lundi 7 janvier 2013

La Russie rend obligatoire l’enseignement religieux dans les écoles

Cette année, tous les élèves de quatrième année (10-11 ans) en Russie doivent suivre un cours de religion. Contrairement au Québec qui prétend valoriser la diversité, mais impose un seul programme à tous, les élèves russes ont le choix entre six options : le christianisme orthodoxe, l'islam, le judaïsme, le bouddhisme, la morale laïque ou les religions du monde. La plupart des Russes se considèrent comme des chrétiens orthodoxes, mais la majorité des parents n'ont pas choisi cette classe pour leurs enfants.

Les élèves de quatrième année dans la classe de « Bases de la culture orthodoxe » discutent aujourd'hui de concepts sérieux. « Dieu est le créateur », explique l’institutrice. « Que faut-il entendre par là ? Qu’est-ce que ça veut dire ? »

Une fillette répond : « Il a créé le monde entier. »

La classe appelée « Bases de la morale laïque » est populaire parmi les élèves
Ici un cours sur le temple de Jérusalem, centre spirituel du peuple hébreu

L'enseignante utilise des manuels scolaires tout neufs et du matériel audiovisuel préparé par le ministère de l'Éducation.

Cette petite salle de classe à Saint-Pétersbourg est l'un des fruits d'une bataille de plus de 20 ans menée par l'Église orthodoxe russe pour réintroduire l'éducation religieuse dans toutes les écoles de Russie. Le porte-parole de l’Église orthodoxe, Vsevolod Tchapline affirme que ce fut vraiment une tâche très difficile.

« Nous avons eu des discussions eu commodes et très émotionnelles avec certains bureaucrates » de déclarer Tchapline. « Certains membres de la bureaucratie pédagogique sont encore très soviétiques d'esprit. »

En fin de compte, selon Tchapline, l'Église orthodoxe est satisfaite du résultat. « Je pense que les enfants et leurs parents comprennent qu'une telle éducation apporte un supplément de morale dans la vie de l'enfant et de la famille, il apporte une meilleure compréhension de ce qui fait la différence entre un musulman, un juif, un chrétien et un non-croyant », précise Tchapline.

Mais le nouveau programme n'est pas nécessairement ce que l'église escomptait. Les analystes disent que l'Église a dû accepter un compromis avec la bureaucratie d'État russe profondément laïque. L'Église avait tout d'abord insisté pour que ne soient offerts que des cours de religion orthodoxe russe.

Alors que, selon les sondages, entre 70 et 80 pour cent des Russes se considèrent comme des croyants orthodoxes, beaucoup sont clairement mal à l'aise de voir un programme de religion présentée par l’État dans les écoles laïques du pays. Au niveau national, seul un tiers des parents ont choisi de faire suivre le programme sur l'orthodoxie par leurs enfants.

Manuel du cours de religion orthodoxe

Nathalie Saprouga, mère d’écolier qui se dit une fervente orthodoxe, soutient que la religion n'a pas sa place dans les écoles publiques.

« Nous pensons que la religion est vraiment une affaire privée et que l’éducation religieuse devrait commencer en famille et continuer à l'église », explique Mme Saprouga. « C'est pourquoi nous avons choisi ce cours de morale laïque qui vise à aider nos enfants à développer des qualités telles que l'honnêteté, la bonté et de la justice. » (Au passage, on ne sait pas trop quelles valeurs le Cours d’éthique et de culture religieuse québécoise veut et peut inculquer si ce n’est la « tolérance » et le « dialogue »…)

Lors de ce cours de « bases de morale laïque », la classe discute d’Abraham et son importance pour les juifs et les musulmans. (C’est un grand classique de la tolérance superficielle, mais Ibrahim est en fait assez différent d’Abraham, voir ici.) La classe est le plus populaire des six choix, tant au niveau national que dans cette école.

Pour l’institutrice Nathalie Savinova, le programme laïc est très populaire parce qu'il va au-delà de la religion. Elle dit que les parents veulent que leurs enfants soient des personnes morales, mais ils ne se sentent pas confiants dans leur capacité à leur enseigner cette morale à la maison.

L’option la plus populaire après morale laïque est le cours orthodoxe, viendrait ensuite le cours qui présente un survol des religions du monde. En plus de ces trois options, on peut également donner des cours de base sur l'islam, le judaïsme et le bouddhisme. Selon le commentateur politique Constantin von Eggert, l'Église orthodoxe russe n’a peut-être pas obtenu ce qu'elle espérait, mais il salue les efforts de l'Église orthodoxe pour se rendre plus « pertinente » dans le monde d'aujourd'hui.

« Notre hiérarchie ne peut simplement pas penser que parce que nous sommes en théorie un pays majoritairement orthodoxe, ils peuvent se reposer sur leurs lauriers », de déclarer von Eggert.

En tant qu'église nationale, l'orthodoxie russe n'a jamais eu à rivaliser avec les autres religions, poursuit von Eggert. Jusqu'à présent. Il dit que la lutte pour les cœurs et les esprits renforceront l'Église. Toutefois, les parents russes préfèrent enseigner eux-mêmes la religion à leurs enfants, et cela ne fera probablement pas à l’aide d’un cours dans les écoles publiques.

Le président russe Vladimir Poutine a signé une nouvelle Loi sur l’éducation qui rend obligatoires ces classes de religion (à six options) dans toutes les écoles de Russie.

Sources (The Word & Moscow Times)

Voir aussi

Russie — Succès mitigés des cours de religion chrétienne, fort succès des cours de religion musulmane

Russie — Retour de l’enseignement religieux dans les écoles

Regard sur l'Est.

Texte bilingue Loyola c. le Monopole de l'Éducation (appel) / Bilingual text Loyola v. Monopoly of Education (appeal)



  
Français  English
Pour un résumé et une analyse de ces 41 pages voir ici.
UNOFFICIAL TRANSLATION
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CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC
GREFFE DE MONTRÉAL

No : 500-09-020854-1 05
(500-17-045278-085)

DATE: 4 DÉCEMBRE 2012

COUR D'APPEL

CORAM :LES HONORABLES ALLAN R. HILTON, J.C.A.
RICHARD WAGNER, J.C.A. JACQUES R. FOURNIER, J.C.A.

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU QUÉBEC
APPELANT- Défendeur

c.

LOYOLA HIGH SCHOOL JOHN ZUCCHI
INTIMÉS - Demandeurs

ARRÊT
CANADA
PROVINCE OF QUEBEC
REGISTRY OF MONTREAL

No: 500-09-020854-1 05
(500-17-045278-085)

DATE: December 4, 2012

COURT OF APPEAL

CORAM: THE HONOURABLE ALLAN R. HILTON J.A.
RICHARD WAGNER J.A., JACQUES R. FOURNIER, J.C.A

THE ATTORNEY GENERAL OF QUEBEC
APPELANT-Defendant

v.

