samedi 13 novembre 2021

France — Comment on endoctrine nos enfants à l’école

Au nom de la « diversité » et de son corollaire pédagogique, l’« inclusion », les idéologies woke ont pénétré dans le temple scolaire avec la complicité d’une partie du corps enseignant et par le biais des outils pédagogiques.

Sara * (1) est lycéenne dans un établissement sans histoire de la banlieue parisienne. Son lycée n’est ni huppé ni ghetto. L’équilibre du « vivre-ensemble » y est fragile, mais il tient. Sara est métisse, ses camarades sont d’origines diverses. Ils sont blancs, noirs, maghrébins, asiatiques, mais pour elle, comme pour eux, la différence n’a jamais été un sujet de débat ni un problème… Jusqu’à ce fameux cours d’éducation morale et civique intitulé : « Le racisme anti-Blancs existe-t-il ? » Une question qui n’en était pas une, selon la lycéenne, tant l’enseignante a verrouillé les échanges pour imposer sa réponse : « Non, il n’existe pas. » Les élèves ont été invités à se définir comme « racisés » ou « non racisés » et ont découvert les notions de « privilège blanc », de « racisme systémique », etc. Une véritable initiation à la sémantique décoloniale !

« Ce cours a tout changé dans la classe, affirme Sara. Nous nous entendions bien, il y avait de la solidarité, du respect et de la bienveillance entre nous. Mais certains ont commencé à se voir comme des victimes de racisme, à ne parler que de cela. La boucle WhatsApp de la classe est devenue un champ de bataille avec deux camps qui s’affrontaient. Il y avait les Blancs accusés de racisme et les “basanés” de la classe qui parlaient d’esclavage, de colonialisme, d’inégalité. Ce cours n’a pas fait réfléchir. Il a installé un climat de haine et transformé en victimes certains de mes camarades qui allaient très bien jusque-là. » Du haut de ses 15 ans, la jeune fille interroge cette notion de racisme à sens unique, mais aussi et surtout la démarche de cette prof : « J’ai été frappée par l’impossibilité de discuter cette théorie. Je ne comprenais pas. Pour moi, le racisme, c’est d’abord de la bêtise. Et la bêtise n’a pas de couleur de peau. Heureusement, j’ai pu en discuter avec mes parents qui m’ont rassurée. Ils m’ont expliqué que ce cours était de l’idéologie déguisée. Ils m’ont parlé des thèses indigénistes et racialistes. Dans notre classe, plus rien n’a été comme avant après ça. La prof a changé d’établissement l’année suivante. Elle est partie sans essayer de réparer les dégâts. »

« Idéologues du bien »

L’anecdote ne surprend pas l’essayiste Fatiha Boudjahlat (2). Professeur d’histoire et géographie dans un collège de Toulouse, elle est en colère : « C’est terrifiant ce qu’il se passe aujourd’hui, s’exclame-t-elle. L’école est gangrenée par des idéologues. Ils avancent masqués, en utilisant leurs cours et leur autorité de professeurs pour faire de la propagande politique sous couvert de générosité et de respect de la diversité. » C’est ce qu’elle appelle « le complexe du missionnaire en Afrique » : « Ils veulent “sauver” les gamins en leur révélant leur statut de victimes, en faire de bons indigènes, avec la haine de l’État et de la France. Ce sont des agents du séparatisme. »

Ses formules volontairement chocs donnent la mesure de son désarroi. Que dire à cette élève noire qui lui raconte, en larmes, que son professeur d’anglais, après avoir projeté à toute la classe un film sur le Ku Klux Klan, l’a reprise au cours de la discussion qui a suivi en lui affirmant : « Tu n’es pas française, tu es afro-américaine ! » « Cette ado est originaire de Guyane, soupire Fatiha Boudjahlat, et son enseignante lui refuse le droit de se définir comme française. C’est incompréhensible pour cette jeune fille. »

Après l’assassinat de Samuel Paty, j’ai assisté à un grand moment de folie ­collective ­durant lequel ils ­essayaient de comprendre et de justifier cet acte abominable. J’avais envie de hurler.

