L'interdiction d'accès à son établissement d'une lycéenne en robe traditionnelle kabyle relance le débat sur la culture amazighe.
Arrivée le matin pour rejoindre ses cours, la jeune fille se voit interdire l'accès au lycée par l'administration de l'établissement.
Motif ? Elle portait la traditionnelle robe kabyle sous sa blouse blanche réglementaire. Réagissant promptement à cette interdiction, la maman de la lycéenne la raccompagne au lycée et finalement l'établissement cède devant l'insistance de la mère et accepte que Thiziri accède au lycée pour suivre normalement ses cours.
Polémique
Quelques heures après, le directeur de l'établissement publie une lettre d'excuse : « Personne n'a le droit d'interdire le port d'une tenue traditionnelle. Le règlement intérieur de l'établissement impose le port d'un habit respectueux et une blouse. Personne n'a le droit de chasser un élève en tenue traditionnelle. » Le responsable ajoute qu'il « refusait ce genre de comportement » et assure ne pas avoir été mis au courant de l'incident, tout en précisant que l'auteur de l'interdiction - un membre de l'encadrement du lycée qu'il ne désigne pas - a demandé pardon à la maman de Tiziri.
« Après les excuses du proviseur du lycée Berchiche d'El Kseur sur BRTV et [son] communiqué, la polémique est close. La solution pour éviter ce genre de malentendu : une véritable prise en charge de la dimension amazighe de notre identité nationale », considère l'auteur, éditeur et militant Brahim Tazaghart. Une internaute, qui a posté la photo d'une jeune élève voilée, écrit pour sa part : « Vous vous êtes emballés pour une lycéenne en robe kabyle, alors que pour les filles qui n'ont pas dix ans en voile, ça passe ! »
« La robe kabyle qui a pénétré même dans les plus prestigieuses des universités du monde, se voit interdite d'accès à une école bas de gamme, gérée par un ignare nostalgique des années du parti unique, c'est juste une injure. Cela se passe au moment où les tenues afghanes sont admises, même de manière ostentatoire. Je ne sais quoi dire de plus, si ce n'est qu'il faut un vrai sursaut pour renvoyer ces nouveaux ennemis de notre identité à leur Moyen Âge », poste le journaliste Lyazid Khaber. « Je comprends un peu les arguments de ceux qui avancent que l'école publique doit rester neutre par rapport à l'aspect vestimentaire. Que l'école n'est pas un podium pour faire défiler nos diverses tenues traditionnelles, etc. Mais il faut juste souligner que la robe kabyle a toujours été une tenue de la vie de tous les jours, et qu'elle ne gêne aucunement le libre mouvement de la femme qui la met », avance une autre internaute. Pour le militant politique Sofiane Benyounes, « ils [les conservateurs] s'offusquent que l'abaya n'ait pas sa place à l'école en France mais approuvent l'interdiction de la robe kabyle en Algérie ».
Incidents récurrents
Il faut rappeler ici que cet incident n'est pas une première. En avril dernier, dans un lycée de la même localité d'El Kseur, un surveillant général avait interpellé une lycéenne en robe kabyle
Prénoms amazighs proscrits
Au-delà de ces affaires de port d'habits traditionnels se pose la récurrente question de la reconnaissance et de la place de la culture amazighe ou berbère millénaire, substrat du patrimoine algérien et maghrébin. Les médias rapportent souvent, par exemple, des interdictions par l'état civil d'inscrire des prénoms amazighs. En 2013, et sous l'impulsion du Haut-Commissariat à l'Amazighité (HCA) qui dépend de la présidence de la République, les autorités ont publié une « nomenclature des prénoms amazighs » comprenant 300 noms sur les 1000 proposés par le HCA. Mais certains prénoms restent proscrits par les mairies, comme Gaya ou Daya, à titre d'exemple, comme le souligne le chercheur Mohand-Akli Haddadou, qui regrette que les prénoms amazighs restes retranscrits en arabe alors que la langue amazighe est enseignée, en caractères latins, en attendant que le débat soit tranché par les autorités sur l'adoption de la graphie latine, tifinagh (amazighe) ou arabe pour la transcription de tamazight, langue déclarée nationale et officielle dans la Constitution.
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