mercredi 25 novembre 2015

La légalisation du suicide assisté augmenterait le nombre de suicides (y compris non assistés)

Aaron Kheriaty, professeur associé en psychiatrie et directeur du programme d’éthique médicale à la Irvine School of Medicine de l’Université de Californie, s’arrête sur les effets des lois autorisant le suicide assisté sur les populations. Il s’appuie sur une étude réalisée il y a peu par des chercheurs britanniques, David Jones et David Paton, qui a démontré que la légalisation du suicide assisté dans certains États a mené à une augmentation des taux de suicides assistés et non assistés dans ces mêmes États. La loi sur le suicide assisté étant « plus contagieuse » chez les personnes de plus de soixante-cinq ans. Cette « contagion » du suicide assisté passe par la publicité entretenue par les médias.

Le professeur Kheriaty cite l’« effet Werther » : de nombreuses personnes, souvent jeunes, utilisent les mêmes moyens pour se suicider que ceux qui ont été mis en avant par les médias. C’est cette raison qui a poussé les US Centers for Disease Control and Prevention, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’US Surgeon à publier des recommandations à l’attention des journaux afin d’éviter de publiciser les cas de suicides et de suicides assistés.

La propension aux suicides se répand aussi à travers le réseau social : « Ma décision de m’ôter ma vie n’affecterait pas seulement mes amis, mais aussi les amis de mes amis ». Aaron Kheriaty pointe enfin le rôle même des lois dans la propagation des suicides, car, précise-t-il, il ne faut pas oublier que « la loi est maîtresse ». Les lois autorisant le suicide assisté envoient un message particulier à la société : dans certaines circonstances très particulières, certaines vies ne valent plus la peine d’être vécues et le suicide est une fin appropriée et digne. Il conclut « quelle sorte de société voulons-nous devenir ? Le suicide est déjà un problème de salut public. Voulons-nous légaliser une pratique qui n’aura d’autre impact que d’empirer la crise ? »

Sources : Washington Post (20/XI/2015) et Généthique

mardi 24 novembre 2015

Anne Coffinier sur la liberté scolaire, les réformes du système scolaire, le financement des écoles

Anne Coffinier, directeur général de la Fondation pour l’école, a répondu aux questions de Justine Fesneau pour Parents Professeurs Ensemble. Cette association se donne pour objectifs de redonner la parole à des experts de l’éducation, aux parents et aux professeurs afin de faire remonter des propositions simples et pragmatiques pour réformer l’école. Découvrez son témoignage.


Enseignement — l'engouement pour les écoles moins scolaires

À l’école ou chez soi, les pédagogies dites alternatives prennent de l’ampleur. Après avoir enseigné les arts dans des écoles, Adeline Charneau a décidé de changer de vie et de créer des outils pédagogiques autant pour les enfants que pour les parents.


Aujourd’hui, la fondatrice de l’Institut des Petits pinsons cherche un local, dans la métropole bordelaise, pour développer son projet. Elle vient de publier, en juillet chez Nathan, deux pochettes inspirées de la pédagogie de Maria Montessori, comprenant des images, des cartes à découper ou à coller, des roues pour comprendre la notion de cycles. Sur le thème de la nature, l’enfant (entre 3 et 6/8 ans) pourra découvrir dans un premier temps les différentes sortes d’animaux et de végétaux, comment ils vivent et évoluent.

Le Pape François se dresse contre une éducation trop sélective

Biographie de Don Bosco en bédé
publiée aux Éditions du Triomphe
(112 pages)
« Votre travail est de faire la même chose que Don Bosco : au temps des francs-maçons, il a fait une éducation d’urgence ! », a rappelé François.

Le Pape François est intervenu dans le cadre de la rencontre organisée au Vatican sur le thème « Éduquer aujourd’hui et demain. Une passion qui se renouvelle », à l’occasion des cinquante ans de la déclaration du concile Vatican II Gravissimum Educationis.

Pendant quatre jours, depuis le 18 novembre, 2000 responsables scolaires et universitaires étaient réunis à Rome. Rassemblés en salle Paul VI, ils ont participé à un échange très dynamique avec le Pape François, lui-même ancien professeur de lettres et passionné par les questions d’éducation. Il a écouté les témoignages et les interpellations de jeunes et de professeurs venus d’environnements très variés, de Naples à Dakar en passant par Bethléem et Bombay. L’occasion pour François, dans un dialogue improvisé, de formuler un nouvel appel pour une éducation accessible à tous.

« L’identité catholique, c’est Dieu qui s’est fait homme ! » a insisté François dans son dialogue avec les congressistes. « On ne peut donc pas parler d’éducation catholique sans parler d’humanité. »

« Éduquer chrétiennement, ce n’est pas seulement faire une catéchèse, ou faire du prosélytisme… Éduquer chrétiennement, c’est faire avancer les jeunes dans toutes les valeurs humaines, ce qui doit inclure la dimension de la transcendance », une dimension malheureusement rejetée par des modèles positivistes en vigueur actuellement.

« Aujourd’hui, non seulement, les liens éducatifs se sont rompus, mais l’éducation est devenue trop sélective et élitiste. Seulement les personnes d’un certain niveau semblent avoir droit à une éducation. C’est une réalité mondiale honteuse, cette sélectivité humaine éloigne les hommes au lieu de les rapprocher : les pauvres et les riches, les cultures entre elles… »

« Votre travail est de faire la même chose que Don Bosco : au temps des francs-maçons, il a fait une éducation d’urgence ! », a rappelé François, évoquant sa rencontre avec les salésiens à Turin, le 21 juin dernier. « Il faut risquer l’éducation informelle, car l’éducation formelle s’est appauvrie, elle est techniciste, intellectualiste, ne parle que le langage de la tête. Il faut de nouveaux modèles, inclure les voies du langage du cœur, du langage des mains. Une éducation inclusive, pour que tous aient une place. »

« Le monde ne peut pas aller de l’avant avec une éducation trop sélective » s’est alarmé François. « Le plus grand échec d’un éducateur, c’est d’éduquer entre les murs d’une culture sélective, sécuritaire. »

Le Pape a donc appelé à renouveler le pacte éducatif entre l’école, les familles et l’État, via notamment un meilleur salaire pour les éducateurs.

Et il a salué les congrégations qui œuvrent dans les périphéries. « Allez aux périphéries, cherchez les pauvres : ils ont l’expérience de la survie, de la faim, de l’injustice. C’est une humanité blessée. Et je pense que notre salut vient d’un homme blessé sur la Croix », a-t-il insisté. »

Source

ECR : Des musulmans modérés dénoncent le contenu des manuels

Une vision intégriste

Des musulmans de Montréal dénoncent que les manuels utilisés dans les cours obligatoires d’éthique et culture religieuse, qui remplacent maintenant les cours de morale et de religion dans les écoles québécoises, exposent une vision intégriste de l’islam.