Un professeur de lettres

Des méthodes que connaît bien ce professeur de lettres qui a choisi d’enseigner dans des établissements difficiles, motivé, dit-il par « l’envie d’être utile et de tirer vers le haut les élèves issus des quartiers les plus défavorisés ». Ses nobles convictions s’érodent chaque jour un peu plus au contact de la rugosité du quotidien dans le lycée des Hauts-de-Seine où il exerce. Le communautarisme, la radicalité voire la violence sont des difficultés avec lesquelles il a appris à composer pour continuer à faire son métier, « pour les élèves qui s’accrochent ». Son intransigeance, il la réserve à ceux de ses collègues qu’il qualifie « d’idéologues du bien », « en général syndiqués et affiliés à l’extrême gauche » : « Ils sont majoritaires en salle de profs et c’est une plaie. Ils contribuent à faire de ce lycée un établissement poubelle. Ce sont des militants indigénistes, woke ou communautaristes. Ils font de l’entrisme pour détruire de l’intérieur le système scolaire. Ça me rend malade, peste-t-il. Après l’assassinat de Samuel Paty, j’ai assisté à un grand moment de folie collective durant lequel ils essayaient de comprendre et de justifier cet acte abominable. J’avais envie de hurler. » Il nous a demandé de ne pas faire apparaître son nom : « Mon attachement viscéral aux valeurs républicaines m’oblige à raser les murs à l’école. »

Il décrit des collègues « militants », qui considèrent l’enseignement, la rigueur et l’exigence comme autant de formes de violence. « À leurs yeux, un prof qui fait bien son boulot est un salaud, soupire-t-il. Pour ma part, je suis critiqué, car je fais de la littérature considérée comme de la “culture blanche”. On ne doit surtout pas confronter nos élèves à de grands auteurs, car, selon eux, ces sujets ne les intéressent pas. Ils leur proposent de la sous-culture. Ils sont convaincus de faire preuve de bienveillance, mais pour moi, ce n’est que du mépris. Ces jeunes ont aussi le droit d’apprendre, de nourrir leurs esprits et leur curiosité. Ces militants veulent surtout les empêcher de progresser et les laisser dans leur merde. »

Des élèves se sont mis à fermer ­ostensiblement leurs cahiers quand je parlais par exemple de darwinisme

Philippe, professeur

Leila *, prof dans un lycée de Seine–Saint-Denis, confirme : « Nos élèves cumulent beaucoup de difficultés et je suis ulcérée de voir comment certains profs, par idéologie, les maintiennent dans un statut de victimes de la société, de la police. Ils entretiennent l’idée que ce pays, qui est le leur, ne les aime pas, et ils alimentent la haine dans le cœur de cette jeunesse. » Assa Traoré est même venue dans son établissement, au titre de son comité La vérité pour Adama. Sujet de l’intervention : les violences policières.

L’islam politique profite de ce terrain pour avancer ses pions. Philippe a démarré sa carrière dans un établissement difficile de la région du Grand Est. Il y a vu progresser le communautarisme religieux. « Avant, seuls un ou deux élèves avaient des difficultés à faire la différence entre science et croyance, se souvient-il. Puis, de plus en plus, des élèves se sont mis à fermer ostensiblement leurs cahiers quand je parlais par exemple de darwinisme. » Lui-même avoue avoir été surpris par le nombre croissant d’élèves demandant à quitter la classe dès la nuit tombée pour pouvoir manger plus tôt en période de ramadan. « J’ai honte de le dire, soupire-t-il, mais au début je trouvais ça amusant. »

Le sujet devient encore plus grave lorsque l’école relaie les injonctions religieuses. En 2019, l’administration d’un collège public du Val-de-Marne a envoyé un formulaire aux familles pour les inviter à se signaler si leurs enfants faisaient le ramadan. Ils auraient droit à une remise exceptionnelle au titre de « la pratique du jeune cultuel ». Quelques parents s’étant émus de cette forme d’assignation à résidence identitaire, on s’est aperçu que la pratique existait ailleurs. En Essonne, le président du conseil départemental François Durovray l’a purement et simplement interdite, mais ailleurs, elle est toujours en vigueur, plus discrètement.

