lundi 8 novembre 2010

Tolérance intolérante

Prélat et théologien moraliste œuvrant notamment au sein du Conseil pontifical pour la famille, Mgr Jean Laffitte développe une thèse à la fois très claire et convaincante dont l'idée centrale ressemble à un paradoxe : la tolérance peut être intolérante.

« Une société tolérante ne peut tolérer que s'exerce en son sein un droit d'objection de conscience, car elle n'est plus en mesure d'accepter en les honorant les valeurs supérieures qui s'expriment en son sein. Elle choisit alors des valeurs consensuelles, dont certaines, infailliblement, la conduisent à la mort. »

Mgr Jean Laffitte montre que l'idéologie de la tolérance née dans la matrice du libéralisme et du relativisme est intrinsèquement violente et même totalitaire. Dès ses origines, elle vu son grand adversaire dans le christianisme et sa défense de lois supérieures (non écrites, pour Antigone, ou divines pour saint Thomas More), fondatrices de valeurs morales objectives. Cette thèse est confirmée par les contraintes de plus en plus fortes visant à empêcher les professions de santé d'exercer leur droit à l'objection de conscience en matière d'avortement : la loi française a ainsi construit progressivement un système de droit qui devait à l'origine simplement décriminaliser l'avortement, sans le légaliser, et qui finit par  non seulement légaliser cet acte mais à le rétribuer et à le protéger contre tout autre droit (l'objection de conscience des médecins, la protection de l'enfant, l'avis du père).

Mgr  Jean Laffitte
Tolérance intolérante ?
Petite histoire de l'objection de conscience
Éditions de L'Emmanuel, 58 p., 8,50 €




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J'ai moi-même dû subir le cours ECR...

Le cégépien pris à partie par l'élève de secondaire IV de Granby au sujet du cours ECR lui répond ci-dessous (pour le contexte, lire Enseignante d'ECR déguisée en curé...enfin pas dans la Voix de l'Est).

Le six novembre dernier, Alexandre Gemme, un élève de secondaire quatre à Granby, a signé une réplique à mon texte paru récemment dans La Voix de l’Est. Puisque j’ai été personnellement critiqué et qu’il s’agit d’un débat d’envergure nationale, je tiens à répondre à mon détracteur.

M. Gemme m’accuse d’être « mal informé ». Outre le fait que je suis attentivement ce dossier depuis plusieurs années, j’ai moi-même eu à subir le cours d’Éthique et culture religieuse au secondaire, au Collège Français de Longueuil. Le pédagogue, M. Michaud, affirmait catégoriquement que tous les religieux ont le même Dieu (et c’est ce qu’il fallait répondre à l’examen). Cela n’est pas simplement « être tolérant », c’est une prise de position théologique, et imposer de telles positions dépasse le mandat du gouvernement. [Note du carnet : voir extrait de manuel ECR, « Un Dieu, trois religions »]

Après le secondaire, je me suis procuré plusieurs livres traitant des diverses religions, et j’ai commencé à lire la Bible et le Coran. Je me suis vite aperçu que ce que l’on m’avait enseigné était carrément faux, ou plus précisément que les grandes religions n’ont pas toutes le même message, qu’il existe des divergences énormes entre elles, et qu’elles ne sont pas, selon leur doctrines respectives, équivalentes.

M. Gemme me fait la leçon en disant que « ce cours est loin d'être une menace à notre identité ». C’est curieux, car Fernand Ouellet, un des pères de ce cours, voit les choses de la manière inverse. Dans un article académique portant sur ce sujet, il affirmait éhontément en 2002 qu’« il faut apprendre à ébranler la suffisance identitaire » des jeunes. Très rassurant pour l’avenir de notre pays isolé sur ce continent ! Souvenons-nous qu’à Montréal, dans un cours d’ECR, l’enseignant a fait redessiner le fleurdelisé sans croix à sa classe pour le rendre « plus inclusif » !

Cet élève scande également que le cours d’ECR « n'a pas été dénoncé par tous les segments de la société ». Il n’y a pourtant rien à redire au consensus social : conservateurs et progressistes, croyants et incroyants, quasiment tous les citoyens s’accordent sur le principe selon lequel l’État n’a pas à imposer des cours de religion.

M. Gemme demande : « Avons-nous oublié de demander à notre belle jeunesse ce qu'elle en pensait ? » Je réponds que la présence d’une dizaine de groupes étudiants contre l’ECR sur Facebook démontre suffisamment bien que ce cours tendancieux ne fait pas l’unanimité auprès des jeunes.