« Une fois, mon fils est venu à la maison... en me disant : “On m’a dit que je ne suis pas musulman parce que ma mère n’est pas voilée” », raconte Hassan Jamali, un musulman qui est né en Syrie, mais qui vit au Québec depuis une trentaine d’années.

Quand il a vu ce qu’on enseignait à ses enfants, il n’en croyait pas ses yeux.

« On décrit la pratique islamique selon le dogme le plus conservateur, ajoute-t-il. C’est-à-dire, c’est comme si on dit : “C’est ça, l’islam.” »

Son fils, qui a aujourd’hui 18 ans, a dû se battre contre certains préjugés qui ont été véhiculés dans ses cours.

« À la longue, tu ignores et tu mets ça de côté, et tu arrêtes d’intervenir, parce que tu ne veux pas te faire associer non plus à ces pensées-là et tout », explique son garçon, Malek-Michel Jamali.



Une diversité mal représentée

Nadia El-Mabrouk, une Tunisienne d’origine et qui enseigne à l’Université de Montréal, déplore elle aussi le contenu de plusieurs des manuels utilisés pour ces cours.

« Ça, c’est une page où on parle de Mahomet, dit-elle en montrant une page d’un livre utilisé par son fils à l’école. Alors, on a fabriqué une image de Mahomet voilé. Là, on a vraiment fabriqué une image censurée. »

Madame El-Mabrouk a analysé plus de 20 manuels et cahiers d’exercices. Elle constate qu’on y présente les femmes musulmanes habituellement comme voilées et que les valeurs sont celles de l’islam radical.

« C’est la promotion de l’islam qui a été propagée par l’idéologie des Frères musulmans, oui », soutient-elle.

Le cours est censé présenter la diversité, mais il ne le fait pas, selon elle.

« On ne voit aucune diversité, renchérit-elle. Alors, on voit juste le voile islamique. Donc, on représente les musulmans par le voile islamique. »

Au bureau du ministre de l’Éducation, on explique que le cours d’éthique et culture religieuse expose les jeunes à un ensemble de traditions. Toutefois, madame El-Mabrouk raconte qu’elle a dû expliquer elle-même à ses enfants pourquoi elle ne portait pas le voile.

Madame El-Mabrouk et Hassan Jamali pensent tous les deux que ce cours, au lieu d’aider à l’intégration des jeunes musulmans, fait plutôt le contraire et empêche les jeunes de mieux comprendre cette religion.

Rien d’étonnant, mais dénonciation tardive

Ceci ne nous étonne pas du tout :

1) Des critiques similaires avaient déjà été faites par le Mouvement laïque québécois et des gens comme Mathieu Bock-Côté et Joëlle Quérin. Ils avaient déjà souligné que ce programme ne luttait pas contre les stéréotypes, mais les renforçait tout en inventant parfois des scènes inexactes par correctivisme politique (voir la scène du mur des Lamentations ici).

2) On retrouvait une musulmane fondamentaliste, Najat Boughaba (ci-contre), parmi les conseillers du Monopole de l’Éducation engagés pour évaluer ce cours.

3) Il est difficile de parler de véritable diversité quand le gouvernement a toujours voulu imposer un seul cours (pas une diversité de cours de morale et de culture religieuse) et qu’aucune tête ne devait dépasser.

 

Boucher, Martial. Rond-Point Cahier d’exercices, de contenu et de projets de recherche. Éthique et culture religieuse. Fascicule B. 2e année du 1er cycle du secondaire, Montréal, Lidec, 2007, p. II


jeudi 19 novembre 2015

Hausse de 17 % du nombre d’élèves d’ici 2029 grâce « l’augmentation du nombre de naissances observée » ? (M-à-j)

Mise à jour du 19 novembre

Le ministre de l’Éducation François Blais s’est exprimé récemment sur l’accueil des enfants de réfugiés syriens. Il a donné des chiffres intéressants sur le nombre d’enfants d’immigrants arrivant chaque année dans le réseau scolaire québécois : environ 13 000 élèves immigrants par année. D'ici 2029, cela fera donc environ 14 * 13.000 = 182.000 élèves immigrants. Quand on considère que la population scolaire est en 2015 de 875 151 élèves (source) et que le même document prospectif du gouvernement québécois prévoit 1 012 698 écoliers en 2029, c'est-à-dire près de 140.000 enfants supplémentaires, autant dire que presque toute l'augmentation dans la population scolaire sera probablement d'origine immigrée.



Voir les explications du ministre François Blais

Billet d'origine du 15 novembre

Selon le Monopole de l’Éducation du Québec, les écoles du Québec accueilleront 150 000 élèves supplémentaires d’ici 2029, ce qui représente une hausse de 17 %. À Québec et à Montréal, où plusieurs écoles sont déjà pleines à craquer, l’augmentation sera encore plus marquée, soit respectivement 28 % et 34 %.


Le ministère de l’Éducation vient de rendre publiques ses plus récentes prévisions démographiques, sur lesquelles se basent les commissions scolaires pour planifier les services à offrir.


Selon ce document, « L’augmentation du nombre de naissances observée depuis une dizaine d’années au Québec provoque une remontée de l’effectif scolaire qui se poursuivra durant plusieurs années ». Le document ne parle pas de l’impact de l’immigration. Ce qui est pour le moins étrange.

En effet, le nombre de naissances baisse lentement depuis 6 ans au Québec (88 891 naissances en 2009, 87 700 en 2014)... Cette baisse continuera probablement en 2015 (sans doute moins de 87 000) malgré une population totale en croissance grâce à l’immigration. Le retard accumulé, quant aux naissances, pendant les huit premiers mois de 2015 par rapport à 2014 dans les statistiques mensuelles publiées ci-dessous s’élève déjà à —800 naissances :


Nombre de naissances au Québec : lente baisse depuis 2009


Se pourrait-il donc que ce ne soient pas les naissances qui expliqueraient cette future augmentation du nombre d’élèves, mais plutôt l’immigration ? Cela expliquerait la forte croissance prévue à Montréal, région pourtant à très faible fécondité (1,49 enfant/femme), mais à forte immigration... Voir le graphique ci-dessous avec Montréal au plus bas pour ce qui est de la fécondité...

Comparons les prévisions d’augmentation du nombre d’écoliers ` : Montréal [1,49 enfant/femme] est la région où la hausse anticipée est la plus élevée, à 34 %, alors que d’autres régions comme le Bas-Saint-Laurent [1,71 enfant/femme], la Gaspésie [1,63] ou la Côte-Nord [1,93 enfant/femme] verront plutôt le nombre d’élèves diminuer légèrement.


