jeudi 31 août 2023

Balarama Holness affirme que l'immigration constitue le réservoir électoral croissant des fédéralistes

Balarama Holness (ci-contre) songe à se présenter comme chef du Parti libéral du Québec (PLQ), le parti ouvertement fédéraliste. 

 « En ce moment, dans une course à la chefferie, ça serait un bon match. Les gens du parti veulent quelqu’un qui va amener du changement. La réflexion est en cours […] Si l’autre sondage sort sans le nom de Marc et que j’ai un quart, là, ma réflexion sera sérieuse », a-t-il affirmé.

Le potentiel candidat admet toutefois que ses positions politiques ne reflètent pas l’intérêt des régions. Puis, il n’a aucun appui dans le caucus, dit-il.

« Une candidature comme la mienne serait très forte à Montréal » et « auprès des membres », dit-il.  

Néanmoins, il estime que le PLQ aura besoin « de deux décennies pour se renforcer en région, le temps qu’il y ait des changements démographiques. »

Il semble que M. Holness soit un adepte de la théorie du Grand Remplacement. 

Selon Wikipédia, « le grand remplacement est une théorie complotiste d'extrême droite introduite [qui] affirme qu'il existerait [...] un processus de substitution de la population française et européenne par une population non européenne [...]. Ce processus conduirait à un changement de civilisation soutenu, voire organisé, par une élite politique, intellectuelle et médiatique qualifiée de "remplaciste" ».

Source : La Presse

En Israël, le taux de fécondité en 2022 était de 3 enfants par femme (1,49 au Québec; 1,80 en France; 1,39 en Suisse et 1,53 en Belgique)

Si l’on peut être tenté de pointer du doigt les juifs religieux ou les musulmans israéliens pour expliquer le taux de fécondité élevé d’Israël, ce n’est qu’une partie de l’explication.

Les ultra-orthodoxes israéliens ont effectivement un taux de fécondité extrêmement élevé — plus de 6,6 enfants par femme — mais il est en légère baisse. Et ils ne représentent qu’environ 13 % de la population. Dans le même temps, le taux de fécondité des Arabes est tombé à trois, alors qu’il était incroyablement élevé en 1960 (9,3 enfants/femme).

En réalité, le taux de natalité élevé des couples juifs traditionnels (religieux et conservateurs, mais pas ultra-orthodoxes) et des « laïques » en Israël, qui constituent la majeure partie du pays explique également la bonne santé démographique d’Israël. Les juifs pratiquants (religieux, mais pas ultra-orthodoxes) ont en moyenne quatre enfants, tandis que les femmes laïques en ont en moyenne deux.

Lorsqu’on les interroge, les Israéliens déclarent que la taille idéale de la famille est de trois enfants, alors qu’en Amérique du Nord, en Europe et en Australie, la taille idéale de la famille est considérée comme étant de deux enfants. 

« Quiconque vit ici est censé avoir des enfants », a déclaré Sigal Gooldin, sociologue à l’Université hébraïque, au New York Times. « Dans une conversation informelle, on vous demandera combien d’enfants vous avez et si vous répondez un, les gens vous demanderont pourquoi un seul, et si vous répondez deux, pourquoi seulement deux ? »


La raison pour laquelle les couples modérément religieux et non religieux choisissent de procréer si souvent est un mystère pour la plupart des démographes, car elle va à l’encontre des tendances observées en Europe, en Amérique du Nord et en Asie.

Les Israéliennes travaillent pratiquement au même rythme qu’au Canada, avec un taux de participation à la population active de 59 %, contre 61 % au Canada. Mais leur congé de maternité est beaucoup plus court : environ trois mois contre 18 au Canada. Comme le reste de l’Occident, elles disposent d’un solide filet de sécurité sociale, avec des garderies subventionnées et des soins de santé publics. Mais ils partagent aussi certaines des difficultés rencontrées des pays à faible natalité — les prix des logements et dans les supermarchés, notamment, sont extrêmement élevés.

Le prix des nouveaux logements atteints des sommets en Israël: 5701 €/m²

Le véritable secret des taux de fécondité israéliens semble être d’ordre culturel. La famille est au centre absolu de la vie israélienne. Se marier et avoir des enfants est la valeur culturelle la plus importante. (Toute personne juive en Israël ou dans la diaspora témoignera de l’immense pression exercée sur elle pour qu’elle se marie — c’est comme si une grande tragédie s’abattait si vous aviez le malheur de rester célibataire après 26 ans).

Le traumatisme générationnel de l’Holocauste explique sans doute en partie cette attitude. La population juive mondiale est toujours inférieure à ce qu’elle était avant la Seconde Guerre mondiale et les Israéliens ont le sentiment qu’ils ont le devoir de reconstituer ce nombre.

Mais surtout, les enfants sont considérés comme une bénédiction et non comme un fardeau. Selon Danielle Kubes dans le National Post, « j’entends souvent mes amis canadiens se plaindre du coût des enfants et de l’impact que l’augmentation du nombre d’humains aura sur le changement climatique, je n’ai jamais entendu un Israélien faire de même. »

Au Canada, un millénarial (né entre le début des années 1980 et la fin des années 1990) sur cinq déclare retarder activement la naissance d’enfants parce qu’il estime ne pas avoir les moyens de fonder une famille, selon une enquête réalisée en 2018 par le cabinet de conseil BDO Canada. Mais les difficultés économiques n’ont pas tendance à empêcher les Israéliens d’avoir des enfants. Ajouter un lit superposé à un appartement de deux chambres n’est pas une grosse affaire. On se dit que l’argent viendra.

« Nous avons certainement besoin de plus d’argent et nos dépenses augmentent », a déclaré Ron Ganot, un Israélien qui vend des voitures d’enfant, au Christian Science Monitor.  « Mais je veux une famille nombreuse et le coût de la vie ne nous arrêtera pas. » [Israël arrivait en tête du palmarès de la cherté de la vie en 2022 (38% au-dessus de la moyenne de l'OCDE, devant la Suisse à 37%, le Canada à 17% au-dessus de la moyenne, la Belgique 5 % en dessous et la France à 8 % en dessous.]

Pas de bombe à retardement démographique arabe

 

  •  Le nombre de naissances juives israéliennes en 2022 (137 566) était 71 % plus élevé qu’en 1995 (80 400), tandis que le nombre de naissances arabes israéliennes en 2022 (43 417) était 19 % plus élevé qu’en 1995 (36 500), comme l’indique le Bulletin mensuel de février 2023 du Bureau central des statistiques d’Israël (ICBS).
  • En 2022, les naissances juives (137 566) représentaient 76 % du total des naissances (180 983), contre 69 % en 1995.
  • Le taux de fécondité (nombre de naissances par femme) des femmes juives laïques israéliennes a eu tendance à augmenter au cours des 25 dernières années.
  • Les femmes juives israéliennes — qui sont les deuxièmes après l’Islande en termes de participation à la main-d’œuvre — sont les seules à connaître une corrélation directe entre l’augmentation du taux de fécondité, d’une part, et l’augmentation de l’urbanisation, de l’éducation, des revenus, de l’intégration sur le marché du travail et de l’âge du mariage, d’autre part.
  • En 1969, le taux de fécondité arabe en Israël était supérieur de six naissances au taux juif. En 2015, les deux taux de fécondité étaient de 3,13 naissances par femme, reflétant l’occidentalisation spectaculaire de la démographie arabe, déclenchée par l’amélioration du statut social des femmes, l’âge du mariage plus élevé (24 ans), une plus grande participation à la vie active et une période de reproduction plus courte (25-45 ans au lieu de 16-55 ans). Selon le Bulletin mensuel des statistiques d’Israël, en 2021, le taux de fécondité juif était de 3,13 (et de 3,27 avec un père juif né en Israël), tandis que le taux de fécondité arabe global était de 2,85 et le taux de fécondité musulman de 3 (taux de fécondité arabe en Judée et en Samarie : 3,02). Le taux de fécondité moyen de l’OCDE est de 1,61 naissance par femme.
  • Selon Yoram Ettinger, la croissance unique du taux de fécondité juif en Israël est attribuable à l’optimisme, au patriotisme, à l’attachement aux racines juives, à la solidarité communautaire, à une mentalité de pionnier et à une diminution du nombre d’avortements (34 % depuis 1990).
  • En 2022, il y a eu 45 271 décès de juifs israéliens, contre 31 575 en 1996, soit une augmentation de 43 %, alors que la taille de la population a presque doublé au cours de la même période. Cette évolution reflète le rajeunissement de la société. En 2022, il y a eu 6 314 décès d’Arabes israéliens, contre 3 089 en 1996, soit une augmentation de 104 %, ce qui reflète une société de plus en plus âgée.
  • En 2021, l’espérance de vie des hommes israéliens était de 80,5 et celle des femmes israéliennes de 84,6. L’espérance de vie des Arabes israéliens, bien que plus faible (78 pour les hommes et 82 pour les femmes), est plus élevée que celle des Américains (73,2 pour les hommes et 79,1 pour les femmes). L’espérance de vie des Arabes de Judée et de Samarie est de 74 ans pour les hommes et de 78 ans pour les femmes.
  • En 2022, le nombre de décès de juifs israéliens représentait 33 % des naissances juives, contre 40 % en 1995, ce qui est symptomatique d’une société qui rajeunit. En 2022, le nombre de décès d’Arabes israéliens représentait 14,5 % des naissances arabes, contre 8 % en 1995, ce qui est symptomatique d’une société qui vieillit.
  • Depuis 1995, la tendance démographique a élargi le segment jeune de la population juive d’Israël, ce qui constitue une base solide pour l’amélioration de la démographie et de l’économie.
  • La tendance démographique juive positive est encore renforcée par l’immigration nette d’Israël, qui consiste en une alya (immigration juive) annuelle, renforcée par une émigration en baisse : de 14 200 émigrants nets en 1990 à 10 800 en 2020 (alors que la population a doublé), ce qui est plus élevé que les 7 000 émigrants nets annuels moyens de ces dernières années. (Les chiffres de 2020 peuvent refléter l’impact de COVID-19 sur les voyages aériens).