Les intérêts de l’enfant

La même volonté d’endoctrinement est à l’œuvre autour d’un sujet ô combien à la mode, celui du genre et du sexe. Le lycée Fénelon, établissement réputé du 6e arrondissement parisien, se veut à la pointe du combat contre les discriminations dans ce domaine. En mai dernier, dans le cadre de sa « semaine contre les discriminations », il a accueilli une série de conférences organisées sous l’égide de l’Observatoire académique des LGBT + phobies. Outre l’exposé de Marie de la Chenelière, « consultante en transidentité », sur « Théorie et pratique de la transidentité », était programmée une session sur le « sexe neutre » au cours de laquelle Marie Mesnil, maîtresse de conférences en droit privé à l’université de Rennes-I, s’est livrée à un long plaidoyer en faveur de la disparition de la mention du sexe à l’état civil.

L’exemple de Fénelon n’est pas isolé. Les associations de lutte contre les discriminations sexistes multiplient les contacts avec l’Éducation nationale sur tout le territoire. SOS Homophobie est agréé par l’Éducation nationale, comme le Planning familial, qui fait lui aussi de la « lutte contre les stéréotypes de genre » une priorité. Ou comme Contact, dont le représentant a expliqué lors d’une table ronde organisée par l’académie de Dijon qu’il concevait ses interventions « avec les services de vie scolaire » qui les « intègrent dans les emplois du temps des collèges et des lycées ». Ces services, ce sont essentiellement les conseillers principaux d’éducation (CPE) et les conseils de vie collégienne ou lycéenne, présidés par le chef d’établissement et composés de représentants des élèves, des personnels, enseignants ou non-enseignants, et des parents d’élèves.

Pour cet enseignant à Nanterre, « par le biais de ces CPE notamment, mais aussi par celui des inspecteurs d’académie, le système encourage la pénétration idéologique ». « Les profs qui s’impliquent dans les initiatives des CPE sont les mieux notés et nous, qui voulons juste faire notre boulot sur le terrain, on avance dans le métier avec un sac à dos lesté de pierres ! »

Par définition, une association milite pour ce qui est son objet

Édouard Geffray, directeur général de l’enseignement scolaire

Nous avons interrogé le ministère sur la confusion entre le travail, utile, de certaines associations auprès des jeunes victimes qu’elles aident et l’endoctrinement auquel elles se livrent avec la bénédiction de la Rue de Grenelle. Directeur général de l’enseignement scolaire (DGESCO dans le jargon maison), Édouard Geffray relativise la notion de militantisme : « Par définition, une association milite pour ce qui est son objet », observe-t-il. Les associations de niveau national qui souhaitent intervenir en milieu scolaire doivent au préalable faire une demande d’agrément au DGESCO. Le numéro 2 du ministère de l’Éducation vérifie en particulier que la requérante souhaite bien s’inscrire dans le cadre pédagogique défini par l’institution et « évidemment qu’elle n’est pas susceptible de porter atteinte aux intérêts de l’enfant ». Et selon lui , « lutter contre l’homophobie participe à la protection de l’enfance ». Si l’agrément est accordé, chaque projet d’intervention doit ensuite faire l’objet d’une autorisation spécifique du chef d’établissement concerné. « Il prend sa décision en accord avec les équipes pédagogiques, en fonction notamment du respect de l’équilibre des arguments et de la pondération dans l’expression », explique Édouard Geffray, en insistant sur ce qu’il appelle les « garde-fous » : « On ne dit pas à ces associations “tout ce que vous faites est génial” et l’agrément ne vaut pas un blanc-seing pour toutes les interventions qu’elles souhaitent faire en milieu scolaire. »

La Ligue de l’enseignement a un agrément. Confédération de quelque 25 000 associations locales, elle est même la première bénéficiaire des subventions de l’Éducation nationale. Elle s’est pourtant bien éloignée de la conception républicaine de la laïcité qu’elle cultivait lors de sa fondation, en 1866. Elle fait dorénavant encore mieux que les associations spécialisées dans les discriminations sexistes en assurant des séances ponctuelles de « sensibilisation aux LGBT + phobies » dès le primaire, jusqu’au lycée, et mène aussi des projets qui peuvent s’étendre tout au long de l’année avec des groupes d’élèves.