LOYOLA HIGH SCHOOL JOHN ZUCCHI
RESPONDENTS - Plaintiff

JUDGMENT

[1] L'appelant se pourvoit contre un jugement rendu le 18 juin 2010 par la Cour supérieure, district de Montréal (l'honorable Gérard Dugré), qui annule une décision de la ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport, déclare l'intimée, Loyola High School, exemptée d'enseigner le programme établi par la Ministre pour enseigner la matière obligatoire Éthique et croyance religieuse (ÉCR) et l'autorise à y substituer son propre programme;[1] The appellant challenges a judgment rendered on June 18, 2010 by the Superior Court, District of Montreal (Honourable Gérard Dugré) rescinding a decision of the Minister of Education, Recreation and Sport, declaring the respondent, Loyola High School, exempt from teaching the program laid out by the Minister for teaching the compulsory Ethics and Religious Culture (ERC) course, and authorizing it to substitute its own program;
[2] Pour les motifs du juge Fournier, auxquels souscrivent les juges Hilton et Wagner,[2] For the reasons provided by Mr. Justice Fournier, with which Justices Hilton and Wagner agree;
LA COUR :THE COURT:
[3] ACCUEILLE le pourvoi;[3] ALLOWS the appeal;
[4] REJETTE la requête introductive d'instance de Loyola et Zucchi; [4] DISMISSES the motion to institute proceedings filed by Loyola and Zucchi;
[5] CONFIRME la décision de la Ministre;[5] CONFIRMS the decision of the Minister;
[6] Chaque partie payant ses frais tant en appel qu'en Cour supérieure.[6] Each party to pay its own costs on appeal as in Superior Court.
MOTIFS DU JUGE FOURNIERREASONS OF FOURNIER, J.A.
[7] Il s'agit de l'appel d'un jugement de la Cour supérieure, district de Montréal, qui annule une décision de la ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport, déclare l'intimée, Loyola High School, exemptée d'enseigner le programme établi par la Ministre pour enseigner la matière obligatoire Éthique et croyance religieuse (ÉCR) et l'autorise à y substituer son propre programme.[7] This is an appeal from a judgment of the Superior Court, District of Montreal, rescinding a decision by the Minister of Education, Recreation and Sports, declaring the respondent, Loyola High School, exempt from teaching the compulsory ethics and religious beliefs [Translator’s note: sic – the judges used “croyance” rather than “culture” in the original French] (ERC) course laid out by the Minister, and authorizing it to use its own program.
LE CONTEXTECONTEXT
[8] Loyola est une école secondaire privée de confession catholique, ce qui ne confère aucun statut particulier de ce seul fait et selon la législation. Plus précisément, elle est un établissement d'enseignement confessionnel administré par l'ordre des Jésuites et une personne morale constituée selon les lois du Québec. Rob Brennan est son président et Paul Donovan est son directeur.[8] Loyola High School is a private confessional Catholic high school, which does not confer upon it any special status for that reason alone and according to the law. More specifically, it is a confessional educational institution administered by the religious order of the Jesuits, a corporation incorporated under the laws of Quebec. Rob Brennan is its president and Paul Donovan its principal.
[9] L'intimé John Zucchi (Zucchi) est le père d'un enfant étudiant en troisième secondaire au moment du dépôt de la demande en Cour supérieure. Il est catholique pratiquant.[9] The respondent John Zucchi (Zucchi) is the father of a pupil in Secondary III at the time of filing at Superior Court. He is a practicing Catholic.
[10] L'appelant, le procureur général du Québec (PGQ), représente la Ministre. Pour les besoins du litige, il suffit de mentionner que cette dernière est chargée de l'application des lois du domaine de l'enseignement primaire et secondaire au Québec.[10] The appellant, the Attorney General of Quebec (AGQ), represents the Minister. For the purposes of the dispute, suffice it to mention that the latter is responsible for law enforcement in the area of primary and secondary education in Quebec.
[11] Le programme dont il est question est celui du cours ÉCR. Il s'agit d'une matière obligatoire, qui doit être enseignée à tous les niveaux de l'enseignement primaire et secondaire, sauf en troisième secondaire.[11] The program in question is that of ERC. It is a compulsory subject to be taught at all levels of primary and secondary education, except in Secondary III.
[12] Le programme s'articule autour de deux objectifs ou finalités : la reconnaissance de l'autre et la poursuite du bien commun. En bref, le programme ÉCR tente d'inculquer aux élèves des principes et des valeurs telles que le respect de l'autre et la démocratie, la construction d'une culture publique commune tenant compte de la diversité et un meilleur « vivre-ensemble » en société. Le programme vise le développement de trois compétences : réfléchir sur des questions éthiques, manifester une compréhension du phénomène religieux et pratiquer le dialogue. Ainsi, au premier cycle du secondaire, la compétence en éthique vise à faire prendre conscience aux élèves des notions de liberté et d'ordre social. La compétence en culture religieuse vise à faire prendre conscience de l'héritage du patrimoine religieux québécois et la compétence relative à la pratique du dialogue vise à établir des conditions favorables à ce dernier.[12] The program revolves around two goals or objectives: the recognition of others and the pursuit of the common good. In short, the ERC program strives to teach students principles and values such as respect for others and democracy, building a common public culture taking into account diversity, and better “living together” as a society. The program aims to develop three competencies: reflect on ethical questions, demonstrate an understanding of religious phenomena, and engage in dialogue. Thus, during the first cycle of secondary school, the ethics competency aims to make students aware of the concepts of freedom and social order. The religious culture competency aims to raise awareness of Québec's religious heritage, and the “practice of dialogue” competency aims to ensure favourable conditions for the latter.
[13] La mise en place du cours ÉCR est une étape du processus de déconfessionnalisation des écoles au Québec. Il est utile de référer ici au contexte dont la juge Deschamps trace l'historique dans l'arrêt récent S.L. c. Commission scolaire des Chênes1 :[13] The implementation of the ERC programme is one stage in the process to secularize schools in Quebec. It is useful here to refer to the historical context which Madam Justice Deschamps describes in the recent case S.L. v. Commission scolaire des Chênes1:
[10] La place de la religion dans la vie civile est source de débats publics depuis les débuts des civilisations. La dissolution progressive des liens entre l'Église et l'État au Canada s'inscrit dans un large mouvement de laïcisation des institutions publiques dans les pays occidentaux (M. H. Ogilvie, Religious Institutions and the Law in Canada (3e éd. 2010), p. 26 et 30; voir également Congrégation des témoins de Jéhovah de St-Jérôme-Lafontaine c. Lafontaine (Village), 2004 CSC 48, [2004] 2 R.C.S. 650, par. 67-68, le juge LeBel). En effet, la neutralité religieuse est maintenant perçue par de nombreux États occidentaux comme une façon légitime d'aménager un espace de liberté dans lequel les citoyens de diverses croyances peuvent exercer leurs droits individuels (voir J. Woehrling, « La place de la religion dans les écoles publiques du Québec » (2007), 41 R.J. T. 651; D. Grimm, « Conflicts Between General Laws and Religious Norms » (2009), 30 Cardozo L. Rev. 2369).
[10] The place of religion in civil society has been a source of public debate since the dawn of civilization. The gradual separation of church and state in Canada has been part of a broad movement to secularize public institutions in the Western World (M. H. Ogilvie, Religious Institutions and the Law in Canada (3rd ed. 2010), at pp. 26 and 30; see also Congrégation des témoins de Jéhovah de St Jérôme Lafontaine v. Lafontaine (Village), 2004 SCC 48, [2004] 2 S.C.R. 650, at pars. 67 68, per LeBel J.). Religious neutrality is now seen by many Western states as a legitimate means of creating a free space in which citizens of various beliefs can exercise their individual rights (see J. Woehrling, “La place de la religion dans les écoles publiques du Québec” (2007), 41 R.J.T. 651; D. Grimm, “Conflicts Between General Laws and Religious Norms” (2009), 30 Cardozo L. Rev.2369).
[11] Le portrait de la situation religieuse dans notre société est un facteur incontournable dans l'adoption d'une politique de neutralité, et ce, non seulement au Québec, mais aussi ailleurs au Canada. En raison du phénomène de la mondialisation des échanges et de l'accroissement de la mobilité individuelle, la diversité des croyances religieuses a considérablement augmenté au Canada au cours des dernières décennies. En effet, le Recensement du Canada de 2001 faisait état d'environ 95 groupes religieux suffisamment importants pour être considéré comme des institutions religieuses distinctes aux fins de consignation des données. En outre, plus de 23 p. 100 des Canadiens se déclaraient de foi non chrétienne ou ne déclaraient aucune identité religieuse (Ogilvie, p. 55-56).
[11] The religious portrait of our society is a key factor in the adoption of a policy of neutrality, not only in Quebec but also elsewhere in Canada. As a result of globalization of trade and increased individual mobility, the diversity of religious beliefs in Canada has increased sharply over the past decades. The 2001 Census of Canada listed approximately 95 religious groups that were large enough to be considered separate religious institutions for the purposes of statistical records. Furthermore, more than 23 percent of Canadians declared that they were members of non Christian religions or reported no religious identity at all (Ogilvie, at pp. 55 56).
[12] La création du Ministère en 1964 a marqué la prise en charge par l'État québécois de l'instruction publique, domaine qui était jusque-là dominé par les communautés religieuses. Le 5 février 1964, dans la foulée du Rapport Parent (1963) qui recommandait d'augmenter les investissements publics en éducation, l'Assemblée législative adopte la Loi instituant le ministère de l'Éducation et le Conseil supérieur de l'éducation, S.Q. 1963-64, ch. 15. Pendant les 30 premières années d'existence de ce ministère, le régime des écoles confessionnelles continue de prévaloir. Le 12 avril 1995, le gouvernement du Québec crée la Commission des États généraux sur l'éducation (Décret 511-95, (1995) 127 G.O.Q. Il, 1960). Les membres de cette commission recommandent une vaste révision des programmes d'enseignement. En 1997, l'ajout de l'art. 93A à la Loi constitutionnelle de 1867 rend possible l'abolition au Québec des commissions scolaires confessionnelles et la réorganisation, sur une base linguistique, du réseau québécois des commissions scolaires (Modification constitutionnelle de 1997 (Québec), TR/97-141).
[12] The creation of the Ministère in 1964 meant that the Quebec government took charge of public education, an area which had been dominated by religious communities up to that time. On February 5, 1964, following the Parent Report (1963), recommending an increase in public investment in education, the Legislative Assembly passed the Act to establish the Department of Education and the Superior Council of Education, S.Q. 1963 64, v. 15. During the first 30 years of the new department’s existence, the confessional school system remains in place. On April 12, 1995, the Quebec government created the Commission for the Estates General on Education (Order in Council 511 95, (1995) 127 G.O. II, 1960). The Commission’s members recommend a far reaching review of education programs. In 1997, the addition of s. 93A to the Constitution Act, 1867 made possible the abolition of confessional school boards in Quebec and the reorganization of Quebec’s school boards on the basis of language (Constitution Amendment, 1997 (Quebec), SI/97 141).
[13] Dans une déclaration ministérielle datée du 26 mars 1997, la ministre de l'Éducation explique l'approche que le gouvernement du Québec propose d'adopter pour permettre à l'école publique de répondre aux attentes des Québécois :
Il convient, premièrement, de gérer ces demandes dans la perspective d'une société pluraliste ouverte. La diversité du paysage socioreligieux éclate partout au Québec. L'école publique se doit donc de respecter le libre choix ou le libre refus de la religion, cela fait partie des libertés démocratiques. C'est dire que toute école doit assurer la liberté de conscience de chaque individu, fût-il seul devant la majorité, et apprendre aux jeunes à vivre dans le respect des allégeances diverses. Pour autant, l'école n'a pas à devenir réfractaire à tout propos sur la religion. Elle doit se montrer ouverte, capable d'accueillir, par delà les convictions particulières et dans un esprit critique, ce que les religions peuvent apporter en fait de culture, de morale et d'humanisme. 
(Assemblée nationale, Journal des débats, 2e sess., 35e lég., 26 mars 1997, p. 5993)
[13] In a statement dated March 26, 1997, the Minister of Education explained the approach the Quebec government proposed to adopt to enable public schools to meet the expectations of Quebeckers:
[TRANSLATION] First, it is expedient to manage these expectations from the point of view of an open, pluralistic society. The social and religious landscape is shifting in all regions of Quebec. Public schools must respect the free choice or the free refusal of religion. This is a democratic freedom. In other words, all schools must respect each student’s freedom of conscience, even if the student stands alone with respect to the majority. All schools must teach students to respect different allegiances. However, our schools must not altogether dismiss religious education. They must show that they are open and able to recognize, regardless of specific convictions and from a critical point of view, the contribution made by the different religions in terms of culture, values and humanism.
(National Assembly, Journal des débats, 2nd Sess., 35th Leg., March 26, 1997, at p. 5993)
[14] La ministre fait état du besoin de mener une réflexion plus poussée sur les aménagements nécessaires pour que les cours offerts aux élèves tiennent compte de la diversité religieuse :
Enfin, dans le contexte d'une société pluraliste, serait-il souhaitable que tous les élèves reçoivent une certaine formation au sujet du phénomène religieux, des cours de culture religieuse intégrant les diverses grandes traditions, des cours d'histoire des religions? J'entends soumettre ces questions à un groupe de travail dont l'avis serait référé à la commission de l'éducation de l'Assemblée nationale, qui pourrait alors entendre l'ensemble des groupes qu'intéresse cette question. 
(Assemblée nationale, Journal des débats, 2e sess., 35e lég., 26 mars 1997, p. 5994)
[14] The Minister spoke of the need to consider more fully the adjustments necessary to ensure that religious diversity was taken into account in courses taught in schools:
[TRANSLATION] Finally, in the context of a pluralistic society, is it not desirable that all students receive some instruction concerning the phenomenon of religion, courses on religious culture which cover the various great traditions, and courses on the history of religion? I intend to submit this question to a Task Force whose conclusions will be referred to the National Assembly’s Standing Committee on Education, which may then hear any groups interested in this issue.
(Ibid., at p. 5994)
[15] En 1999, le Groupe de travail sur la place de la religion à l'école dépose son rapport (Laïcité et religions : Perspective nouvelle pour l'école québécoise). Le groupe recommande notamment que soient donnés, dans les écoles, un enseignement culturel des religions en sus d'un enseignement moral. En 2000, le ministre de l'Éducation annonce la mise en place des aménagements requis pour répondre à la diversité des attentes morales et religieuses de la population. La même année, une première modification législative marquant le début du processus de déconfessionnalisation est adoptée (Loi modifiant diverses dispositions législatives dans le secteur de l'éducation concernant la confessionnalité, L.Q. 2000, ch. 24).
[15] In 1999, the Task Force on the Place of Religion in Schools in Quebec submitted its report (Religion in Secular Schools: A New Perspective for Québec). In addition to moral education, the Task Force recommended, inter alia, that religions be studied in schools from a cultural perspective. In 2000, the Minister of Education announced that adjustment would be made to respond to the diversity of the moral and religious expectations of the population. That same year, a first legislative amendment was passed, marking the start of the secularization process (An Act to amend various legislative provisions respecting education as regards confessional matters, S.Q. 2000, v. 24).
[16] En 2005, le ministre de l'Éducation publie un document d'orientation qui précise les principes sur lesquels devra être établi le programme ÉCR (La mise en place d'un programme d'éthique et de culture religieuse : Une orientation d'avenir pour tous les jeunes du Québec). Le 15 juin 2005, la Loi modifiant diverses dispositions législatives de nature confessionnelle dans le domaine de l'éducation, L.Q. 2005, ch. 20, est adoptée. Cette loi permettait notamment aux écoles de remplacer, à certaines conditions, les programmes d'enseignement moral et religieux catholique et protestant. Ainsi le programme ÉCR a été mis en place de façon graduelle pour devenir obligatoire à compter de la rentrée scolaire 2008. [...]
[Transcrit tel quel]
[16] In 2005, the Minister of Education published a policy paper setting out the principles on which the proposed ERC Program was to be based (Establishment of an ethics and religious culture program: Providing future direction for all Québec youth). On June 15, 2005, the Act to amend various legislative provisions of a confessional nature in the education field, S.Q. 2005, v. 20, was passed. Among other things, the Act authorized schools to replace Catholic and Protestant programs of religious and moral instruction subject to certain conditions. Thus, the ERC Program was implemented gradually before becoming mandatory at the start of the 2008 9 school year.
[Transcribed unchanged]
LES FAITSTHE FACTS
[14] Le 30 mars 2008, avant la première rentrée scolaire imposant le programme ÉCR, Loyola écrit à la Ministre demandant d'être exemptée de « l'exigence d'enseigner le programme d'éthique et de culture religieuse au cours de l'année scolaire 2008- 2009 ». La lettre fait valoir que l'enseignement du programme ÉCR entre en conflit avec la nature et les valeurs catholiques de l'école.[14] On March 30, 2008, before the beginning of the new school year where the ERC course was to be imposed, Loyola writes to the Minister requesting to be exempted from “the requirement to teach the ethics and religious culture course during the 2008 – 2009 school year.” The letter argues that the ERC course conflicts with the Catholic nature and values of the school.
[15] La Ministre répond le 7 août 2008 et refuse cette demande qu'elle qualifie de « demande de dérogation ».[15] The Minister replies on August 7, 2008 and refuses this request, qualifying it a “request for derogation”.
[16] Le 25 août 2008, alléguant avoir été mal comprise, Loyola écrit une seconde lettre à la Ministre et lui spécifie qu'elle demande une dérogation fondée sur l'article 22 du Règlement d'application de la Loi sur l'enseignement privé2 (Règlement d'application), c'est-à-dire une demande d'exemption d'utiliser le programme ECR tel qu'établi par la Ministre.[16] On August 23, 2008, claiming to have been misunderstood, Loyola writes a second letter to the Minister and specifies that it was requesting derogation under section 22 of the Regulation respecting the application of the Act respecting private Education2 (Regulations application), that is to say, a request to be exempted from teaching the ERC program as determined by the Minister.
[17] Loyola demande la permission d'enseigner la matière obligatoire ÉCR avec son propre programme qui, selon elle, « affirme la valeur des religions du monde et qui enseigne leurs coutumes et croyances d'une manière bien plus approfondie que le nouveau programme d'éthique et de culture religieuse ». Elle identifie ainsi la principale différence entre les deux programmes3 :
[...] nous identifions clairement les perspectives présentées et demandons à nos élèves d'évaluer d'une manière plus approfondie l'éthique catholique. Nous estimons que la « neutralité » méthodologique proposée par le programme d'éthique et de culture religieuse est problématique en théorie, puisqu'elle implique un relativisme moral qui contrevient aux croyances de nombreuses personnes et religions, y compris le catholicisme. Cette « neutralité » proposée est également illusoire et est impossible à atteindre dans la pratique.
[17] Loyola requests permission to teach the compulsory ERC subject using its own program which it claims, “affirms the value of world religions and teaches their customs and beliefs in far greater depth than the new Ethics and Religious Culture program.” It identifies the main difference between the two programs3:
[...] we clearly identify the perspectives that are presented and invite the students to a deeper appreciation of Catholic ethics. We find that the methodological “neutrality” proposed in the Ethics and Religious Culture program is problematic in theory, as it implies a moral relativism that contradicts the beliefs of many individuals and religions, including Catholicism. This proposed “neutrality” is also an illusion and impossible to achieve in practice.
[18] En bref, Loyola prétend ne pas pouvoir enseigner le programme prescrit par la Ministre sans compromettre certaines de ses valeurs.[18] In short, Loyola claims not to be able to teach the curriculum prescribed by the Minister without compromising some of its values.
[19] Un sommaire du programme alternatif proposé par Loyola est aussi transmis au ministère. Son contenu et ses objectifs y sont décrits.[19] A summary of the alternative program offered by Loyola is also sent to the Ministry. Its content and objectives are described.
[20] La demande est refusée et la décision est transmise à Loyola le 13 novembre 2008.[20] The request is denied and the decision transmitted to Loyola on November 13, 2008.
DÉCISION DE LA MINISTREDECISION OF THE MINISTER
[21] La lettre signée par la sous-ministre adjointe aux réseaux, Line Gagné, indique d'abord que les autorités concernées au ministère ont évalué le programme d'étude soumis par Loyola. Ensuite, elle indique que la Ministre a pris connaissance du dossier et qu'elle4 :
n'a pas jugé que le programme d'études local que Loyola High School propose d'offrir à ses élèves est équivalent au programme ministériel Éthique et culture religieuse. En effet, le programme proposé par Loyola High School est très différent du programme Éthique et culture religieuse, particulièrement quant à l'approche, aux finalités et au contenu, et ce, notamment pour les motifs indiqués ci-après [ ...]
The letter signed by the Assistant Deputy Minister for School Networks, Line Gagné, first states that the relevant authorities at the Ministry evaluated the curriculum submitted by Loyola. Secondly, it indicates that the Minister became aware of the issue and that she4:
did not consider that the local curriculum Loyola High School proposes to provide to its students is equivalent to the ministerial Ethics and Religious Culture program. Indeed, the program offered by Loyola High School is very different from the Ethics and Religious Culture program, particularly in its approach, aims and content, and in particular for the reasons listed below [...]
[22] Premièrement, la Ministre estime que les deux grandes finalités du programme, la connaissance de l'autre et la poursuite du bien commun, font l'objet d'une approche différente dans le programme alternatif de Loyola. L'approche serait fondée sur la foi catholique. À titre d'exemple, « la connaissance de l'autre » serait enseignée selon la perspective catholique.First, the Minister considers that the two main objectives of the program, the knowledge of others and the pursuit of the common good, are subject to a different approach in Loyola's alternative program. The approach would be based on the Catholic faith. For example, “the knowledge of the other” would be taught from the Catholic perspective.
[23] Deuxièmement, la Ministre explique que le programme proposé adopte la perspective jésuite du service chrétien au lieu d'amener les élèves à réfléchir sur les questions éthiques et du bien commun.[23] Second, the Minister said that the proposed program adopts the Jesuit perspective of Christian service instead of bringing students to think about ethical issues and the common good.
[24] Troisièmement, le volet éthique du programme de Loyola semblerait être axé sur l'enseignement de la morale catholique.[24] Third, the ethics portion of Loyola's program seems to be focused on the teaching of Catholic morality.
[25] Quatrièmement, la Ministre estime que le programme ne prévoit pas le développement de la compétence de la pratique du dialogue.[25] Fourth, the Minister considers that the program does not provide for the development of the “practice of dialogue” competencies.
[26] Cinquièmement, l'étude des religions annoncée semble se réaliser dans une perspective catholique alors que le programme ministériel prévoit leur étude individuelle sans comparaison ou référence à une autre religion.[26] Fifth, the study of religions proposed seems to be taught from a Catholic perspective while the ministerial program provides for their individual study without comparison or reference to another religion.
[27] Sixièmement, la Ministre reproche au programme proposé par Loyola d'imposer un rôle différent à l'enseignant que celui dicté par le programme ministériel. Selon le programme officiel, l'enseignant doit accompagner les élèves dans leur réflexion tandis que, pour Loyola, le rôle de l'enseignant serait d'enseigner les fondements de la religion et des croyances catholiques.[27] Sixth, the Minister criticizes the program proposed by Loyola insofar as it imposes a different role on teachers to the one prescribed by the ministerial program. According to the official program, the teacher should guide students in their thinking, while for Loyola the role of the teacher is to teach the fundamentals of Catholic religion and beliefs.
[28] Enfin, il est indiqué qu'une école privée peut mettre en place un programme d'étude local confessionnel de quatre unités ou moins en plus du cours ÉCR.[28] Finally, it is noted that a private school can set up its own four-unit (or less) religious curriculum, besides the ERC course.
LES PROCÉDURESPROCEDURES
[29] Loyola demande à la Cour supérieure de réviser cette décision pour des motifs de droit administratif et de droit constitutionnel. Elle demande dans sa requête introductive d'instance réamendée qu'il lui soit permis d'enseigner son programme alternatif au lieu du programme ministériel ÉCR. Loyola allègue que ce programme est incompatible avec les convictions catholiques de l'école et qu'il n'est pas réellement neutre, car il fait la promotion d'une idéologie relativiste, le « normative pluralism » selon ses mots.[29] Loyola asks the Superior Court to review this decision for reasons of administrative law and constitutional law. Loyola requests in its reamended application instituting proceedings that it be allowed to teach its alternative program instead of the ministerial ERC program. Loyola alleges that this program is incompatible with the Catholic beliefs of the school and it is not really neutral because it promotes an ideology of relativism, “normative pluralism” in its own words.
[30] Les 19 septembre 2008 et 15 juin 2009, Loyola donne avis au PGQ, en vertu de l'article 95 C.p.c., qu'au soutien de ces prétentions, elle présentera un argument constitutionnel et qu'elle se réserve le droit de contester la constitutionnalité de certaines dispositions du Règlement du Régime pédagogique de l'éducation préscolaire, de l'enseignement primaire et de l'enseignement secondaire.[30] On September 19, 2008 and June 15, 2009, Loyola gives notice to the AGQ under section 95 C.p.c (Code of Civil Procedures), that in support of these claims, it will present a constitutional argument, and that it reserves the right to challenge the constitutionality of certain provisions of the Basic school regulation for preschool, elementary and secondary education.
JUGEMENT DONT APPELTHE IMPUGNED JUDGMENT
[31] Le juge de première instance énonce, en guise d'introduction, que « La réponse à cette question met en cause, notamment, les principes constitutionnels de la suprématie de Dieu et de la primauté du droit5 ».[31] The trial judge states, by way of introduction, “The answer to this question involves, in particular, the constitutional principles of the supremacy of God and the rule of law.”5
[32] Puis, il cerne ainsi l'enjeu6 :
i) bref, la Ministre tient à ce que cette matière, ÉCR, soit enseignée de façon laïque, alors que Loyola est d'accord pour l'enseigner, mais doit l'enseigner de façon confessionnelle afin de se conformer aux préceptes de la religion catholique qui le régissent et qu'il applique depuis sa fondation en 1848.
[32] Then he identifies the issue as follows6:
i) In short, the Minister requires that this course, ERC, be taught in a secular manner, whereas Loyola agrees to teach it, but must teach it in a confessional manner so that the school complies with the precepts of the Catholic religion that governs it and that it has applied since it was founded in 1848.
[33] Il pose aussi cette question générale: « La présente affaire soulève donc la question de savoir si l'État peut déconfessionnaliser l'enseignement de la religion et de la morale jusqu'à l'intérieur des murs d'une école privée confessionnelle catholique7 ».[33] He also raises the general question: “The present case therefore raises the question as to whether the State can secularize the teaching of religion and morality within the very walls of a private confessional Catholic school.7
[34] Ensuite, le juge de première instance analyse les témoignages des experts. Il conclut que l'expert Lévesque, ayant témoigné pour Loyola, est parfaitement crédible. Il retient de son expertise que le programme ministériel a pour effet de jeter un discrédit sur le religieux et qu'il est incompatible avec l'enseignement confessionnel de Loyola. Pour ce qui est du témoignage de l'expert du gouvernement, Georges Leroux, le juge est d'avis qu'il est peu pertinent, car il se méprend sur l'objet du débat. Pour le second témoin expert de Loyola, Douglas Farrow, son témoignage est jugé convaincant et le tribunal retient que Loyola enfreindrait les règles fondamentales de l'Église catholique en enseignant le programme ministériel.[34] Next, the trial judge analyses the testimonies of the expert witness. He concludes that the expert Lévesque, who testified for Loyola, is perfectly credible. He retains from his expertise that the ministerial program does effectively discredit religion and that it is incompatible with the confessional education provided by Loyola. As for the testimony of the government expert, Georges Leroux, the judge is of the opinion that it is of little relevance, because it misunderstands the issue being debated. As far as the second Loyola expert witness is concerned, Douglas Farrow, his testimony is considered convincing and the court retains that Loyola would violate the fundamental rules of the Catholic Church were it to teach the ministerial program.
[35] Le juge identifie les questions en litige sous deux volets8 :[35] The judge identifies the issues in litigation under two aspects8:
Volet droit administratif
Administrative Law Aspect
a)   Quelle est la norme de contrôle ?
a)   What is the standard of review?
b)   La décision de la Ministre, compte tenu de la norme de contrôle appropriée, devrait-elle être annulée ?
b)   Should the Minister’s decision be quashed, considering the appropriate standard of review?
Volet droit constitutionnel
Constitutional Law Aspect
a)   La décision de la ministre porte-t-elle atteinte à la liberté de religion garantie par l'al. 2a) de la Charte canadienne ou de l'art. 3 de la Charte québécoise ? Dans l'affirmative, cette atteinte peut-elle être justifiée par l'application de l'art. premier de la Charte canadienne ou de l'art. 9.1 de la Charte québécoise?
a) )    Does the Minister’s decision violate freedom of religion as guaranteed by section 2(a) of the Canadian Charter or section 3 of the Québec Charter? If so, can the violation be justified by the application of the first section of the Canadian Charter or section 9.1 of the Québec Charter?
[36] Pour commencer, le juge recherche la norme de contrôle applicable en se fondant sur l'arrêt Dunsmuir. Il conclut qu'aucune clause privative ne protège la décision de la Ministre et que, en conséquence, il s'agit d'une question de compétence. Il ne discute pas des autres facteurs de l'analyse relative à la norme de contrôle et se penche plutôt sur l'interprétation du premier alinéa de l'article 22 du Règlement d'application10. Il conclut que la compétence de la Ministre est un pouvoir lié et non pas un pouvoir discrétionnaire.[36] First of all, the judge seeks the appropriate standard of review based on the Dunsmuir decision9. It concludes that no privative clause protects the decision of the Minister and, therefore, it is a jurisdictional issue. He does not discuss other factors of analysis related to the standard of review, but rather focuses on the interpretation of the first paragraph of Section 22 of the Application Regulation10. He concludes that the jurisdiction of the Minister is not a discretionary power but rather a circumscribed one.
[37] En interprétant les expressions de l'article 22 « est exempté », « pourvu que » et « l'établissement offre des programmes jugés équivalents par le ministre », il est d'avis que l'exemption prévue à cet article est « en quelque sorte automatique11».[37] In interpreting the terms of Section 22 “is exempt”, “provided that”, and “the institution offers programs deemed equivalent by the minister,” he is of the opinion that the exemption under this section is “somehow automatic”11.
[38] Il constate aussi que c'est un fonctionnaire du ministère, Jacques Pettigrew, qui a énoncé les critères d'équivalence dans l'étude du programme proposé par Loyola. Le juge conclut que le pouvoir de définir le terme « équivalent » appartient au gouvernement et il s'agit d'une délégation de pouvoir illégale.[38] He also notes that it is a ministry official, Jacques Pettigrew, who established the equivalence criteria in reviewing the program offered by Loyola. The judge concludes that the power to define the term “equivalent” belongs to the government and that we have here an unlawful delegation of power.
[39] Il étudie aussi la disposition habilitante de l'article 22 du Règlement d'application, l'article 111.7 de la Loi sur l'enseignement privé12(LEP) et conclut qu'elle attribue à la Ministre compétence pour constater si un programme est équivalent à son programme selon le sens ordinaire du terme « équivalent ». Autrement dit, le juge estime que la Ministre n'a pas la compétence de déterminer les critères d'équivalence lorsqu'elle juge si un programme proposé est équivalent au sien.[39] He also examines the enabling provision of Section 22 of the Regulation, section 111.7 of the Act respecting private education12 (LEP) and concludes that it assigns to the Minister power to determine whether a program is equivalent to her program in accordance with the ordinary meaning of the term “equivalent”. In other words, the judge considers that the Minister has no jurisdiction to determine the equivalency criteria when judging whether a proposed program is equivalent to her own.
[40] Le juge décide que le premier alinéa de l'article 22 du Règlement d'application est adopté en vertu, selon son expression « de la première branche » de l'article 111.7° de la LEP qui prévoit que le gouvernement peut, par règlement, « exclure, aux conditions qu'il peut déterminer, [...] des personnes, organismes, établissements ou services éducatifs de tout ou partie des dispositions de la présente loi ou des règlements pris en application du présent article13». Voici comment il s'exprime14:
[135] En outre, le terme « jugés » du premier al. de l'art. 22 du Règlement ne peut conférer un pouvoir discrétionnaire à la Ministre puisque les termes « aux conditions qu'il peut déterminer », stipulés au par. 111.7° de la Loi, exigent du gouvernement qu'il établisse des normes dans le Règlement, comme il l'a d'ailleurs fait en utilisant le terme « équivalents ». Il ne peut cependant s'en remettre à la discrétion de la Ministre ni lui déléguer par ce Règlement le pouvoir de faire ces normes.
[Transcrit tel quel] 
[Je souligne]
[40] The judge decides that the first paragraph of Section 22 of the Regulation is made under, in his words “the first branch” in section 111.7 of the Act respecting private education (LEP), which provides that the Government may, by regulation “exclude conditions that it may determine [...] individuals, organizations, institutions, or educational services for all or part of the provisions of this Act or the regulations made under the present section13.” He expresses himself as follows14:
[135] Furthermore, the term “judged” in the first paragraph of section 22 of the
Regulation cannot give the Minister discretionary power since the wording “on the conditions it may determine”, stipulated in paragraph 7 of section 111 of the Act, require the government to establish standards in the Regulation, as it in fact did in using the term “equivalent” However, it cannot rely on the discretion of the Minister or delegate to her through that Regulation the power to make those standards.
[Transcribed unchanged]
[I underlined]
[41] En conséquence, le juge assujettit la décision de la Ministre à la norme de la décision correcte.[41] Accordingly, the judge secures the Minister's decision to the standard of correctness.
[42] Ensuite, il rend la décision qu'il croit s'imposer.[42] Then he renders the decision that he feels must be made.
[43] Il est d'avis que, parmi les six motifs invoqués par la Ministre pour refuser la demande de Loyola, quatre sont fondés sur la distinction entre les deux approches des programmes en question : l'approche culturelle et l'approche confessionnelle. Il ajoute que ces quatre motifs sont erronés, car ils mènent à un excès de compétence. En effet, le terme « équivalent » utilisé à l'article 22 du Règlement d'application ne comporte pas une telle distinction. Selon lui, la Ministre ne peut que juger si les programmes sont équivalents selon le sens ordinaire de cette expression.[43] He believes that among the six reasons given by the Minister to refuse Loyola’s request, four are based on the distinction between the two approaches of these programs: the cultural approach and confessional approach. He adds that these four reasons are wrong, because they lead to an excess of jurisdiction. Indeed, the term “equivalent” as used in Section 22 of the Regulation does not include such a distinction. According to him, the Minister can only judge whether the programs are equivalent in the ordinary sense of the term.
[44] Ensuite, il estime que les deux autres motifs donnés par la Ministre ne sont que des prétextes. Il est d'avis que le programme proposé par Loyola répond à la compétence de la pratique du dialogue.[44] Then, he believes that the other two reasons given by the Minister are merely pretexts. He believes that the program offered by Loyola meets the competency of the practice of dialogue.
[45] De plus, il conclut que le processus décisionnel est entaché de plusieurs erreurs. [45] Furthermore, he concludes that the decision-making process is vitiated by several errors.
[46] D'abord, il répète que les fonctionnaires du ministère, tout comme la Ministre, n'avaient pas le pouvoir de définir les critères d'équivalence sur lesquels la décision est fondée.[46] To begin with, he reiterates that the ministry officials, just as the Minister, had no authority to define equivalence criteria on which the decision is based.
[47] Ensuite, il réitère que le critère de la laïcité n'est pas requis pour qu'un programme alternatif puisse être jugé équivalent au programme ministériel d'ÉCR.[47] Then, he reiterates that the secularism criterion is not required for an alternative program to be considered equivalent to the ministerial ERC program.
[48] Il estime aussi que la décision de la Ministre aurait dû tenir compte du fait que Loyola est un établissement privé de confession catholique.[48] He also believes that the Minister’s decision should have taken into account the fact that Loyola is a private Catholic institution.
[49] Selon lui, le contenu et les objectifs des programmes sont suffisamment similaires pour être jugés équivalents: « Enfin, le Tribunal est d'avis que le programme de Loyola est comparable au programme ÉCR établi par la Ministre. L'enseignement de ce programme suivant la confession catholique n'en change pas la nature et ne peut faire perdre le statut d'équivalent au programme de Loyola15».[49] According to him, the content and objectives of the programs are similar enough to be considered equivalent: “Finally, the Tribunal is of the opinion that Loyola’s program is comparable to the ERC program set out by the Minister. The teaching of this program according to the Catholic confession does not change its nature and cannot lead to the loss of the status of equivalency for Loyola’s program15”.
[50] Pour ce qui est du volet constitutionnel, le juge de première instance décide, sans que cela soit nécessaire à son avis, de se prononcer sur l'argument constitutionnel de Loyola et Zucchi. Ceux-ci allèguent une atteinte à leur liberté de religion.[50] With respect to the constitutional component, the trial judge decides, without it being necessary in his opinion, to rule on the constitutional argument made by Loyola and Zucchi. They allege a violation of their freedom of religion.
[51] Se fondant sur l'arrêt Multani16 de la Cour suprême, le juge décide que c'est la norme de la décision correcte qui s'impose en l'espèce, étant donné qu'il s'agit de réviser la décision de la Ministre à la lumière des valeurs consacrées par les Chartes.[51] Based on the Supreme Court Multani decision16, the judge decides that the standard of correctness is the standard that needs to be applied in this case, since what is required is to review the Minister’s decision in light of the values enshrined in the Charters.
[52] Ensuite, il limite son analyse à la liberté de religion telle que garantie par la Charte québécoise17. Il conclut que Loyola est une personne au sens de la Charte et qu'à ce titre, elle possède la liberté de religion. Il cerne ainsi ce droit18 :
[261] En conséquence, le Tribunal est d'avis, compte tenu de l'ensemble des circonstances et de la nature du droit invoqué, que Loyola a droit à la protection de sa liberté d'expression religieuse et de sa liberté d'enseigner la matière ÉCR avec son programme confessionnel catholique.
[52] Then, he restricts his analysis to the freedom of religion as guaranteed by the Quebec Charter 17. He concludes that Loyola is a person within the meaning of the Charter and as such, it enjoys freedom of religion. He identifies this right as follows18:
[261] Accordingly, the Court is of the opinion, given all the circumstances and the nature of the right invoked, that Loyola is entitled to the protection of its freedom of religious expression and its freedom to teach the ERC course using its Catholic program.
[53] Puis, il décide que la décision de la Ministre porte atteinte au droit à la liberté de religion de Loyola et de ses membres. Il explique la position intenable de l'école, placée entre une croyance religieuse sincère de devoir enseigner les préceptes de la religion catholique et les exigences du programme ministériel. À son avis, la décision de la Ministre n'étant pas une règle de droit, il est impossible de la sauvegarder dès qu'elle porte atteinte à un droit consacré par les Chartes.[53] Then he decides that the decision of the Minister violates the right to freedom of religion for Loyola and its members. He explains the untenable position of the school, placed between a sincere religious belief of having to teach the precepts of the Catholic religion and the requirements of the ministerial program. In his view, the decision of the Minister is not law, and therefore this decision is impossible to safeguard where it infringes upon a right enshrined in the Charters.
[54] Il ajoute que le critère de l'atteinte minimale n'est pas respecté.[54] He adds that it does not satisfy the minimal impairment test.
[55] Le juge considère la présence de l'intimé Zucchi comme une intervention conservatoire puisqu'il appuie les prétentions de Loyola et qu'il ne demande aucune conclusion personnelle.[55] The judge considers the presence of the respondent, Zucchi, as a conservatory intervention as it supports the claims of Loyola and requires no personal conclusion.
[56] Le juge conclut par un épilogue. Au paragraphe 331, il dit paraphraser le juge Beetz de la Cour suprême et compare la décision de la Ministre à une décision datant de l'inquisition19 :
[331] Pour paraphraser les propos du juge Beetz dans l'arrêt Slaight Communications Inc. énoncés relativement à la liberté d'expression, mais tout aussi pertinents à la liberté d'expression religieuse, l'obligation imposée à Loyola d'enseigner la matière ÉCR de façon laïque revêt un caractère totalitaire qui équivaut, essentiellement, à l'ordre donné à Galilée par l'Inquisition de renier la cosmologie de Copernic.
[Référence omise]