 

Poids des « pieux », des ultra-orthodoxes

Le taux de croissance annuel de la population ultra-orthodoxe d’Israël, 4 %, est supérieur à tout autre groupe de population dans les pays développés. Ce taux de croissance unique repose sur des taux de fécondité élevés, des niveaux de vie et des soins médicaux modernes et un jeune âge au premier mariage.
 
La population ultra-orthodoxe d’Israël est très jeune, avec près de 60 % de ses membres âgés de moins de 20 ans, contre 31 % de la population générale. En 2021, la population ultra-orthodoxe s’élevait à environ 1 226 000, contre quelque 750 000 en 2009, et constitue actuellement 12,9 % de la population totale. Selon les prévisions du Bureau central des statistiques, sa taille relative passera à 16 % en 2030 et comptera deux millions de personnes d’ici 2033. Il y a eu une légère baisse des taux de fécondité des ultra-orthodoxes au cours de la dernière décennie et demie, passant de 7,5 naissances vivantes par femme entre 2003 et 2005 à 6,9 entre 2017 et 2019. Parmi les autres femmes juives israéliennes, le taux de fécondité moyen est de 4,3. pour les femmes religieuses, 3,0 pour les femmes traditionnelles religieuses, 2,4 pour les femmes traditionnelles non religieuses et 2,1 pour les femmes laïques.

 

mercredi 30 août 2023

Québec — Un enseignant en haut de l'échelle salariale gagne entre 92 000 et 96 000 $ /an (2023)

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Canada — Un million de résidents non permanents de plus que les chiffres officiels

Benjamin Tal, économiste en chef adjoint de aux Marchés des capitaux CIBC, a déclaré lors de la réunion du gouvernement libéral à Charlottetown que le sous-dénombrement dans les statistiques officielles signifie que le Canada sous-estime le nombre de nouveaux logements nécessaires pour répondre aux besoins croissants du pays en matière de logement. C'est ce qu'affirme le Globe and Mail en ce jour.

Benjamin Tal, économiste en chef adjoint aux Marchés des capitaux CIBC, à Toronto, le 7 juin 2019

Un économiste de renom a averti les ministres fédéraux, lors de leur retraite ministérielle la semaine dernière, qu’il y a environ un million de résidents non permanents de plus au Canada, y compris les étudiants étrangers, que ne le suggèrent les estimations du gouvernement.

Cette mise en garde a été formulée par Benjamin Tal, économiste en chef adjoint chez Marchés des capitaux CIBC. Il a déclaré à l’assemblée du gouvernement libéral à Charlottetown que le sous-dénombrement dans les statistiques officielles signifie que le Canada sous-estime le nombre de nouveaux logements nécessaires pour répondre aux besoins croissants du pays en matière de logement.

M. Tal a déclaré dans une interview que le gouvernement estimait à environ un million le nombre de résidents non permanents dans le pays en 2021. Or, son analyse a révélé que ce nombre était plus proche de deux millions. La principale raison de cet écart est que le gouvernement ne compte pas les personnes qui restent dans le pays après l’expiration de leur visa.

Selon M. Tal, Statistique Canada part du principe que les détenteurs de visas de résident temporaire, y compris les étudiants étrangers, quittent le pays 30 jours après l’expiration de leur visa. « Leur logiciel, leur codage, suppose que vous avez quitté le pays 30 jours après l’expiration de votre visa, bien que vous n’ayez pas quitté le pays », a-t-il déclaré.

Il a ajouté que la majorité des résidents temporaires ne quittent pas le pays dans ce délai et que nombre d’entre eux demandent à prolonger leur séjour au Canada.

Dans un rapport sur ses conclusions, publié mercredi, M. Tal déclare que « l’implication pratique de ce sous-dénombrement est que la crise de l’accessibilité au logement à laquelle le Canada est confronté est en réalité plus grave que ce que l’on croit, et qu’elle appelle une action politique encore plus urgente et agressive ».

Le gouvernement fédéral a porté ses objectifs en matière d’immigration à des niveaux historiquement élevés. Il vise désormais à admettre environ 500 000 nouveaux résidents permanents cette année et les deux années suivantes. Mais ces chiffres ne tiennent pas compte des étudiants étrangers titulaires d’un visa ou d’un permis de travail temporaire.

Il n’existe actuellement aucune limite fédérale au nombre de visas d’étudiants délivrés chaque année. Lors du conseil des ministres de la semaine dernière, le ministre du Logement, Sean Fraser, a déclaré à la presse que le gouvernement devrait envisager de plafonner le programme, qui, selon lui, a connu une « croissance explosive » et a exercé une pression sur les marchés du logement.

Le coût élevé de la location et de l’achat d’un logement est devenu une question politique délicate. Les conservateurs fédéraux ont fait valoir que les libéraux du Premier ministre Justin Trudeau devaient faire davantage pour remédier à la pénurie de logements.

M. Tal a déclaré au Globe and Mail que la méthode de Statistique Canada consistant à supposer que les détenteurs de visas expirés quittent le pays après 30 jours ne représente qu’environ 750 000 des quelque millions de résidents non permanents qui, selon lui, ne figurent pas dans les chiffres officiels.

Par ailleurs, 250 000 autres personnes — pour la plupart des étudiants étrangers — ne figurent pas dans les données de recensement. Les formulaires de recensement les plus récents indiquaient que les étudiants devaient fournir leurs informations s’ils vivaient dans leur résidence principale. Mais on leur a dit de ne pas remplir le formulaire de recensement s’ils retournaient vivre chez leurs parents pendant l’année.

M. Tal a déclaré que le système était déroutant pour les étudiants et que tous ne remplissaient pas le questionnaire, dans certains cas parce qu’ils pensaient que leur résidence principale se trouvait à l’étranger.

« C’est pourquoi même Statistique Canada estime que le recensement continue de sous-estimer les résidents non permanents titulaires d’un visa valide au Canada », a-t-il déclaré, en utilisant l’abréviation de « résident non permanent ».

Selon lui, les lacunes du recensement ont des répercussions sur la politique du logement, car la Société canadienne d’hypothèques et de logement, la société d’État fédérale responsable du logement, utilise les données du recensement pour établir ses prévisions, sur lesquelles s’appuient largement les planificateurs dans tout le Canada.

« Si votre point de départ est trop bas, vos prévisions seront beaucoup trop basses, ce qui se traduira par un processus de planification sous-optimal », a déclaré M. Tal.

Le rapport qu’il a rédigé sur les résultats de l’étude précise que les chiffres sont prudents.

Un document d’information rédigé par Henry Lotin, fondateur de Integrative Trade and Economics et ancien économiste fédéral, est d’accord avec les conclusions de M. Tal. Il affirme que « plus d’un million de personnes manquent dans la population officielle, en grande partie à cause des détenteurs de visas expirés qui restent au Canada dans l’attente d’un nouveau visa ».

Statistique Canada devrait modifier ses méthodes de comptage afin d’inclure les détenteurs de visas expirés, selon le document de M. Lotin.

Humour — L'enseignement en temps de pénuries

Humour — La rentrée scolaire des enseignants


mardi 29 août 2023

Humour — La rentrée scolaire


L'échec en matière de drogues : L’« approvisionnement sûr » du gouvernement libéral alimente une nouvelle crise des opioïdes

Les partisans d’un « approvisionnement plus sûr » veulent vous faire croire que leurs solutions à la crise de la toxicomanie au Canada fonctionnent. Ils affirment qu’en fournissant aux consommateurs de drogues des substituts gratuits et financés par le gouvernement pour des substances illicites potentiellement contaminées, les surdoses peuvent être réduites et des vies peuvent être sauvées.