Il semble donc bien que l’immigration soit l’explication principale de cette future augmentation (jusqu’en 2029 !) alors que le nombre des naissances baisse lentement depuis 2009 au Québec. Pourquoi ce rapport passe-t-il complètement sous silence l’apport de l’immigration ?



La scolarisation des enfants réfugiés syriens : la réalité sur le terrain

L'école arménienne Alex Manougian à Saint-Laurent offre un programme d’accueil et de francisation à des immigrants et des réfugiés. Son directeur Sébastien Stasse s'est exprimé sur les nombreux défis qui attendent les écoles québécoises avec l'arrivée de plusieurs milliers de réfugiés syriens. Il est très inquiet... Son école accueille des réfugiés syriens et irakiens. Il tient à rappeler que la francisation est un défi de taille et il qu'il n'y a pas assez de ressources actuellement, surtout des ressources dans leur langue.

Spectacle lors du 45e anniversaire de l'école arménienne de Saint-Laurent

Depuis de nombreuses années, l'école assume elle-même les coûts de formation des enfants qui arrivent après le 30 septembre puisque le Monopole de l'Éducation n'a rien prévu dans les règles budgétaires pour ce genre de situations.

Pour M. Stasse,
sans classes de francisation, les chances sont grandes que plusieurs des élèves qui seront intégrés directement en classe régulière avec des mesures ponctuelles de francisation se retrouvent en adaptation scolaire alors qu’ils n’ont aucun problème d’apprentissage. Le milieu scolaire n’est actuellement pas prêt à franciser un nombre aussi important d’élèves avec des besoins aussi particuliers.

Il est très facile d’accueillir des réfugiés, ça en est une autre d’assurer leur intégration, leur scolarisation, mais surtout la réussite des enfants à l’école. Nous savons très bien de quoi nous parlons et notre communauté est inquiète.

Écoutez Sébastien Stasse au micro de Paul Arcand





mercredi 18 novembre 2015

France — Les coupes socialistes dans la politique familiale expliquent-elles la baisse de la natalité ?

De janvier à septembre, cette année, 569 000 bébés ont vu le jour en France métropolitaine. C’est 16 000 de moins que l’an dernier à la même époque. Avec un total prévu de 765 600 à la fin de l’année (il est rare que le dernier trimestre modifie la tendance annuelle), la France, championne de la natalité en Europe, connaîtrait alors son millésime le moins fécond depuis près de quinze ans. Un signal d’alarme ?

« Les coupes répétées dans la politique familiale fragilisent le désir d’enfant », explique dans le Figaro Marie-Andrée Blanc, présidente de l’Union nationale des associations familiales (Unaf). « La France a d’abord cherché à compenser les effets de la crise en augmentant les dépenses en direction des familles grâce à des réductions fiscales et au versement d’une prime ponctuelle de 150 euros en 2009 pour les familles modestes, rappelle Luc Masson, de l’Insee, dans ce rapport qui porte plus largement sur les liens entre la fécondité et la crise en France et en Europe.

Dans un deuxième temps, à partir de 2012, elle a plutôt cherché à limiter les dépenses : gel des revalorisations des prestations familiales puis baisse du plafond de réduction d’impôt liée au quotient familial (les classes moyennes et supérieures étant à nouveau punies d’avoir des enfants) et du montant d’allocations liées à la prestation d’accueil du jeune enfant (Paje) et modulation des allocations familiales selon le niveau de revenu en 2015. »

Des restrictions de dépense qui se sont toutefois accompagnées d’une augmentation des suppléments familiaux accordés aux familles modestes et d’un plan de développement des services d’accueil de la petite enfance, mesures qui visiblement n’ont pas réussi à maintenir la natalité.

Comment l’Europe se dépeuple (hors immigration)

Les pays en rouge ou rose sont en dessous du seuil de renouvellement des générations. Ils sont largement majoritaires et illustrent l’affaissement démographique de l’Europe ce culture chrétienne. Le Québec a une fécondité (1,62 enfant/femme) similaire à celle de Lituanie (1,60). Deux groupes sont plus féconds que les autres au Québec : les immigrants (sauf notamment ceux de Chine) et les autochtones (amérindiens et esquimaux). La Lituanie ne connaît aucune immigration importante. La Russie qui ne figure pas sur l'illustration ci-dessus a une fécondité de 1,76 enfant/femme (2104). Cette fécondité a fortement remonté depuis 1999 quand elle avait atteint un nadir de 1,17 enfant par femme.

Trois exceptions à ce non-remplacement des générations : l’Irlande, l’Islande, et la France. La fécondité de ces pays est toutefois passée à 1,96, 1,93 et 1,99 respectivement en 2013, c’est-à-dire sous le taux de remplacement des générations fixé à 2,1 enfants/femme dans nos pays à faible mortalité avant la vieillesse.

Cette décroissance encourage certains pays (comme l’Allemagne) à recourir à l’immigration depuis de nombreuses années ce qui n’a cependant pas permis à l’Allemagne de rétablir le renouvellement de ses générations. Les pays de souche musulmane, comme le Kossovo, au cœur de l’Europe, ou la Turquie, à sa marge, continuent au contraire de croître.

« La nature a horreur du vide », remarquait déjà Aristote, voici deux mille quatre cents ans.


lundi 16 novembre 2015

« Le Règne de l’homme – Genèse et l’échec du projet moderne » de Rémi Brague

Rémi Brague est philosophe, membre de l’Institut. Dans son dernier livre, Le Règne de l’homme (Gallimard) — le dernier volet d’une trilogie consacrée à la manière dont l’homme a pensé successivement son rapport au monde, à Dieu puis à lui-même — il décrit la montée en puissance du projet moderne. Et son échec.


Liberté politique — En se coupant de son passé pour aller toujours plus de l’avant, l’homme moderne s’est-il empêché de penser l’avenir, et donc de le réaliser ?

Rémi Brague — Le passé n’est pas un boulet que nous traînerions au pied et qui nous entraverait. Il est au contraire ce sur quoi nous nous appuyons pour avancer. Nous ne pouvons nous comprendre comme porteurs d’avenir que si nous commençons par nous comprendre comme héritiers du passé. Nous ne sommes gros d’avenir que si nous sommes lourds de passé. Nous ne serons les parents de nos enfants que si nous sommes conscients d’avoir été d’abord les enfants de nos parents. Nous ne transmettrons aux générations futures que si nous nous sentons, pour ainsi dire, transmis nous-mêmes.

— Pour que l’homme puisse régner, il fallait le couper de Dieu, faire « table rase ». Mais ce plan ne s’est-il pas retourné contre l’homme lui-même, en l’amenant à s’idolâtrer ?