[56] The judge concludes with an epilogue. In paragraph 331, he says that he paraphrases Justice Beetz of the Supreme Court and compares the Minister's decision to a decision dating back to the Inquisition19 :
[331] To paraphrase Beetz J.’s comments in Slaight Communications Inc. — comments that pertain to freedom of expression but are just as relevant to freedom of religious expression—the obligation imposed on Loyola to teach the ERC course in a secular manner is totalitarian in nature and essentially tantamount to the command given to Galileo by the Inquisition to abjure the cosmology of Copernicus.
[Reference omitted]
QUESTIONS EN LITIGEMATTERS IN DISPUTE (or LITIGATION)
[57] D'abord, sur le volet de droit administratif et ensuite sur le volet du droit constitutionnel, je propose les questions suivantes :
a) Le juge de première instance a-t-il correctement identifié la norme de contrôle en choisissant celle de la décision correcte ?
b) Si la norme de contrôle est celle de la décision raisonnable, la décision de la Ministre faisait-elle partie des issues possibles ?
c) Le juge de première instance a-t-il raison de conclure que Loyola peut invoquer la liberté de religion ? 
d) Le juge de première instance erre-t-il en concluant à une atteinte à la liberté de religion ? 
e) Le juge de première instance erre-t-il en décidant que cette atteinte ne peut être justifiée ?
[57] First, for the aspect of administrative law and then that of constitutional law, I propose the following questions:

a)
Did the trial judge correctly identify the standard of review by choosing that of the correct decision?

b)
If the standard of review is reasonableness, was the Minister's decision part of the possible outcomes?

c)
Is the trial judge right in concluding that Loyola may invoke freedom of religion?

d)
Does the trial judge err when he concludes that freedom of religion is being violated?