Le Canada est aux prises avec une crise des opioïdes qui a tué plus de 35 000 personnes depuis 2016. Alors, pourquoi ne pas soutenir cette solution ? Eh bien, il s’avère qu’une grande partie de ce qui a été dit au sujet de l’approvisionnement plus sûr est exagérée ou simplement fausse.

Selon un certain nombre de médecins spécialistes de la toxicomanie, une grande partie des médicaments censément plus sûrs distribués gratuitement dans le cadre de programmes financés par le gouvernement ne sont pas consommés par les personnes auxquelles ils sont destinés. Au contraire, ces médicaments sont vendus sur le marché noir à des prix défiant toute concurrence, généralement pour financer l’achat de fentanyl illicite. Les programmes d’approvisionnement plus sûr n’endiguent pas le marché du fentanyl, ils le subventionnent.

Les médecins signalent également qu’en raison de cette revente sur le marché noir (officiellement appelée « détournement »), les communautés à travers le Canada ont été inondées d’opioïdes bon marché. Selon certains des experts avec lesquels je me suis entretenu, cette situation a entraîné une baisse du prix de l’hydromorphone (le principal opioïde distribué dans les sites d’approvisionnement plus sûr) estimée à 70-95 % dans les villes dotées de programmes d’approvisionnement plus sûr.

Les consommateurs de drogues ont déclaré aux médecins spécialistes de la toxicomanie que, tel un geyser, l’hydromorphone détournée s’écoule de ces villes vers d’autres marchés où les opioïdes sont plus rares et se vendent à des prix plus élevés. L’hydromorphone serait revendue dans tout le Canada et même dans d’autres pays, ce qui remplit les poches des trafiquants de drogue et des gangs. 


Selon une étude de 2017 publiée dans Psychopharmacology, une revue scientifique à comité de lecture, l’hydromorphone a « des effets subjectifs et physiologiques similaires à ceux de l’héroïne », mais est « plus puissante que l’héroïne ». Une autre étude de 1990, publiée dans The Journal of the International Association for the Study of Pain, estime que l’hydromorphone est en fait cinq fois plus puissante que l’héroïne.

L’augmentation spectaculaire de la disponibilité et de l’accessibilité de l’hydromorphone a eu des conséquences négatives. Les médecins signalent une nouvelle vague de dépendances aux opioïdes, particulièrement prononcée chez les jeunes.

Les programmes de traitement axés sur le rétablissement ont également été dévastés. Les médecins spécialistes de la toxicomanie signalent que de nombreux patients qui s’épanouissaient dans leur rétablissement rechutent aujourd’hui. Les patients abandonnent le traitement pour s’inscrire à des programmes d’approvisionnement plus sûrs, ou sont ramenés à la dépendance par l’hydromorphone abondante et bon marché achetée dans la rue.

Lorsque les toxicomanes consomment effectivement leur approvisionnement plus sûr, les résultats peuvent malgré tout être désastreux. Plusieurs personnes interrogées ont confirmé que les comprimés d’hydromorphone, conçus pour être consommés par voie orale, sont souvent écrasés pour être injectés par voie intraveineuse, ce qui peut entraîner des infections atroces et défigurantes ayant paralysé certains patients.

 

Après examen des principaux documents gouvernementaux et avoir pris contact avec Santé Canada et les ministères concernés en Ontario et en Colombie-Britannique, il semble évident que les décideurs politiques canadiens sont conscients de bon nombre de ces problèmes, mais qu’ils ne sont pas intéressés à les résoudre ou qu’ils tentent activement d’empêcher le public de prendre conscience du désastre qu’a été la sécurisation de l’approvisionnement.

lundi 28 août 2023

900 000 étudiants internationaux au Canada cette année...

Marc Miller (ci-dessous) affirme que le Canada accueillera environ 900 000 étudiants étrangers cette année.

Marc Miller en chambre (on notera le nom de sa circonscription à rallonge sous son nom)


Le ministre de l’Immigration, Marc Miller, a refusé de s’engager sur une idée lancée par le gouvernement en début de semaine passée, à savoir plafonner le nombre d’étudiants étrangers entrant au Canada chaque année.

Le ministre de l’Immigration, Marc Miller, affirme que l’inquiétude suscitée par la montée en flèche du nombre d’étudiants étrangers entrant au Canada ne concerne pas seulement le logement, mais aussi la confiance des Canadiens dans l’« intégrité » du système d’immigration lui-même.

Le Canada est en voie d’accueillir environ 900 000 étudiants étrangers cette année, a déclaré M. Miller dans une entrevue diffusée samedi à l’émission The House, sur les ondes de la CBC. C’est plus que jamais dans l’histoire du Canada et environ le triple du nombre d’étudiants qui sont entrés dans le pays il y a dix ans.

L’augmentation rapide du nombre d’étudiants étrangers a attiré l’attention cette semaine lorsque le nouveau ministre du Logement, Sean Fraser, a lancé l’idée d’un éventuel plafonnement du nombre d’étudiants que le Canada accueille.

M. Fraser a présenté le plafonnement du nombre d’étudiants étrangers comme « l’une des options que nous devrions envisager » lors d’une retraite du cabinet au début de la semaine à l’Île-du-Prince-Édouard.

M. Miller, qui a succédé à M. Fraser à la tête d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, a déclaré à l’invité Evan Dyer que le nombre croissant d’étudiants constituait une préoccupation pour le logement, bien qu’il soit important, selon lui, de ne pas surestimer ce défi.

« Il s’agit d’un écosystème très lucratif au Canada, qui a des effets pervers : certaines fraudes dans le système, certaines personnes profitant de ce qui est considéré comme une entrée détournée au Canada, mais aussi des pressions dans un certain nombre de domaines, dont celui du logement », a-t-il déclaré.

Mais M. Miller n’a pas voulu s’engager sur l’idée d’un plafond absolu pour le nombre d’étudiants entrant au Canada.

« L’instauration d’un plafond absolu, qui a fait couler beaucoup d’encre ces derniers jours, n’est pas la seule solution à ce problème », a-t-il déclaré. « L’essentiel est d’essayer de comprendre quel est le problème que nous essayons de résoudre. Il ne s’agit pas uniquement de logement, mais plutôt de l’intégrité du système qui s’est développé ces dernières années.

M. Miller a déclaré qu’un certain nombre d’ » acteurs illégitimes » tentaient d’exploiter le système, ce qui finissait par avoir un effet négatif sur les personnes qui essayaient de venir au Canada pour des raisons légitimes. M. Miller a fait référence à un cas très médiatisé, le mois dernier, d’un étudiant étranger retrouvé dormant sous un pont.

Il a déclaré qu’il ne s’impliquerait pas dans la « désignation et la dénonciation », mais qu’il se concentrait sur certains établissements d’enseignement supérieur privés. Il a ajouté qu’il faudrait renforcer le système pour s’assurer que les établissements disposent effectivement de places et de logements convenables pour les personnes admises. M. Miller a également déclaré qu’une collaboration plus étroite avec les provinces était essentielle pour résoudre le problème.

Les grandes universités s’opposent au plafonnement (c’est très lucratif et elles ne paient pas les pots cassés)

Dans une déclaration à la Chambre, la National Association of Career Colleges a déclaré que « les collèges professionnels réglementés offrent une formation efficace, de haute qualité et axée sur l’industrie aux étudiants nationaux et internationaux afin de produire les travailleurs qualifiés dont le Canada a le plus grand besoin ». Cela inclut les travailleurs des métiers de la construction qui construisent des logements.

Philip Landon, président-directeur général par intérim d’Universités Canada, s’est également opposé à l’idée d’un plafond, cherchant à positionner les grandes universités comme faisant partie de la solution au problème.
 
Poilièvre pour la tarte aux pommes
 
Le logement est devenu un enjeu politique majeur au niveau fédéral, l’opposition conservatrice s’en prenant au gouvernement alors que les Canadiens sont aux prises avec le coût de la vie.

« En tant que conservateurs [sic], nous veillerons à ce que les étudiants étrangers aient un logement, des soins de santé et, lorsqu’ils le souhaitent, un emploi, afin que nous puissions revenir à un système qui soutienne nos universités, attire les personnes les plus brillantes du monde, contribue à la démographie de notre pays, mais ne laisse pas les gens vivre dans la misère », a déclaré le chef de file des conservateurs, Pierre Poilièvre.

Lors de son entretien avec M. Dyer, M. Miller a déclaré que l’objectif de son ministère était de veiller à ce que le système fonctionne correctement pour les personnes qui tentent de venir au Canada.

« Ce que nous ne voulons pas voir, ce sont des espoirs déçus sur la base d’une fausse promesse », a déclaré M. Miller.

Source : CBC 

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dimanche 27 août 2023

Au lieu du seuil de 50 k nouveaux venus au Québec, il y en a eu 155 k sans compter les « réfugiés » en très forte hausse

Les enjeux liés à l’immigration au Canada et au Québec n’ont pas fini de faire la manchette. Au Québec, l’an dernier, en 2022, selon l’Institut de la statistique du Québec, il y a eu 80 700 naissances et 78 400 décès.  [...]


