire de la Covid a montré que cela pouvait être un recours précieux, et que les difficultés de l’Éducation nationale à assurer un niveau de sécurité et d’enseignement suffisant dans tout point du territoire sont aujourd’hui reconnues par l’État lui-même. Au regard de cette situation, il est franchement malvenu de tirer sur l’ambulance qu’est l’instruction en famille et les établissements libres hors contrat. Alors, mobilisons-nous pour défendre notre légitimité en tant que parents et de veiller sur le bien de notre enfant face aux Danton au petit pied qui s’imaginent que l’enfant appartient à l’État alors qu’il n’appartient qu’à lui-même et que nous lui devons collectivement la sécurité et l’accès à la connaissance.

Anne Coffinier


lnstruction en famille en France : encore une liberté qu’on laisse sacrifier ?

Ingénieur, anciens instituteurs dotés d’une solide expérience en la matière, tous défendent l’instruction en famille, arguments à l’appui.

L’instruction en famille est une liberté fondamentale ancrée en droit français depuis un siècle et demi. En voulant l’interdire, le gouvernement se trompe de cible. Une telle interdiction serait inconstitutionnelle, profondément injuste, et porterait inéluctablement atteinte aux principes républicains, au lieu de les renforcer.

Début octobre 2020, le président de la République a annoncé vouloir supprimer la possibilité pour les parents d’instruire leurs enfants en famille (sauf exception d’ordre médical), c’est-à-dire supprimer une liberté fondamentale pourtant ancrée en droit français depuis un siècle et demi.

L’avant-projet de loi confortant les principes républicains, que nous avons consulté, prévoit de remplacer le libre choix de l’instruction en famille par : « L’instruction obligatoire est donnée dans les établissements ou écoles publics ou privés. » (article 18). Le projet de loi sera présenté en Conseil des ministres le 9 décembre.

Tous concernés

Le projet de suppression du libre choix de l’instruction en famille concerne tous les citoyens : tout parent peut se retrouver dans la nécessité de retirer un enfant de l’école pour un temps (harcèlement, profils atypiques, troubles dys, handicap en cours de reconnaissance, etc.). Savoir que cette possibilité légale existe est rassurant pour les parents comme pour les enfants.

Si cette disposition était adoptée, plus de 20 000 enfants actuellement instruits en famille ne pourraient plus l’être. Ils le sont principalement parce que c’est l’organisation qui convient le mieux aux enfants et à leur famille, ou parce qu’ils ont besoin de reprendre confiance en eux pendant quelques mois. Il est prévu que les parents souhaitant simplement continuer à exercer cette liberté fondamentale encourent six mois d’emprisonnement et 7 500 euros d’amende (article 19) !

L’instruction en famille participe à la résilience du système

L’instruction en famille fait partie intégrante du paysage de l’éducation française depuis les lois de Jules Ferry (1881-1882). Elle participe à la résilience du système et constitue un véritable laboratoire d’innovations pédagogiques. De récentes recherches en sciences de l’éducation et en sociologie montrent que la très grande majorité des enfants instruits en famille sont tout à fait intégrés à la société et socialisés.

Les familles se réunissent régulièrement pour participer à des ateliers, sorties pédagogiques ou activités sportives, favorisant dès lors les interactions et une réelle mixité sociale. De plus, les enfants pratiquent souvent plusieurs activités hebdomadaires avec d’autres enfants de leur âge (musique, sports collectifs en clubs). Et si, en grandissant, les enfants font le souhait d’intégrer l’école, d’y retourner ou de poursuivre des études, ils s’adaptent en général très bien.

Isabelle Filliozat, spécialiste de la parentalité, témoigne : « L’instruction en famille forme des enfants passionnés, à l’aise avec les adultes, autonomes et responsables. Leur esprit civique est souvent manifeste ». Certaines grandes universités de par le monde recherchent explicitement des étudiants avec ce profil.

Un projet inconstitutionnel, déjà écarté par les parlementaires plusieurs fois

En France, selon l’arrêt du Conseil d’État du 19 juillet 2017 (nous soulignons, NDLR), « Le principe de la liberté de l’enseignement, qui figure au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, implique la possibilité de créer des établissements d’enseignement, y compris hors de tout contrat conclu avec l’État, tout comme le droit pour les parents de choisir, pour leurs enfants, des méthodes éducatives alternatives à celles proposées par le système scolaire public, y compris l’instruction au sein de la famille. » Il s’agit d’un garde-fou démocratique inestimable.

En juillet 2018, les députées Anne Brugnera et George Pau-Langevin, chargées d’une « mission flash » sur la déscolarisation, précisaient : « le droit, pour tout parent, d’instruire son enfant à domicile, {est} bien établi dans notre pays. (…) dans la grande majorité des cas, la qualité de cette instruction est régulièrement contrôlée et ne fait aucun doute. »

Et en juillet 2020, la rapporteure de la Commission d’enquête sénatoriale sur la radicalisation islamiste expliquait que : « L’instruction est obligatoire, mais elle est libre. Des familles ont fait le choix de la scolarisation à domicile sans avoir la moindre velléité d’éloigner leur enfant de la République. À mon sens, il revient plutôt à l’Éducation nationale de veiller à ce que les enfants présentant un risque de radicalisation ne quittent pas l’école. Il ne s’agit pas de supprimer toute liberté de choix aux familles. »

Une « punition collective » synonyme de déni de droit

Parmi les raisons invoquées par le ministère de l’Éducation nationale, la difficulté de l’exécutif à faire respecter les dispositions légales existantes, notamment à diligenter les contrôles. Faudrait-il alors retirer la liberté de manifestation à tous les Français parce que des casseurs s’infiltrent dans les cortèges ? Et bâillonner la liberté d’expression pour éviter d’éventuels troubles à l’ordre public ? N’est-ce pas le rôle de l’exécutif que de faire appliquer les lois ?

