lundi 18 mars 2013

Le PQ retranche 56,2 millions à une des vaches sacrées féministes : les garderies contrôlées par l'État

Le gouvernement de Pauline Marois a décider de faire subir aux centres de la petite enfance (CPE) des compressions de 37,9 millions par an, soit une coupe de 3,5 %. Québec sabre également les subventions des garderies privées de 18,3 millions. Au total, les coupes atteignent 56,2 millions pour l'ensemble du réseau de garderie.

Les garderies devaient pourtant échapper aux compressions en 2013-2014, selon le budget Marceau déposé en novembre. Québec annonçait une hausse de 3,4% du budget du ministère de la Famille, l'aide étant quasiment uniquement axée sur les subventions aux frais de garde des femmes qui retournent au travail. Les subventions des CPE doivent passer de 1,087 à 1,112 milliard en un an, une hausse de 2,3 % (25 millions).

L'Association québécoise des CPE se dit « trahie » par Pauline Marois, l'instigatrice du réseau. Son directeur général, Louis Senécal, estime que c'est la « pire attaque » de l'histoire des CPE, très courte histoire quand même.

Il promet que « le réseau des CPE va se mobiliser comme jamais un réseau ne s'est mobilisé ». « Le printemps érable de Mme Marois commence ! », a-t-il lancé.

« Absolument tous les moyens seront utilisés» pour faire pression sur le gouvernement, y compris des journées de fermeture dans les CPE. Les parents assurent la croissance économique du Québec parce que leurs enfants sont en CPE. Quand ils se retrouveront sans service et dans les rues avec leurs enfants, ça va faire beaucoup plus mal que les étudiants qui ont attiré l'attention l'an dernier », a soutenu M. Senécal.

Malgré une augmentation constante du budget affecté aux garderies, les sommes consacrées s'avèrent insuffisante pour à la fois payer les coûts de système — notamment l'augmentation des salaires du personnel à la suite de conventions récentes — et financer la création de nouvelles places dites à 7 $ par jour. Les compressions sont donc nécessaires pour un gouvernement qui dit vouloir retrouver l'équilibre budgétaire en 2013-2014.

Selon un document du Ministère, les coupes représentent environ 25 000$ pour un CPE de 80 places dont 25 % des enfants sont âgés de 4 ans. L'AQCPE a fait ses propres calculs et arrive plutôt à 32 000$. C'est presque le salaire moyen d'une éducatrice qui avoisine 35 000 $.

Plus de la moitié des CPE en déficit

Les compressions sont d'autant plus imposantes que la moitié des CPE enregistrent un déficit d'exploitation. Il se chiffrait à 34 000$ en moyenne en 2010-2011, pour des déficits totaux de 13,4 millions cette année-là. Les subventions de fonctionnement versées par Québec n'ont pas suivi la hausse constante des coûts des CPE. « Il y a des CPE qui risquent la fermeture avec les compressions. C'est intenable pour plusieurs, surtout en région », estime M. Senécal.

Compressions et hausses de taxes

Dans son dernier budget, le gouvernement Marois a annoncé des compressions de 200 millions $ dans le réseau de l'éducation (celui-ci ne comprend pas les CPE) pour la prochaine année scolaire, qui s'ajoutent aux 300 millions $ imposés depuis deux ans.

La ministre Malavoy avait affirmé qu'avec leur pouvoir de taxation, les commissions scolaires avaient une « marge de manœuvre » qui leur permet d'aller chercher des revenus supplémentaires afin d'absorber ces compressions.

Maternelle à 4 ans, l'État s'étend

La ministre Nicole Léger a informé le réseau de ces coupes (dans les augmentations) au même moment où sa collègue de l'Éducation, Marie Malavoy, déposait un projet de loi destiné à instaurer progressivement la maternelle à 4 ans à temps plein dans les milieux défavorisés. Pour Louis Senécal, « le financement des maternelles 4 ans est clairement fait avec les budgets des CPE ».

De leur côté, les garderies privées doivent faire une « rationalisation de leurs dépenses » de 3,4 millions. Le financement pour les enfants de 4 ans est également réduit, une baisse de 14,9 millions.

Sans effet bénéfique démographique, pédagogique et comportemental

Rappelons que les CPE et autres garderies sont sans effet positif notoire sur la démographie: la natalité au Québec est en panne depuis trois ans malgré des dépenses en hausse constante dans la prétendue politique familiale alors que la natalité a également grimpé dans le reste du Canada dans les années 2000 sans cette politique discriminatoire et ruineuse. En 2011, le taux de fécondité du Québec était de 1,69 par femme alors que celui du Canada était de 1,67; en 2011 ces taux étaient quasi identiques (1,5 pour le Canada et 1,49 pour le Québec). Il faut 2,1 enfants par femme pour que les générations se remplacent.

Plus de 15 ans après leur création, les Centres de la petite enfance (CPE) n'ont toujours pas atteint un de leurs objectifs déclarés : améliorer les performances scolaires des enfants. C'est en effet ce que déplore un chercheur qui dresse un dur portrait des garderies dites à 7 $. (Le coût quotidien d'une place de CPE est en réalité proche de 50 $ quand on ajoute les subventions gouvernementales.) Quand Pauline Marois a présidé à la création des CPE en 1997, le programme avait notamment  comme objectif d’augmenter les capacités cognitives des enfants pour mieux les préparer à l’école, on espérait ainsi réduire le décrochage.  Un autre objectif était de réduire les inégalités d’apprentissage entre enfants provenant de milieux pauvres et de milieux plus aisés. Dans le meilleur des cas,  l'étude dirigée par Pierre Lefebvre (UQAM) en 2011 a observé un statu quo, dans le pire des cas on peut voir une légère détérioration de la situation...

Selon une autre étude de l'Université de Montréal publiée en 2009, près de 15 % des Québécois de moins de 6 ans souffrent de degrés atypiques de dépression (pas nécessairement majeure) et d'anxiété. Les bambins sont particulièrement vulnérables lorsqu'ils se voient séparés de la personne qui prenait soin d'eux, notait une pédopsychiatre interrogée par La Presse de Montréal sur ce sujet. Les enfants issus de familles nanties ou de la classe moyenne sont trois fois plus susceptibles d'être touchés par la dépression que ceux de milieux défavorisés. La psychologue et chercheuse Lise Bergeron est arrivée à cette conclusion surprenante au terme de l'Enquête sur la santé mentale des jeunes Québécois.

Des chercheurs new-yorkais ont observé le même phénomène. Rappelons que des études antérieures ont démontré des désavantages notables liés à une garde trop précoce des enfants d'âge préscolaire. C'est ainsi que le Bureau national de recherche économique, un organisme renommé de recherche des États-Unis, avait publié en 2005 parmi une des études les plus complètes sur le système de garderie du Québec. Dans leur résumé, les professeurs d'économie Michael Baker, Jonathan Gruber et Kevin Milligan écrivent que l'introduction de ce programme a eu des conséquences négatives autant sur les parents que sur les enfants :
« [N]ous avons découvert des preuves frappantes que les enfants ont subi des détériorations dans un éventail d'aspects comportementaux et liés à la santé, allant de l'agression aux aptitudes motrices et sociales en passant par la maladie. Notre analyse suggère aussi que le nouveau programme de garderie a mené à des pratiques parentales plus hostiles et moins cohérentes ainsi qu'à une détérioration de la santé parentale et des relations parentales. »

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