Quand on considère le problème aigu de la pénurie de logements, le manque de places dans les services de garde et l’état précaire de notre système de santé et de services sociaux, sans parler des défis engendrés par une croissance de ce type dans le dossier de l’avenir du français au Québec[, il n'est pas évident qu'une forte immigration soit un bienfait]

Pour réfléchir rigoureusement et sereinement à cette question, Anne Michèle Meggs est la personne toute désignée. D’origine ontarienne, Meggs est diplômée en études canadiennes et vit en français, à Montréal, depuis des décennies. Elle a dirigé le cabinet du ministre ontarien des Affaires francophones avant de travailler comme directrice de la planification au ministère de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration du Québec.


Dans L’immigration au Québec. Comment on peut faire mieux (Renouveau québécois, 2023, 204 pages), un recueil de chroniques d’abord parues dans L’aut’journal depuis 2019, elle montre avec efficacité que le dossier de l’immigration au Québec est complexe, souffre d’une gestion désordonnée et charrie son lot de mythes.

Meggs ne s’oppose pas à l’immigration. Cette dernière, note-t-elle, « fait partie de l’histoire de l’humanité » et n’a rien de condamnable. On migre pour avoir une meilleure qualité de vie, pour fuir les conflits, la persécution ou les catastrophes naturelles, et ça se comprend. « L’immigration est un projet foncièrement humain », écrit Meggs.

[...]

D’abord, les idées fausses entretenues au sujet de l’immigration nuisent à la rigueur du débat. Non, redit Meggs en citant des experts, l’immigration n’est pas une solution à la pénurie de main-d’œuvre et au vieillissement de la population. Non, ajoute-t-elle, le déclin du français n’est pas d’abord le résultat de l’immigration, mais celui du faible taux de natalité des francophones, de leur anglicisation et de leurs comportements linguistiques : engouement pour la culture et pour les cégeps anglophones, indifférence à l’égard du statut du français, exigence de l’anglais en entreprise, etc.

[Comme le souligne Frédéric Lacroix, l'immigration est bel et bien une bonne partie du problème, mais pas la seule, la faible démographie des francophones, la faible assimilation au français, notamment, en étant d'autres:
 
]

« La société d’accueil, écrit Meggs, a le devoir de créer un espace propice à l’intégration en français [des personnes immigrantes]. » Elle est souvent loin d’être à la hauteur de cette mission. Les efforts de francisation déployés par le gouvernement du Québec, notamment en milieu de travail, ne méritent pas non plus la note de passage.

Le principal obstacle à une bonne compréhension du dossier de l’immigration au Québec est toutefois le tripotage des chiffres. Alors qu’on se demande si notre capacité d’accueil — une notion qui n’a jamais été rigoureusement définie — est de 30 000 ou de 70 000 immigrants, le Québec en accueillait, en 2022, 155 400, c’est-à-dire 68 700 personnes admises à la résidence permanente et 86 700 personnes détentrices d’un permis de séjour temporaire (étudiants étrangers et travailleurs), cela sans compter les demandeurs d’asile.

Tout le débat, dans ces conditions, est faussé puisque les temporaires, plus nombreux que les permanents, échappent à la réflexion sur les seuils et aux efforts d’intégration en français qui devraient être déployés par le gouvernement du Québec.

En vertu de l’Accord Canada-Québec sur l’immigration signé en 1991, explique Meggs, le Québec pourrait exiger que les immigrants temporaires soient inclus dans le calcul annuel du nombre d’immigrants qu’il veut recevoir. Il pourrait aussi ajouter des conditions linguistiques à cet accueil, mais il ne le fait pas, sauf quand il déplore, mollement, le refus fédéral des demandes de permis d’études pour de jeunes Africains francophones.

Pour avoir une politique d’immigration efficace et humaine, le Québec devrait pouvoir gérer seul l’ensemble du dossier, c’est-à-dire être indépendant, note justement Meggs. En attendant, Justin Trudeau et François Legault disent et font un peu n’importe quoi.

Source : Le Devoir

Les demandeurs d’asile liés à une hausse record des assistés sociaux au Québec

En un an, le nombre de demandeurs d’asile prestataires de l’aide sociale au Québec est passé de 17 544 à 40 142. 

Le nombre de ménages prestataires de l’aide sociale au Québec a enregistré cette année sa plus forte augmentation en plus de 25 ans. Une hausse en grande partie provoquée par l’afflux record de demandeurs d’asile dans la province et aux délais d’Ottawa pour leur délivrer des permis de travail.

 


Cet afflux de réfugiés au pays entraîne des dépenses supplémentaires pour le gouvernement du Québec. Uniquement en prestations du Programme d’aide sociale, qui s’élèvent en moyenne à 850 $ par mois, la prise en charge des demandeurs d’asile a coûté environ 35 millions de dollars en juin. [Il y a d'autres frais à ajouter : ceux liés par exemple à la santé ou à la scolarité des enfants.]

Au Canada, l’accueil des demandeurs d’asile relève d’abord de la responsabilité du gouvernement fédéral. C’est la raison pour laquelle depuis 2017, Québec demande à Ottawa le remboursement de l’ensemble des dépenses encourues pour leur prise en charge.

Canada — immigration de masse ou État-Providence, il faut choisir

Alors que le cabinet fédéral récemment remanié se réunissait il y a deux semaines à l’Île-du-Prince-Édouard, le gouvernement libéral du Canada s’est retrouvé pris dans un terrible dilemme : essayer de concilier ses objectifs « ambitieux » en matière d’immigration avec ses efforts pour maîtriser la crise nationale du logement abordable. En effet, même les plus hauts responsables du parti semblent ignorer délibérément la corrélation évidente entre la croissance démographique record du Canada, alimentée par l’immigration, et la grave pénurie de logements abordables. Ils refusent également de reconnaître le fait mathématique que l’arrivée de plus d’un demi-million de nouveaux immigrants au Canada chaque année ne fera qu’aggraver le problème.

Prenons, par exemple, la logique circulaire proposée par le nouveau ministre de l’Immigration Marc Miller il y a deux semaines. Répondant à une question sur l’accessibilité du logement, M. Miller a déclaré : Le gouvernement fédéral rend le logement plus abordable :
Le gouvernement fédéral rend le logement plus abordable et fait venir les travailleurs qualifiés nécessaires pour construire plus de maisons. Sans ces travailleurs qualifiés venant de l’étranger, nous ne pouvons absolument pas construire les logements et répondre à la demande actuelle.
Démêlons cette logique déconcertante : le ministre affirme que pour sortir de la crise du logement, il faut augmenter la demande en faisant venir davantage d’immigrants alors que ces travailleurs qualifiés auront besoin d’un endroit où se loger pendant qu’ils construisent des maisons pour le reste d’entre nous… Le refus abject de son gouvernement de considérer l’immigration autrement que comme une panacée rappelle le vieil adage : « Si le seul outil dont vous disposez est un marteau, tout ressemble à un clou ».

Mais alors que notre gouvernement reste profondément dans le déni, de nombreuses personnes au Canada (y compris à gauche) remettent ouvertement en question l’orthodoxie pro-immigration de longue date. Des articles demandant si nous accueillons « trop » d’immigrants — une question que peu de personnes en dehors de la blogosphère de droite osaient poser jusqu’à récemment — apparaissent de plus en plus fréquemment, même dans les médias de gauche. Il est tout à fait stupéfiant de voir les grands pontes débattre aussi ouvertement de ce sujet autrefois tabou.

Ce changement de ton est peut-être aussi le signe que le « dilemme du progressiste », qui se pose depuis des décennies dans une grande partie de l’Occident, est enfin arrivé au Canada.

D’une manière générale, le dilemme du progressiste pose une tension insoluble entre l’immigration de masse et le maintien des liens de solidarité sociale nécessaires pour soutenir les politiques sociales de redistribution. Cette thèse repose sur la logique selon laquelle les citoyens se sentent moins obligés de contribuer au bien collectif lorsqu’ils se reconnaissent moins dans leurs concitoyens (c’est-à-dire en ce qui concerne la langue, la race, l’appartenance ethnique, la religion et d’autres marqueurs d’identité).

Cette logique convaincante explique pourquoi des pays relativement homogènes comme la Suède et la Norvège ont des États-providence plus importants que des pays très diversifiés comme le Royaume-Uni et la France. Elle explique également comment certains des partis politiques européens les plus prospères associent le soutien à des politiques sociales généreuses à une xénophobie et un nativisme manifeste. (Le parti hongrois Fidesz est peut-être le meilleur exemple de cet archétype).

On a longtemps pensé que le Canada était à l’abri de cette dynamique, conciliant depuis des décennies des niveaux élevés d’immigration avec un État-providence relativement solide. En fait, il existe une littérature assez importante dans le domaine des études migratoires qui réfléchit aux fondements de l’« exceptionnalisme canadien » à cet égard. 
 