Cet élève loue pompeusement ce cours en argumentant qu’il est basé sur « l'ouverture envers les autres cultures et façons de penser ». Cela explique sans doute pourquoi un cahier d’ECR pour le secondaire deux des éditions Lidec présente une fille en niqab en classe, avec un contexte qui laisse comprendre que cela serait tout à fait acceptable. Face à telle propagande, tout le monde conviendra que l’ouverture n’est pas toujours une vertu, et que les parents font bien de rester sur leurs gardes.


Clément Barbeau Vermet
Étudiant en Histoire et Civilisation
Cégep de Sherbrooke




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Internet comme mirage pédagogique ?

Texte de Norman Baillargeon, professeur à l'UQAM :

Je suis très loin d’être un technophobe et j’utilise au contraire beaucoup et apprécie énormément l’ordinateur, Internet, de nombreux logiciels et des tas d’innovations de l’ère numérique. Tout cela, je le reconnais, a souvent rendu ma vie et certaines des tâches que j’accomplis plus faciles. Pourtant, ce n’est pas sans un grand malaise que j’entends certaines personnes vanter les bienfaits pédagogiques qu’il faut attendre de toutes ces innovations. Je l’avoue : j’ai très souvent de sérieux doutes et de grandes réserves devant les promesses que me font tous ces technophiles.

L’expérience m’a montré que ces doutes sont sains, à la fois sur un plan pédagogique et sur un plan économique, puisque ces technologies coûtent typiquement très cher. Sans nier qu’on trouvera des avantages à certains modestes usages faits en classe de ces nouvelles technologies, je pense que bien souvent les promesses qu’on nous fait miroiter, spécialement pour l’enseignement primaire et secondaire, sont des mirages pour lesquels on dépense des sommes importantes qui seraient mieux investies ailleurs.

Mais c’est là un vaste sujet et c’est pourquoi je voudrais m’attarder ici à une seule idée, bien précise, qui est avancée par certains de ces technophiles. Je pense que si on examine cette idée de près, en particulier à la lumière de ce que nos savons en psychologie cognitive, de très sérieux bémols s’imposent.

Connaissance brute et raisonnement

Cette idée est que l’existence d’Internet comme source quasi illimitée d’informations forcerait à complètement réévaluer l’importance qui était autrefois accordée en éducation à la transmission de connaissances, de faits et d’informations. « Internet », dit en ce sens Michel Serres, « nous force à être intelligent ».

Après tout, vous expliquera-t-on, il sera toujours possible d’aller sur Internet chercher une information qui vous manque, de sorte que c’est perdre un précieux temps scolaire et pédagogique que de vouloir enseigner aux enfants des faits aisément accessibles et qui risquent, de surcroît, d’être vite périmés. Le plus sage et le plus efficace est plutôt d’apprendre aux enfants à raisonner, à synthétiser, à être créatif, à faire preuve d’esprit critique, à questionner, bref de développer chez eux ces habiletés cognitives de haut niveau qui sont celles des experts – sans oublier bien entendu celle qui consiste à chercher de l’information, notamment sur Internet.

En somme, et on invoquera ici Montaigne, une tête bien faite est le but que doit viser l’éducateur : et le moyen de faire une telle tête n’est surtout pas de la remplir de connaissances, d’informations et de « simples faits » vite périmés, mais de développer, par la pratique, ces indispensables habiletés de haut niveau que l’élève pourra ensuite utiliser dans différents contextes – c’est-à-dire transférer –, et cela tout au long de sa vie.

Donnons un exemple : dans une discussion sur la possibilité de la vie extraterrestre, qui ignore ce qu’est une planète, mais sait penser de manière critique, pourra toujours consulter Internet et lire la définition ; par contre, qui sait ce qu’est une planète mais ne sait pas penser de manière critique, celui-là ne l’apprendra pas sur Internet et ce « simple fait » qu’il connaît, outre qu’il est toujours révisable (ne vient-on d’ailleurs pas justement d’exclure Pluton du nombre des planètes ?) ne lui sera d’aucun secours.

Si ces idées sont aussi répandues, c’est qu’elles sont terriblement séductrices et à première vue plausibles. Quelle efficacité et quelle économie de temps ne promettent-elles pas au pédagogue dont le temps est si limité ! Et quelle joie de pouvoir contourner ce pénible obstacle de faits, de dates, de noms et de défi-nitions, qu’il faut péniblement apprendre, pour aussitôt accéder à la joie de com-prendre, de résoudre des problèmes et de penser par soi-même.

En me fondant sur divers écrits de E.D. Hirsch, je voudrais avancer quelques arguments qui suggèrent que ces idées sont un mirage pédagogique d’autant dangereux qu’il est séduisant.