Les associations qui promeuvent la « déconstruction » du sexe et du genre devraient voir leurs ressources et leur influence augmenter considérablement grâce au plan gouvernemental 2020-2023 « pour l’égalité des droits, contre la haine et les discriminations anti-LGBT+ » préparé par la délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti-LGBT (DILCRAH). Dans le titre 5, « Promouvoir une éducation inclusive et faire reculer les préjugés », plusieurs de leurs revendications sont reprises, dont la création d’un site dédié à l’éducation contre les LGTB + phobies, d’un « observatoire de la haine anti-LGTB+ dans chaque académie » et le développement tous azimuts de « formations » du personnel sur ces sujets. Par les associations dédiées, bien sûr.

Et les parents, dans tout cela ? La Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE), de gauche et très largement majoritaire, a choisi son camp depuis longtemps. En 2019, elle a franchi un pas supplémentaire dans l’« intersectionnalité » en menant une campagne d’affichage montrant une mère de famille voilée avec la légende : « Oui, je vais en sortie scolaire, et alors ? » En ce qui concerne la sexualité et le genre, elle n’est pas en reste. Pour Isabel Amis, présidente de la FCPE en Côte-d’Or, « l’école doit être ce point de solidité qui va permettre aux jeunes de s’émanciper des croyances familiales, (…) des parents qui sont dans le rejet, qui refuse d’accueillir et de prendre leur enfant en compte dans tout ce qu’il est et dans tout ce qu’il veut ». On ne saurait être plus clair.

Argent public

L’Observatoire du décolonialisme et des idéologies identitaires a enquêté sur ces phénomènes d’endoctrinement en remontant à la source : il a publié en mai un rapport qui montre comment le discours racialiste et indigéniste imprègne la formation des futurs enseignants. Les extraits des thèses soutenues par certains de ces étudiants en pédagogie sont particulièrement édifiants. L’un d’eux, par exemple, s’est intéressé aux « rapports sociaux langagiers de pouvoir dans le domaine de l’éducation de la petite enfance ». Ce qui donne, en écriture inclusive bien sûr : « Les enseignant-e-s ne savent pas comment se comporter avec des enfants qui ne parlent pas la langue cible (le français, NDLR). Les langues “autres” des enfants et de leurs parents sont reléguées au contexte privé et leurs locutrices/locuteurs sont réduit-e-s au silence dans le cadre de l’école maternelle. De cette façon, le capital symbolique des enfants parlant une langue “autre” est exclu de l’institution préscolaire, ce qui contribue à une restriction de leur participation égalitaire aux processus de l’éducation. » Lueur d’espoir, selon l’auteur : « D’autres enseignant-e-s critiquent ces politiques linguistiques de facto et décrivent en revanche comment ils contribuent à aider les enfants à s’exprimer dans leur(s) langue(s) préférée(s). » Autrement dit, l’apprentissage du français ne doit plus être une priorité !

Ces formations sont autant de bombes à retardement qui vont exploser dans une dizaine d’années

Xavier-Laurent ­Salvador, fondateur de ­l’Observatoire du ­décolonialisme et des idéologies identitaires

Dans un registre tout aussi accablant, l’Observatoire a repéré une « formation à l’intersectionnalité », destinée à des enseignants-stagiaires, qui préconise de « prendre en compte » des « facteurs ethniques », « de manière imbriquée avec le genre et la classe sociale », y compris en éducation physique. Exemple : « En natation, je sais que mes élèves d’Afrique noire ont de grosses appréhensions du milieu aquatique, ce qui amène des problèmes pour, par exemple, se maintenir sur le dos en position étoile, donc on les autorise à bouger les jambes. » Ce « facteur ethnique » est « à considérer avec beaucoup de précautions afin de l’éloigner de toute tentation différentialiste », précise le plus sérieusement du monde le pédagogue.