Mais le récent changement de ton concernant la politique d’immigration du gouvernement libéral, et en particulier le discours de plus en plus répandu selon lequel cette politique exacerbe la crise du logement, suggère que nous sommes peut-être sur le point de vivre notre propre dilemme progressiste « made in Canada ».

Les critiques de la politique d’immigration des libéraux se sont abstenues de cibler les Néo-Canadiens eux-mêmes. Au contraire, de récents articles de presse ont présenté les nouveaux arrivants sous un jour favorable, estimant qu’ils avaient été trompés par une campagne nationale de recrutement trop zélée (et carrément trompeuse). Une récente série d’articles a relaté les difficultés rencontrées par des dizaines de demandeurs d’asile contraints de vivre dans des campements de rue pendant des semaines en raison du manque de places dans les centres d’hébergement d’urgence de Toronto. De nombreux médias ont également fait état de la tendance des nouveaux immigrants à quitter le Canada et à retourner dans leur pays d’origine.

Le discours public évite également l’omniprésence de l’image de l’immigré « profiteur ». Au contraire, les médias et les politiciens dépeignent la plupart des immigrants Canadiens comme des contributeurs potentiels enthousiastes à l’économie canadienne qui sont trop souvent empêchés de saisir les occasions économiques par la faute de barrières réglementaires. Ainsi, des dirigeants politiques de tous bords ont demandé aux organismes professionnels d’accélérer le processus de reconnaissance des diplômes étrangers parfois de manière démagogique (est-ce qu’un diplôme congolais vaut vraiment un diplôme suisse ?).
 
Dans l’ensemble, les Canadiens anglais semblent encore satisfaits du caractère multiethnique du pays, et nombre d’entre nous considèrent encore le multiculturalisme comme une source de fierté nationale. En fait, l’une des répliques les plus applaudies du chef du parti conservateur, Pierre Poilievre, est « Peu importe… si vous vous appelez Smith ou Singh, Martin ou Mohammed ». Est-ce un signe que le Canada reste à l’abri de certains des courants nationalistes qui sous-tendent les politiques anti-immigration dans d’autres pays ?

Dans l’ensemble, les Canadiens anglais semblent encore satisfaits du caractère multiethnique du pays, et nombre d’entre nous considèrent encore le multiculturalisme comme une source de fierté nationale. En fait, l’une des répliques les plus applaudies du chef du parti conservateur, Pierre Poilièvre, est « Peu importe… si vous vous appelez Smith ou Singh, Martin ou Mohammed ». Est-ce un signe que le Canada reste à l’abri de certains des courants nationalistes qui sous-tendent les politiques anti-immigration dans d’autres pays ?

Après des décennies de maintien d’un équilibre relativement harmonieux entre des niveaux élevés d’immigration et de protection sociale, le Canada semble enfin se trouver au bord du dilemme du « choix de Sophie » qui a longtemps frappé les autres sociétés occidentales : un conflit à somme nulle entre le maintien de niveaux élevés d’immigration et la préservation de la protection sociale pour les Canadiens de tous les jours.

Le gouvernement pro-immigration et pro-protection sociale de Trudeau pourrait bientôt découvrir qu’il ne peut avoir le beurre et l’argent du beurre.

samedi 26 août 2023

« Sur l’immigration, les chiffres sont manipulés »

Le consultant international sur l’Afrique et les migrations regrette l’absence, à gauche comme à droite, d’approche purement scientifique du rapport coût/bénéfices de l’immigration. Extrait issu du « Figaro Magazine.



— Vous dénoncez une « désinformation » sur la question du coût de l’immigration. Qui en est responsable ?

Jean-Paul GOURÉVITCH. — En 2010, l’économiste Xavier Chojnicki, de l’université de Lille-III, a mené à la demande de l’État une évaluation du rapport coûts/bénéfices de l’immigration pour notre système social pour l’année 2005. Il laissait de côté les coûts régaliens, sécuritaires, sociétaux, humanitaires, le surcoût des migrations irrégulières… Surtout il ne prenait pas en compte les coûts engendrés par les descendants directs d’immigrés. Sa première étude, qui aboutissait à un solde positif de 12 milliards, ayant provoqué un tollé, il en a refait une dans laquelle ce solde n’était plus que 3,9 milliards.

Et finalement en 2018, dans l’étude du Centre d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII), il a admis que le solde était négatif. Je ne remets pas en cause son honnêteté intellectuelle, mais celle des médias et des politiques qui ont manipulé son travail pour dire que l’immigration rapportait plus qu’elle ne coûtait. Une partie de la presse a décidé que ces sujets n’étaient pas prioritaires, et que les drames individuels ou collectifs des migrants étaient beaucoup plus importants.

— La question ne fait toujours pas consensus aujourd’hui…

— Aucun économiste scientifique, quelle que soit son orientation politique, ne vous dira que l’immigration rapporte plus qu’elle ne coûte, pour une raison précise : le nombre d’immigrés qui travaillent est très inférieur à celui des immigrés qui ne sont pas encore en âge de travailler ou qui ne travaillent pas. Prenons l’exemple des descendants directs des immigrés d’Afrique subsaharienne : selon l’Insee, 56 % sont mineurs, donc ne travaillent pas, et une partie de ceux qui pourraient travailler est au chômage.

— Vous parlez de manipulation à gauche. Et à droite ?

Arabie séoudite — Deux cours de chinois par semaine au secondaire

Des supporters de football séoudiens apprennent à écrire des caractères chinois à l’extérieur du stade Lusail au Qatar, le 22 novembre 2022
 
Les autorités éducatives d’Arabie séoudite auraient demandé à toutes les écoles secondaires publiques et privées d’assurer deux cours de chinois par semaine. Des experts ont déclaré jeudi que cette mesure aurait des « conséquences importantes » en offrant aux élèves la possibilité d’apprendre le chinois et de découvrir une culture différente. Elle témoigne également de l’intensification de la collaboration entre les deux pays dans le domaine de l’éducation.

La quatrième période de chaque dimanche et de chaque lundi sera consacrée à l’enseignement du chinois, a rapporté mardi la Saudi Gazette. 

Il s’agit d’une nouvelle « positive » pour l’enseignement du chinois en Arabie séoudite, car les écoles ont accueilli plus de 7 millions d’étudiants au cours du nouveau semestre, a déclaré Chen Ming, un professeur qui enseigne le chinois à l’Université du Roi Séoud, au Global Times jeudi.

Selon les médias, plus de 7 millions d’étudiants séoudiens ont repris le chemin des écoles et des universités le 20 août, premier jour de la nouvelle année académique. 

Le plan d’enseignement a des « répercussions importantes » et constitue également une autre « initiative majeure » depuis que l’Arabie saoudite a accepté d’inclure la langue chinoise dans le programme des écoles et universités séoudiennes en 2019, a déclaré jeudi au Global Times Li Bowen, professeur de langue chinoise à l’Université du roi Abdoulaziz et directeur adjoint du Centre de test de compétence en chinois à Riyad.

 
 En 2019, les deux pays ont convenu d’inclure la langue chinoise dans le programme d’études à tous les stades de l’éducation dans les écoles et les universités d’Arabie saoudite, afin d’enrichir la palette culturelle des étudiants.

La popularisation des cours de chinois dans les écoles primaires et secondaires peut « offrir davantage de débouchés » aux étudiants qui se spécialisent en chinois, et encourager davantage de personnes à apprendre le chinois, selon M. Li.

Bien que l’enseignement du chinois en Arabie séoudite soit entré dans une période de développement accéléré, il demeure inégal dans les différentes régions du pays. Par exemple, dans les 13 régions d’Arabie saoudite, la population étant principalement concentrée à Riyad et à Djeddah, les cours de chinois sont aussi principalement offerts dans ces deux villes, a expliqué M. Li.

À la fin de l’année 2022, 11 universités séoudiennes au total auront mis en place des cours de chinois. Parallèlement, le nombre d’établissements d’enseignement et de formation en chinois augmente rapidement, a ajouté M. Li.  

L’apprentissage du chinois connaît actuellement un engouement de la part des Séoudiens, car beaucoup d’entre eux pensent qu’ils auront plus de perspectives à l’avenir s’ils parlent chinois, a noté Chen. Entre-temps, de nombreux enseignants comme Chen travaillent dans ce domaine pour promouvoir l’enseignement du chinois en Arabie séoudite et faciliter la coopération entre les deux pays. 
 
La Chine et l’Arabie séoudite ont convenu de continuer à faire de leurs relations bilatérales une priorité et de construire un modèle de solidarité et de coopération mutuellement bénéfique pour les pays en développement, selon une déclaration commune publiée par les deux pays en décembre 2022.
 
