vendredi 19 novembre 2021

Ottawa accepte de plus en plus d'« étudiants » anglophones au Québec, de moins en moins de francophones

Alors que le nombre d’étudiants étrangers anglophones augmente au Québec, les taux de refus pour des pays africains ne cessent de grimper, et certains dossiers « impeccables » sont refusés. Des candidats répondant pourtant aux critères sont ainsi empêchés de poursuivre leurs études ici, déplorent-ils.

Leurs avocats en immigration dénoncent ces taux « qui frôlent le 100 % » pour certains pays du Maghreb et de l’Afrique de l’Ouest, deux bassins de locuteurs du français. « Il arrive fréquemment qu’un candidat aux études démontre une capacité financière de 100 000 $ pour la durée de son programme, qu’il a son acceptation de l’université, mais il est quand même refusé », note l’avocate québécoise Krishna Gagné.

Le taux de refus global est aussi beaucoup plus élevé au Québec que dans le reste du pays, selon les données fournies au Devoir par Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC). La différence est attribuable entre autres aux principaux bassins de recrutement pour la province, par rapport au reste du Canada.

En moins de deux ans, entre janvier 2020 et septembre 2021, Ottawa a ainsi refusé 35 642 candidats des principaux pays francophones du Maghreb et de l’Afrique de l’Ouest qui voulaient venir au Québec. Pendant ce temps, le nombre d’étudiants en provenance de l’Inde — qui se destinent majoritairement à des cours en anglais — a atteint des sommets, notamment dans le réseau collégial québécois.

Parmi les témoignages recueillis, figure celui du couple Dorothée et Mboungou, originaire de République du Congo. Ils racontent avoir présenté des preuves de leur argent disponible dans des comptes en euros et en monnaie locale. Appartements en location qu’ils possèdent, maison, voiture, entreprise, parcelles de terre ; ils ont également fait évaluer tous leurs biens, en plus de devoir voyager trois fois dans le pays voisin pour faire prendre leurs empreintes digitales par un centre autorisé par le Canada.

« Nous ne sommes pas des nécessiteux au Congo, il ne faut pas croire que tous les Africains sont d’une pauvreté extrême », résume la mère de famille qui travaille pour la multinationale Total depuis 14 ans. Ils ont demandé d’utiliser uniquement leur prénom, de crainte de nuire à une future demande de permis d’études.

« À partir du moment où on a déposé tous les papiers, il s’est passé à peine une semaine avant le refus, comme si la réponse était déjà toute faite », note Dorothée. « Est-ce que c’est une discrimination ? On s’attendait à une étude objective de notre dossier », ajoute-t-elle.

Des raisons contradictoires

Leur dossier était pourtant « impeccable », insiste leur avocate québécoise, Krishna Gagné, mais Ottawa les a refusés. Le principal motif invoqué ? L’agent d’immigration n’était pas convaincu qu’ils quitteraient le Canada à la fin de la période d’études, comme le veut le règlement sur l’immigration.

Ce motif semble « entièrement contradictoire » pour Me Gagné. En effet, les politiques d’immigration tant provinciales que fédérales encouragent de plus en plus les étudiants étrangers à rechercher un statut permanent après l’obtention de leur diplôme.

Ottawa a ouvert cette année de nouvelles voies d’accès à la résidence permanente pour les étudiants étrangers diplômés d’une institution d’enseignement canadienne, soit 40 000 places attitrées. Lors de l’annonce en avril, le ministre de l’Immigration d’alors, Marco Mendicino, disait vouloir permettre « à ceux qui ont un statut temporaire de planifier leur avenir au Canada ». « Nous voulons que vous restiez », avait-il déclaré.

Québec est aussi très actif en matière d’opération de séduction à l’étranger. Seulement en 2021, le gouvernement a conclu des ententes de près de six millions de dollars avec diverses organisations pour « l’attraction et la rétention » d’étudiants étrangers.

« Il existe nombre d’incitatifs pour que les gens restent après leurs études, donc cette raison [évoquée par les agents d’IRCC] contrevient au discours politique et à ces efforts. On dénonce cet aspect », souligne aussi Francis Brown, directeur des affaires internationales de la Fédération des cégeps.