Une fois en poste, les enseignants disposent d’un large éventail de sites d’autoformation en ligne, dont plusieurs sont des guides pratiques d’application de l’idéologie woke. Parmi eux, ce site dédié à la « pédagogie antidiscrimination ». Conçu par l’Institut national supérieur du professorat et de l’éducation (Inspé) de l’académie de Créteil et l’université Paris-Est Créteil, il est financé par de l’argent public, via l’Agence nationale de la recherche (ANR). On y parle « privilège blanc », « blanchité », « islamophobie », « hétéronormativité », « culture du viol » ou, encore, « capacitisme » (discrimination à l’égard des handicapés). On y dénonce même l’« âgisme », défini comme la « domination des adultes sur les enfants par la création d’une distinction juridique arbitraire entre ces deux catégories » ! Le site propose aux enseignants du primaire et du secondaire de s’« autodiagnostiquer » en répondant à un questionnaire : « Est-ce que je contribue à véhiculer ou est-ce que je combats les stéréotypes concernant les familles populaires sur le fait qu’elles sont “démissionnaires” ou qu’elles ne s’occupent pas de la scolarité de leurs enfants ? Est-ce que j’ai conscience que l’évaluation chiffrée produit un stress lié à la menace du stéréotype et n’est pas favorable aux élèves de milieux populaires ? etc. » Xavier-Laurent Salvador, fondateur de l’Observatoire du décolonialisme et des idéologies identitaires, prévient : « Ces formations sont autant de bombes à retardement qui vont exploser dans une dizaine d’années. » Transmis à la ministre de l’Enseignement supérieur, Frédérique Vidal.

(1) Les noms suivis d’astérisque ont été modifiés.

(2) Les Nostalgériades, de Fatiha Agag-Boudjahlat, Éditions du Cerf, 144 p., 16 €.


L’idéologie dans les manuels et sur internet
Nombre d’ouvrages fleurissent. L’objectif affiché : biberonner les plus jeunes aux idées « progressistes ».
 
 
En mars 2017, le manuel Magellan et Galilée — Questionner le monde, destiné aux élèves de CE2 et publié par Hatier, lançait la mode des manuels « féministes » en utilisant l’écriture inclusive. Une grande première selon les professeurs des écoles interrogés à l’époque par Le Figaro. Depuis, la maison d’édition a récidivé et elle n’est pas la seule. « Tu reçois un. e correspondant. e anglais. e. Tu veux savoir si il ou elle apprécie les sports représentés dans les vignettes. Pose-lui trois questions », propose par exemple un cahier d’anglais baptisé My English Memo, destiné aux élèves de sixième. Il a été publié en mai, au moment même où Jean-Michel Blanquer prenait une circulaire pour proscrire l’écriture inclusive à l’école. Mais comme le rappelle Souâd Ayada, les éditeurs de manuels ne sont pas tenus par les circulaires ministérielles.

Plus subrepticement, un ouvrage des éditions Milan (hautement recommandées par l’Éducation nationale) sur le thème de la violence, à destination des 6-10 ans, illustre des actions brutales, dans lesquelles la quasi-totalité des agresseurs est blanche et les victimes « racisées ». Il ne s’agit pas ici d’un manuel scolaire, mais cet exemple illustre la façon dont les idéologies progressistes infusent petit à petit dans le milieu éducatif.

De nouveaux acteurs décomplexés ont émergé ces dernières années et s’investissent ouvertement dans les causes adoubées par le « wokisme »

Outre les maisons d’édition traditionnelles, de nouveaux acteurs décomplexés ont émergé ces dernières années et s’investissent ouvertement dans les causes adoubées par le « wokisme », défense des minorités en tête, qu’elles soient ethniques, sexuelles ou de genre. Le plus emblématique est Lelivrescolaire.fr. Créé en 2009 et propriété du groupe Hachette depuis 2020, ce site internet se vante de mettre en ligne « les manuels numériques les plus utilisés de France ». Quelque 1500 établissements français adhèrent en effet à la version « premium » pour leurs enseignants, avec le concours de certaines régions. La version gratuite, très bien référencée sur Google, est, elle, disponible en libre accès. Si bien que « le site s’impose de plus en plus comme une référence incontournable pour les élèves lors d’un devoir à la maison ou d’une dissertation », comme le confie un professeur de lycée de banlieue parisienne. Les exercices proposés sont clairement orientés, comme celui de ce manuel de français qui demande aux élèves de seconde de « rédiger un discours dans lequel [ils présenteront leurs] convictions et [défendrons leur] opinion sur l’écriture inclusive, à la manière d’un manifeste politique ». Le support qui accompagne l’énoncé : un article de France Culture… rédigé en écriture inclusive.