Il a fallu commencer par se faire de Dieu une certaine idée, particulièrement imbécile. C’est celle d’un adversaire qu’il faut abaisser pour que l’homme puisse s’élever. Comme s’il existait une sorte de balançoire : quand Dieu monte, l’homme descend, et réciproquement. On peut à la rigueur la trouver chez Hérodote, avec son idée de la némésis, une sorte de jalousie des dieux devant le bonheur des hommes. Elle est plus claire chez Feuerbach, puis chez Nietzsche. Depuis le christianisme, pour lequel Dieu se laisse crucifier pour libérer l’homme, il faut laisser cette image plus ou moins consciente là où elle a sa place, c’est-à-dire à la pouponnière, si ce n’est à l’asile. Des auteurs du XIXe siècle ont déjà dénoncé l’auto-idolâtrie de l’homme moderne : un chrétien comme Baudelaire, ou un agnostique comme Flaubert. Mais au fond, toute idolâtrie est une idolâtrie de soi-même. Ce que nous appelons des idoles sont au fond des miroirs que nous tendons à notre propre désir.

— L’homme peut-il survivre, ou plutôt peut-il vouloir survivre sans Dieu ?

Le « ou plutôt » par lequel vous précisez votre question met le doigt sur le point essentiel : vouloir. Nous vivons une sorte de « triomphe de la volonté », en ce que l’homme décide de plus en plus de ce qu’il est, et déjà, de savoir s’il existera. Mais comment décider que notre volonté doit mener à la vie plutôt qu’à la mort ? Le suicide est lui aussi un acte volontaire, et qui n’est même pas sans une certaine noblesse. Survivre sans Dieu ? L’expérience commence à nous montrer que non. Les groupes sociaux qui se définissent comme « séculiers » sont particulièrement inféconds. Et certains disent très explicitement qu’il est moralement mal d’avoir des enfants. Un marchand de soupe « philosophique », qui se proclame hédoniste, donc faire du plaisir le souverain bien, le déclare à qui veut l’entendre. Mais finalement, vive Darwin ! Nous procédons à une sorte de sélection naturelle — ou surnaturelle. Les groupes humains qui veulent survivre, et qui en prennent les moyens, survivront. Quant à ceux dont les comportements montrent qu’ils veulent la mort, ils l’auront. Mais qu’on se rassure : sans violence, par simple extinction. Vous vouliez la mort ? Vous l’avez. Alors, de quoi vous plaignez-vous ?

— Pour faire advenir le projet moderne, l’homme a dû dominer la nature, grâce à la technique. Quelle est la place de la nature, dans un monde moderne qui rejette tout ordre, naturel ou divin ?

La nature n’y est guère vue plus que comme un réservoir d’énergie, ou une carrière d’où extraire des matières premières. Ou alors, nous la rêvons comme un jardin dans lequel nous pouvons nous délasser. On peut noter d’ailleurs que, comme cela se produit souvent, exagérer dans une direction mène, par contrecoup, à aller trop loin dans la direction opposée. Je pense à une certaine tendance à diviniser la Nature, chez les « Philosophes » autoproclamés des « Lumières » françaises. Et aussi, de nos jours, à la figure de Gaia, la Terre, à laquelle certains adeptes de l’écologie dite « profonde » rêvent de sacrifier l’homme. À égale distance de ces deux extrêmes, il serait bon d’en revenir à la nature « vicaire de Dieu » dont parlent Alain de Lille au XIIe siècle, puis le Roman de la Rose au XIIIe : puissante, belle, inventive, mais subordonnée ; créative, mais sans qu’on la confonde avec le Créateur.

Recension

Dernier volet d’une trilogie consacrée à l’anthropologie, Le Règne de l’homme est un ouvrage fouillé et rigoureux sur l’histoire et l’échec de la Modernité. Et si l’auteur regrette qu’il soit incomplet (« je croyais que je ne réussirais pas à lire le dixième de ce qu’il aurait fallu ; je sais maintenant qu’il s’agissait du centième »), le lecteur, lui, profite largement du savoir encyclopédique du philosophe.

« Le projet moderne comporte deux faces tournées, l’une vers le bas, ce qui est inférieur à l’homme, l’autre vers le haut, ce qui lui est supérieur. » Il s’agit d’abord de soumettre la nature : « Au lieu que ce soit le cosmos qui donne sa mesure à l’homme, c’est l’homme qui doit se créer un habitat à sa mesure. Le sens de l’idée d’ordre change alors radicalement. » C’est ensuite une volonté d’émanciper l’homme « par rapport à tout ce qui se présente […] comme son origine inaccessible : un dieu créateur et/ou législateur, ou une nature que son caractère actif rend divine ». L’auteur explique comment l’avènement de la Modernité a été préparé puis comment elle s’est déployée, et montre enfin son échec.

La pensée moderne s’est attelée à concevoir des choses avant qu’elles existent, ouvrant ainsi le chemin à sa réalisation technique : « L’intention de dominer la nature précède la naissance de la technique qui en permettra la réalisation. » Non sans paradoxes. Elle se base sur ce qu’elle rejette : « Ce que l’on repousse est aussi ce sur quoi on s’appuie. » En oubliant de distinguer les progrès matériels et la progression spirituelle, comme le faisait saint Augustin, et qu’ils ne sont pas toujours liés… loin de là !

Or « l’esprit public des sociétés occidentales a fait de l’adhésion au progrès le critère du bien ». S’y opposer, ou même seulement s’en poser la question, c’est se discréditer. Et passer dans le camp du mal. L’homme se tourne vers lui-même. « Péguy fait remarquer que l’homme moderne est moins athée que, d’un mot de son cru, “auto-thée”. » Il devient l’être suprême, débarrassé de toute servitude. Puis il doit être « recréé », voire « remplacé ». L’échec se profile alors. Comment, en effet, se projeter dans l’avenir sans conscience de son passé ? En se coupant de toute antériorité et supériorité, l’homme s’empêche de penser son avenir. « Il faut se savoir descendant d’ancêtres pour se sentir soi-même appelé à devenir le père d’une postérité. »

Ce problème de la perte conjointe du passé et de l’avenir avait déjà été énoncé par Tocqueville : « Non seulement la démocratie fait oublier à chaque homme ses aïeux, mais elle lui cache ses descendants. » Et la société moderne, en se coupant de ses attaches, se met elle-même en danger, ce que Rémi Brague explique en citant Böckenförde : « L’État libéral, sécularisé, vit de présupposés qu’il est incapable de garantir lui-même. » L’abandon de Dieu, loin de faire avancer l’homme, le renvoie en arrière : « La fin du culte de Dieu mène moins à un progrès qu’à une régression vers une religiosité primitive, l’idolâtrie, qui porte désormais sur l’homme lui-même. » Or « l’homme ne peut lui-même se prononcer sur sa valeur ; il serait juge et partie. […] Il y faudrait un arbitre neutre entre les hommes et les animaux. […] Il y faut celui qui a déclaré au sixième jour de la Création que tout y était “très bon” ». Mais l’homme moderne est-il encore capable d’adorer ce qu’il a brûlé ?