L’Arabie saoudite intéressée par les centrales nucléaires chinoises
 
L’information est sortie juste au lendemain de l’annonce de l’entrée de l’Arabie saoudite dans le club des BRICS ( (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud). Riyad évaluerait une offre chinoise pour la construction d’une centrale nucléaire, selon le Wall Street Journal.
 
La portée de cette éventuelle collaboration industrielle dépasse de loin le seul domaine de l’énergie atomique, car si elle se concrétisait, elle aurait une longue portée géopolitique. On peut y voir l’importance que l’alliance des Brics, renforcée par six nouveaux pays accueillis jeudi au sommet de Johannesburg, veut se donner, comme un bloc anti-G7. La construction de réacteurs chinois en Arabie saoudite confirmerait aussi, puissamment, la prise de distance de Riyad par rapport à Washington, son protecteur historique. Enfin, elle alimenterait, via le royaume wahhabite, l’affrontement politico-commercial qui oppose depuis 2018 la Chine et les États-Unis.

Le grand écart : ce fossé qui se creuse entre les valeurs « occidentales » [progressistes] et celles du reste du monde

On a longtemps pensé que les différences culturelles entre les grandes civilisations allaient s’estomper avec le temps et le développement économique. Mais tel n’est pas le cas.

 
The Economist  (voir la traduction de la majorité de l’article ci-dessous) souligne, en s’appuyant sur le World values survey, que contrairement à ce qu’on a longtemps pensé, les valeurs occidentales divergent du reste du monde. À quel point ce phénomène est-il marqué ?

Vincent Tournier — On a longtemps pensé que les différences culturelles entre les grandes civilisations allaient s’estomper avec le temps et le développement économique. Telle était la thèse optimiste qui a été avancée par Francis Fukuyama au début des années 1990, au moment de la chute de l’URSS et au début de la mondialisation. Le politologue américain Ronald Inglehart, décédé récemment, qui est le concepteur des World Values Survey (WVS), est allé dans le même sens. Sa réflexion a été fortement influencée par le contexte français puisqu’il est venu en France lors des événements de Mai-1968. Il a pensé qu’une profonde transformation des valeurs était à l’œuvre qui se caractérisait par le déclin du nationalisme, de la religion et du consumérisme au profit de ce qu’il appelait les valeurs post-matérialistes : l’autonomie individuelle, la recherche du bien-être, l’engagement civique. Pour désigner cette mutation, il parlait d’une « révolution culturelle ». Ses principaux ouvrages datent des années 1990, au moment où l’optimisme était à son maximum.

Assez rapidement toutefois, les données ont indiqué que son schéma évolutionniste ne marchait pas complètement. Alors que les pays occidentaux connaissent toujours un processus de libéralisation des mœurs, ce que vient de confirmer une équipe française dirigée par Pierre Bréchon qui travaille sur les données européennes des WVS, les comparaisons internationales montrent que les zones de fracture sont toujours très nettes. Même si la plupart des pays évoluent, il y a toujours des différences très fortes entre les grandes ères civilisationnelles : l’Asie, l’Amérique latine, l’Europe et ses divisions (protestants, orthodoxes et catholiques), le monde musulman.

— Concrètement, quelles sont les valeurs où l’on observe les écarts se creuser ?

Vincent Tournier Les principaux points de clivage portent sur le rapport à l’autorité, aux hiérarchies sociales, à la religion et aux mœurs. Ce dernier point occupe une place particulièrement saillante, notamment la question de l’homosexualité. Le rapport à l’homosexualité cristallise les antagonismes. Les pays occidentaux voient l’homosexualité comme une situation légitime qui mérite de recevoir une pleine reconnaissance sociale et juridique, alors que le reste du monde, à des degrés divers, considère que l’homosexualité est une situation anormale qui doit rester tabou ou cachée [ou punie…]. Précisons que cette divergence ne concerne pas seulement les hommes, car, dans la plupart des pays, les deux sexes ont généralement des opinions assez proches sur les mœurs.

— Y a-t-il néanmoins des thématiques où une convergence s’opère ?

Vincent Tournier — Les convergences se font plutôt au sein des zones civilisationnelles. C’est particulièrement le cas en Europe occidentale : les pays du sud, traditionnellement plus catholiques, ont tendance à se rapprocher des pays protestants du nord sur les questions de société.

Pourquoi pensait-on, notamment Inglehart, que, avec le temps, les valeurs allaient converger ?

Vincent Tournier — La thèse de Ronald Inglehart est que la sécurité matérielle conditionne les valeurs individuelles : plus la sécurité progresse, plus les individus ont tendance à adhérer aux valeurs post-matérialistes. Ce schéma n’est pas faux : le développement des valeurs individualistes à partir des années 1960 doit beaucoup à la hausse du pouvoir d’achat et du niveau d’éducation, ainsi qu’à la mise en place de la sécurité sociale et au bouclier américain, autant de facteurs qui ont créé un environnement rassurant, ce qui permet par exemple aux individus de prendre leurs distances avec la religion.

Mais Inglehart a sous-estimé plusieurs éléments. Il a d’abord eu une vision radicale de l’opposition entre les valeurs matérialistes et les valeurs post-matérialistes. Non seulement le consumérisme n’a pas disparu en Occident, y compris dans les milieux éduqués, mais dans le reste du monde, la hausse du niveau de vie n’a pas toujours fait reculer les valeurs traditionalistes. Ensuite, Inglehart n’a pas vu que, en Occident, la sécurité matérielle pouvait s’accompagner d’une insécurité psychologique et existentielle, ce qui se manifeste notamment par de nouvelles formes de religiosités telles que les croyances ésotériques ou complotistes. Même la Silicon Valley semble gagner par un technomessianisme empreint de religiosité.

Enfin et surtout, Inglehart a mal évalué les réactions de rejet que pouvaient susciter les valeurs post-matérialistes. Il en a pris conscience tardivement, dans un ouvrage intitulé Cultural backlash, que l’on pourrait traduire par « retour de balancier ». En voulant trop analyser les valeurs à partir de la psychologique individuelle, il a oublié que les valeurs ont aussi une dimension politique, ce qui signifie qu’elles peuvent se politiser et devenir un objet de conflit. On l’a vu en France lors de la loi sur le mariage gay et on le voit aujourd’hui avec les débats sur la GPA ou l’euthanasie. C’est aussi le cas avec l’immigration qui est devenue un point de polarisation très important dans beaucoup de pays occidentaux.

— Qu’est-ce qui peut expliquer que, plutôt que de converger, les valeurs divergent ? Faut-il s’en inquiéter ?

Vincent Tournier — L’économie ne fait pas tout. Le développement économique n’a pas d’effets mécaniques et systématiques. Malgré les progrès, beaucoup de régions du monde sont loin de bénéficier d’un environnement aussi sécurisé que celui que connaît l’Occident, lequel constitue finalement une exception dans le monde actuel.

De plus, il ne faut pas sous-estimer la dimension répulsive des valeurs individualistes. Les polarisations que l’on observe au sein des pays occidentaux se retrouvent aussi au niveau international. Le libéralisme des mœurs ne s’exporte pas facilement. Il est d’autant moins attractif qu’il est perçu comme le symbole de l’Occident. Les pays occidentaux sont fiers de leurs valeurs et ils sont tentés d’en faire une référence universelle. Curieusement, alors que l’histoire coloniale de l’Europe est regardée avec horreur, cette ambition moralisatrice n’est pas perçue comme une forme de néo-colonialisme. Or, pour beaucoup de pays, ces injonctions moralisatrices relèvent d’un interventionnisme inacceptable. Du Brésil à la Russie sans oublier les pays musulmans, le sentiment se développe que les Occidentaux veulent imposer un modèle de société qui n’est pas forcément conforme à leur culture. 

Repoussoir pour beaucoup dans le Tiers-Monde : Macron reçoit à l’Élysée des « artistes » pratiquant une danse urbaine qui trouve son origine dans la communauté LGBT (Lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres) noire américaine.

Le problème est que les pays occidentaux considèrent que ces valeurs libérales ou individualistes sont consubstantielles à la démocratie elle-même. En somme, elles sont censées former un tout indissociable : si vous voulez être démocrate, il faut aussi souscrire au panel de valeurs que les Européens ont défini comme incontournables. Cette confusion entre la politique et la morale n’est pas saine, car elle peut rendre la démocratie moins désirable. Si beaucoup de gens aspirent à vivre dans un régime démocratique, tout le monde n’a pas forcément envie de copier le mode de vie occidental. C’est une des raisons qui peut expliquer le désamour pour la démocratie et le regain d’intérêt pour les pouvoirs autoritaires. En Afrique, les pays qui se présentent comme des contre-modèles occidentaux (Chine, Russie, Turquie, pétromonarchies) rencontrent un certain succès. Dans le cas du Sahel, où plusieurs coups d’État se sont produits (Mali, Burkina Faso, Niger), une partie du sentiment anti-français peut aussi venir de là. Le modèle français fait d’autant moins rêver que les gouvernements africains, soutenus par la France, sont accusés de corruption et d’inefficacité dans la lutte contre le djihadisme. De ce point de vue, la théorie de Inglehart n’est pas totalement dépassée : c’est parce que les habitants de ces régions se sentent en insécurité qu’ils ne sont pas prédisposés à accueillir dans la joie les valeurs post-modernes. 