Rappelons qu’en juin 2020, le ministre de l’Éducation déclarait encore devant le Sénat : « La liberté d’instruction en famille a un fondement constitutionnel puissant et qu’on ne peut que reconnaître, et qui est, je pense, positif » (…) « on doit bien appliquer les règles que nous avons établies dans la loi de 2019 (Loi pour l’école de la confiance, NDLR). La mise en œuvre débute ; nous sommes en phase ascendante (…) Sur le plan des principes juridiques, il me semble qu’on est allé à un certain stade qui est le bon. »

Une solution de facilité qui se trompe de cible

L’interdiction de l’instruction en famille n’est pas la réponse à l’existence de formes clandestines d’endoctrinement hors du contrôle de l’État. Les enfants « hors radar », pris en charge dans des « écoles de fait » non déclarées, ou les enfants en décrochage scolaire ne font par définition pas partie de ceux instruits en famille, qui sont quant à eux suivis et contrôlés par l’État. Une telle interdiction ne permettrait pas non plus de prévenir la dérégulation sociale (isolement — y compris vis-à-vis de la famille —, perte de sens et d’estime de soi) qui fait le lit de la radicalisation.

En conclusion

L’interdiction de l’instruction en famille serait non seulement profondément injuste pour les milliers de parents qui ont choisi d’instruire leurs enfants en famille dans le respect des principes républicains, mais aussi inconstitutionnelle.

Se crisper sur des politiques autoritaristes par facilité sonne comme un aveu d’impuissance de l’exécutif. Nous appelons le président de la République, élu sur des idées de progressisme et de pluralisme, à faire preuve de créativité et de rationalité pour garantir le respect des libertés fondamentales en France, et en particulier la liberté d’enseignement.

Restreindre les libertés fondamentales, c’est affaiblir l’état de droit et par là même porter inéluctablement atteinte aux principes républicains au lieu de les renforcer.

Pour les associations et collectifs représentant les familles instruisant leurs enfants :

Claudia Renau, éditrice, ex-professeure agrégée d’histoire-géographie, association Les Enfants d’Abord
Alix Fourest, ingénieure en informatique, association Libres d’Apprendre et d’Instruire Autrement
Denis Verloes, chef de projet multimédia, Fédération pour la Liberté du Choix de l’Instruction et des Apprentissages
Laurence Fournier, ex-institutrice, collectif L’école est la maison
Armelle Borel, auto-entrepreneure, association Union Nationale pour l’Instruction et l’Épanouissement
Thérèse Louvel, ex-enseignante de Lettres, association Choisir d’Instruire Son Enfant

Source : Médiapart


Dans quelle mesure l'orientation politique et le sexe déterminent-ils les valeurs de la tour d'ivoire ?

Une étude d’une équipe en psychologie de l’Université d’État de New York a interrogé près de 200 universitaires de partout aux États-Unis et leur a demandé d’évaluer dans quelle mesure ils accordent la priorité à chacune des cinq valeurs universitaires suivantes :

  • la rigueur scientifique,
  • le progrès des connaissances,
  • la liberté universitaire,
  • le bien-être émotionnel des élèves,
  • la « justice sociale ».

L’équipe a demandé à ces professeurs de préciser leur sexe, de leur orientation politique, de leurs traits de personnalité de base (ouverture, conscience, extraversion, amabilité et stabilité émotionnelle) et de leur domaine d’études. Confirmant les résultats que suggérait le professeur Jonathan Haidt (voir vidéo), plusieurs de ces variables étaient fortement liées à l’orientation politique des universitaires.

Voici quelques points saillants des résultats :

Les professeurs relativement conservateurs valorisaient la rigueur scientifique et l’avancement des connaissances plus que les professeurs relativement libéraux.

Les professeurs relativement libéraux valorisaient la « justice sociale » et le bien-être émotionnel des étudiants plus que les professeurs relativement conservateurs.

Les professeurs s’identifiant comme des femmes avaient aussi tendance à privilégier, relativement, la « justice sociale » et le bien-être émotionnel (par rapport aux professeurs qui s’identifiaient comme des hommes).

Les professeurs de commerce accordaient une importance relative à l’avancement des connaissances et à la rigueur académique, tandis que les professeurs en éducation mettaient un accent relatif sur la justice sociale et le bien-être émotionnel des étudiants.

Indépendamment de ces autres facteurs, les professeurs relativement aimables ont tendance à mettre davantage l’accent sur la justice sociale et le bien-être émotionnel des étudiants.

L’étude se conclut sur une discussion qui se concentre en grande partie sur la façon dont ces données sont cohérentes avec un portrait hautement politisé du monde universitaire américain. Une tour d’ivoire où l’orientation politique, le sexe biologique, la personnalité et le domaine d’études façonnent de manière importante les valeurs des professeurs.




L'Art européen selon Google

Saisir « European Art » dans la recherche d'images de Google:





Ah, trois Africains...