Source

Certains groupes ethno-culturels pâtissent-ils d'une surcriminalité ? Si oui, pourquoi ?

Pénurie de la main d'œuvre et immigration — attention aux sophismes

Extrait d’un article de Pierre Fortin, un économiste bien en vue dans les milieux progressistes, qui a réagi aux propos de l’opposition libérale la semaine dernière qui préconisait de hausser les seuils de l’immigration internationale afin d’aider à résorber la pénurie de main-d’œuvre ambiante au Québec. Les milieux d’affaires appuient généralement une telle mesure.

Les milieux d’affaires : attention aux sophismes

Les affirmations qu’on rencontre le plus fréquemment dans les milieux d’affaires sont les trois suivantes :

  • L’immigration atténue le fardeau du vieillissement.
  • L’immigration aide à soulager la pénurie de main-d’œuvre.
  • L’immigration favorise la croissance du PIB par habitant.

Ces affirmations sont largement contredites par les faits et doivent au minimum être tempérées. La première croyance veut que l’immigration aide à combattre le vieillissement de la population. Comme l’âge moyen des nouveaux arrivants est inférieur à celui des habitants de la société d’accueil, on pense qu’accroître l’immigration rajeunira la population et allégera le fardeau du vieillissement : plus de jeunes au travail paieront des impôts qui financeront les dépenses de santé pour le nombre croissant de nos aînés.

Malheureusement, il s’agit d’un faux espoir. L’élan du vieillissement est beaucoup trop fort. L’immigration ne peut le modifier que de façon marginale. Après un examen attentif des chiffres pour le Canada, les chercheurs Parisa Mahboubi et Bill Robson, de l’Institut C.D. Howe, ont calculé que l’effet sur le vieillissement d’une hausse, même très forte, de l’immigration serait minime. Ces experts ont conclu que c’est duper les gens que de leur faire croire que l’immigration est un antidote réaliste à la pression sur la démographie et les budgets. Ils ont démontré que c’est plutôt en facilitant le maintien des travailleurs de 60 ans et plus sur le marché de l’emploi que les répercussions du vieillissement sur la population active peuvent être le mieux atténuées.

La deuxième croyance des milieux d’affaires est qu’une plus forte immigration peut aider à soulager la pénurie de main-d’œuvre. C’est un pur sophisme, car on oublie ici que l’immigration fait augmenter non seulement le nombre de travailleurs, mais aussi le nombre de consommateurs et de citoyens. Elle offre plus de main-d’œuvre, mais engendre également une demande accrue pour des biens de consommation et des services qui exige d’être satisfaite par encore plus de travailleurs. Ainsi, il est possible qu’un plus grand nombre d’immigrants conduise à une aggravation, plutôt qu’à un soulagement, de la pénurie de main-d’œuvre.

Les données provinciales canadiennes disponibles ne permettent pas de conclure qu’un rythme d’immigration accru fait baisser notablement le taux de postes vacants. Par exemple, le taux d’immigration est beaucoup plus élevé dans le Grand Montréal qu’ailleurs au Québec, mais le taux de postes vacants n’y est pas plus faible. On observe la même insensibilité de la pénurie de main-d’œuvre au taux d’immigration au Japon et aux États-Unis.