e)
Does the trial judge err by deciding that this violation cannot be justified?
[58] Le litige porte sur l'application des articles 22 et 22.1 du Règlement d'application de la LEP20 qui sont rédigés ainsi :
22. Tout établissement est exempté de l'application du premier alinéa de l'article 32 de la Loi sur l'enseignement privé (L.R.Q., c. E- 9.1) pourvu que l'établissement offre des programmes jugés équivalents par le ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport.
En outre, si le ministre l'autorise, une organisation ou association à caractère religieux sans but lucratif est exemptée de l'application du paragraphe 1 du premier alinéa de l'article 25, du quatrième alinéa de l'article 32 et de l'article 35 de la Loi pourvu qu'une telle organisation ou association remplisse les conditions déterminées par le ministre.
22.1Le ministre peut, aux conditions qu'il détermine, exempter de l'application de toutes les dispositions de la Loi, une personne ou un organisme qui dispense dans ses installations tout ou partie des programmes d'études en formation professionnelle établis par le ministre et énumérés dans une liste établie conjointement par le ministre et le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale.
[58] The dispute concerns the application of Articles 22 and 22.1 of the Regulations respecting the application of the Act respecting private education (LEP)20 which are written as follows:
22.An institution is exempted from the application of the first paragraph of Article 32 of the Act respecting private education (i.e. E-9.1) provided that the institution offers programs deemed equivalent by the Minister of Education, Recreation and Sport.
In addition, if authorized by the Minister, a non-profit organization or religious association is exempt from the application of paragraph 1 of the first paragraph of Article 25, the fourth paragraph of Article 32 and the Section 35 of the Act provided that such organization or association meets the conditions determined by the Minister.
22.1The Minister may, on the conditions it determines, exempt from the application of all the provisions of the Act, a person or organization that provides facilities in all or part of the curriculum in vocational training established by the Minister and the Minister of Employment and Social Solidarity.
[59] La Ministre, nous l'avons vu, est responsable de l'application des lois relatives à l'éducation selon la Loi sur le ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sports21.[59] The Minister, we have seen, is responsible for the enforcement of laws relating to education according to the Act respecting the Ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport21.
[60] La Loi sur l'instruction publique22 (LIP) régit au premier chef le domaine de l'éducation. Selon l'article 461 de cette loi, la Ministre établit les programmes d'études dans les matières obligatoires qui comprennent des objectifs et un contenu obligatoires.[60] The Education Act22 (LIP) primarily governs the field of education. According to section 461 of this Act, the Minister establishes the curriculum for the compulsory subjects, which include goals and content requirements.
[61] L'article 447 de cette même loi donne au gouvernement le pouvoir d'établir, par règlement, un régime pédagogique portant notamment sur la nature, les objectifs et le cadre général d'organisation de l'enseignement.[61] Article 447 of the same Act grants the government the authority to establish, by regulation, Basic School Regulations (régime pédagogique) including the nature, objectives, and general organization framework of education.
[62] C'est en vertu de cet article que le règlement du Régime pédagogique de l'éducation préscolaire, de l'enseignement primaire et de l'enseignement secondaire23 est adopté.[62] It is under this section that the Basic school regulation for preschool, primary and secondary education23 was adopted.
[63] Essentiellement, le Régime pédagogique stipule les règles relatives aux admissions, à la fréquentation scolaire, aux évaluations scolaires et à la répartition des matières. Le programme d'ÉCR y est prévu à titre de matière obligatoire aux premier et deuxième cycles du secondaire (art. 23 et 23.1).[63] Essentially, the Basic School Regulation provides rules regarding admissions, attendance, school evaluations, and subject-time allocations. The ERC course is compulsory for the first and second cycles of secondary school (s. 23 and 23.1).
[64] L'article 25 du Régime pédagogique permet aux écoles d'attribuer, sans autorisation de la Ministre, un maximum de quatre unités à un programme d'études local, c'est-à-dire de modifier ou d'adapter de leur propre chef le parcours de formation.[64] Section 25 of the Basic school regulation enables schools to assign, without the consent of the Minister, a maximum of four units to a local curriculum, that is, to initiate modifications or adaptations to their own teaching program.
[65] Par ailleurs, la LEP régit l'activité des établissements d'enseignement privés. Elle impose, à l'article 25, aux écoles privées l'obligation de respecter le régime pédagogique imposé par la LIP24 :
25. Le régime pédagogique applicable aux services éducatifs visés par la présente section est le même que celui, édicté en application de la Loi sur l'instruction publique (chapitre 1-13.3), applicable aux services éducatifs de même catégorie dispensés par les commissions scolaires, pour tout ce qui concerne :
1 ° les matières à enseigner, sous réserve des restrictions mentionnées au permis, le cas échéant;
[...]
[65] In addition, the Act respecting Private Education (LEP) regulates the activity of private schools. It requires, in Section 25, that private schools meet the requirements of the program organization imposed by the Education Act (LIP)24:
25. The basic school regulation applicable to educational services referred to in this section is the same as that which, enacted pursuant to the Education Act (chapter I-13.3), is applicable to educational services of the same category provided by school boards, for matters pertaining to:
1 subjects to be taught, subject to the limitations specified in the permit, if applicable;
[...]
[66] Un établissement privé doit enseigner les matières prévues au Régime pédagogique, dont la matière obligatoire du programme ÉCR alors que le premier alinéa de l'article 32 de la LEP spécifie que ces établissements doivent suivre les programmes d'études des matières obligatoires tels qu'établis par le ministère25:
32. À l'enseignement primaire et à l'enseignement secondaire général, les programmes d'études en ce qui a trait à l'enseignement des matières obligatoires sont ceux établis par le ministre en vertu de l'article 461 de la Loi sur l'instruction publique (chapitre 1- 13.3).
 [ ...]
[66] A private school must teach the subjects required by the Basic School Regulation (Régime pédagogique), including the compulsory program ERC, where the first paragraph of section 32 of the Act respecting private education (LEP) specifies that these institutions must follow the curriculum for compulsory subjects as established by the ministry25:
32.The elementary school program of studies and the secondary school program of studies in general education shall, for compulsory subjects, be the programs established by the Minister under section 461 of the Education Act (chapter I-13.3).
[...]
[67] Ensuite, l'article 111 de la LEP permet au gouvernement d'adopter des règlements afin d'appliquer la loi. Le septième alinéa de cet article permet au gouvernement d':
exclure, aux conditions qu'il peut déterminer, ou autoriser, dans la mesure qu'il indique, le ministre à exclure, aux conditions que ce dernier peut déterminer, des personnes, organismes, établissements ou services éducatifs de tout ou partie des dispositions de la présente loi ou des règlements pris en application du présent article;
[67] Then, Section 111 of the Act respecting private education (LEP) allows the government to adopt regulations in order to implement the law. The seventh paragraph of this section allows the government to:
exclude, on the conditions it may determine or authorize, to the extent it indicates, the Minister to exclude, on the conditions he may determine, persons, bodies, institutions or educational services from all or some of the provisions of this Act or of the regulations made under this section;
[68] Le Règlement d'application traite notamment des permis d'enseignement, des contrats avec les établissements privés et de certaines exclusions.[68] The Regulation for application deals more particularly with teaching permits, contracts with private institutions, and certain exclusions.
[69] Le Règlement d'application contient, en effet, des dispositions concernant les exclusions mentionnées à l'article 111.7° de la LEP.[69] In effect, the Regulation contains provisions for exclusions mentioned in Section 111.7 Education Act (LIP).
[70] Loyola fonde sa demande sur l'article 22 du Règlement d'application26 :[70] Loyola bases its request on Section 22 of the Regulation26:
22. Tout établissement est exempté de l'application du premier alinéa de l'article 32 de la Loi sur l'enseignement privé (L.R.Q., c. E- 9.1) pourvu que l'établissement offre des programmes jugés équivalents par le ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport.
[Je souligne]
22. An institution is exempted from the application of the first paragraph of Section 32 of the Act respecting private education (i.e. E-9.1) provided that the institution offers programs deemed equivalent by the Minister of Education, Recreation and Sport.
[Emphasis added]
ANALYSEANALYSIS
Volet droit administratif 
Prétentions des parties
Administrative Rights Component
Claims of the Parties
[71] Le PGQ est d'avis que la décision de la Ministre est bien fondée. Il plaide donc que le juge de première instance a erré en révisant cette décision.[71] The AGQ is of the opinion that the decision of the Minister is well founded. He therefore argues that the trial judge erred in reviewing the decision.
[72] Il prétend que l'article 22 du Règlement d'application accorde un pouvoir discrétionnaire à la Ministre afin d'évaluer l'équivalence entre un programme proposé par un établissement d'enseignement et le programme ministériel. Le PGQ explique qu'il serait incongru de confier l'application de la loi et l'élaboration de la totalité des programmes d'études à la Ministre tout en ne lui laissant pas la discrétion pour évaluer les équivalences entre deux programmes.[72] He argues that Section 22 of the Regulation gives discretion to the Minister to assess the equivalence between a program offered by an educational institution and the ministerial program. The AGQ explains that it would be incongruous to entrust the enforcement of the law and the development of the entire curriculum to the Minister, while not leaving her any discretion to evaluate the equivalence between two programs.
[73] Ensuite, le PGQ fait valoir que le gouvernement peut déléguer ce pouvoir discrétionnaire à la Ministre.[73] Then the AGQ argues that the government may delegate this discretion to the Minister.
[74] Selon lui, lors des contrôles judiciaires, les décisions ministérielles discrétionnaires commandent un très haut degré de déférence de la part du tribunal. En l'espèce, le PGQ plaide que la Ministre a correctement utilisé sa discrétion et qu'elle n'a pas agi sans compétence, ou pour une fin impropre ou de façon discriminatoire. Elle a évalué l'équivalence des programmes selon les finalités et les objectifs du programme ÉCR. Le PGQ fait ensuite la démonstration que le programme proposé par Loyola n'est pas équivalent à celui élaboré par le ministère et qui fait partie des programmes obligatoires. Il explique l'historique de la réforme de l'éducation au Québec qui a mené à des objectifs d'objectivité et de neutralité et explique l'importance de la compétence de la pratique du dialogue dans le programme ECR. Pour le PGQ, la décision de la Ministre n'était pas susceptible de révision.[74] According to him, during judicial reviews, discretionary ministerial decisions require a great degree of deference from the court. In this case, the AGQ argues that the Minister correctly used her discretion and that she did not act without jurisdiction, or for an improper purpose or in a discriminatory manner. She assessed the equivalency of the programs according to the aims and objectives of the ERC program. The AGQ then demonstrates that the program offered by Loyola is not equivalent to that developed by the Ministry and part of the mandatory programs. He explains the history of educational reform in Quebec, which has led to goals of objectivity and neutrality, and explains the importance of the competency in the practice of dialogue in the ERC program. For the AGQ, the decision of the Minister was not subject to review.
[75] Également, le PGQ fait valoir que les pouvoirs discrétionnaires des ministres peuvent être exercés par des fonctionnaires de leur ministère par délégation implicite.[75] Also, the AGQ argues that the discretionary powers of ministers may be exercised by officials of the ministry by implicit delegation.
[76] Finalement, il soutient que donner suite à la demande d'exemption de Loyola équivaut à rendre obligatoire un cours confessionnel.[76] Finally, he argues that to follow up on Loyola's request for exemption is equivalent to making a confessional course mandatory.
[77] Quant à eux, Loyola et Zucchi défendent tous azimuts la décision du juge de première instance. Ils se plaignent de ce que le programme ÉCR « forcerait effectivement l'École à abandonner son caractère et sa mission catholique, le temps du cours ».[77] For their part, Loyola and Zucchi defend all around the trial judge's decision. They complain that the ERC program “would effectively force the school to abandon its Catholic character and mission during the course.”
[78] Ils plaident aussi que l'ajout du critère à caractère confessionnel dans l'analyse de l'équivalence par la Ministre équivaut à un excès de compétence. Comme le Règlement d'application ne prévoit aucun tel critère de comparaison, la norme de contrôle applicable à la décision de la Ministre serait celle de la décision correcte.[78] They also argue that the inclusion of faith-based criterion in the analysis of equivalence by the Minister is equivalent to an excess of jurisdiction. As the Regulation for application provides no such basis for comparison, the standard of review applicable to the decision of the Minister is that of correctness.
[79] Loyola et Zucchi estiment que la finalité de l'article 22 du Règlement d'application est de permettre de la souplesse dans l'application des programmes prévus par le ministère.[79] Loyola and Zucchi believe that the purpose of Section 22 of the Regulation is to allow flexibility in the application of the programs provided by the Ministry.
[80] Ils plaident, en s'appuyant sur l'arrêt de la Cour suprême Adler c. Ontario27, qu'il serait contraire aux objectifs de la loi d'ajouter un critère fondé sur le caractère confessionnel. Loyola et Zucchi ajoutent que l'expert du PGQ a reconnu que le confessionnalisme est toujours légitime dans les écoles privées.[80] They argue, relying on the judgment of the Supreme Court Adler v. Ontario27, that it would be contrary to the objectives of the Act to add a criterion based on confessionality. Loyola and Zucchi add that the AGQ's expert acknowledged that confessionality is still legitimate in private schools.
[81] Dans un argument fondé sur la comparaison de l'article 22 avec l'article 22.1 du Règlement d'application, Loyola et Zucchi soutiennent que la Ministre et, à plus forte raison son fonctionnaire, ne peuvent établir les conditions d'exemption. Ils expliquent que ce n'est pas parce que le gouvernement peut déléguer un pouvoir qu'il l'a fait.[81] In an argument based on a comparison of Section 22 with Section 22.1 of the Regulation, Loyola and Zucchi argue that the Minister and, a fortiori her administrative officer, cannot establish the conditions for exemption. They explain that it is not because the government may delegate a power, that it actually did.
[82] En outre, Loyola et Zucchi estiment que le programme proposé par Loyola répond à la compétence de la pratique du dialogue. Ils ajoutent que l'employée ayant comparé les programmes a fait son analyse à partir d'une documentation incomplète. Selon eux, le juge de première instance ne commet aucune erreur révisable en concluant que leur programme comporte la compétence de la pratique du dialogue.[82] In addition, Loyola and Zucchi believe that the program offered by Loyola includes the competency of the practice of dialogue. They add that the employee who compared the programs did her analysis from incomplete documentation. According to them, the trial judge makes no reviewable error in concluding that their program includes the competency of the practice of dialogue.
a) Le juge de première instance a-t-il correctement identifié la norme de contrôle en choisissant celle de la décision correcte ?
a) Did the trial judge correctly identify the standard of review by choosing that of the correct decision?
[83] Je suis d'abord d'avis que le juge de première instance ne pouvait se substituer à la Ministre.[83] First of all, I believe that the trial judge could not replace the Minister.
[84] L'article 22 du Règlement d'application comporte, à sa face même, une large discrétion par l'utilisation des termes « jugés équivalents ».[84] Section 22 of the Regulations has, on its face, a wide discretion in the use of the terms “deemed equivalent”.
[85] Le juge a eu tort de conclure à l'illégalité de la décision au motif que c'est un fonctionnaire du ministère qui établit les conditions d'équivalence. En conséquence, il a mal identifié la norme de contrôle.[85] The judge was wrong in concluding that the decision was illegal on the grounds that it is a ministry official who establishes the conditions for equivalency. As a result, he misidentified the standard of review.
[86] Je suis d'avis que la norme d'intervention est celle de la décision raisonnable. Ceci étant, je considère que la Ministre a correctement exercé sa discrétion et qu'il n'y avait pas matière à intervention.[86] I am of the opinion that the standard of review is that of reasonableness. This being said, I believe that the Minister has correctly exercised her discretion and that there were no grounds for intervention.
[87] La Cour suprême dans l'arrêt Baker c. Canada offre une définition de la notion de pouvoir discrétionnaire qu'il convient de reprendre ici : « La notion de pouvoir discrétionnaire s'applique dans les cas où le droit ne dicte pas une décision précise, ou quand le décideur se trouve devant un choix d'options à l'intérieur de limites imposées par la loi28 ».[87] The Supreme Court in Baker v. Canada offers a definition of the concept of discretion which it is appropriate to apply here: “The concept of discretion applies in cases where the law does not dictate a specific outcome, or when the decision maker is faced with options within the limits imposed by the law28.”
[88] Plus récemment, dans Catalyst Paper Corp. c. North Cowichan (District)29 , la Cour suprême a retenu que la norme de contrôle applicable était celle de la décision raisonnable lorsque la décision de l'organisme administratif s'inscrit dans un contexte où plusieurs issues sont possibles :[88] More recently, in Catalyst Paper Corp. v. North Cowichan (District)29, the Supreme Court held that the applicable standard of review was that of reasonableness where the decision of the administrative agency is within a context where multiple outcomes are possible:
[24] Il est donc clair que les tribunaux appelés à réviser le caractère raisonnable de règlements municipaux doivent le faire au regard de la grande variété de facteurs dont les conseillers municipaux élus peuvent légitimement tenir compte lorsqu'ils adoptent des règlements. Le critère applicable est le suivant : le règlement ne sera annulé que s'il s'agit d'un règlement qui n'aurait pu être adopté par un organisme raisonnable tenant compte de ces facteurs. Le fait qu'il faille faire preuve d'une grande retenue envers les conseils municipaux ne signifie pas qu'ils ont carte blanche.
[24] It is thus clear that courts reviewing bylaws for reasonableness must approach the task against the backdrop of the wide variety of factors that elected municipal councillors may legitimately consider in enacting bylaws. The applicable test is this: only if the bylaw is one no reasonable body informed by these factors could have taken will the bylaw be set aside. The fact that wide deference is owed to municipal councils does not mean that they have carte blanche.
[25] La norme de la décision raisonnable restreint les conseils municipaux en ce sens que la teneur de leurs règlements doit être conforme à la raison d'être du régime mis sur pied par la législature. L'éventail des issues raisonnables est donc circonscrit par la portée du schème législatif qui confère à la municipalité le pouvoir de prendre des règlements. 
25] Reasonableness limits municipal councils in the sense that the substance of their bylaws must conform to the rationale of the statutory regime set up by the legislature. The range of reasonable outcomes is thus circumscribed by the purview of the legislative scheme that empowers a municipality to pass a bylaw.
[26] La loi applicable en l'espèce est la Community Charter, S.B.C. 2003, ch. 26. Son article 197 confère aux municipalités un pouvoir discrétionnaire large et quasi illimité de fixer les taux de l'impôt foncier à payer au titre de chacune des catégories d'immeubles se trouvant sur son territoire, sous réserve des !imites prescrites par règlement. La portée de ce pouvoir que le régime législatif actuellement en vigueur confère aux municipalités ressort du fait que le gouvernement de la Colombie-Britannique a cessé, en 1985, d'imposer des limites réglementaires aux rapports permis entre les taux d'imposition. L'alinéa 199b) de la Community Charter donne au lieutenant-gouverneur en conseil le pouvoir de prendre des règlements sur le rapport entre le taux d'imposition des immeubles de catégorie 1 et celui des immeubles de catégorie 4, et aucun règlement de ce genre n'a été pris depuis l'abrogation du règlement de 1984, qui prévoyait un rapport de 1:3,4 entre le taux d'impôt foncier sur les immeubles résidentiels et celui applicable aux immeubles de grande industrie : B.C. Reg. 63/84, adopté en vertu de l'al. 14.1(3)b) de la Municipal Finance Authority Act, 1979, ch. 292, la disposition qui a précédé l'al. 199b) de la Community Charter. Des dispositions spéciales de la Community Charter en matière d'imposition de bien-fonds, de services locaux, de zones d'amélioration commerciale ou d'exemptions fiscales en fonction de la valeur des immeubles répondent à des besoins particuliers et n'enlèvent rien au large pouvoir des municipalités de la Colombie-Britannique de modifier le rapport entre les taux applicables à diverses catégories d'immeubles.
[26] Here the relevant legislation is the Community Charter. Section 197 gives municipalities a broad and virtually unfettered legislative discretion to establish property tax rates in respect of each of the property classes in the municipality, unless limited by regulation. The intended breadth of the legislative discretion under the current legislative scheme is highlighted by the fact that the government of British Columbia ceased to impose regulatory limits on the ratios between tax rates in 1985. Section 199(b) of the Community Charter allows the Lieutenant Governor in Council to make regulations on the relationships between Class 1 and Class 4 tax rates, and no regulation of this sort has been reintroduced since the repeal of the 1984 regulation, which prescribed a 1 to 3.4 ratio between residential and major industry tax rates (B.C. Reg. 63/84, adopted pursuant to s. 14.1(3)(b) of the Municipal Finance Authority Act, R.S.B.C. 1979, c. 292, the predecessor of s. 199(b) of the Community Charter). Special provisions of the Community Charter relating to parcel taxation, local area services, business improvement areas, or property value tax exemptions address particular concerns and do not detract from the broad power of British Columbia municipalities to vary rates between different classes of property.
[89] En effet, un acte est discrétionnaire lorsque l'autorité administrative a le choix entre plusieurs solutions30. Par contre, selon le professeur Pierre Lemieux, dans le cas d'une compétence liée, « l'action de l'autorité administrative doit s'insérer étroitement dans le cadre prévu par le législateur31». Le pouvoir d'un ministre sera donc lié, s'il doit agir dans un sens déterminé lorsque certaines conditions objectives prévues par la loi existent32.[89] Indeed, an act is discretionary where the administrative authority has the option between several solutions30. By contrast, according to Professor Pierre Lemieux, where non discretionary power is involved, “the action of the administrative authority must fit closely within the framework provided by the legislator31.” The power of a minister will therefore be bound, if he must act in a particular way when certain objective conditions laid down by law exist32.
[90] Pour qualifier un pouvoir de discrétionnaire, l'auteur Patrice Garant indique dans son ouvrage Droit administratif qu'il faut lire le texte de la norme habilitante33 :