Source

 

Extraits de l’article de The Economist

EN 1981, plus de 40 % de la population mondiale vivait dans l’extrême pauvreté. Mais la croissance économique commençait à s’accélérer dans les pays en développement. Ron Inglehart, professeur à l’université du Michigan, organise une enquête mondiale pour vérifier la théorie selon laquelle, lorsque les paysans échappent à la pauvreté, ils commencent à penser et à se comporter différemment, comme l’ont fait les gens dans le passé lorsqu’ils ont rejoint les classes moyennes.  

Ils pourraient accorder une plus grande priorité à l’éducation, à l’élargissement des connaissances de leurs enfants, que ne l’avaient fait leurs propres parents. Ils pourraient accorder plus d’importance à leur propre expérience et à leur raisonnement, et moins aux livres religieux ou à l’autorité des rois. Et peut-être que ces nouvelles façons de faire, ces valeurs fondamentales, commenceraient à converger dans le monde entier. Inglehart pensait que l’on pouvait tester ces éléments en posant des questions révélant des valeurs sous-jacentes telles que « Quelle est l’importance de la religion dans votre vie ? », « Seriez-vous heureux de vivre à côté d’un étranger ? » et « Pouvez-vous faire confiance à la plupart des gens ? ».  

 Quarante ans plus tard, seuls 8 % de la population mondiale sont encore en situation d’extrême pauvreté ; plus de la moitié, selon certaines mesures, font partie de la classe moyenne. Le World Values Survey (WVS), le bébé d’Inglehart, est devenu le plus grand réseau de recherche sociale au monde. Tous les cinq ans environ, ses chercheurs se rendent sur le terrain pour interroger, aux dernières nouvelles, près de 130 000 personnes dans 90 pays. Pourtant, la dernière vague de résultats, qui couvre la période 2017-22, ne confirme que partiellement l’idée selon laquelle les valeurs fondamentales tendent à converger à mesure que les gens s’enrichissent. De manière significative, les différences entre les modes de pensée des différentes parties du monde semblent se creuser.
 
Inglehart (décédé en 2021) a soutenu que la sécurité — ou, pour être précis, l’insécurité — est à l’origine de la façon dont les gens pensent et de ce à quoi ils accordent de la valeur. Dans un monde incertain où les enfants ou les récoltes peuvent être anéantis par la maladie ou la sécheresse du jour au lendemain, la famille est souvent le seul rempart contre le désastre, tandis que l’église, la mosquée ou le temple sont les principaux pourvoyeurs de consolation ou d’explication. Mais à mesure que la richesse s’étend, l’insécurité de base recule. Dans un environnement plus stable, les gens peuvent penser davantage par eux-mêmes.
 
Inglehart pensait que ce processus se produisait sous deux formes légèrement différentes. Il a inventé des méthodes pour mesurer chacune d’entre elles.
  

La première évalue l’influence des sources d’autorité coutumières, telles que la famille et la religion. À une extrémité de ce spectre se trouve le respect de la tradition. À l’autre extrémité, on trouve les croyances laïques et une pensée plus scientifique. C’est ce qu’il a appelé l’axe « tradition-laïcité ». Votre position sur cet axe dépend de vos réponses à des questions telles que « Croyez-vous en Dieu ? » et « Quelle est l’importance de l’obéissance chez les enfants ? ».

La deuxième mesure évalue l’attachement des personnes à un groupe d’appartenance. À une extrémité, on trouve une association étroite avec une ethnie, une nation ou une race ; il y a une division nette entre « nous » et « eux ». À l’autre extrémité, on trouve un plus grand individualisme et le fait de penser par soi-même. Cette approche repose sur des questions telles que « Pouvez-vous faire confiance à la plupart des gens ? » ou « Seriez-vous prêt à signer une pétition ? ». Il s’agit d’une sorte d’indice de tribalisme politique, bien que les chercheurs soient trop polis pour l’appeler ainsi. L’ensemble de ces indices crée une carte des valeurs mondiales. 

Les populations voisines se regroupent librement :

  • Les Européens dans une région,
  • les Latino-Américains dans une autre,
  • les pays africains et islamiques dans une troisième, etc.

Et les valeurs ont tendance à ne pas changer rapidement.  Comme le dit Pippa Norris, l’un des coauteurs de l’étude d’Inglehart, « si elles changent, il s’agit d’opinions et non de valeurs ».  Mais au cours des dernières décennies, on a assisté à un changement substantiel — et extraordinaire.

  •  Les pays orthodoxes sont devenus plus traditionnels.
  •  Les pays latino-américains le sont moins.
  •  Les pays anglophones se distinguaient clairement des Européens protestants (dont l’appartenance religieuse est plus forte), mais les deux groupes sont devenus plus difficiles à distinguer.

[Si l’on compare les résultats de l’enquête de 1998 à ceux d’aujourd’hui, on constate que dans les deux cas], les Européens protestants sont les plus laïques et les plus individualistes. Les Européens catholiques ont des opinions similaires, bien que moins marquées. Dans les pays islamiques et africains, la religion et la famille tiennent le haut du pavé. Ce que le WVS appelle les pays « confucéens », dont la Chine, le Japon et la Corée du Sud, sont un mélange. Ils sont aussi attachés aux valeurs laïques que les Européens ; lorsqu’ils répondent à des affirmations telles que « en cas de conflit entre la religion et la science, la religion a toujours raison », ils sont même moins susceptibles d’être d’accord que les Allemands ou les Néerlandais. Mais ils sont loin d’être aussi tolérants que ces nations à l’égard des homosexuels et d’autres minorités.
 

Il y a deux décennies, un groupe de pays combinait les convictions religieuses avec le soutien à l’individualisme et à l’expression de soi, c’est-à-dire une sorte d’hybride de valeurs traditionnelles et modernes. Il s’agissait de l’Amérique, de l’Irlande et de certains pays d’Amérique latine, comme le Venezuela. Cet amalgame les place dans le coin inférieur droit. De nombreux pays orthodoxes (comme la Russie et la Roumanie) présentaient l’inverse : des valeurs religieuses faibles, mais des valeurs « tribales », ou collectives, fortes.
 
[…]

À première vue, cette évolution suggère que les gens pensent différemment lorsqu’ils échappent à la pauvreté et à l’insécurité. La ligne diagonale implique que les pays sont soit traditionalo-collectifs, soit rationalo-individualistes. Les pays les plus pauvres se trouvent (pour la plupart) à une extrémité et les plus riches (pour la plupart) à l’autre. On peut supposer que les pays les plus pauvres finiront par se déplacer le long de la diagonale.
 
 Peut-être. Mais pour l’instant, les résultats du WVS suggèrent que cela ne se produit pas sans obstacle ni détour. Si les pays pauvres convergeaient effectivement avec les pays riches en termes de valeurs, on pourrait s’attendre à ce qu’ils soient ceux où les valeurs évoluent le plus rapidement, tandis que les pays qu’ils rattrapent seraient plus stables. En fait, l’enquête révèle le contraire. Les pays qui sont déjà les plus laïques et les plus individualistes changent le plus rapidement et deviennent encore plus laïques ; ceux qui sont les plus traditionnels et les plus claniques changent moins et deviennent parfois plus traditionnels, et non moins. 

En 1998, 38 % des Européens protestants et 32 % des musulmans déclaraient que la plupart des gens étaient dignes de confiance. En 2022, la confiance avait augmenté en Europe (plus de la moitié des Européens déclarant faire confiance aux gens), mais elle s’était effondrée dans les pays islamiques, où seulement 15 % des personnes interrogées déclaraient que les gens étaient dignes de confiance. En 1998, les Européens catholiques et les Latino-Américains avaient des niveaux de confiance comparables. En 2022, la proportion d’Européens catholiques déclarant faire confiance aux gens était trois fois plus élevée que celle des Latino-Américains.
 
Tout comme la méfiance à l’égard des étrangers est une mesure des valeurs collectives, la réticence à signer des pétitions l’est également. En effet, les sociétés claniques ont tendance à ne pas croire que les autorités dirigeantes agiront dans leur intérêt, et ce par crainte de représailles. En 2022, près de la moitié des personnes interrogées en Amérique latine et dans les pays orthodoxes ont déclaré qu’elles ne signeraient jamais une pétition. Il s’agit d’une forte augmentation en Amérique latine depuis 1998, et d’une faible augmentation dans les pays orthodoxes. En revanche, le nombre d’Européens ayant déclaré qu’ils ne signeraient jamais une pétition a nettement diminué, pour atteindre des niveaux inférieurs de moitié à ceux de la plupart des pays du reste du monde. 