Réfléchir, sans réservoir de connaissances, est-ce possible ?

Pour commencer, et cela semblera un formidable paradoxe, le fait est qu’il faut du savoir pour apprendre et ce n’est que parce qu’on sait déjà beaucoup qu’on peut apprendre. En établissant cela, la psychologie cognitive a confirmé ce que soupçonnait Platon. Ce point est capital. Il implique en pratique qu’une défi-nition qu’on consulte ne peut être comprise que si on connaît déjà une très grande part de ce qu’on y lira et que c’est l’expert, qui sait déjà beaucoup de choses, et non le novice, qui en apprendra plus, plus vite et mieux.

La psychologie cognitive suggère aussi pourquoi il en est ainsi. Nous accé-dons au monde via une sorte de fenêtre à travers laquelle un nombre limité d’items [sic] peut être traité. On estime en fait à sept plus ou moins deux le nombre de ces items que peut contenir ce qu’on appelle notre mémoire de travail : après quoi, nous sommes intellectuellement débordés. Cette limitation est cependant surmontée par un processus qui permet de regrouper des items pour en faire un seul. Or ce qui permet cette synthèse, ce sont justement des savoirs, de « simples faits », mémorisés et connus.

Enfin, lorsque nos habiletés cognitives supérieures peuvent se mettre en œuvre parce que des savoirs préalables existent et ont permis de surmonter les limitations de notre mémoire de travail, ces habiletés sont spécifiques à un domaine du savoir. Ce qui signifie qu’elles ne seront transférables que dans la mesure où, là où on les transpose, ces savoirs qu’on possède soient pertinents.

Ces trois séries d’arguments convergent et ils sont décisifs contre l’idée qu’il existerait des capacités intellectuelles transversales de haut niveau qu’on pourrait exercer et développer pour elles-mêmes. Les experts sont toujours sa-vants et leur expertise, qui dépend de leur savoir, est spécifique à un domaine donné.

Considérez la célèbre expérience... (suite dans le PDF ci-dessous)


Texte au complet




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Belgique — l'école libre Schola Nova

Fondée en 1995, Schola Nova est une école privée non subventionnée, située près de Bruxelles en Belgique.

L'école organise un enseignement primaire et secondaire, destiné aux élèves de 6 à 18 ans.
Le programme qui fait le succès et la réputation de l'école depuis quinze ans est celui des humanités classiques gréco-latines. Ce moyen privilégié d'accès à la culture occidentale a fait ses preuves pendant des siècles.

Selon le site de l'école, son but est de former des jeunes compétents, capables de s'exprimer dans plusieurs langues et de raisonner tant avec le cœur qu'avec l'esprit, ayant une ouverture sur le monde et sur les autres cultures grâce à leur connaissance approfondie de leurs racines et des Anciens.

SSchola Nova est une école privée internationale ne dépendant donc pas de l’État. Elle est basée sur l’article 24 de la constitution belge, garantissant la liberté d'enseignement. Le statut légal des écoles privées est celui de l’enseignement à domicile.

Chaque professeur est maître de sa pédagogie. L’école n’est ni catholique ni anti-catholique. Les élèves reçoivent un cours d’histoire des religions dans le cadre d’un cours de latin parlé ; la question de la foi et de la pratique religieuse est laissée aux parents.

L'école insiste sur le fait que le professeur doit être respecté et valorisé.

Il est intéressant de noter que les élèves de l'école peuvent choisir le diplôme qui couronne leurs études secondaires (en réalité sans doute collégiales pour le Québec quand on sait que le bac français équivaut à un DEC québécois) :

Nombre d'élèves ayant étudié jusqu'en fin du secondaire belge à Schola Nova : 35.

Ces élèves ont réussi entre 15 et 18 ans l'un des examens mentionnés ci-dessous leur permettant de poursuivre leurs études dans les orientations de leur choix.
Soit :

  • l'examen du jury central supérieur général organisé par la Communauté française de Belgique (CESS) (28 % des élèves) ;
  • l'examen d'admission aux études supérieures organisé par les universités (UCL, ULB, ULg ou St Louis) (69 % des élèves) ;
  • l'examen du Baccalauréat International (IB) après deux années de préparation (3 %).

Jusqu’à présent, tous les élèves ayant terminé leurs études à Schola Nova ont réussi l’une ou l’autre épreuve et ont commencé leurs études supérieures à l’âge habituel ou même avant.