Évidemment, l’immigration a un rôle à jouer pour aider les entreprises à combler certains besoins en matière de talent. Recruter sélectivement des travailleurs temporaires ou permanents à l’étranger reste pour les employeurs un outil efficace pour parer à un manque de main-d’œuvre précise. Mais le gouvernement doit ici se pencher sur la composition de l’immigration plutôt que de s’appliquer à augmenter à l’aveuglette la cible générale d’immigration. Sans discernement quant aux compétences recherchées et aux secteurs industriels en déficit de main-d’œuvre, une hausse exagérée de cette cible accroît le risque de chômage parmi les nouveaux arrivants. Or, soutenir les chômeurs est toujours coûteux pour les gouvernements et la société, qu’ils soient immigrants ou natifs.

Troisième croyance des milieux d’affaires : l’immigration favorise la croissance du niveau de vie. La recherche contemporaine ne permet pas d’accorder foi à cette idée. Dans leur synthèse récente de la question, les professeurs Brahim Boudarbat, de l’Université de Montréal, et Gilles Grenier, de l’Université d’Ottawa, ont constaté que les effets de l’immigration sur le PIB par habitant d’âge actif étaient généralement faibles ou incertains, même en tenant compte des retombées possibles sur l’entrepreneuriat et l’innovation, la spécialisation des tâches, les économies d’échelle et le changement technologique. Il est incontestable que des immigrants plus nombreux font augmenter le PIB. Mais le revenu qui en découle enrichit surtout les immigrants qui travaillent pour l’obtenir plutôt que la population d’accueil. Cela est tout à fait acceptable et désirable, mais ne signifie pas que le revenu par habitant de l’ensemble de la société va nécessairement croître.

Le public en général : l’économie, oui, mais aussi le vivre-ensemble

Qu’est-ce que le public québécois en général pense de l’immigration ? Les sondages de l’institut Environics permettent de constater que son opinion comporte deux volets bien distincts : l’économie, d’une part, et les valeurs, d’autre part. Premier volet : à Montréal comme dans le reste du Québec, la population ne croit pas que les immigrants soient trop nombreux, elle juge que leurs répercussions économiques sont positives, et elle n’est pas préoccupée outre mesure par le coût des services publics offerts aux immigrants.

Notons que selon ces études, l’attitude envers les immigrants est plus favorable chez les Québécois que chez les autres Canadiens. C’est en Alberta que l’opinion est la plus réticente.

Second volet, par contre : lorsqu’on quitte le domaine de l’économie pour aborder celui des valeurs et du vivre-ensemble (langue, culture, respect de la loi, liberté religieuse, égalité hommes-femmes, etc.), une plus grande inquiétude apparaît, tout particulièrement dans les régions du Québec hors de Montréal, où les immigrants sont en moyenne six fois moins présents que dans la métropole. Il s’agit d’un phénomène qui s’observe partout : la littérature de recherche sur l’immigration a clairement établi — c’en est devenu un lieu commun — que la réticence des natifs envers les immigrants est fonction croissante de la distance physique ou sociale qui les sépare d’eux.

Il est donc complètement déplacé de traiter automatiquement d’intolérants, de xénophobes ou de racistes, parce qu’ils expriment une certaine réticence à augmenter la cible d’immigration, les habitants des régions où les immigrants sont peu présents. Les sociologues Robert Putnam, de l’Université Harvard, et Irene Bloemraad, de l’Université de Californie à Berkeley, ont démontré qu’à court terme, l’introduction rapide de l’immigration et de la diversité ethnoculturelle dans une communauté tend à réduire les relations de confiance, le degré d’altruisme, l’intérêt à coopérer et la cohésion sociale. À long terme, cependant, l’immigration et la diversité peuvent réussir, à condition d’être absorbées dans une culture commune renouvelée. Mais — cela est fondamental — il faut y mettre le temps et s’armer de patience. L’énorme disparité de présence immigrante entre Montréal et les autres régions du Québec va prendre des décennies à évoluer. Il faut laisser à nos communautés locales le temps de se construire peu à peu une nouvelle identité, de nouvelles valeurs et de nouvelles solidarités.

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Institut Fraser : L’immigration massive nuit au bien-être des Canadiens en général ; les politiques d’immigration doivent être revues (étude de 264 pages) 

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L’initiative du Siècle (dont un des cofondateurs est Dominic Barton, actuellement ambassadeur du Canada en Chine populaire). En anglais uniquement.

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