Le couple congolais n’avait pour sa part pas l’intention de rester. Le père de famille espérait qu’un diplôme canadien donne un élan international à sa carrière et à son entreprise : « Il voulait tout simplement sortir un peu du cadre national, même si sa boîte fonctionne très bien », a confié au Devoir son épouse.

« Seulement avec l’argent qu’on a dépensé pour les démarches, on aurait pu payer toute une scolarité en France », soupire la femme. Mboungou a d’ailleurs déjà décroché une maîtrise en France en 2020 à l’Université Lumière Lyon avec des démarches de permis d’études « beaucoup plus simples ».

Le Québec pénalisé ?

« On ne fait pas le poids face à d’autres systèmes d’immigration », fait valoir M. Brown. Il rappelle notamment que les récents délais de traitement des permis d’études se sont encore allongés cette année, ce qui a été déploré par le gouvernement de François Legault dans une lettre transmise au fédéral.

Le Québec est pénalisé par rapport au reste du Canada en raison de ses bassins de recrutement francophones en Afrique. L’Algérie, le Sénégal et le Cameroun figurent par exemple parmi les six premiers pays d’origine des étudiants étrangers au Québec et ont connu des taux de refus de plus de 80 % en 2020 et en 2021. Le Maroc figure au 4e rang en importance sur le plan du nombre d’étudiants, mais son taux de refus est moins élevé en moyenne que ceux des autres pays africains.

D’autres ressortissants à destination du Québec se font rejeter par Ottawa à hauteur de 80 à 90 %, comme ceux de la Guinée, du Bénin, du Togo et de la République démocratique du Congo.

Dans les autres provinces, l’Inde représente une grande partie du bassin d’étudiants étrangers, mais son taux de refus est beaucoup moins élevé que pour ces pays africains francophones. Il n’a été que de 30 % pour les neuf premiers mois de 2021, soit nettement sous celui des pays d’origine pour le Québec.

Qui plus est, le taux de refus des candidats d’un même pays d’origine est parfois plus élevé au Québec que dans le reste du Canada. En 2020, les demandes de la Côte d’Ivoire ont par exemple été refusées à 75 % au Québec et à 68 % dans le reste du Canada.

Ce fossé s’explique en partie par une « méconnaissance de la place du réseau collégial dans le système d’enseignement supérieur » par IRCC, selon la Fédération des cégeps. Plusieurs étudiants se font ainsi refuser un permis d’études dans un cégep « parce que l’agent considère que la demande ne concorde pas avec le parcours, sur la base du cheminement scolaire », dit Francis Brown.

Une personne avec l’équivalent d’un baccalauréat universitaire par exemple serait considérée comme trop « avancée » par un agent d’immigration pour faire une technique dans un cégep. Les étudiants africains s’inscrivent pourtant dans des programmes « avec un taux de placement très élevé », insiste Nathalie Houde, conseillère en recrutement à l’international pour le Cégep de Jonquière. C’est le cas dans des filières industrielles, par exemple, où les demandes d’admission de la part des Québécois sont en baisse, mais qui connaissent pourtant de graves pénuries de main-d’œuvre.

En août dernier, cinq étudiants acceptés par ce cégep avec des bourses d’excellence se sont vu refuser l’accès au Canada, relate-t-elle. « C’était une situation absurde et excessivement difficile », poursuit-elle. La bourse, octroyée par Québec, couvrait les frais de scolarité plus élevés pour les étrangers ainsi que des frais de subsistance. Quatre d’entre eux ont finalement pu arriver à temps pour la session d’automne.

Le taux de refus a en outre augmenté depuis 2017, ce qui indique que la situation empire au lieu de s’améliorer, note Me Krishna Gagné et d’autres membres de l’Association québécoise des avocats et avocates en droit de l’immigration (AQAADI). Le fossé entre les refus au Québec et au Canada s’est aussi accru globalement, selon les données d’IRCC.

Source : Le Devoir


Les pronoms trans « iel, iels, ielle, ielles » entrent dans Le Robert...

Le pronom trans « iel » et ses diverses déclinaisons viennent de faire leur apparition dans le dictionnaire Le Robert, rapporte notamment Front populaire.