Le Règne de l’homme
Genèse et l’échec du projet moderne,
par Rémi Brague,
aux éditions Gallimard,
publié en 2015,
Collection L’esprit de la cité,
416 pages.
ISBN-13 : 978-2070775880



Source

La France catholique de Jean Sévillia vu du Québec

Extraits d’une recension de Mathieu Bock-Côté, docteur en sociologie et chargé de cours aux HÉC Montréal, sur le dernier ouvrage de Jean Sévillia « La France catholique » :


[...]

Jean Sévillia ne s’est pas seulement intéressé aux catholiques en France, mais à la France catholique. C’est-à-dire que son enquête portait non seulement sur une religion parmi d’autres, mais sur une religion qui, à bien des égards, a fait la France, ou du moins, a contribué à la faire. Ne dit-on pas de la France qu’elle fut, bien avant d’être le pays phare de la laïcité, la fille aînée de l’Église ? Faire l’histoire de la France catholique, c’est chercher à comprendre les racines de l’identité française, même si elles ne sont évidemment pas les seules. D’une certaine manière, à travers le catholicisme, on se rapproche de ses origines les plus intimes. Certains verront là un propos audacieux. En d’autres temps, on y aurait vu une évidence. Il y a quelques décennies, une telle sociologie aurait donné beaucoup de place à l’aile « progressiste » de l’Église en France. Elle était hégémonique. Jean Sévillia note une chose : nous assistons probablement aujourd’hui à la fin de l’aventure historique des cathos de gauche, qui voulurent, dans la deuxième moitié du vingtième siècle, transvaser à peu près complètement le catholicisme du spirituel vers le social, comme s’il devait moins se préoccuper de la vie intérieure et de l’aspiration spirituelle de chaque homme que de l’établissement du paradis sur terre, qui était la plupart du temps une manière ou une autre de se rallier au socialisme dominant auquel il voulait donner un supplément d’âme. Aujourd’hui, le christianisme de gauche est en lambeaux.

Des mouvements éducatifs plébiscités
C’est l’étrange histoire de la deuxième moitié du vingtième siècle. Les catholiques ont cru alors devoir se faire discrets pour gagner les âmes. C’était ce qu’on a appelé la pédagogie de l’enfouissement. Il s’agissait de transformer la société souterrainement sans brandir aucunement l’étendard de l’Église. Pour aller à la rencontre du monde, les catholiques devaient neutraliser ce qu’ils avaient en propre. Il fallait s’accorder avec l’époque, lui donner des gages, en quelque sorte, pour purifier l’Église et lui donner un nouveau souffle. Mais ce qui devait permettre sa renaissance a contribué à son délitement. On a cherché à déculturer le catholicisme, en croyant alors le délivrer d’une tradition qui, apparemment, l’étouffait.

En fait, on s’est livré à un saccage liturgique qui a détourné bien des fidèles de leur Église. Jean Sévillia le note, c’est à un mouvement inverse qu’on assiste aujourd’hui avec la renaissance d’un catholicisme d’abord centré sur la vie intérieure et la quête spirituelle. Car il est d’abord et avant tout centré sur la quête des fins dernières. C’est ainsi que les catholiques des nouvelles générations redécouvrent non seulement la prière, mais réapprennent à prier. On a cru que l’homme pouvait s’aventurer sans repères dans la quête de l’absolu en se fiant simplement à ses bonnes intuitions. Il risquait pourtant de s’y perdre comme on l’a vu avec la prolifération des sectes. On parle aujourd’hui du vide spirituel occidental. On doit ajouter que le commun des mortels cherche à y répondre en se jetant confusément dans le nouvel-âge ou l’exotisme oriental. D’autres se tournent vers un Islam ne doutant manifestement pas de lui-même.

Vue aérienne de Rocamadour
C’est pourtant essentiellement à travers le catholicisme que la France s’est posée, au fil du temps, les grandes questions spirituelles et qu’elle a civilisé son rapport à l’absolu, qu’elle a appréhendé ce dernier. C’est d’ailleurs la vertu des grandes religions. L’homme n’accède pas au monde en se détournant de sa culture, mais en l’assumant. Plus il est enraciné et plus il risque de rencontrer la part sacrée de sa culture. On comprend aussi l’importance accordée par Sévillia à l’éducation catholique : la foi n’est pas séparable de la raison, et la doctrine, pour qui veut véritablement cheminer dans l’Église, n’est pas sans importance. Le travail d’évangélisation en est aussi un d’enseignement. Et la France, à sa manière, est redevenue terre de mission.

Une nouvelle génération de prêtres apparaît. Ils assument jusqu’à la soutane et au col romain. Ils s’investissent dans la vie publique, prennent d’assaut les médias sociaux et contestent une époque qui se veut hostile au catholicisme et le considère d’ailleurs souvent à la manière d’une opposition philosophique officielle, comme le dernier bastion d’une autre idée de l’homme à éradiquer. L’émergence de la question anthropologique, qui place au cœur de la cité le problème de la définition de l’homme, révèle les limites d’un certain individualisme libéral qui a privatisé radicalement la question du sens et qui ouvre la porte à toutes les dérives dont la théorie du genre est la plus exaspérante. À ceux qui succombent au fantasme de l’autoengendrement, le catholicisme veut rappeler que l’homme est créé. Nul besoin d’avoir la foi pour savoir cela : il suffit de méditer sur la finitude de l’homme et sur ce qui, chez lui, relève du donné. Ce n’est peut-être pas sans raison qu’en ces temps d’angoisse identitaire, la France se tourne vers sa religion première, moins pour s’y fondre, mais pour voir une source à laquelle elle doit s’alimenter. En un mot, la France catholique renaît d’abord spirituellement, mais elle n’abandonne pas la cité. Cette renaissance catholique répond aussi à la quête identitaire de la France contemporaine, qui découvre manifestement les limites du culte autoréférentiel des seules valeurs républicaines, qui pousse à la dissolution du pays dans un néant mondialisé. Ce n’est peut-être pas sans raison qu’en ces temps d’angoisse identitaire, la France se tourne vers sa religion première, moins pour s’y fondre, mais pour voir une source à laquelle elle doit s’alimenter. Peut-être est-ce d’ailleurs par la médiation identitaire que certains redécouvriront le catholicisme, non seulement comme un patrimoine de civilisation, ce qu’il est même pour les incroyants, mais comme une foi qui relève fondamentalement d’une conversion personnelle. Tout cela demeure minoritaire et Jean Sévillia ne le cache pas. 