Le législateur confère habituellement un pouvoir lié en utilisant le terme « doit », alors qu'un pouvoir discrétionnaire sera généralement attribué à son titulaire par le terme « peut », ou l'une ou l'autre des expressions suivantes : « s'il juge convenable », « s'il estime opportun », « s'il estime conforme à l'intérêt public », « selon qu'il le juge nécessaire », « peut à sa discrétion », « peut s'il le juge à propos », etc.
[90] To qualify a power as discretionary, the author Patrice Garant indicates in his book Droit administratif (Administrative Law) that one needs to read the text of the enabling standard33:
Parliament usually confers a non discretionary power using the word “shall” [Translator’s Note : the French “doit” in legal documents is translated “shall” but has the meaning of “must”], while a discretionary power is generally granted to its holder by the term “may”, or any of the following expressions: "if he deems it appropriate,” “if he sees it fit”, “if he considers it consistent with the public interest”, “as he deems necessary”, “may, at his discretion”, “may, if he deems advisable”, etc.
[91] Le contexte législatif peut aussi indiquer si un pouvoir est discrétionnaire34.[91] The legislative context may also indicate if a power is discretionary.
[92] Pour les auteurs Pierre lssalys et Denis Lemieux : « l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire n'est valide que dans la mesure où il correspond à l'esprit et à la lettre de la norme habilitante [...]35» Ils ajoutent cependant36:
une interprétation restrictive d'un pouvoir discrétionnaire ne doit pas empêcher que celui-ci s'exerce efficacement. On ne pourra donc l'entraver au point que l'intention du législateur soit mise de côté, car ainsi l'objet de la loi ne pourrait être atteint. Certains actes seront donc estimés nécessaires pour la mise en œuvre d'une loi, même si celle-ci ne prévoit pas expressément leur adoption. Leur auteur sera donc habilité par déduction nécessaire.
[92] According to authors Issalys Pierre and Denis Lemieux: “the exercise of discretionary power is only valid insofar as it corresponds to the spirit and the letter of the enabling standard [...]35” "They add, however36:
a restrictive interpretation of a discretionary power should not prevent it from being exercised effectively. It may therefore not be hindered to the extent where the legislator’s intent is set aside, since then the purpose of the Act could not be achieved. Certain acts will therefore be deemed necessary for the implementation of a law, even if that law does not expressly provide for their adoption. Their author will therefore be qualified by necessary implication.
[93] Le juge de première instance commet une erreur déterminante lorsqu'il conclut que le pouvoir octroyé à la Ministre est un pouvoir lié. Il n'y a pas d'exemption « en quelque sorte automatique37», comme l'écrit le premier juge. Le législateur délégué a choisi de conférer au Ministre une discrétion.[93] The trial judge commits a decisive error when he concludes that the power granted to the Minister is of a non discretionary nature. There is no “some sort of automatic”37 exemption, as the trial judge writes. The delegate legislator has chosen to grant to the Minister discretionary power.
[94] D'ailleurs, le texte du Règlement d'application ne contient pas les termes « doit » ni « peut » ni des termes similaires, qui pourraient être indicatifs d'un pouvoir lié.[94] Moreover, the text of the Regulations contains neither the terms “shall” nor “may” nor any similar terms, which could indicate a non discretionary power.
[95] Je comprends que si la Ministre juge le programme offert par l'établissement équivalent au programme ministériel, elle devra l'exempter de suivre le programme prescrit. Le pouvoir discrétionnaire se situe au niveau de l'appréciation de l'équivalence. Si la Ministre juge que le programme proposé est équivalent, mais n'accorde pas l'exemption demandée, le requérant aurait possiblement un recours en mandamus pour l'obliger à agir dans ce sens. Par contre, il est impossible de l'obliger à juger qu'un programme est équivalent à un autre, dans la mesure où il ne s'écarte pas de la finalité de la loi et ne prend pas sa décision pour des motifs étrangers à cette finalité.[95] I understand that if the Minister considers the program offered by the institution equivalent to the ministerial program, she will have to exempt it from following the prescribed curriculum. Discretionary power is applied when evaluating the equivalency. If the Minister considers that the proposed program is equivalent, but does not grant the exemption requested, the applicant could possibly seek a mandamus to oblige her to act accordingly. By contrast, it is impossible to force her to determine that one program is equivalent to the other, insofar as it does not deviate from the purpose of the law, and does not make her decision for reasons unrelated to this purpose.
[96] Comme l'écrit Pierre Lemieux, la question est de savoir en quoi l'administration est libre38 .[96] As Pierre Lemieux writes, the question has to do with how the public administration is free38.
[97] Quant à lui, Patrice Garant indique que le pouvoir discrétionnaire ne réfère pas nécessairement à toutes les composantes d'un acte. Il peut se situer à plusieurs niveaux39. En l'espèce, il se situe au niveau de la décision de la Ministre de juger de l'équivalence d'un programme local.[97] For his part, Patrice Garant indicates that discretionary power does not necessarily refer to all components of an act. It can occur at several levels39. In this case, it applies to the decision of the Minister to assess the equivalency of a local program.
[98] La nature même de la demande d'exemption rend nécessaire l'existence d'un pouvoir discrétionnaire. Selon le deuxième article de la Loi sur Je ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport, la Ministre a comme fonction d'« assurer le développement des établissements d'enseignement et veiller à la qualité des services éducatifs dispensés par ces établissements40». La LIP lui confère également cette fonction (art. 459). Le préambule de la Loi sur Je ministère reconnaît le droit de tout enfant de « bénéficier d'un système d'éducation qui favorise le plein épanouissement de sa personnalité ».[98] The very nature of the exemption request renders necessary the existence of discretionary power. According to Section 2 of the Act respecting the Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport, the Minister has the duty of “ensuring the development of educational institutions and overseeing the quality of the educational services provided by those institutions40”. The Education Act also grants her this responsibility (s. 459). The preamble to the Act respecting the Ministère recognizes for every child the right “to benefit from an education system conducive to the full development of his personality”."
[99] La Ministre a besoin de sa discrétion pour pouvoir assumer le rôle que lui donne le législateur sinon, dès qu'une demande d'exemption sera formulée, elle aura les mains liées et perdra la faculté que lui confère la loi de juger de l'équivalence.[99] The Minister needs this discretionary power in order to fulfil the role granted by the legislator. Otherwise, whenever an exemption is requested, her hands will be tied and she will lose the power conferred upon her by law to assess equivalency.
[100] Comme la Ministre doit établir les programmes d'études dans les matières obligatoires (art. 461 de la LIP), il serait absurde de la priver de la discrétion nécessaire pour évaluer les conditions selon lesquelles un programme alternatif est équivalent.[100] Since the Minister must establish the curriculum for compulsory subjects (s. 461 of the Education Act), it would be absurd to deny her the discretionary power necessary to assess the conditions under which an alternative program is equivalent.
[101] Comme je le mentionnais précédemment, la mise en oeuvre de la loi relative à l'enseignement privé rend nécessaire l'exercice d'une discrétion qui devra évidemment s'exercer en fonction des objectifs poursuivis par le législateur.[101] As I mentioned earlier, the implementation of the Private Education Act makes it necessary to exercise discretion which must obviously be exercised in accordance with the objectives pursued by the legislature.
[102] Comme la Ministre a le pouvoir de juger l'équivalence au programme ministériel, je ne vois pas comment, en comparant l'approche confessionnelle du programme de Loyola à l'approche culturelle et neutre du programme ÉCR, elle excède sa juridiction. Il ne s'agit pas de l'ajout de critères à ceux prévus par le législateur.[102] Since the Minister has the power to assess equivalency to the ministerial program, I do not see how, by comparing the confessional approach of Loyola’s program to the cultural and neutral approach of the ERC program, she exceeds her jurisdiction. It has nothing to do with adding criteria to those provided by the legislature.
[103] Le juge de première instance conclut que l'article 22 du Règlement d'application ne doit pas être interprété pour donner à la Ministre le pouvoir de décider les conditions de l'exemption, car cela serait une délégation illégale d'un pouvoir discrétionnaire. Je ne suis pas d'accord.[103] The trial judge concludes that Section 22 of the Regulations must not be interpreted to give the Minister the power to decide on the conditions of exemption, because that would be an unlawful delegation of a discretionary power. I do not agree.
[104] Il est vrai que le titulaire d'un pouvoir discrétionnaire conféré par le législateur ne peut le déléguer à une autre personne (la règle delegatus non potest delegare). Les auteurs Issalys et Lemieux écrivent à ce sujet41 :[104] It is true that the holder of a discretionary power conferred by the legislature cannot delegate it to another person (delegatus non potest delegare principle). Authors Issalys and Lemieux write on this topic41:
Toute délégation d'un pouvoir discrétionnaire qui serait faite par voie de règlement (voir 7.28), directive (voir 2.19) ou pratique administrative (voir 2.22) sera donc illégale à moins d'être habilité expressément par la loi.
[...]
Il y aura notamment délégation illégale d'un pouvoir discrétionnaire lorsqu'au lieu de prévoir des normes complètes et suffisantes, on laisse à d'autres le soin de les établir ou de les compléter (voir 7.28).
Any delegation of a discretionary power that is made by regulation (see 7.28), directive (see 2.19) or an administrative practice (see 2.22) will therefore be illegal unless expressly authorized by law.
[...]
In particular, there will be unlawful delegation of discretionary power when, instead of prescribing adequate and comprehensive standards, others are left the task of establishing or completing these standards. (See 7.28).
[105] En l'espèce, la loi habilite expressément le gouvernement à autoriser la Ministre à exclure des établissements de l'application d'une partie de la loi (art. 111.r LEP). Je ne partage pas l'avis du premier juge selon lequel, suivant son expression, ce n'est que « la première branche » de cette disposition qui habilite le gouvernement à octroyer à la Ministre le pouvoir prévu à l'article 22 du Règlement d'application. Comme expliqué précédemment, je suis d'avis qu'il s'agit d'un pouvoir discrétionnaire. Pour reprendre les termes de l'article 111.r LEP, si le législateur ne voulait pas « autoriser, dans la mesure qu'il indique, le ministre à exclure, aux conditions que ce dernier peut déterminer [...] », il ne lui aurait pas donné le pouvoir de juger si un programme est équivalent.[105] In this case, the law expressly empowers the government to allow the Minister to exclude facilities from the application of part of the law (section 111.r An Act respecting private education). I do not agree with the trial judge that, using his words, only the “first component” of this provision that empowers the government to grant to the Minister the power provided for under Section 22 of the Regulations. As explained earlier, I believe it is a matter of discretionary power. To use the wording of Section 111.r Act respecting private education (), if the legislature did not want to “authorize, to the extent specified, the Minister to exclude, subject to such conditions as she may determine [...]”, the legislature would not have given her the power to decide whether a program is equivalent.
[106] Le juge reproche aussi que l'étude des critères d'équivalence des programmes a été élaborée par un fonctionnaire du ministère, Jacques Pettigrew.[106] The judge also criticizes that a ministerial official, Jacques Pettigrew, developed the program equivalence criteria.
[107] Comme l'écrivait la Cour suprême en 197742, il est irréaliste de penser qu'un ministre peut remplir personnellement tous les pouvoirs et fonctions confiés par la loi :
Lorsque l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire est confié à un ministre du gouvernement, on peut alors supposer que les mesures nécessaires seront prises par les fonctionnaires responsables du ministère et non par le ministre lui­ même : Carltona Ltd. v. Commissioners of Works. De nos jours, les fonctions d'un ministre du gouvernement sont si nombreuses et variées qu'il serait exagéré de s'attendre à ce qu'il les remplisse personnellement. On doit présumer que le ministre nommera des sous-ministres et des fonctionnaires expérimentés et compétents et que ceux-ci, le ministre étant responsable de leurs actes devant la législature, s'acquitteront en son nom de fonctions ministérielles dans les limites des pouvoirs qui leur sont délégués. Toute autre solution n'aboutirait qu'au chaos administratif et à l'incurie.
[Références omises]
[107] As stated by the Supreme Court in 197742, it is unrealistic to think that a Minister may personally perform all the powers and functions entrusted by law:
Thus, where the exercise of a discretionary power is entrusted to a Minister of the Crown it may be presumed that the acts will be performed, not by the Minister in person, but by responsible officials in his department: Carltona, Ltd. v. Commissioners of Works. The tasks of a Minister of the Crown in modern times are so many and varied that it is unreasonable to expect them to be performed personally. It is to be supposed that the Minister will select deputies and departmental officials of experience and competence, and that such appointees, for whose conduct the Minister is accountable to the Legislature, will act on behalf of the Minister, within the bounds of their respec­tive grants of authority, in the discharge of ministerial responsibilities. Any other approach would but lead to administrative chaos and inefficiency.
[Citations omitted]
[108] Les actes préparatoires à une décision ne comportent pas une délégation illégale d'un pouvoir discrétionnaire43.[108] Acts preparatory to a decision do not involve an unlawful delegation of discretionary power43.
[109] Pettigrew, le fonctionnaire responsable du programme ÉCR, confie la tâche d'effectuer une analyse comparative entre les programmes à une autre fonctionnaire, Nathalie Knott. Elle effectue l'analyse demandée selon les instructions de Pettigrew, c'est-à-dire de vérifier si l'approche des deux programmes et leur contenu sont équivalents. Il lui indique que l'approche du programme est « culturelle et non confessionnelle » et que son contenu est« Éthique- Culture religieuse- Dialogue ».[109] Pettigrew, the official in charge of the ERC program, entrusts the task to carry out a comparative analysis of both programs to another official, Nathalie Knott. She performs the requested analysis according to Pettigrew’s instructions; that is, to verify whether the approach and the contents of both programs are equivalent. He tells her that the approach of the program is “cultural and not confessional”, and that its content is “Ethics - Religious Culture - Dialogue.”
[110] Au terme de l'analyse signée par Jacques Pettigrew, celui-ci est d'avis que le programme de Loyola n'est pas équivalent au programme ÉCR. Ensuite, une fonctionnaire prépare une lettre à l'intention de la Ministre à ce sujet. Cette lettre est notamment approuvée par la sous-ministre adjointe aux réseaux, Une Gagné, et par le sous-ministre adjoint à l'éducation préscolaire et de l'enseignement primaire et secondaire, Alain Veilleux. Par cette lettre, les sous-ministres recommandent à la Ministre de refuser l'exemption demandée par Loyola. L'analyse précitée y est jointe. La décision de la Ministre qui parvient à Loyola est sensiblement fondée sur cette analyse, car ces motifs correspondent aux lacunes du programme de Loyola identifiées dans l'analyse.[110] At the conclusion of the analysis signed by Jacques Pettigrew, he considers that Loyola’s program is not equivalent to the ERC program. Then, a public service employee prepares a letter to the Minister in this regard. In particular, this letter is approved by the Assistant Deputy Minister for School Networks, Line Gagné, and by the Assistant Deputy Minister for Preschool, Primary and Secondary Education, Alain Veilleux. In this letter, the Deputy Ministers recommend that the Minister refuse the exemption requested by Loyola. The above analysis is attached. The decision of the Minister sent to Loyola substantially draws from this analysis, since the grounds correspond to deficiencies highlighted in the analysis of Loyola’s program.
[111] Ultimement, c'est la Ministre qui décide si le programme de Loyola est équivalent ou non au programme ÉCR.[111] Ultimately, it is the Minister who decides whether the Loyola’s program is equivalent or not to the ERC program.
[112] Dans un arrêt récent, 368226 Canada inc. c. Agence du revenu du Québec44 , notre Cour a rappelé l'existence de la règle d'interprétation dite de délégation implicite et son application, à moins que le texte même de la loi habilitante ne s'y oppose en conférant le pouvoir au ministre personnellement.[112] In a recent judgment, 368226 Canada inc. v. Québec Revenue Agency44, this Court noted the existence of the interpretation rule, the so-called implicit delegation rule and its application, unless the text of the enabling legislation provides to the contrary by empowering the Minister personally.
[113] Le juge a commis une erreur en identifiant la norme de contrôle de cette décision administrative comme étant la norme de la décision correcte. Je suis d'avis contraire et suis d'opinion que la Ministre n'a pas outrepassé sa compétence. J'ajouterais qu'en procédant selon les enseignements de la Cour suprême dans Dunsmuir, j'en viendrais aussi à la conclusion que la norme de contrôle est celle de la décision raisonnable.[113] The judge erred in identifying the standard of review of this administrative decision as the standard of correctness. I hold the opposite view and am of the opinion that the Minister has not exceeded her jurisdiction. I would add that building on the lessons learned from the Supreme Court in Dunsmuir, I also would come to the conclusion that the standard of review is reasonableness.
[114] Selon la Cour suprême45, il y a deux normes de contrôle :
[51] [...] Nous verrons qu'en présence d'une question touchant aux faits, au pouvoir discrétionnaire ou à la politique, et lorsque le droit et les faits ne peuvent être aisément dissociés, la norme de la raisonnabilité s'applique généralement. De nombreuses questions de droit commandent l'application de la norme de la décision correcte, mais certaines d'entre elles sont assujetties à la norme plus déférente de la raisonnabilité.
[114] According to the Supreme Court45, there are two standards of review:
[51] […] As we will now demonstrate, questions of fact, discretion and policy as well as questions where the legal issues cannot be easily separated from the factual issues generally attract a standard of reasonableness while many legal issues attract a standard of correctness. Some legal issues, however, attract the more deferential standard of reasonableness.
[115] Pour déterminer la norme de contrôle applicable, il faut d'abord vérifier si la jurisprudence l'a déjà déterminée pour la question soumise46 . Si ce n'est pas le cas, il faut se livrer à l'analyse de la norme de contrôle, tel que prévu dans Dunsmuir47.[115] To determine the applicable standard of review, it must first be ascertained whether it has already been determined for the case at hand by legal precedents46. If this is not the case, it is essential to conduct an analysis of the standard of review as set out in Dunsmuir47.
[116] Le constat de l'existence d'un pouvoir discrétionnaire confié par la loi à l'administration publique dicte la norme de contrôle appropriée : celle de la décision raisonnable48. Je suis d'accord avec le PGQ lorsqu'il écrit dans son mémoire: « Les décisions ministérielles à caractère discrétionnaire doivent être examinées avec un très haut degré de déférence, selon une jurisprudence constante et abondante49 ».[116] The determination of a discretionary power entrusted to public administration by law dictates the appropriate standard of review: that of reasonableness48. I agree with the AGQ when he writes in his memoir: “Discretionary ministerial decisions should be examined with a high degree of deference, according to consistent and abundant case law49.”
[117] La jurisprudence suggère donc d'adopter la norme de la décision raisonnable. De plus, les facteurs identifiés dans Dunsmuir de l'analyse de la norme de contrôle, considérés globalement, font ressortir l'application de cette norme.[117] Case law therefore suggests that the standard of reasonableness be adopted. In addition, the factors identified in Dunsmuir regarding the analysis of the standard of review, when considered as a whole, highlight the application of this standard.
[118] Ces facteurs sont50 :
[64] [...] (1) l'existence ou l'inexistence d'une clause privative, (2) la raison d'être du tribunal administratif suivant l'interprétation de sa loi habilitante, (3) la nature de la question en cause et (4) l'expertise du tribunal administratif. Dans bien des cas, il n'est pas nécessaire de tenir compte de tous les facteurs, car certains d'entre eux peuvent, dans une affaire donnée, déterminer l'application de la norme de la décision raisonnable.
[118] These factors are50:
[64] [...] (1) the presence or absence of a privative clause; (2) the purpose of the tribunal as determined by interpretation of enabling legislation; (3) the nature of the question at issue, and; (4) the expertise of the tribunal. In many cases, it will not be necessary to consider all of the factors, as some of them may be determinative in the application of the reasonableness standard in a specific case.
[119] Même si, comme le souligne le premier juge, aucune clause privative ne protège la décision de la Ministre51, l'analyse ne s'arrête pas là.[119] Even if, as pointed out by the trial judge, no privative clause protects the Minister’s decision51, the analysis does not stop there.
[120] La mission de la Ministre, dans le cadre législatif de l'éducation au Québec, est de veiller à la qualité de l'enseignement, je l'ai mentionné précédemment. Pour répondre à cet objectif, elle gère l'application des lois du domaine de l'éducation, établit des programmes d'enseignement, impose des cours obligatoires, etc. Ce facteur milite pour la norme de la raisonnabilité.[120] As I mentioned earlier, the mission of the Minister, within the legislative framework of education in Quebec, is to ensure the quality of education. To meet this goal, she administers application of law in the field of education, establishes educational programs, imposes compulsory courses, etc. This element argues in favour of the standard of reasonableness.
[121] Ensuite, la nature de la question en cause est l'équivalence entre deux programmes. Il s'agit d'une question hautement factuelle qu'elle examine dans les paramètres de sa spécialité. La Ministre possède une expertise certaine dans la décision d'accorder des exemptions de programme et dans l'analyse des équivalences entre des programmes d'enseignement.[121] Then, the nature of the issue at hand is one of equivalence between two programs. It is a highly factual issue that she examines within the framework of her specialty. The Minister has some expertise in the decision to grant exemptions to its program and in the analysis of equivalencies between curricula.
[122] La décision de la Ministre doit être examinée selon la norme de la raisonnabilité. Le juge Binnie répète dans l'arrêt Canada c. Khosa52 ce que commande cette norme :
[59] [...] Lorsque la norme de la raisonnabilité s'applique, elle commande la déférence. Les cours de révision ne peuvent substituer la solution qu'elles jugent elles-mêmes appropriée à celle qui a été retenue, mais doivent plutôt déterminer si celle-ci fait partie des « issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir, par. 47). Il peut exister plus d'une issue raisonnable. Néanmoins, si le processus et l'issue en cause cadrent bien avec les principes de justification, de transparence et d'intelligibilité, la cour de révision ne peut y substituer l'issue qui serait à son avis préférable.
[122] The decision of the Minister shall be reviewed according to a standard of reasonableness. Justice Binnie reiterates in Canada v. Khosa52 what that standard requires:

[59] [...] Where the reasonableness standard applies, it requires deference. Reviewing courts cannot substitute their own appreciation of the appropriate solution, but must rather determine if the outcome falls within “a range of possible, acceptable outcomes which are defensible in respect of the facts and law” (Dunsmuir, at para. 47). There might be more than one reasonable outcome. However, as long as the process and the outcome fit comfortably with the principles of justification, transparency and intelligibility, it is not open to a reviewing court to substitute its own view of a preferable outcome.
[123] Je suis d'avis que la décision de la Ministre de refuser la demande d'exemption fait partie des issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit. Les motifs donnés ne sont pas de « simples prétextes ». Ils sont transparents et intelligibles et ne sont pas étrangers aux objectifs poursuivis par le législateur.[123] I am of the opinion that the decision of the Minister to refuse the application for exemption is one of the possible and acceptable outcomes which are justifiable in respect of the facts and law. The reasons given are not “mere pretexts.” They are transparent and understandable and are not foreign to the objectives pursued by the legislator.
[124] En somme, la Ministre refuse l'exemption, car l'approche du programme Loyola est confessionnelle. Or, le programme ÉCR remplace l'enseignement religieux, passant d'un enseignement essentiellement confessionnel à un enseignement laïque. Il y est bien indiqué que le programme n'a comme objectif ni de proposer ou d'imposer des règles morales ni d'accompagner la quête spirituelle des élèves. À cet égard, il est nécessaire que l'enseignant ne fasse pas valoir ses croyances. En outre, dès la genèse du programme en 1999, il est question d'un enseignement non confessionnel.[124] In summary, the Minister denied the exemption because the approach of Loyola’s program is confessional. However, the ERC program replaces religious instruction, shifting the focus from a mainly confessional to a secular education. It is clearly indicated that the program’s purpose is neither to propose or impose moral rules, nor accompany the spiritual quest of students. In this regard, it is necessary that the teacher does not promote his beliefs. In addition, from the beginning of the program in 1999, it has been a question of non confessional instruction.
[125] Le programme proposé par Loyola semble viser l'enseignement d'un contenu similaire à celui de la Ministre, mais la perspective d'enseignement est sans contredit confessionnelle.[125] The program offered by Loyola seems to aim teaching content that is similar to that of the Minister, but its teaching approach is unquestionably confessional.
[126] En tenant compte de la volonté politique affirmée qui est de déconfessionnaliser l'enseignement, à ce sujet, je rappelle l'historique dressé par la juge Deschamps dans S.L. c. Commission scolaire des Chênes53 que j'ai cité en introduction, je ne vois pas comment on pourrait considérer la décision comme étant étrangère au cadre législatif et réglementaire qui gouverne l'activité du ministère.[126] In light of the stated political will to secularize education, in this regard, let me recall the history compiled by Deschamps J. in S.L. v. Commission scolaire des Chênes53 and that I mentioned in the introduction, I do not see how one could consider the decision as foreign to the legislative and regulatory framework that governs the activities of the ministry.
[127] Je suis d'avis que la décision de la Ministre est de nature discrétionnaire, qu'elle est raisonnable et donc, à l'abri du contrôle judiciaire.[127] I am of the opinion that the decision of the Minister is discretionary; it is reasonable and therefore immune from judicial review.
Volet droit constitutionnelConstitutional Law Aspect
Prétentions des parties
Claims of the parties
[128] Le PGQ plaide que Loyola, à titre de personne morale, ne peut invoquer une atteinte à sa liberté de religion. À son avis, elle ne possède pas ce droit, car une personne morale est incapable de formuler des croyances religieuses sincères. Le PGQ ajoute que Loyola ne peut plaider pour autrui, c'est-à-dire les élèves fréquentant l'école et leurs parents.[128] The AGQ argues that Loyola, as a corporation, cannot invoke a violation of freedom of religion. In his opinion, it does not have this right, since a corporation is unable to express sincere religious beliefs. The AGQ adds that Loyola cannot plead for another, that is to say, the students attending the school and their parents.
[129] Il soulève les problèmes de preuve de la thèse de Loyola : comment le directeur de l'école peut-il témoigner d'une atteinte à la liberté de religion de l'école et de ses membres ?[129] He raises the evidentiary issues related to Loyola’s claims: how can the principal demonstrate that the freedom of religion of the school and its members has been violated?
[130] Ensuite, le PGQ plaide que les Chartes ne protègent pas contre les atteintes négligeables aux droits. Il estime que Loyola n'identifie pas une croyance religieuse précise. Il cite plusieurs autorités selon lesquelles le programme ÉCR ne viole pas la liberté de religion. Comme argument, il présente une analogie avec l'affaire Chamberlain c. Surrey School District No. 3654 de la Cour suprême.[130] Then the AGQ argues that Charters do not protect against negligible infringements on their rights. He believes that Loyola does not identify a specific religious belief. He cites several authorities according to whom the ERC program does not violate the freedom of religion. As an argument, he puts forward an analogy with Chamberlain v. Surrey School District No. 3654 of the Supreme Court.
[131] En somme, le PGQ plaide que, s'il y a atteinte, il s'agit d'une atteinte négligeable. À ce sujet, il rappelle que Loyola peut donner un cours confessionnel de quatre crédits sans la permission de la Ministre.[131] In summary, the AGQ argues that, if there is an infringement, it is negligible. In this regard, he recalls that Loyola may teach a four-credit confessional course without the permission of the Minister.
[132] Subsidiairement, le PGQ prétend que la décision en l'espèce est prise en vertu d'une règle de droit, au sens de l'article premier de la Charte canadienne55. Selon lui, l'atteinte serait justifiée, il explique l'importance des objectifs poursuivis, que la décision permet d'atteindre ces objectifs et qu'il s'agit d'une atteinte minimale au sens de l'arrêt Oakes56.[132] Alternatively, the AGQ argues that the decision in this case is made under a rule of law, within the meaning of Section I of the Canadian Charter55. According to him, the infringement would be justified; he explains the importance of the objectives; that the decision allows for the attaining of these objectives, and that this is minimally intrusive within the meaning of the Oakes decision56.
[133] Loyola et Zucchi soutiennent plutôt qu'une personne morale peut invoquer la liberté de religion. Ensuite, ils prétendent que leur droit est réellement atteint. Ils expliquent en quoi le programme de la Ministre est incompatible avec leurs croyances religieuses.[133] Loyola and Zucchi argue rather that corporations may invoke freedom of religion. Then, they claim that their rights are really violated. They explain how the Minister’s program is incompatible with their religious beliefs.
[134] Ensuite, Loyola et Zucchi soulignent que la question de savoir s'il y a eu atteinte est une question de fait laissée à l'appréciation du juge de première instance.[134] Then, Loyola and Zucchi emphasize that the question of whether there was an infringement is a question of fact left to the discretion of the trial judge.
[135] Ils plaident que le refus d'exempter Loyola ne constitue pas une limite raisonnable à la liberté de religion au sens des Chartes. Ils appliquent aussi le test de Oakes et font valoir que l'objectif du programme est inconstitutionnel et qu'il s'agit d'imposer à une école catholique l'abandon de son point de vue confessionnel dans l'enseignement.[135] They argue that refusing to exempt Loyola is not a reasonable limit on freedom of religion under the Charters. They also apply the Oakes test and argue that the objective of the program is unconstitutional and that it compels a Catholic school to abandon its confessional perspective in education.
[136] Subsidiairement, ils plaident l'absence de lien rationnel entre les objectifs décrits par le PGQ et le refus de la Ministre. Selon eux, rien dans le programme de Loyola ne compromet ces objectifs. En somme, ils estiment qu'il s'agit d'une atteinte qui n'est ni minimale ni proportionnelle.[136] Alternatively, they argue the absence of a rational connection between the objectives set by the AGQ and the Minister’s refusal. According to them, nothing in the Loyola program compromises on these objectives. In short, they believe that there is an infringement that is neither minimal nor proportionate.
[137] Je rappelle que le recours ne porte pas sur la constitutionnalité de la loi ou du cours ÉCR. Il s'agit de la contestation de la décision discrétionnaire de la Ministre pour un motif constitutionnel. Loyola prétend que sa liberté de religion est atteinte par la décision de la Ministre de lui refuser l'exemption demandée.[137] I recall that the action is not about the constitutionality of the law or of the ERC program. This challenge is directed, on constitutional grounds, against the discretionary decision of the Minister. Loyola claims its freedom of religion is violated by the decision of the Minister to deny it an exemption.
[138] La liberté de religion est consacrée à l'article 3 de la Charte québécoise57:
3. Toute personne est titulaire des libertés fondamentales telles la liberté de conscience, la liberté de religion, la liberté d'opinion, la liberté d'expression, la liberté de réunion pacifique et la liberté d'association.
[138] Freedom of religion is enshrined in Section 3 of the Quebec Charter57:
3. Every person has fundamental freedoms, including freedom of conscience, freedom of religion, freedom of opinion, freedom of expression, freedom of peaceful assembly and freedom of association.
[139] Et l'article 2 de la Charte canadienne58 garantit la liberté de conscience et de religion:
2. Chacun a les libertés fondamentales suivantes :
a) liberté de conscience et de religion;
b) liberté de pensée, de croyance, d'opinion et d'expression, y compris la liberté de la presse et des autres moyens de communication;
c) liberté de réunion pacifique;
d) liberté d'association.
[139] And Section 2 of the Canadian Charter58 guarantees freedom of conscience and religion:
2. Everyone has the following fundamental freedoms:
a) freedom of conscience and religion;
b) freedom of thought, belief, opinion and expression, including freedom of the press and other media of communication;
c) freedom of peaceful assembly; and
d) freedom of association.
[140] Voici comment la Cour suprême a défini la liberté de religion dans l'affaire R. c. Big M Drug Mart Ltd.59 :
Le concept de la liberté de religion se définit essentiellement comme le droit de croire ce que l'on veut en matière religieuse, le droit de professer ouvertement des croyances religieuses sans crainte d'empêchement ou de représailles et le droit de manifester ses croyances religieuses par leur mise en pratique et par le culte ou par leur enseignement et leur propagation.
[140] This is how the Supreme Court defined freedom of religion in R. v. Big M Drug Mart Ltd.59:
The essence of the concept of freedom of religion is the right to entertain such religious beliefs as a person chooses, the right to declare religious beliefs openly and without fear of hindrance or reprisal, and the right to manifest religious belief by worship and practice or by teaching and dissemination.
[141] Je suggère que la solution, sur le volet constitutionnel du pourvoi, s'analyse à la lumière de deux arrêts récents de la Cour suprême : Doré c. Barreau du Québec60 et S.L c. Commission scolaire des Chênes61. J'y reviendrai.[141] I suggest that the solution to the constitutional component of the appeal should be analyzed in light of two recent decisions of the Supreme Court: Doré v. Barreau du Québec60 and S.L v. Commission scolaire des Chênes61. I will come back to this subject.
[142] D'abord, je crois utile de rappeler l'importance des Chartes et des droits qui y sont enchâssés à l'occasion de l'étude des décisions administratives contestées.[142] First, I think it is useful to recall the importance of the Charters and of the rights enshrined therein in connection with the study of the contested administrative decisions.
[143] Patrice Garant écrit à ce sujet : « La première limite au pouvoir discrétionnaire est incontestablement la Constitution et la Charte [...]62 ». Un décideur administratif doit agir de manière compatible avec les valeurs consacrées par les Chartes63. Ses décisions y sont assujetties64. Il doit tenir compte des droits protégés par les Chartes lors de l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire65.[143] Patrice Garant writes on this topic: “The first limit to discretionary power is undoubtedly the Constitution and the Charter [...]62”. An administrative decision-maker must act in a manner consistent with the values enshrined in the Charters63. His decisions are subject to them64. He must take account the rights protected by the Charters in the exercise of a discretionary power65.
[144] Pour le juge de première instance, c'est la norme de la décision correcte qui s'applique, car il s'agit de la révision d'une décision administrative à la lumière de la Charte québécoise66.[144] For the trial judge, the standard of correctness applies, since what is under review is an administrative decision in light of the Quebec Charter66.
[145] Dans l'arrêt Doré67de la Cour suprême, rendu après le jugement de première instance, la juge Abella pose la question de la norme de contrôle applicable en révision judiciaire à des décisions de l'administration qui comportent un volet portant sur un droit protégé. Son analyse passe en revue l'évolution de la pensée de la Cour suprême et je crois utile d'en reproduire un long extrait. Elle écrit68 :
[23] Il ressort clairement des décisions du Tribunal et des cours qui ont procédé à la révision judiciaire en l'espèce qu'une certaine confusion entoure la question du cadre d'analyse applicable pour examiner la conformité des décisions administratives aux valeurs consacrées par la Charte. Certaines cours de justice ont eu recours au cadre d'analyse fondé sur l'article premier élaboré dans Oakes, qui sert à juger de la conformité des lois à la Charte, tandis que d'autres ont appliqué l'approche classique de la révision judiciaire.
[145] In the Doré Supreme Court decision67 rendered after the trial judgment, Justice Abella poses the question of the applicable standard for judicial review of administrative decisions which involve a protected right. Her analysis traces the evolution of the Supreme Court’s understanding and I think it is useful to reproduce from it a lengthy extract. She writes68:
[23] It is clear from the decisions of the Tribunal and the reviewing courts in this case that there is some confusion about the appropriate framework to be applied in reviewing administrative decisions for compliance with Charter values. Some courts have used the same s. 1 Oakes analysis used for determining whether a law complies with the Charter; others have used a classic judicial review approach.
[24] Il va sans dire que les décideurs administratifs doivent agir de manière compatible avec les valeurs sous-jacentes à l'octroi d'un pouvoir discrétionnaire, y compris les valeurs consacrées la Charte (voir Chamberlain c. Surrey School District No. 36, 2002 CSC 86 , [2002] 4 R.C.S. 710 , par. 71; Pinet c. St. Thomas Psychiatrie Hospital, 2004 CSC 21, [2004] 1 R.C.S. 528, par. 19- 24; et Ontario (Sûreté et Sécurité publique) c. Crimina; Lawyers' Association, 2010 CSC 23, [2010] 1 R.C.S. 815, par. 62-75). La question est donc celle de savoir quel cadre d'analyse il faut utiliser pour examiner l'application de ces valeurs.
[24] It goes without saying that administrative decision-makers must act consistently with the values underlying the grant of discretion, including Charter values (see Chamberlain v. Surrey School District No. 36, 2002 SCC 86, [2002] 4 S.C.R. 710, at para. 71; Pinet v. St. Thomas Psychiatric Hospital, 2004 SCC 21, [2004] 1 S.C.R. 528, at paras. 19-23; and Ontario (Public Safety and Security) v. Criminal Lawyers’ Association, 2010 SCC 23, [2010] 1 S.C.R. 815, at paras. 62-75). The question then is what framework should be used to scrutinize how those values were applied?
[25] Dans l'arrêt Slaight Communications Inc. c. Davidson, [1989] 1 R.C.S. 1038 , le juge Lamer a affirmé, dans des motifs concordants, que la décision rendue par un arbitre du travail était assujettie à la Charte. Il s'est, en outre, servi du cadre d'analyse fondé sur l'article premier élaboré dans Oakes pour apprécier la conformité à la Charte de la sentence arbitrale en cause dans cette affaire. Au nom des juges majoritaires de la Cour, le juge en chef Dickson a jugé, comme le juge Lamer, que les décisions administratives étaient assujetties à la Charte. Cela étant dit, tout en recourant au cadre d'analyse établi dans Oakes, il a notamment souligné, faisant en cela preuve de prescience, que « [l]e rapport précis entre la norme traditionnelle de contrôle, en droit administratif, du caractère déraisonnable manifeste et la nouvelle norme constitutionnelle de contrôle va se dégager de la jurisprudence à venir » (p. 1049 (Je souligne)).
[25] In Slaight Communications Inc. v. Davidson, [1989] 1 S.C.R. 1038, Lamer J., in his concurring reasons, said that the Charter applied to a labour adjudicator’s decision and used the s. 1 framework developed in R. v. Oakes, [1986] 1 S.C.R. 103, to determine if the decision complied with the Charter. Writing for the majority, Dickson C.J. agreed with Lamer J. that the Charter applied to administrative decision-making. But while he applied the Oakes framework, he notably and presciently observed that “[t]he precise relationship between the traditional standard of administrative law review of patent unreasonableness and the new constitutional standard of review will be worked out in future cases” (p. 1049 (emphasis added)).
[26] Or, l'approche adoptée dans Slaight ne peut être correctement interprétée que dans son contexte. Fait important, c'est devant ce qui semblait être l'incapacité du droit administratif de traiter des violations de la Charte dans l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire que le juge Lamer a jugé que les décisions administratives de nature discrétionnaire, mettant en cause les valeurs consacrées par la Charte, devraient être révisées en appliquant le cadre d'analyse élaboré dans Oakes. Cette conclusion imprègne l'ensemble des motifs formulés dans Slaight. Comme la professeure Geneviève Cartier l'a souligné:
[TRADUCTION] [...] bien que, selon le juge Lamer, la norme de droit administratif ne soit pas adaptée aux contestations fondées sur la Charte, parce qu'elle ne permet pas d'examiner à fond les décisions de nature discrétionnaire, le juge en chef Dickson a estimé qu'elle n'est pas adaptée parce qu'elle ne permet pas de décortiquer adéquatement l'examen des valeurs que comportent les litiges intéressant la Charte. (The « Baker Effect : A New Interface Between the Canadian Charter of Rights and Freedoms and Administrative Law - The Case of Discretion » dans David Dyzenhaus, éd., The Unity of Public Law (2004), 61' p. 68)
[26] Yet the approach taken in Slaight can only be properly understood in its context. Importantly, when Lamer J. held that discretionary administrative decisions implicating Charter values should be reviewed under the Oakes analysis, he did so in the context of the perceived inability of administrative law to deal with Charter infringements in the exercise of discretion. This concern permeates the reasons in Slaight. As Prof. Geneviève Cartier has noted:
[…] while Lamer J thought the administrative law standard was ill-suited to Charter challenges because of its inability to inquire into the substance of discretionary decisions, Dickson CJ thought it was ill-suited because of its inability to properly unravel the value inquiries involved in any Charter litigation.
(“The Baker Effect: A New Interface Between the Canadian Charter of Rights and Freedoms and Administrative Law — The Case of Discretion”, in David Dyzenhaus, ed., The Unity of Public Law(2004), 61, at p. 68)
[27] L'approche adoptée dans l'arrêt Slaight a suscité des préoccupations chez les universitaires spécialisés en droit administratif. Le professeur John Evans a soutenu que si les tribunaux étaient trop prompts à esquiver le droit administratif au profit d'analyses fondées sur la Charte, [TRADUCTION] « une source précieuse de connaissances et d'expériences en matière de droit et de gouvernance ne sera pas prise en compte ou sera complètement perdue » (« The Principles of Fundamental Justice : The Constitution and the Common Law » (1991), 29 Osgoode Hall L.J. 51, p. 73). Dans le même ordre d'idées, la professeure Cartier a affirmé que l'approche préconisée dans Slaight réduisait le rôle du droit administratif à [TRADUCTION] « déterminer la compétence de façon formelle en fonction de l'interprétation des lois » et que cela empêche la révision de l'exercice du pouvoir discrétionnaire en ce qui concerne les « valeurs » et donne « une image appauvrie du droit administratif » (p. 68-69).
[27] The approach taken in Slaight attracted academic concern from administrative law scholars. Prof. John Evans argued that if courts were too quick to bypass administrative law in favour of the Charter, “a rich source of thought and experience about law and government will be overlooked or lost altogether” (“The Principles of Fundamental Justice: The Constitution and the Common Law” (1991), 29 Osgoode Hall L.J. 51, at p. 73). Similarly, Prof. Cartier suggested that the Slaight approach reduced the role of administrative law to the “formal determination of jurisdiction on the basis of statutory interpretation”, which prevented the control of discretion with reference to “values” and presented “an impoverished picture of administrative law” (pp. 68-69).
[28] La portée de la révision des décisions administratives de nature discrétionnaire qui a servi de toile de fond à la décision rendue dans Slaight a été modifiée par la décision de la Cour dans l'affaire Baker c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817 , par. 65. Dans cet arrêt, la juge L'Heureux-Dubé a conclu que les décideurs administratifs devaient tenir compte des valeurs canadiennes fondamentales, notamment celles consacrées par la Charte, lorsqu'ils exercent leur pouvoir discrétionnaire (Baker,par. 53-56).
[28] The scope of the review of discretionary administrative decisions that provided the backdrop for the decision in Slaight was altered by this Court’s decision in Baker v. Canada (Minister of Citizenship and Immigration), [1999] 2 S.C.R. 817, at para. 65. In that case, L’Heureux-Dubé J. concluded that administrative decision-makers were required to take into account fundamental Canadian values, including those in the Charter, when exercising their discretion (Baker, at paras. 53-56).