À en croire certains, les théories « woke » n’existeraient pas — ou si peu qu’elles ne mériteraient en rien l’écho qu’elles suscitent dans la société. Pourtant, l’une de leurs plus célèbres déclinaisons langagières vient de faire son entrée dans le dictionnaire Le Robert — une référence dans le domaine du vocabulaire et de l’évolution du langage français. Depuis la fin du mois d’octobre, rapporte Front populaire, le pronom inclusif « iel », qui sert à désigner une personne sans faire mention de son genre, a effectivement fait son entrée dans Le Robert web — en compagnie de plusieurs nouveaux mots tels que « passe sanitaire » ou « antivax ». « On a constaté que ce mot prenait de l’ampleur et nous l’avons intégré », explique Marie-Hélène Drivaud au Figaro, qui s’inquiète de voir « l’idéologie woke à l’assaut du dictionnaire ».

Une démarche politique

Pour autant, l’ajout d’un tel pronom si parfaitement contraire aux usages de la langue française relève bien plus, chez Le Robert, d’une démarche politique que de la prétendue prise en compte de l’ampleur du mot, qui reste encore très peu utilisé. « Tous nos dictionnaires sont inclusifs depuis plusieurs années », assume Marie-Hélène Drivaud. « On a revu toutes les fois où il y avait écrit ­“homme” pour le remplacer par “humain” », se souvient-elle. Ainsi, note le Figaro, la définition de « cheveu » ne correspond plus à « poil sur le crâne d’un homme ». À la place, Le Robert préfère parler de « poil sur le crâne d’un humain ».

 

 


Une offensive woke, vraiment ?

Le pronom « iel », pour l’heure seulement intégré de manière probatoire au dictionnaire web du Robert, devrait faire son entrée dans la version papier dès 2022, même s’il n’est utilisé que par une partie ultra-minoritaire de la population, de surcroît très rarement à l’oral. Pourtant, note Front populaire, il n’en reste pas moins qu’il connaît un certain succès dans de nombreuses organisations officielles. Le trimestriel souverainiste fondé par Michel Onfray cite notamment certaines universités publiques, comme à Toulouse ou à Lille, plusieurs municipalités ou partis politiques de gauche (essentiellement chez EELV, ainsi qu’au PS et chez LFI). Quelques médias, comme Libération ou Médiapart, l’ont également autorisé — ainsi que le reste des usages de l’écriture inclusive — sans toutefois en systématiser l’utilisation. L’État, lui, en a interdit l’usage dans son administration en février 2019, sur décision d’Édouard Philippe.

 

63 % des sondés désapprouvent l’écriture inclusive

Pour le Front Populaire, il est difficile de le nier : l’introduction du pronom « iel » dans le dictionnaire s’inscrit dans une démarche militante visant à faire évoluer lentement ce langage dont pourtant les Français ne veulent pas. Ils étaient 63 % à en désapprouver le principe, dans un sondage IFOP/Express du 2 mars 2021. Une part importante (42 %) n’en avait même pas entendu parler, preuve en est qu’il ne s’agit là que d’un gadget élitiste, militant et hors-sol. Au-delà de la féminisation des noms, sont désormais plébiscités l’accord de genre, la règle de proximité, l’utilisation systématique du masculin et du féminin. Mais surtout, d’autres règles (tout aussi irritantes) sont mises en avant comme l’utilisation du point médian, véritable vecteur de discriminations pour les mal voyants et dyslexiques — un paradoxe désolant qui prouve que ceux qui l’utilisent n’ont cure de la prétendue inclusion. Et enfin, la création de pronoms dits « inclusifs », censés refléter la vaste diversité des genres auxquels on peut désormais s’identifier.


 

Au fond, le Robert ne fait que participer à cette dynamique d’américanisation et d’asservissement des usages qui a désormais les faveurs de la gauche « woke ». Cette gauche qui semble pourtant si minoritaire dans la représentativité nationale (Jadot –Mélenchon – Hidalgo – Poutou – Kazib ne cumulent qu’environ 20 % des voix au premier tour de la présidentielle 2021, d’après les récents sondages) ne remportera sans doute pas la guerre politique. Mais elle pourra se consoler avec ce genre de victoires dérisoires qu’elle fera ensuite subir à l’ensemble des Français.

 

Humour de la gauche radicale ?