Et bien des chiffres feront frémir ceux qui souhaitent voir le catholicisme regagner du terrain. La chute vertigineuse des vocations l’inquiète particulièrement. Il veut croire, toutefois, au pouvoir des minorités créatrices. Si on comprend bien Sévillia, c’est à partir de la marge que le catholicisme français est revenu à ses fondements, qu’il a renoué avec ce qu’il n’aurait jamais dû sacrifier.

[...]

En fait, là où plusieurs veulent voir un catholicisme crépusculaire, dont ils chanteront tristement les derniers jours, Jean Sévillia veut voir un catholicisme à l’aube de sa renaissance, comme si en renouant avec sa meilleure part, il était appelé à illuminer à nouveau le vieux monde. Jean Sévillia ne cache pas sa foi, mais jamais son livre ne semble verser dans la nostalgie de la France d’hier — ce qui ne serait pas déshonorant, par ailleurs. Cette foi non seulement assumée, mais revendiquée, sans jamais être agressive et ouverte à la pluralité des familles dans l’Église, donne d’ailleurs une profondeur particulière à son livre, qui dépasse les seules limites du grand journalisme. Jean Sévillia a éclairé et illustré comme peu d’autres une part irremplaçable de l’identité française. Chose certaine, nous sommes devant un livre magnifique vers lequel on retournera souvent. Il nous permet d’apercevoir, au-delà des formules habituelles, la richesse inouïe d’une tradition spirituelle et culturelle, qui a marqué les âmes et les paysages, et qu’un peuple ne saurait sacrifier sans se mutiler.





La France catholique
par Jean Sévillia,
chez Michel Lafon,
publié le 14 octobre 2015,
à Paris,
237 pages.  
ISBN-13 : 978-2749925936



dimanche 15 novembre 2015

La scolarisation des écoliers satmars sortis de « l'illégalité »

La SRC a récemment publié un reportage sur les élèves juifs ultra-orthodoxes qui fréquentaient une école que le gouvernement du Québec voulait fermer il y a quelques années. Le gouvernement avait perdu en première instance quand il avait demandé à un tribunal de fermer d’urgence cette école. Il y a un an, avant un deuxième passage dans les prétoires, le gouvernement et l’école sont parvenus à un arrangement.

Yéchiva religieuse à Outremont

Dans cette entente avec le monopole de l’Éducation du Québec, les parents de la communauté juive hassidique satmar d’Outremont se sont engagés auprès de Québec à inscrire leurs enfants dans une commission scolaire et à enseigner à la maison le programme établi par le ministère de l’Éducation.

En vertu de l’entente, les 230 enfants de la communauté peuvent également continuer à fréquenter quotidiennement l’Académie Yéchiva Toras Moché pour y recevoir un enseignement religieux durant le jour, comme c’était le cas auparavant. Cette école était considérée comme illégale par le monopole de l’Éducation du Québec et se voyait menacée de fermeture sans succès (selon la Loi, les écoles religieuses ne sont pas soumises à autorisation...)

Les enfants fréquentent l’Académie en moyenne plus d’une trentaine d’heures par semaine. Pour le directeur de l’école, l’étude des textes sacrés du judaïsme leur permet d’acquérir des connaissances comme la logique et l’argumentation.

Salle de cours de la yéchiva Toras Moché

Un centre de soutien scolaire dans la yéchiva

L’accord signé avec Québec a également permis à la communauté de créer un service de soutien scolaire à l’Académie Yéchiva. Les enfants qui le fréquentent ont donc accès à des tuteurs qui peuvent leur venir en aide et ainsi appuyer les parents qui font l’école à la maison.

Les tuteurs offrent des cours de soutien en anglais, en français et en mathématique, des matières enseignées par les parents à la maison. Avant l’entente, les jeunes n’apprenaient pas le français, c’est d’ailleurs en français qu’il y aurait le plus de demandes, selon les confidences du directeur.

Radio-Canada n’a, cependant, pas pu apprendre combien de temps les jeunes peuvent passer au soutien scolaire par semaine ni non plus le nombre d’heures d’enseignement religieux données à l’Académie. Le directeur de l’établissement, comme les membres de la communauté, auraient refusé de donner ces détails aux journalistes de la SRC.


Pour beaucoup de familles, le centre de soutien scolaire de l’Académie va jouer un rôle de premier plan dans l’apprentissage des enfants. On peut même se demander si les tuteurs n’en feront pas plus que les parents. Selon l’entente signée le 4 novembre 2014, les services de soutien scolaire comprennent notamment :
  • l’aide aux devoirs ;
  • l’aide pour la préparation d’examens ;
  • des services de récupération et de soutien pédagogique relativement à une matière prévue au Régime pédagogique de l’éducation préscolaire, de l’enseignement primaire et de l’enseignement secondaire ;
  • des services de psychoéducation, d’éducation spécialisée, d’orthopédagogie ou d’orthophonie.

Élèves dans une salle de soutien scolaire
Bilan de l’entente
On est donc passé d’une école que le Monopole jugeait « illégale » et que la presse n’hésitait pas à présenter comme telle à :
  1. une yéchiva religieuse qui n’est pas sujette à approbation par le Monopole ;
  2. un centre de soutien scolaire (dans les mêmes bâtiments) pas plus sujet à autorisation comme le rappelait le juge de première instance ;
  3. de potentiels cours à la maison (non vérifiables) ;
  4. des examens auprès la commission scolaire dans trois matières (mathématique, anglais et français) ;
  5.  aucun examen pour le cours d’histoire et géographie, ainsi que celui de science et technologie ;
  6. des aménagements pour répondre aux convictions religieuses de la communauté, dont le programme d’« éthique » [et culture religieuse] « inspiré de sources rabbiniques ». 
 Un programme personnalisé

On remarquera que le gouvernement n’a pas hésité, semble-t-il, à modifier le cours d’ECR pour cette communauté, ce qu’il a toujours refusé obstinément pour les autres parents du Québec.

Un représentant haut placé du Monopole de l’Éducation, Jacques Pettigrew, avait même déclaré lors d’une réunion houleuse à Valcourt il y a quelques années que les petites catholiques des campagnes avaient encore plus besoin des cours d’éthique et de culture religieuse que les écoliers montréalais afin qu’ils s’ouvrent à la diversité. Cette nécessité impérieuse semble à géométrie variable et ne pas s’appliquer aux écoliers de cette yéchiva d’Outremont.