[29] Fort de la décision rendue dans Syndicat canadien de la Fonction publique, section locale 963 c. Société des alcools du Nouveau-Brunswick, [1979] 2 R.C.S. 227 (« S.C.F.P. »), l'arrêt Baker s'est davantage écarté des principes énoncés par Dicey. En reconnaissant que les décideurs administratifs sont à la fois liés par des valeurs fondamentales et habilités à statuer sur elles, Baker leur a cédé le pouvoir d'interprétation quant à ces questions (David Dyzenhaus et Evan Fox-Decent, « Rethinking the Process/Substance Distinction : Baker v. Canada •• {2001), 51 U.T.L.J. 193, p. 240). La Charte peut ainsi [TRADUCTION] « favoriser le développement » du droit administratif en mettant l'accent pour que les valeurs qu'elle consacre infusent l'enquête (Cartier, p. 75 et 86; voir également Mary Liston, «Governments in Miniature : The Rule of Law in the Administrative State », dans Colleen M. Flood et Lorne Sossin, édit., Administrative Law in Context (2008), 77, p. 100; Susan L. Gratton et Lorne Sossin, « In Search of Coherence : The Charter and Administrative Law under the McLachlin Court », dans David A. Wright and Adam M. Dodek, eds., Public Law at the McLachlin Court: The First Decade (2011), 145, p. 157-58).
[29] Building on the decision in Canadian Union of Public Employees, Local 963 v. New Brunswick Liquor Corp., [1979] 2 S.C.R. 227 (“C.U.P.E.”), Baker represented a further shift away from Diceyan principles. By recognizing that administrative decision-makers are both bound by fundamental values and empowered to adjudicate them, Baker ceded interpretive authority on those issues to those decision-makers (David Dyzenhaus and Evan Fox-Decent, “Rethinking the Process/Substance Distinction: Bake v. Canada” (2001), 51U.T.L.J. 193, at p. 240). This allows the Charter to “nurture” administrative law, by emphasizing that Charter values infuse the inquiry (Cartier, at pp. 75 and 86; see also Mary Liston, “Governments in Miniature: The Rule of Law in the Administrative State”, in Colleen M. Flood and Lorne Sossin, eds., Administrative Law in Context(2008), 77, at p. 100; Susan L. Gratton and Lorne Sossin, “In Search of Coherence: The Charter and Administrative Law under the McLachlin Court”, in David A. Wright and Adam M. Dodek, eds., Public Law at the McLachlin Court: The First Decade (2011), 145, at pp. 157-58).
[30] Lorsque l'affirmation qui précède est appréciée au regard des décisions ultérieures de la Cour, nous entrevoyons une relation entre la Charte, les tribunaux et le droit administratif complètement différente de celle qui dont il a été question pour la première fois dans Slaight. Dans Dunsmuir c. Nouveau­ Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190 , la Cour a conclu que la révision judiciaire doit être orientée par une politique de retenue justifiée par le respect de la volonté du législateur, le respect de l'expertise spécialisée que possèdent les décideurs administratifs et la reconnaissance que les cours de justice n'ont pas le pouvoir exclusif de statuer sur toutes les questions dans le domaine administratif (par. 49). Dans R. c. Conway, 2010 CSC 22, [2010] 1 R.C.S. 765, par. 78-82, s'appuyant sur l'évolution de la jurisprudence, la Cour a conclu que les tribunaux administratifs dotés du pouvoir de trancher des questions de droit ont le pouvoir d'appliquer la Charte et d'accorder les réparations qu'autorise cette dernière dans les affaires dont ils sont régulièrement saisis.
[30] When this is weighed together with this Court’s subsequent decisions, we see a completely revised relationship between the Charter, the courts, and administrative law than the one first encountered in Slaight. In Dunsmuir v. New Brunswick, 2008 SCC 9, [2008] 1 S.C.R. 190, the Court held that judicial review should be guided by a policy of deference, justified on the basis of legislative intent, respect for the specialized expertise of administrative decision-makers, and recognition that courts do not have a monopoly on adjudication in the administrative state (para. 49). And in R. v. Conway, 2010 SCC 22, [2010] 1 S.C.R. 765, at paras. 78-82, building on the development of the jurisprudence, the Court found that administrative tribunals with the power to decide questions of law have the authority to apply the Charter and grant Charter remedies that are linked to matters properly before them.
[31] Cela étant dit, depuis, comme l'avait prédit le juge en chef Dickson, notre Cour a exploré différentes méthodes d'examen de la constitutionnalité des décisions administratives. Elle a oscillé entre, d'une part, l'approche fondée sur les valeurs préconisées dans Bakeret, d'autre part, le modèle plus formaliste préconisé dans Slaight. L'approche proposée par le juge Lamer dans Oakes et fondée sur l'article premier a été suivie dans Stoffman c. Vancouver General Hospital, [1990] 3 R.C.S. 483 , Dagenais c. Société Radio-Canada,[1994] 3 R.C.S. 835 , Ross c. Conseil scolaire du district no 15 du Nouveau-Brunswick, [1996] 1 R.C.S. 825 , Eldridge c. British Columbia (Procureur général), [1997] 3 R.C.S. 624, Little Sisters Book and Art Emporium c. Canada (Ministre de la Justice), [2000] 2 R.C.S. 1120 , États-Unis c. Burns, 2001 CSC 7 , [2001] 1 R.C.S. 283 et R c. Mentuck, 2001 CSC 76, [2001] 3 R.C.S. 442.
[31] But, as predicted by Chief Justice Dickson, this Court has explored different ways to review the constitutionality of administrative decisions, vacillating between the values-based approach in Baker and the more formalistic template in Slaight. The s. 1 Oakes approach suggested by Lamer J., was followed in Stoffman v. Vancouver General Hospital, [1990] 3 S.C.R. 483; Dagenais v. Canadian Broadcasting Corp., [1994] 3 S.C.R. 835; Ross v. New Brunswick School District No. 15, [1996] 1 S.C.R. 825; Eldridge v. British Columbia (Attorney General), [1997] 3 S.C.R. 624; Little Sisters Book and Art Emporium v. Canada (Minister of Justice), 2000 SCC 69, [2000] 2 S.C.R. 1120; United States v. Burns, 2001 SCC 7, [2001] 1 S.C.R. 283; and R. v. Mentuck, 2001 SCC 76, [2001] 3 S.C.R. 442.
[32] Dans d'autres affaires, plus particulièrement des affaires récentes, c'est plutôt l'analyse droit administratif /révision judiciaire qui a été effectuée pour déterminer si le décideur a pris suffisamment compte des valeurs consacrées par la Charte. C'est cette approche qui a été privilégiée dans Baker, Université Trinity Western c. British Columbia College of Teachers, 2001 CSC 31 , [2001] 1 R.C.S. 772, Chamberlain; Ahani c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2002 CSC 2, [2002] 1 R.C.S. 72, Pinet; Lake c. Canada (ministre de la Justice), 2008 CSC 23 , [2008] 1 R.C.S. 761 , Canada (Premier ministre) c. Khadr, 2010 CSC 3 , [2010] 1 R.C.S. 44 , et Criminal Lawyers' Association; et Németh c. Canada (Justice), 2010 CSC 56, [2010] 3 R.C.S. 281.
[32] Other cases, and particularly recently, have instead applied an administrative law/judicial review analysis in assessing whether the decision-maker took sufficient account of Charter values. This approach is seen in Baker; Trinity Western University v. British Columbia College of Teachers, 2001 SCC 31, [2001] 1 S.C.R. 772; Chamberlain; Ahani v. Canada (Minister of Citizenship and Immigration), 2002 SCC 2, [2002] 1 S.C.R. 72; Pinet; Lake v. Canada (Minister of Justice), 2008 SCC 23, [2008] 1 S.C.R. 761; Canada (Prime Minister) v. Khadr, 2010 SCC 3, [2010] 1 S.C.R. 44; Criminal Lawyers’ Association; and Németh v. Canada (Justice), 2010 SCC 56, [2010] 3 S.C.R. 281.
[33] C'est dans Multani que notre Cour a utilisé pour la dernière fois l'analyse intégrale fondée sur l'article premier élaborée dans Oakes pour juger de la conformité à la Charte de l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire conféré par la loi. La doctrine qui a suivi a été uniformément critique. En somme, les auteurs, pour la plupart, ont fait valoir que le recours à une analyse fondée strictement sur l'art. 1 réduisait le droit administratif à un rôle formel dans le contexte de la révision de l'exercice du pouvoir discrétionnaire (voir Gratton et Sossin, p. 157; David Mullan, « Administrative Tribunals and Judicial Review of Charter Issues after Multani » (2006) 21 N.J.C.L. 127; Stéphane Bernachez, « Les rapports entre le droit administratif et les droits et libertés : la révision judiciaire ou le contrôle constitutionnel? » (2010), 55 McGill L.J. 641).
[33] The last decision of this Court to use the full s. 1 Oakes approach to determine whether the exercise of statutory discretion complied with the Charter was Multani. The academic commentary that followed was consistently critical. In brief, it generally argued that the use of a strict s. 1 analysis reduced administrative law to having a formal role in controlling the exercise of discretion (see Gratton and Sossin, at p. 157; David Mullan, “Administrative Tribunals and Judicial Review of Charter Issues after Multani” (2006), 21 N.J.C.L. 127; Stéphane Bernatchez, “Les rapports entre le droit administratif et les droits et libertés: la révision judiciaire ou le contrôle constitutionnel?” (2010), 55 McGill L.J. 641).
[34] Depuis le prononcé de cet arrêt, et en grande partie à cause de la révision du modèle d'analyse des décisions administratives opérée par Dunsmuir, notre Cour semble s'être écartée de Multani, ce qui laisse croire qu'elle a peut-être [TRADUCTION] « décidé de faire table rase avant d'établir une nouvelle cohérence en droit public » (Gratton et Sossin, p. 161). Aujourd'hui, la Cour a deux options quant à la révision des décisions administratives de nature discrétionnaire qui soulèvent des questions relatives aux valeurs consacrées par la Charte. La première consiste à adopter le cadre d'analyse décrit dans Oakes et élaboré pour examiner la constitutionnalité des lois. Cette approche protège indéniablement les droits visés par la Charte, mais elle le fait au détriment d'une conception plus riche du droit administratif. Comme l'exprime le professeur Evans, si les tribunaux étaient trop prompts à esquiver le droit administratif au profit de la Charte, [TRADUCTION] « une source précieuse de connaissance et d'expérience en matière de droit et de gouvernance ne sera pas prise en compte ou sera complètement perdue »·
[34] Since then, and largely as a result of the revised administrative law template found in Dunsmuir, this Court appears to have moved away from Multani, leading to the suggestion that it may have “decided to start from ground zero in building coherence in public law” (Gratton and Sossin, at p. 161). Today, the Court has two options for reviewing discretionary administrative decisions that implicate Charter values. The first is to adopt the Oakes framework, developed for reviewing laws for compliance with the Constitution. This undoubtedly protects Charter rights, but it does so at the risk of undermining a more robust conception of administrative law. In the words of Prof. Evans, if administrative law is bypassed for the Charter, “a rich source of thought and experience about law and government will be overlooked” (p. 73).
[35] En choisissant plutôt la seconde option, la Cour donnerait son aval à cette conception plus riche du droit administratif en vertu de laquelle le pouvoir discrétionnaire est exercé « à l'aune des garanties constitutionnelles et des valeurs que comportent celles-ci »(Multani, par. 152, le juge LeBel). Cette approche n'exige pas de se rabattre sur l'analyse requise par l'article premier telle qu'elle a été établie dans Oakes pour protéger les valeurs consacrées par la Charte; elle suppose plutôt que les décisions administratives prennent toujours en considération les valeurs fondamentales. La Charte n'agit alors que comme [TRADUCTION] « un rappel que certaines valeurs sont manifestement fondamentales et [...] ne peuvent être violées à la légère » (Cartier, p. 86). L'approche du droit administratif reconnaît, en outre, la légitimité que la Cour a donnée à la prise de décisions administratives dans des arrêts tels Dunsmuir et Conway. Ces derniers soulignent que les organismes administratifs ont le pouvoir, et même le devoir, de tenir compte des valeurs consacrées par la Charte dans leur domaine d'expertise. Intégrer ces valeurs dans l'approche qui préconise l'application des règles de droit administratif et reconnaître l'expertise des décideurs administratifs instaure [TRADUCTION] « un dialogue institutionnel quant à l'utilisation qui doit être faite du pouvoir discrétionnaire et quant à la révision appropriée de son exercice plutôt que de faire appel à la relation plus ancienne d'autorité et de contrôle » (Liston, p. 100).
[35] The alternative is for the Court to embrace a richer conception of administrative law, under which discretion is exercised “in light of constitutional guarantees and the values they reflect” (Multani, at para. 152, per LeBel J.). Under this approach, it is unnecessary to retreat to a s. 1 Oakes analysis in order to protect Charter values. Rather, administrative decisions are always required to consider fundamental values. The Charter simply acts as “a reminder that some values are clearly fundamental and. . . cannot be violated lightly” (Cartier, at p. 86). The administrative law approach also recognizes the legitimacy that this Court has given to administrative decision-making in cases such as Dunsmuir and Conway. These cases emphasize that administrative bodies are empowered, and indeed required, to consider Charter values within their scope of expertise. Integrating Charter values into the administrative approach, and recognizing the expertise of these decision-makers, opens “an institutional dialogue about the appropriate use and control of discretion, rather than the older command-and-control relationship” (Liston, at p. 100).
[36] Comme la juge en chef McLachlin l'a expliqué dans Alberta c. Hutterian Brethren of Wilson Colony, 2009 CSC 37, [2009] 2 R.C.S. 567, l'examen de la constitutionnalité d'une loi doit être différent de la révision d'une décision administrative qui est contestée parce qu'elle porterait atteinte aux droits d'un individu en particulier (voir également Bernatchez). Lorsque les valeurs consacrées par la Charte sont appliquées à une décision administrative particulière, elles sont appliquées relativement à un ensemble précis de faits. Dunsmuir nous dit que la retenue s'impose dans un tel cas (par. 53; voir aussi Suresh c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2002 CSC 1, [2002] 1 R.C.S. 3 , par. 39). Par contre, lorsqu'on vérifie si une « loi » particulière respecte la Charte, il est question de principes d'application générale.
[36] As explained by Chief Justice McLachlin in Alberta v. Hutterian Brethren of Wilson Colony, 2009 SCC 37, [2009] 2 S.C.R. 567, the approach used when reviewing the constitutionality of a law should be distinguished from the approach used for reviewing an administrative decision that is said to violate the rights of a particular individual (see also Bernatchez). When Charter values are applied to an individual administrative decision, they are being applied in relation to a particular set of facts. Dunsmuir tells us this should attract deference (para. 53; see also Suresh v. Canada (Minister of Citizenship and Immigration), 2002 SCC 1, [2002] 1 S.C.R. 3, at para. 39). When a particular “law” is being assessed for Charter compliance, on the other hand, we are dealing with principles of general application.
[37] L'approche plus souple du droit administratif pour mettre en balance les valeurs consacrées par la Charte est également plus compatible avec la nature de la prise de décision qui découle de l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire. Quoi qu'il en soit, certains aspects du test élaboré dans Oakes conviennent peu à la révision des décisions prises à la suite de l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire, qu'elles aient été prises par des juges ou par des décideurs administratifs. Par exemple, la Cour a jugé que l'exigence de l'article premier selon laquelle la restriction doit découler de l'application d'une « règle de droit » s'applique à des normes dont l'« adoption est autorisée par une loi, [des normes, en outre,] obligatoires et d'application générale et [...] suffisamment accessibles et précis[es] pour ceux qui y sont assujettis. » (Greater Vancouver Transportation Authority c. Fédération canadienne des étudiantes et étudiants - Section Colombie-Britannique, 2009 CSC 312, [2009] 2 R.C.S. 295, par. 53).
[37] The more flexible administrative approach to balancing Charter values is also more consistent with the nature of discretionary decision-making. Some of the aspects of the Oakes test are, in any event, poorly suited to the review of discretionary decisions, whether of judges or administrative decision-makers. For instance, the requirement under s. 1 that a limit be “prescribed by law” has been held by this Court to apply to norms where “their adoption is authorized by statute, they are binding rules of general application, and they are sufficiently accessible and precise to those to whom they apply” (Greater Vancouver Transportation Authority v. Canadian Federation of Students — British Columbia Component, 2009 SCC 31, [2009] 2 S.C.R. 295, at para. 53).
[38] En outre, lorsqu'un décideur exerce le pouvoir discrétionnaire que lui confère une disposition législative ou un régime légal dont la constitutionnalité n'est pas contestée, il est difficile, d'un point de vue conceptuel, d'imaginer ce qui pourrait constituer l'« objectif urgent et réel » d'une décision ou de savoir qui devrait assumer le fardeau de le définir et de le défendre.
[38] Moreover, when exercising discretion under a provision or statutory scheme whose constitutionality is not impugned, it is conceptually difficult to see what the “pressing and substantial” objective of a decision is, or who would have the burden of defining and defending it.
[39] La Cour a déjà reconnu la difficulté que pose l'application du cadre d'analyse formulé dans Oakes au-delà du contexte de la révision d'une loi ou d'un autre type de règles de droit d'application générale. Le défi s'est posé lorsqu'il s'est agi d'appliquer les valeurs protégées par la Charte à la common law [traduction] « qui ne recèle aucun texte réglementaire qui puisse être examiné en terme d'objectif, de lien rationnel, d'atteinte minimale et d'effet proportionnel » (Peter W. Hogg, Constitutional Law of Canada (5e éd. Supp.) vol. 2, art. 38.15). Dans R. c. Daviault, [1994] 3 R.C.S. 63 , par exemple, la Cour devait évaluer la règle de common law relative à l'établissement de l'existence de l'intention dans le cas d'une intoxication extrême. Elle a conclu qu'il n'était pas nécessaire de procéder à l'analyse prescrite par Oakes dans le contexte de la révision d'une règle de common law pour s'assurer de sa conformité aux valeurs consacrées par la Charte :
S'il est possible d'énoncer une nouvelle règle de common law qui ne contrevienne pas au droit de l'accusé de contrôler la conduite de sa défense, je n'ai aucune difficulté à imaginer que la Cour puisse simplement la formuler, en remplacement de l'ancienne, sans chercher à savoir si l'ancienne règle pourrait néanmoins être maintenue en vertu de l'article premier de la Charte. Vu que la règle de common law a été créée par des juges et non par le législateur, l'égard que les tribunaux doivent avoir envers les organismes élus n'est pas en cause. S'il est possible de reformuler une règle de common law de façon qu'elle ne s'oppose pas aux principes de justice fondamentale, il faudrait le faire. [p. 93-94; Citant R. c. Swain, [1991] 1 R.C.S. 933, p. 978.]
[39] This Court has already recognized the difficulty of applying the Oakes framework beyond the context of reviewing a law or other rule of general application. This has been the case in applying Charter values to the common law, “where there is no specific enactment that can be examined in terms of objective, rational connection, least drastic means and proportionate effect” (Peter W. Hogg, Constitutional Law of Canada (5th ed. Supp.), vol. 2, at section 38.15). In R. v. Daviault, [1994] 3 S.C.R. 63, for example, in assessing the common law rule relating to establishing intent under extreme intoxication, the Court held that no Oakes analysis was required when reviewing a common law rule for compliance with Charter values:
If a new common law rule could be enunciated which would not interfere with an accused person’s right to have control over the conduct of his or her defence, I can see no conceptual problem with the Court’s simply enunciating such a rule to take the place of the old rule, without considering whether the old rule could nonetheless be upheld under s. 1 of the Charter. Given that the common law rule was fashioned by judges and not by Parliament or a legislature, judicial deference to elected bodies is not an issue. If it is possible to reformulate a common law rule so that it will not conflict with the principles of fundamental justice, such a reformulation should be undertaken. [pp. 93-94, citing R. v. Swain, [1991] 1 S.C.R. 933, at p. 978.]
[40] Dans Hill c. Église de scientologie de Toronto, [1995] 2 R.C.S. 1130 , la Cour a explicitement rejeté, pour deux raisons, l'utilisation du cadre d'analyse formulé dans Oakes lorsqu'il s'est agi d'élaborer la common law en matière de diffamation. Premièrement, quand il est question d'interpréter une règle de common law, il n'y a pas de violation d'un droit visé par la Charte, mais plutôt un conflit entre deux principes, de sorte que, d'une part, « la pondération doit être plus souple que l'analyse traditionnelle effectuée en vertu de l'article premier » et que, d'autre part, les valeurs consacrées par la Charte offrent alors des lignes directrices quant à toute modification de la common law (par. 97). Deuxièmement, la Cour a souligné que « le partage habituel du fardeau dans [une] contestation fondée sur la Charte » ne convenait pas pour un litige privé en common law puisque la partie qui cherche à faire modifier la common law ne devrait pas pouvoir profiter d'un renversement du fardeau de la preuve (par. 98). La Cour a donc examiné « la common law de la diffamation à la lumière des valeurs de la Charte » (par. 99). De plus, dans Grant c. Torstar Corp., 2009 CSC 61, [2009] 3 R.C.S. 640 , la Cour s'est fondée sur les valeurs consacrées par la Charte pour introduire dans le droit relatif à la diffamation le nouveau moyen de défense de communication responsable concernant des questions d'intérêt public, et ce, sans faire intervenir l'analyse élaborée dans Oakes.
[40] In Hill v. Church of Scientology of Toronto, [1995] 2 S.C.R. 1130, this Court explicitly rejected the use of the s. 1 Oakes framework in developing the common law of defamation for two reasons. First, when interpreting a common law rule, there is no violation of a Charter right, but a conflict between principles, so “the balancing must be more flexible than the traditional s. 1 analysis”, with Charter values providing the guidelines for any modification to the common law (para. 97). Second, the Court noted that “the division of onus which normally operates in a Charter challenge” was not appropriate for private litigation under the common law, as the party seeking to change the common law should not be allowed to benefit from a reverse onus (para. 98). As a result, the Court went on to “consider the common law of defamation in light of the values underlying the Charter” (para. 99). And in Grant v. Torstar Corp., 2009 SCC 61, [2009] 3 S.C.R. 640, the Court relied on Charter values in introducing the new defence of responsible communication on matters of public interest to the law of defamation, without engaging in an Oakes analysis.