Nombre d'anciens élèves ayant déjà terminé leurs études supérieures : 12
Diplômes obtenus : Philologies classique & romane, ingénieur en gestion, bio-ingénieur, ingénieur industriel, licence ou maîtrise en droit, traduction et interprétation (ISTI et Marie Haps), premier prix, maîtrise en musique (conservatoire royal).




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Enseignante d'ECR déguisée en curé...enfin pas dans la Voix de l'Est

La Voix de l'Est a publié deux lettres « spontanées » d'écoliers de Granby (secondaires IV et V) qui défendent le cours ECR. Ce journal de Granby a également consacré un article à une enseignante ECR, Mme Bergeron, professeur de ces deux écoliers.

Un de cet élève de Mme Bergeron s'en prend au cégépien dont nous avions publié ici la lettre. Visiblement, la critique de ce jeune étudiant a porté et le fait qu'il soit jeune et ait pu assister en tant qu'élève au cours ECR et ne pas l'apprécier a piqué à vif certains.

Le cours ECR nous apprend le bien et le mal, sans jamais être jugé...

Une des élèves anonymes de l'enseignante de Granby dit que sa professeur Claire Bergeron « nous donne tellement d'exemples de ce qui n'est pas bien. » Alexandra Courtemanche dans sa lettre publiée dans la Voix de l'Est dit la même chose : « On apprend ce qui est bien ou mal, à s'exprimer librement en disant ce que l'on pense sans jamais être jugé car nous avons tous notre vision du monde. »

On ne sait plus très bien que croire. D'une part, comment est-ce que la professeur peut être neutre comme le programme gouvernemental lui enjoint de l'être et parler du bien et du mal de manière concrète ? En fonction de quelles valeurs, de quelle vision du monde ? L'avortement est-il bien ou mal   ? L'euthanasie ? L'homosexualité ? La liste peut être très longue : le divorce, la polygamie, l'infidélité sexuelle, les manipulations génétiques, l'hédonisme, la sexualité précoce, l'athéisme ?

D'autre part, comment un élève peut-il apprendre le bien et le mal de son professeur sans que jamais ses propos d'élève ne soient jugés tout en admettant que tout se valle (« car nous avons tous notre vision du monde ») ? C'est la quadrature du cercle. Ou peut-être simplement des propos quelque peu contradictoires appris en classe et régurgités pour la galerie...

« La lutte contre l'homophobie »

Alexandre Gemme dit fièrement que les jeunes adolescents débattent « chaque jour » de sujets comme « le suicide assisté » ou « encore l'homophobie ». Quand on sait ce que cache dans les programmes scolaires le slogan gouvernemental de « lutte contre l'homophobie » (la normalisation de l'homosexualité comme choix légitime et égal à l'hétérosexualité), il y a fort à parier à la lumière du vocabulaire intégré par l'élève (« homophobie » et non « homosexualité ») que le cours fut partisan et tenta bien de légitimer l'homosexualité et non pas seulement de limiter, par exemple, les brimades contre les jeunes garçons efféminés.

Halloween et la prêtrise des femmes

La Voix de l'Est trace un portrait complaisant et modéré de l'enseignante d'Alexandre. Ses « élèves [...] disent apprécier beaucoup le cours ».

Pourtant, sous le couvert de l'anonymat, une personne nous a déclaré ne pas avoir été heureuse de voir cette enseignante « neutre » se déguiser en curé lors de l'Halloween pour ensuite se lancer devant sa classe captive dans un sermon sur pourquoi les femmes devraient pouvoir devenir prêtres... On peut faire mieux en termes de neutralité...

« Notre belle jeunesse », « nos enfants », « au nom de tous et chacun », « obligatoire »

Il y a quelque chose de missionnaire dans le ton des lettres des élèves. Sur un ton désinvolte, des jeunes de 15 ou 16 ans apostrophent leurs aînés et répètent ce qu'ils ont appris en classe : «  L'ouverture d'esprit, ça vous dit quelque chose ? »

On s'étonne aussi de lire un très jeune adolescent parler « de laisser une planète propre à nos enfants » alors qu'il vient à peine peut-être de quitter cette enfance et puis d'évoquer  « notre belle jeunesse ». Ce sont là des tournures que l'on associe plus à un adulte (cet élève serait-il atteint de psittacisme et reproduit-il les paroles de son enseignante ?) ou à un jeune bien peu modeste (pourquoi les gens qui pensent comme lui formeraient-ils « notre » belle jeunesse ?)

Alexandra Courtemanche pour sa part affirme « Je suis pour ce cours et je resterai toujours en faveur. » Au-delà de la formulation étrange (rester en faveur sans « de » signifie « continuer à plaire »), on admirera l'assurance de la jeune fille, sa foi. Comment peut-elle affirmer ce qu'elle pensera dans 20 ou 30 ans quand elle réfléchira avec plus de détachement au cours qu'elle a été obligée de suivre ?