Qu’on nous comprenne bien : nous ne sommes pas contre cette adaptation du cours d’« éthique » (comme l’appelle pudiquement la SRC), mais nous nous insurgeons contre l’intransigeance du Monopole de l’Éducation qui a toujours refusé une adaptation dans ce sens du programme ECR pour les autres parents du Québec.

Littérature jeunesse, que choisir?

On trouvera ci-dessous la conférence d’Anne-Laure Blanc donnée le 30 septembre dernier au Collège latin, une école préceptorale et hors contrat située à Paris.

Mme Blanc y expose brièvement l’histoire de la littérature jeunesse et donne des clés concrètes pour sélectionner les ouvrages. Les bons titres, les âges cibles, l’influence des éditeurs, le vocabulaire...


On consultera aussi le site de Mme Blanc qui présente quatre livres pour la jeunesse qu’elle a aimés par semaine (environ 9000 titres destinés à ce public paraissent chaque année en France et environ 1000 au Québec).

Voir aussi 

Faut-il faire lire des classiques abrégés ou adaptés aux enfants ?

lundi 9 novembre 2015

Sexologue clinicienne : « les cours de sexualité en milieu scolaire font fausse route »

La sexologue clinicienne, Sœur Marie-Paul Ross, quitte le Québec pour s’installer en Acadie. Selon Radio-Canada, son arrivée pourrait transformer les cours de sexualité dans les écoles du Nouveau-Brunswick. Plusieurs pays lui ont fait part de leur intérêt, mais c’est l’Acadie qu’elle a choisie. « C’est vraiment ici, je n’ai pas de doute, confie-t-elle. Je me suis sentie tout de suite dans la place où je sentais qu’il fallait faire quelque chose pour le monde. » Elle compte ouvrir un centre de santé international à Cocagne. La sœur a elle-même dessiné le plan de l’Institut de développement intégral. Diverses thérapies seront offertes, mais la priorité sera la santé sexuelle des jeunes. « C’est un institut qui se veut unique au monde, explique-t-elle. Il est unique au monde de par sa méthode et on veut qu’il soit international. » Docteure Ross souhaite aussi former des intervenants qui se déplaceront dans les écoles.

Point de non-retour


Marie-Paul Ross dresse un bilan extrêmement dur à l’égard des jeunes Québécois. Selon elle, le point de non-retour est atteint. « Ce n’est pas normal que nos jeunes ne veuillent pas entendre parler d’une sexualité saine, dit-elle. On le sait que leur éducation sexuelle c’est la pornographie. » « C’est la pornographie qui a pris le pouvoir sur l’éducation sexuelle. Donc c’est une éducation à la déviance sexuelle. » — Marie-Paul Ross. Elle est convaincue que les cours de sexualité en milieu scolaire font fausse route. La spécialiste croit qu’il faut impliquer les sentiments. « Le condom ils s’en foutent, la protection, les grossesses non désirées. Ils ne sont pas là, ils sont dans la passion et l’excitation. »

Inefficaces pour lutter contre les maladies sexuellement transmissibles

Notons que les cours d’éducation à la sexualité souvent vendue aux parents comme essentiels pour éviter des « comportements à risques » n’ont pas fait leurs preuves à ce titre : il y a recrudescence des maladies vénériennes dans les pays occidentaux, peu importe la présence d’éducation à la sexualité moderne. Voir Le cours d’éducation sexuelle ontarien évite-t-il l’augmentation du nombre de maladies vénériennes ?, Malgré l’éducation sexuelle, recrudescence des maladies vénériennes en Suède.

Voir aussi

Humour — « Une majorité des Québécois préfèrent la connaissance à l’ignorance »

Québec — éducation sexuelle : dispense en 1992, aucune exemption en 2015.

Le syndicat CSQ suggère des livres homosexuels et transgenres aux garderies et écoles primaires

Projet-pilote à l’école : lutte aux stéréotypes, sextos, homosexualité et porno au menu

Québec — une quinzaine de projets-pilotes en éducation à la sexualité seront mis en place

Étude : Environ 70 % des ados qui se disaient LGBT se déclarent hétérosexuels par la suite

Le cours d’éducation sexuelle ontarien évite-t-il l’augmentation du nombre de maladies vénériennes ?

Malgré l’éducation sexuelle, recrudescence des maladies vénériennes en Suède

Peter Hitchens : Plus d’éducation à la sexualité cause plus de maladies sexuelles et de grossesses parmi les adolescentes (exemples en Angleterre), vidéo (en anglais) devant audience à Norwich.


dimanche 8 novembre 2015

Palmarès 2015 des écoles secondaires: le privé domine toujours

L’Institut Fraser a publié samedi son palmarès des écoles secondaires du Québec, attribuant aux écoles une cote sur 10 points. Sans surprise le privé domine toujours occupant la quasi-totalité des 50 premières positions sur 452 écoles analysées.

En comptant quelques égalités au 50e rang, 47 écoles privées et seulement 6 écoles publiques occupent les 50 premières places de ce palmarès réalisé à partir des résultats scolaires des élèves en 2013-2014.

La cote décernée à chaque établissement est essentiellement basée sur la moyenne des résultats des élèves de 4e et 5e secondaire aux examens du ministère de l’Éducation dans cinq matières : langue d’enseignement, langue seconde, mathématiques, science et technologie ainsi qu’histoire et « éducation à la citoyenneté ».

L’auteur de l’étude, Peter Cowley, explique à Métro qu’il s’agit des seules données que les systèmes provinciaux d’éducation produisent annuellement et de manière généralisée. « Les gens me demandent souvent ce qu’il en est des autres habiletés développées à l’école. Je leur dis qu’ils ont raison, mais nous n’avons pas ces données », affirme ce Britanno-colombien qui produit des rapports similaires pour l’Alberta, l’Ontario et la Colombie-Britannique.

En plus des résultats aux cinq matières, les autres facteurs qui influencent la cote d’une école sont le taux d’échec dans ces mêmes matières, l’écart de réussite entre les filles et les garçons, l’écart entre les notes de l’année et celles aux examens du ministère et le pourcentage d’élèves qui finiront leur secondaire plus d’un an après la date prévue.

Le pourcentage d’élèves handicapés ou en difficultés d’apprentissage est aussi fourni à titre indicatif, mais n’influence pas la cote. Questionné à savoir s’il aimerait faire de même avec les écoles qui utilisent un test d’entrée, M. Cowley répond que « cette information n’est probablement pas compilée par le ministère de l’Éducation, mais que si c’était le cas, [il] la demanderait ».

Bien conscient que plusieurs autres facteurs sont importants dans le choix d’une école, l’auteur souhaite que ce classement ne soit qu’une aide pour les parents quand vient le temps de décider d’un établissement où envoyer leurs enfants. « J’espère que très peu de parents utilisent ce rapport comme seule information pour choisir une école, parce que ce n’est pas bon du tout », insiste M. Cowley.