 Mesure après mesure, qu’il s’agisse de penser que les enfants doivent être obéissants, de tolérer l’homosexualité ou de convenir que « lorsque la religion et la science s’opposent, la religion a toujours raison », les pays européens ont évolué vers plus d’individualisme et de laïcité au cours des 25 dernières années. C’est également le cas de l’Amérique. Bien que les Américains aient longtemps été un peu plus religieux que la plupart des Européens, ils ont évolué au fil du temps vers plus d’individualisme et de laïcité, au moins autant que les Européens.
 
En 1981, par exemple, 47 % des Américains se décrivaient comme non religieux (déclarant que Dieu n’était pas important dans leur vie, qu’ils n’assistaient pas aux offices religieux, etc.)). En Suède, cette proportion était de 58 %. En 2022, la part des Américains avait augmenté de 14 points, atteignant presque celle de la Suède. Entre-temps, les pays orthodoxes, islamiques et latino-américains ont connu des changements moins importants ou, dans certains cas, une évolution vers plus de traditionalisme et de collectivisme. Cela n’invalide pas nécessairement l’idée que les valeurs mondiales convergeront un jour. Mais cela suggère que ce jour est peut-être [au minimum] encore loin.
    
 Attention à l’écartement

Ces résultats soulèvent trois autres questions. Premièrement, combien de temps cet écart peut-il continuer à se creuser ? En particulier, les Européens et les Américains peuvent-ils vraiment continuer à devenir de plus en plus individualistes et laïques ? « Les gens ne cessent de me demander s’il y a une limite », déclare Christian Welzel, professeur à l’université Leuphana de Luneburg, en Allemagne, et l’un des coauteurs de l’étude d’Inglehart. « Mais je n’ai encore vu aucun signe ». Le Dr Welzel a examiné les données de la WVS par cohorte d’âges. Il constate que, dans chaque région, chaque génération devient plus individualiste et plus laïque que la précédente.
 
 En Europe, l’écart entre les jeunes et les vieux est particulièrement important et bien plus grand que dans les pays islamiques ou orthodoxes. Cela signifie que l’évolution vers une plus grande expression de soi se poursuivra dans la prochaine génération. En Amérique, il existe un écart de valeurs entre les régions les plus religieuses et les plus laïques du pays, ce qui pourrait théoriquement signifier que les régions religieuses (dans le Sud et le Midwest) ne participent pas à la dérive vers la laïcité. Pourtant, même cette hypothèse semble erronée. L’écart entre les États les plus et les moins religieux n’a pas changé de manière significative depuis 1981. Quelle que soit la cause de la polarisation inhabituelle de la politique américaine, il ne s’agit pas, comme le suggère le WVS, d’un changement fondamental des croyances dans les différentes régions du pays.

Deuxièmement, quelles sont les implications politiques et géopolitiques ? D’une manière générale, les valeurs et la politique sont manifestement et intimement liées. Les valeurs traditionnelles semblent être davantage associées aux autocraties ; les systèmes « une personne, une voix » incarnent des valeurs individualistes. Ce n’est pas une coïncidence si, au cours de la dernière décennie, les populistes autoritaires ont particulièrement bien réussi dans deux des régions où le ralentissement ou l’inversion des valeurs séculaires et rationnelles s’est produit : les pays orthodoxes (tels que la Russie et le Belarus) et l’Amérique latine (Brésil, Nicaragua, Venezuela).
 
Dans les pays orthodoxes, latino-américains et islamiques, le soutien à la démocratie s’est également effondré, mesuré par la part de la population estimant qu’il est bon ou assez bon d’avoir un dirigeant fort qui ne s’embarrasse pas de parlement ou d’élections. Dans les trois régions, cette proportion a augmenté d’un tiers à deux tiers entre 1998 et 2022. Cela n’augure rien de bon pour l’avenir de la démocratie.
 

Néanmoins, il n’existe pas de relation simple entre les valeurs et la politique, comme le suggère l’exemple des électeurs religieux américains. La persistance de la droite dévote et traditionaliste en Europe et en Amérique est clairement liée au mécontentement suscité par la diffusion de l’individualisme. Mais il n’est pas évident de savoir si les électeurs ont changé et se sont organisés en partis d’extrême droite plus puissants, ou si les partis ont simplement réussi, avec plus de succès que par le passé, à vendre leur politique à des électeurs qui n’ont pas tellement changé eux-mêmes.
 
 Une remarque similaire peut être faite à propos des valeurs et de la géopolitique. Les conflits internationaux sur les valeurs semblent s’étendre. Il ne se passe pas un jour sans que les gouvernements occidentaux et non occidentaux ne s’affrontent sur la question des droits des LGBT. Après que le président Joe Biden a critiqué l’introduction par l’Ouganda d’une loi anti-homo sévère au début de l’année, Anita Among, la présidente du parlement ougandais, a déclaré : « Le monde occidental ne viendra pas gouverner l’Ouganda ». Et lorsque Recep Tayyip Erdogan, le président turc, a menacé de bloquer la demande d’adhésion de la Suède à l’OTAN parce qu’un homme avait brûlé des pages du Coran en Suède, il a fait appel aux fortes convictions religieuses des Turcs. Mais pour de nombreux Suédois individualistes, le brûleur de livres avait tout à fait le droit de s’exprimer librement, tant qu’il respectait la loi. 

 Les dissentiments sur les valeurs sont également omniprésents dans la rivalité entre les superpuissances américaine et chinoise. Les dirigeants chinois se plaignent sans cesse que « les soi-disant valeurs universelles de l’Occident » n’existent pas (comme le dit Xi Jinping, le président chinois) et que les appels du gouvernement américain à de telles valeurs ne sont qu’un écran de fumée pour un nouveau type d’impérialisme. Dilma Rousseff, ancienne présidente du Brésil, qualifie le libéralisme occidental de « système de valeurs imposé ».
 
 Néanmoins, bon nombre de ces conflits se seraient certainement produits indépendamment des différences de valeurs. La Chine aurait défié l’Amérique pour des raisons stratégiques et technologiques. La Turquie aurait pu bloquer la Suède pour obtenir des concessions de l’OTAN. Vladimir Poutine, le président russe, affirme avoir envahi l’Ukraine parce que ce pays, qui faisait autrefois partie intégrante du monde orthodoxe, s’imprègne des habitudes de pensée européennes qui, selon M. Poutine, menacent la Russie. Mais M. Poutine avait de nombreuses raisons de prendre sa décision, qu’elles soient paranoïaques ou calculées. Il ne s’agit pas de dire que les différences de valeurs sont artificielles. Mais elles peuvent ne pas être déterminantes. Pour les gouvernements autoritaires, les « valeurs » sont une excuse aussi bien qu’un ensemble de croyances. 

Troisièmement, qu’est-ce que tout cela signifie pour les arguments sur les « valeurs universelles » ? La WVS implique que les valeurs laïques et libérales ne sont pas plus universelles que les valeurs religieuses et autoritaires. Les deux ensembles de valeurs se situent aux extrémités opposées du même spectre d’opinions ; tous deux sont des moyens par lesquels les gens s’adaptent à leurs circonstances, qu’elles soient sûres ou incertaines. En ce sens, M. Xi et d’autres ont raison : ces valeurs ne sont pas universelles. Mais elles ne dépendent pas entièrement de l’histoire ou de la culture politique d’un pays.
 
En règle générale, à mesure que la prospérité s’étend, que l’espérance de vie augmente, que les taux de fécondité diminuent et que l’éducation se développe, les gens tendent à se rapprocher de l’extrémité laïque/rationnelle du spectre. M. Welzel décrit ce phénomène comme un changement d’état d’esprit, passant d’une « orientation vers la prévention » (dans laquelle la principale préoccupation des gens est de prévenir les dommages et les pertes pour eux-mêmes et leur famille) à ce qu’il appelle une « orientation vers la promotion » (dans laquelle les gens recherchent l’expression de soi et la liberté de choisir la manière de vivre leur vie).
 
 Le WVS constate toutefois que la vitesse à laquelle ce changement se produit varie considérablement d’un pays à l’autre. Dans certains endroits, le processus s’inverse même. Les différentes générations s’adaptent plus ou moins facilement. Les gouvernements interviennent pour ralentir les choses si cela les arrange. Et il est clair que l’enrichissement n’est pas nécessairement suffisant pour déclencher le changement de valeurs, car les pays qui s’enrichissent peuvent souvent se sentir moins en sécurité. 

 
Pour toutes ces raisons, les modes de pensée traditionnels persistent et la convergence des valeurs qui devrait accompagner la croissance économique est loin d’être achevée. Pourtant, l’impact d’une plus grande sécurité sur les valeurs des gens ne disparaît pas. Lentement, sans certitude, les valeurs religieuses et autoritaires tendent à perdre de leur attrait, tandis que les valeurs laïques et libérales tendent à en gagner. La bataille des valeurs se joue entre ces deux pôles. 

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