Alexandra dit aussi parler « au nom de tous et chacun ». (On dira plus correctement en français « tout un chacun ».) Il est vrai que certains détracteurs du cours reprochent à ce programme de promouvoir l'esprit grégaire. Dès le primaire, les élèves participent en effet à des exercices de délibération où ils doivent examiner des questions éthiques « pour arriver à une décision commune ». C'est une critique que l'on fait aussi à toute la réforme pédagogique qui privilégie nettement le travail d'équipe au travail individuel (tout en affirmant vouloir développer l'autonomie éthique des élèves). Alexandra n'a sans doute jamais parlé avecles enfants de M. Alec Saint-Jean qui devaient subir les sarcasmes de toute une classe unanime. Comment savoir vraiment ce que pensent les élèves muets dans la classe d'Alexandra ? Oseraient-ils vraiment contredire publiquement leur professeur qui décide de leurs notes alors qu'ils n'ont entendu qu'un son de cloche de la part d'une personne en autorité ? N'est-il pas plus sage qu'Alexandra parle d'abord en son nom avant de s'arroger l'opinion des absents dans ce débat ?

Sûr d'elle-même, Alexandra n'hésite pas à déclarer que le cours doit être obligatoire. Voilà une jeune étudiante tolérante comme les zélotes du programme ECR les aiment bien : elle ne peut admettre de choix en la matière.

Invitation acceptée, mais qu'en dira la direction ?

Alexandre Gemme qui n'a sans doute jamais suivi d'autres cours de formation morale et religieuse à l'école et probablement jamais lu le programme officiel ECR (il est illisible) n'hésite pas à dire sur un ton impatient : « Alors aux adultes qui n'ont jamais suivi ce cours et qui s'obstinent quand même à dire qu'il vise à nous convertir à d'autres religions, j'aimerais les inviter à ne venir passer ne serait-ce qu'un cours de Mme Bergeron et à réfléchir à tout ce que j'ai écrit. »

On appréciera l'humilité du ton.

Étrangement, Alexandra Courtemanche dit a peu près la même chose dans les mêmes termes. Pure coïncidence à n'en pas douter. La lettre signée du nom de cette jeune fille affirme ainsi : « Les élèves ne sont pas influencés par le simple fait d'apprendre la culture religieuse des gens [...] Je vous l'écris pour vous faire comprendre qu'on [qui?] en a assez d'entendre critiquer notre [?] cours, lorsque vous n'avez jamais mis un seul pied dans nos classes pour y assister. Alors je vous invite à faire des démarches, allez assister à un cours ECR. »

D'une part, de nombreux parents ne craignent pas tant que leurs enfants se convertissent, par exemple, au judaïsme parce qu'ils apprendront quelques faits sur cette religion, mais plutôt que, par l'étude de 6 ou 7 religions toutes présentées superficiellement et comme d'une égale valeur pendant 11 ans, ils en viennent à considérer que ces religions se valent toutes, ce qui peut mener, notamment, à un syncrétisme religieux à la Hans Küng ou un relativisme agnostique. C'était, après tout, le but visé par Jean-Pierre Proulx quand il a proposé ce cours à la page 90 de son fameux rapport : « d’initier l’élève aux différentes cultures et aux différentes religions et de les présenter comme des manifestations de l’esprit créateur humain, tout aussi légitimes que la sienne ».

D'autre part, nous avons appris qu'un de nos lecteurs a accepté l'invitation du jeune Alexandre Gemme et de la jeune Alexandra Courtemanche et a demandé à pouvoir assister à plusieurs cours de Mme Bergeron et d'autres professeur d'éthique. Nous attendons de savoir si les directions des écoles concernées sont prêtes à accepter qu'un adulte soit enfin éduqué correctement par « notre belle jeunesse » si sûre d'elle-même.



Mise à jour

Notre lecteur nous informe qu'après de multiples tentatives pour joindre l'enseignante d'ECR, Claire Bergeron, pour accepter l'invitation des élèves à ce qu'un adulte opposé à « leur » cours y assiste. Mme Bergeron a refusé que ce monsieur y participe prétextant une vague opposition des parents. Selon ce lecteur outré : « dans le journal, cette professeur se donne le beau rôle, fait tancer les adultes qui n'apprécient pas ce cours par ses élèves influençables et obéissants, puis elle refuse l'invitation en privé. Est-ce là un comportement digne ? »