Selon l’auteur, l’indicateur le plus utile pour les parents et celui de la tendance qui différencie les écoles qui maintiennent leur cote de celles qui l’améliorent ou qui perdent des points. « On ne devrait pas regarder seulement la plus récente cote globale puisqu’on n’a aucune idée de l’évolution dans le temps », dit-il. Les établissements qui obtiennent une flèche vers le haut ou le bas sont ceux qui, sur cinq ans, ont un changement statistique significatif. « Devant un résultat stable, j’espère que les directeurs d’écoles et les parents vont se demander : “pourquoi certaines écoles s’améliorent et pas nous” et qu’ils trouveront ce que ces écoles font de bien », explique Peter Cowley.

Écoles privées dominantes

Le fait que les écoles privées dominent le classement québécois d’année en année est prévisible selon M. Cowley. Il observe d’ailleurs la même tendance en Alberta et en Colombie-Britannique, où les écoles privées sont, comme au Québec, financées par le gouvernement. « Si les parents veulent que leurs enfants aillent dans une école où la performance académique est importante, et s’ils paient pour ça, ils vont l’exiger de l’école, indique M. Cowley. Donc l’école privée est mieux d’avoir de bons résultats, ou elle va perdre son marché. » Comme facteur avantageant les écoles privées, il cite aussi l’effet d’entraînement entre les jeunes lorsque l’on voit que tout le monde autour réussit bien à l’école.

10 meilleures écoles privées

(École – ville – cote sur 10)

Jean-de-Brébeuf — Montréal — 10

Jean-Eudes — Montréal – 9,9

Sainte-Anne de Lachine — Montréal – 9,8

Notre-Dame — Montréal – 9,7

Saint-Joseph de Hull — Gatineau – 9,7

Saint-Nom-de-Marie — Montréal – 9,5

Durocher Saint-Lambert — Saint-Lambert – 9,4

Sainte-Marcelline — Montréal – 9,4

Jean de La Mennais – La Prairie – 9,4

Keranna — Trois-Rivières – 9,4

10 meilleures écoles publiques

École d’éducation internationale — McMasterville – 9,7

École internationale de Montréal — Westmount – 9,5

École d’éducation internationale — Laval – 9,3

Cardinal-Roy — Québec – 8,8

Royal West — Montréal-Ouest – 8,6

Mont-Royal — Mont-Royal – 8,6

Vincent Massey — Montréal – 8,2

Académie de Roberval — Montréal – 8,2

Le tandem — Victoriaville – 8,2

Vallée-des-Lacs — Saint-Michel-du-Squatec – 8,0

5 meilleures écoles publiques francophones à Montréal

(École – cote – rang total)

Académie de Roberval — 8,2 – 59e

Joseph-François-Perrault — 7,2 – 111e

École Saint-Louis — 7,0 – 116e

Saint-Luc – 6,9 –121 e

FACE – 6,3 – 167e

Les centres d’éducation des adultes et de formation permanente, les écoles ayant une importante clientèle d’élèves étrangers non résidents et celles ayant moins de dix élèves en 5e secondaire ont été exclus de l’étude.

L’outil interactif de comparaison de l’Institut Fraser ici
.

Voir aussi le Palmarès de 2014.


mercredi 4 novembre 2015

Québec : un prof corrige un courriel d’alerte à la bombe truffé d'erreurs

Plus de 60 écoles québécoises ont été évacuées ce mardi après avoir reçu un courriel menaçant d’attaques à la bombe. Un message bourré de fautes d’orthographe et de grammaire, qu’un professeur a choisi de tourner en dérision.



« Au lieu de faire exploser les écoles, allez y faire un tour, c’est très instructif... » C’est ainsi qu’Étienne Forest, professeur d’informatique dans un collège québécois, a répondu à un mail menaçant les écoles de la province canadienne d’alertes à la bombe. Le message, signé par le mystérieux « collectif du Sceptre rouge », a entraîné le mardi 3 novembre l’évacuation de plus de soixante établissements scolaires. L’enseignant a choisi de dédramatiser la situation en moquant les très nombreuses fautes d’orthographe, de grammaire et de syntaxe contenues dans le mail de menace.

Se déclarant « furieux » contre « les syndicats des professeurs », le collectif du Sceptre rouge annonce dans son message de menace le début d’une « campagne » intitulée « Quatre Jours de Mort ». Le collectif indique avoir « planté quatre bombes » dans plusieurs collèges, écoles primaires et secondaires du Québec et de l’Ontario. Face à cette menace d’attaque à la bombe, la réaction immédiate des autorités canadiennes est la prudence. Au total, 68 écoles et collèges sont évacués. Après la fouille de ces établissements, aucune bombe n’est retrouvée, comme l’indique le journal La Presse.

Un courriel de menace infesté de fautes

Étienne Forest, professeur d’informatique au Collège Lionel-Groulx dans la ville de Sainte-Thérèse, au nord de Montréal, a choisi de dédramatiser la situation avec ironie. Il s’est saisi du mail de menace, dont l’orthographe et la syntaxe sont plus que douteuses, et en a fait une correction. Il a ensuite publié le résultat sur sa page Facebook avec un message de légende directement adressé aux auteurs : « Au lieu de faire exploser les écoles, allez y [sic, sans trait d’union] faire un tour, c’est très instructif... »






Son message remporte un grand succès sur les réseaux sociaux, même s’il n’emporte pas l’adhésion de tous. Si certains félicitent le professeur pour son humour, d’autres lui reprochent de prendre un sujet sérieux trop à la légère. Beaucoup pointent et moquent également l’ignorance des auteurs du message des règles les plus élémentaires de la langue française, et suggèrent que les auteurs ont écrit le texte dans une autre langue avant de le passer dans un logiciel de traduction. Manœuvre qui expliquerait pour d’aucuns le très faible niveau de langue de la missive. Google traduit pourtant correctement « 1 bomb in a  primary school » par « 1 bombe dans une école primaire » alors que les auteurs avaient écrit « un école », erreur assez commune à l’oral au Québec...

Une enquête est ouverte pour retrouver les auteurs du courriel. La Sûreté du Québec, qui mène les investigations, indique à La Presse qu’il est « trop tôt pour déterminer combien de personnes se trouvaient derrière le ou les claviers qui ont servi à envoyer ces courriels », mais qu’il pourrait s’agir d’élèves. Mais que pour déterminer l’origine de la lettre, c’est « une enquête complexe et longue » qui s’amorce. Le Premier ministre du Québec, Philippe Couillard, a prévenu que les auteurs des menaces seront poursuivis, même s’il s’agit d’un canular.