[41] L'arrêt S.D.G.M.R., section locale 558 c. Pepsi-Cola Canada Beverages (West) Ltd., 2002 CSC 8, [2002] 1 R.C.S. 156, est un autre exemple de décision allant en ce sens. Il s'agit de l'affaire où la Cour a traité de la notion de common law de piquetage secondaire. Or, après avoir conclu que la liberté d'expression était en jeu, elle n'a pas procédé à l'analyse décrite dans Oakes. Elle a plutôt conclu que la question qu'il fallait se poser était celle de savoir quelle est « l'approche [pour régir le piquetage secondaire] qui pondère le mieux les intérêts en jeu, d'une façon conforme aux valeurs fondamentales reflétées dans la Charte » (par. 65).
[41] A further example is found in R.W.D.S.U., Local 558 v. Pepsi-Cola Canada Beverages (West) Ltd., 2002 SCC 8, [2002] 1 S.C.R. 156, where the Court dealt with the common law of secondary picketing. After concluding that freedom of expression was engaged, the Court did not embark on an Oakes analysis. Instead, it found that the appropriate question was “which approach [to regulating secondary picketing] best balances the interests at stake in a way that conforms to the fundamental values reflected in the Charter?” (para. 65).
[42] Ainsi, même si toutes ces causes mettaient en jeu des valeurs consacrées par la Charte, la Cour n'a pas jugé bon d'utiliser le test élaboré dans Oakes pour décider si ces valeurs avaient été suffisamment prises en compte. Il en va de même, à mon avis, dans le contexte du droit administratif, où les décideurs sont appelés à exercer le pouvoir discrétionnaire que leur confère la loi en s'assurant de protéger !es droits visés par la Charte.
[42]Though each of these cases engaged Charter values, the Court did not see the Oakes test as the vehicle for balancing whether those values were taken into sufficient account. The same is true, it seems to me, in the administrative law context, where decision-makers are called upon to exercise their statutory discretion in accordance with Charter protections.
[43] Quel est l'effet de cette approche sur la norme de révision applicable à l'appréciation de la conformité d'une décision administrative aux valeurs consacrées par la Charte? Il ne fait aucun doute que la décision d'un tribunal administratif au sujet de la constitutionnalité d'une loi s'examine suivant la norme de la décision correcte (Dunsmuir, par. 58). Cela étant dit, compte tenu de la jurisprudence de la Cour, il n'est pas du tout clair, selon moi, que c'est cette norme qu'il faut appliquer pour déterminer si un décideur administratif a suffisamment tenu compte des valeurs consacrées par la Charte en rendant une décision à la suite de l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire.
[43] What is the impact of this approach on the standard of review that applies when assessing the compliance of an administrative decision with Charter values? There is no doubt that when a tribunal is determining the constitutionality of a law, the standard of review is correctness (Dunsmuir, at para. 58). It is not at all clear to me, however, based on this Court’s jurisprudence, that correctness should be used to determine whether an administrative decision-maker has taken sufficient account of Charter values in making a discretionary decision.
[44] La Cour a approfondi la question de la norme de contrôle applicable aux décisions d'organismes disciplinaires dans l'arrêt Barreau du Nouveau-Brunswick c. Ryan, 2003 CSC 20, [2003] 1 R.C.S. 247 , antérieur à Dunsmuir, et le juge lacobucci y a retenu la norme de la décision raisonnable pour l'examen de la sanction infligée à l'égard d'une faute professionnelle :
Bien que la loi prévoie un droit d'appel des décisions du comité de discipline, l'expertise du comité, l'objet de sa loi habilitante et la nature de la question en litige militent tous en faveur d'un degré plus élevé de déférence que la norme de la décision correcte. Ces facteurs indiquent que le législateur voulait que le comité de discipline du barreau autonome soit un organisme spécialisé ayant comme responsabilité primordiale la promotion des objectifs de la Loi par la surveillance disciplinaire de la profession et, au besoin, le choix de sanctions appropriées. Compte tenu de l'ensemble des facteurs pris en compte dans l'analyse qui précède, je conclus que la norme appropriée est celle de la décision raisonnable simpliciter. Par conséquent, sur la question de la sanction appropriée pour le manquement professionnel, la Cour d'appel ne devrait pas substituer sa propre opinion quant à la réponse » correcte » et ne peut intervenir que s'il est démontré que la décision est déraisonnable. [Je souligne; par. 42.]
[44] This Court elaborated on the applicable standard of review to legal disciplinary panels in the pre-Dunsmuir decision of Law Society of New Brunswick v. Ryan, 2003 SCC 20, [2003] 1 S.C.R. 247, where Iacobucci J. adopted a reasonableness standard in reviewing a sanction imposed for professional misconduct:
Although there is a statutory appeal from decisions of the Discipline Committee, the expertise of the Committee, the purpose of its enabling statute, and the nature of the question in dispute all suggest a more deferential standard of review than correctness. These factors suggest that the legislator intended that the Discipline Committee of the self-regulating Law Society should be a specialized body with the primary responsibility to promote the objectives of the Act by overseeing professional discipline and, where necessary, selecting appropriate sanctions. In looking at all the factors as discussed in the foregoing analysis, I conclude that the appropriate standard is reasonableness simpliciter. Thus, on the question of the appropriate sanction for professional misconduct, the Court of Appeal should not substitute its own view of the “correct” answer but may intervene only if the decision is shown to be unreasonable. [Emphasis added; para. 42.]
[45] Je suis d'avis que, si on applique les principes établis dans Dunsmuir, la norme de la décision raisonnable reste celle à laquelle il faut recourir pour réviser les décisions des comités de discipline. Il s'agit donc de se demander si c'est une norme différente dont les tribunaux doivent se servir lorsque l'analyse porte sur l'application par l'organisme disciplinaire des garanties visées par la Charte dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire qui lui est conféré. À mon avis, il n'y a pas lieu d'appliquer une norme différente du fait que la Charte est en cause.
[Je souligne]
[45] It seems to me that applying the Dunsmuir principles results in reasonableness remaining the applicable review standard for disciplinary panels. The issue then is whether this standard should be different when what is assessed is the disciplinary body’s application of Charter protections in the exercise of its discretion. In my view, the fact that Charter interests are implicated does not argue for a different standard.
[Emphasis added]
[146] Je suis d'avis que cet enseignement s'applique aussi aux décisions d'un ministre, dès lors que le caractère discrétionnaire de la décision est reconnu. La Ministre de l'Éducation jouit d'une grande expertise dans l'application des lois dont elle a la responsabilité. La Cour suprême explique dans l'arrêt Lake, relativement à une décision du ministre portant sur l'extradition, que le fait d'invoquer des droits constitutionnels ne change pas la norme de contrôle69.[146] I am of the opinion that this lesson also applies to the decisions of a minister, as soon as the discretionary nature of the decision is recognized. The Minister of Education has extensive expertise in the application of laws under her responsibility. The Supreme Court explains in the Lake decision, in relation to the Minister's decision on extradition, that referring to constitutional rights does not change the standard of review69.
[147] Ainsi, bien que la Ministre réponde à une demande pouvant comporter un volet touchant un droit protégé par les Chartes, la norme de contrôle ne change pas. Ce n'est pas la constitutionnalité de la loi ou des règlements qui est mise en cause, mais bien celle de la décision elle-même.[147] Thus, although the Minister replies to a request which may include a component related to a right protected by the Charters, the standard of review does not change. The constitutionality of the law or the regulations is not disputed, but rather that of the decision itself.
[148] J'ai conclu, précédemment, à l'application de la norme de la décision raisonnable, en traitant du volet administratif de l'appel, cette norme continue de s'appliquer au titre du volet constitutionnel.[148] I concluded previously that the standard of reasonableness is to be applied in dealing with the administrative law component of the appeal, this standard continues to apply under the constitutional component.
c) Le juge de première instance a-t-il raison de conclure que Loyola peut invoquer la liberté de religion?
c) Is the trial judge right in concluding that Loyola may invoke freedom of religion?
[149] Dans un premier temps, j'écarterai l'argument du PGQ qui soutient que Loyola plaide pour autrui. L'arrêt Big M70 précité retient que le droit de propager sa foi et sa doctrine religieuse fait partie de la liberté de religion.[149] To begin with, I will reject the AGQ’s argument alleging that Loyola is arguing on behalf of another. The aforementioned Big M decision70 retains that the right to disseminate one’s faith and religious doctrine is part of the freedom of religion.
[150] Lorsque Loyola se porte demanderesse pour contester la décision de la Ministre qui lui refuse l'exemption au motif qu'elle a proposé un programme qui n'a pas été jugé équivalent, étant donné sa composante confessionnelle, elle soutient précisément qu'on lui refuse le droit de manifester ses croyances religieuses par leur enseignement et leur propagation.[150] When Loyola filed a request as plaintiff challenging the decision of the Minister denying it an exemption on the grounds that it proposed a program that was not deemed equivalent, given its confessional component, it claims precisely that it is denied the right to manifest its religious beliefs by teaching and disseminating those.
[151] Ceci étant, la question est de savoir si une personne morale peut avoir des convictions religieuses et donc le droit accessoire de les propager.[151] This being so, the question then is whether a corporation may hold religious beliefs and therefore hold the accessory right to disseminate them.
[152] Pour intéressante qu'elle soit, je ne crois pas utile de répondre à cette épineuse question, étant donné la conclusion à laquelle j'en viens sur l'atteinte alléguée et qui est au cœur de la question à résoudre. La position du PGQ aurait pour effet de priver Loyola d'un intérêt juridique suffisant pour soulever la question.[152] However interesting, I do not believe it to be useful to answer this difficult question; given the conclusion I reach on the alleged infringement and which is at the heart of the issue at hand. The AGQ’s position would deprive Loyola of a sufficient legal interest to raise the question.
[153] Plutôt donc que de régler le cas sur une question de procédure et alors que la présence de l'intimé Zucchi vient en quelque sorte régler la question de l'intérêt à soulever l'atteinte, je crois utile de régler le problème au fond.[153] Therefore, rather than settling the case on a procedural matter and where the presence of the respondent Zucchi somehow resolves the issue of whether one can speak of an infringement, I think it is useful to resolve the fundamental issue.
[154] J'ajouterais également que, outre le litige ponctuel qui oppose les parties, la question en est une de droit public, et que dans les matières de droit public, qui sont d'intérêt général, la notion d'intérêt doit se voir avec plus d'ouverture que dans le cas de litige de nature purement privée.[154] I would also add that, in addition to the punctual dispute opposing the parties, the issue is one of public law, and that in matters of public law which are of general interest, the concept of interest must be seen with more openness than in the case of purely private litigation.
[155] En droit privé, « l'intérêt peut se définir comme un avantage d'ordre pécuniaire, d'ordre moral ou comme un intérêt de principe à ce qu'une question de droit soit résolue par un tribunal71 ». Cet intérêt est l'utilité ou l'avantage pratique qu'un justiciable devrait retirer de l'exercice de son droit d'action. En d'autres mots :
« [ ...] n'a l'intérêt suffisant que la victime qui a été directement lésée dans ses droits subjectifs propres par opposition aux droits généraux de la collectivité72».
[155] In private law, “interest may be defined as a pecuniary or moral advantage, or as an interest in principle that a question of law to be resolved by a tribunal71.” This interest is the usefulness or the practical benefit that a litigant should achieve from the exercise of his right to action. In other words:
“[...] has a sufficient interest only the victim who has seen his own individual rights violated as opposed to the rights of the general community72”.
[156] Bref, l'intérêt suffisant du demandeur doit être un intérêt juridique, direct et personnel, né et actuel73:
« L'intérêt juridique du demandeur doit reposer sur un fondement juridique, un droit d'ester en justice en vue d'obtenir les conclusions recherchées dans la demande.
[ ...]
L'intérêt direct et personnel d'un demandeur lui est conféré par un droit distinct, qui lui est propre, personnel, en ce que le demandeur plaide pour lui-même.
[ ...]
Si l'intérêt du demandeur doit être juridique, direct et personnel, pour être suffisant, il doit aussi être né et actuel, c'est-à-dire qu'il doit référer à un droit déjà méconnu, dénié ou menacé, et non à une situation éventuelle hypothétique ou à une menace purement hypothétique d'un droit ».
[156] In short, the sufficient interest of the applicant must be legal, direct, personal, vested, and present73:
"The applicant's legal interest should be based on a legal basis, a right to sue in order to obtain the relief sought in the application.
[...]
The direct and personal interest of an applicant is conferred to him by a separate and personal right, as the applicant pleads for himself.
[...]
If the applicant's interest must be legal, direct and personal to be sufficient, it must also be vested and present, that is to say, it must refer to a right already ignored, denied or threatened, not a potential and hypothetical situation or a purely hypothetical threat to a right. "
[157] En droit public, la notion d'« intérêt suffisant » se présente différemment.[157] In public law, the notion of “sufficient interest” is different.
[158] Plus précisément en droit constitutionnel, la doctrine et la jurisprudence réfèrent plutôt à la notion de standing, une notion qui fut expliquée par notre Cour en ces termes74 :
« La situation de fait et de droit créée par les appelants eux-mêmes dans ce dossier, confirme la nécessité d'accueillir les objections du procureur général sur leur absence d'intérêt, de qualité ou de standing au sens où cette expression est utilisée dans les contestations constitutionnelles. Cette notion de standing, du moins en matière constitutionnelle, ne s'identifie pas strictement au concept d'intérêt au sens du Code de procédure civile du Québec. Elle est souple, large, mais aussi comme nous le verrons à certains égards, plus étroite. Le standing constitutionnel recouvre une notion à la fois plus complexe et plus fuyante que l'intérêt au sens procédural du terme et aussi l'opportunité même pour le tribunal de se prononcer, en raison de la nature de la question posée et des circonstances du cas ».
[Je souligne]
[158] More specifically in constitutional law, doctrine and case law rather refer to the notion of standing, a concept which was explained by this Court in these terms74:
“The legal and factual situation created by the appellants themselves in this case confirms the need to accommodate the objections of the Attorney General on their lack of interest, of status or standing in the sense that term is used in constitutional challenges. This notion of standing, at least in constitutional matters, does not strictly identify with the concept of interest defined in the Quebec Code of Civil Procedure. It is flexible, broad, but also as we shall see in some respects, narrower. Constitutional standing is a concept that is at the same time more complex and more elusive than interest in the procedural sense of the term and also the opportunity itself for the court to decide [Translator’s note: original French is not clear], because of the nature of the issue raised and the circumstances of the case”.
[Emphasis added]
[159] Ainsi, en droit constitutionnel, la notion d'intérêt suffisant fut élargie par la jurisprudence75 :
« La reconnaissance de l'importance des droits publics dans notre société vient confirmer la nécessité d'élargir la reconnaissance du droit à la qualité pour agir par rapport à la tradition de droit privé qui reconnaissait qualité pour agir aux personnes possédant un intérêt privé. En outre, un élargissement de la qualité pour agir au-delà des parties traditionnelles est compatible avec les dispositions de la Loi constitutionnelle de 1982.
[...]
La reconnaissance de la qualité pour agir a pour objet d'empêcher que la loi ou les actes publics soient à l'abri des contestations ».
[159] Thus, in constitutional law, the notion of sufficient interest was extended by case law75:
“The [increasing, Appeal judge omitted this word in French] recognition of the importance of public rights in our society confirms the need to extend the right to standing from the private law tradition which limited party status to those who possessed a private interest. In addition some extension of standing beyond the traditional parties accords with the provisions of the Constitution Act, 1982.
[...]
The whole purpose of granting status is to prevent the immunization of legislation or public acts from any challenge”
[160] En matière de droit constitutionnel, l'intérêt pour introduire un débat de droit public fut reconnu par la trilogie Thorson76, McNeil77, Borowski78 qui établit les trois critères suivants : la présence d'une question sérieuse qui peut être résolue par le forum judiciaire, l'existence d'un intérêt véritable et l'absence d'un autre moyen raisonnable et efficace de saisir un tribunal de la question.[160] In constitutional law, the interest in introducing a public law debate was recognized by the Thorson76, McNeil77, Borowski78 trilogy which lays out the following three criteria: the presence of a serious issue that can be resolved by the judicial forum, the existence of a genuine interest, and the absence of another reasonable and effective way that the issue can be brought before a court.
[161] En résumé, même si sur la question constitutionnelle l'intérêt de Loyola n'est direct que si elle bénéficie de la liberté de religion, ce que je ne décide pas, comme collège catholique elle a, à tout le moins, un intérêt oblique à la détermination du litige du point de vue de la liberté de religion.[161] In summary, even if on the constitutional issue, Loyola’s interest is only direct if it benefits from freedom of religion as a Catholic college, which I am not deciding, it has, at least, an indirect interest that the dispute be determined in terms of freedom of religion.
d) Le juge de première instance erre-t-il en concluant à une atteinte à la liberté de religion ?
d) Does the trial judge err when he concludes that freedom of religion is being violated?
[162] Sur le fond, l'arrêt de la Cour suprême S.L. c. Commission scolaire des Chênes présente bien le cadre juridique de la question, tel que développé depuis l'arrêt Amselem79.[162] On its merits, the S.L. v. Commission scolaire des Chênes judgment from the Supreme Court outlines very well the legal framework surrounding the issue, as developed since the Amselem79 decision.
[163] Une personne qui invoque une atteinte à sa liberté de religion doit d'abord prouver la sincérité de sa croyance80, c'est-à-dire la croyance de se conformer à une pratique ou une croyance ayant un lien avec la religion81. Pour franchir cette première étape, il suffit de démontrer la sincérité de la croyance. C'est la partie subjective du test. Ainsi, dans S.L. c. Commission scolaire des Chênes, il s'agissait pour les parents de « l'obligation de transmettre les préceptes de la religion catholique » à leurs enfants82. Dans Multani, il s'agissait de la croyance de l'obligation pour l'élève de porter en tout temps un kirpan (couteau) en métal83.[163] A person who alleges a violation of his freedom of religion must first of all prove the sincerity of his belief80, that is the belief to comply with a practice or a belief related to religion81. To make it through this first stage, it is sufficient to prove the sincerity of the said belief. This is the subjective part of the test. Thus, in S.L. v. Commission scolaire des Chênes, the belief was that the parents “have an obligation to pass on the precepts of the Catholic religion” to their children82. In Multani, it was the belief that a pupil was under the obligation to wear a metal kirpan (a knife) at all times83.
[164] Ensuite, la personne doit prouver l'atteinte selon la prépondérance des probabilités. Cette preuve doit reposer sur des faits objectivement démontrables84. Il s'agit de la partie objective de l'analyse. En bref, la personne doit prouver qu'il existe une pratique ou une croyance religieuse à laquelle il est porté atteinte, ceci requiert l'analyse objective des faits qui en entravent l'exercice85.[164] Then, the person must prove the violation on the balance of probabilities. This evidence must be based on objectively demonstrable facts84. This is the objective part of the analysis. In short, the person must prove that a religious practice or belief is infringed upon; this requires an objective analysis of the facts that interfere with the practice of the belief85.
[165] Dans l'arrêt Multani86, la juge Charron résume ainsi le test de l'atteinte selon Amselem:
Dans Amselem, la Cour a statué que, pour démontrer l'existence d'une atteinte à sa liberté de religion, le demandeur doit établir (1) qu'il croit sincèrement à une pratique ou à une croyance ayant un lien avec la religion, et (2) que la conduite qu'il reproche à un tiers nuit d'une manière plus que négligeable ou insignifiante à sa capacité de se conformer à cette pratique ou croyance.
[165] In Multani86, Justice Charron summarizes as follows the infringement test according to Amselem:
In Amselem, the Court ruled that, in order to establish that his or her freedom of religion has been infringed, the claimant must demonstrate (1) that he or she sincerely believes in a practice or belief that has a nexus with religion, and (2) that the impugned conduct of a third party interferes, in a manner that is non-trivial or not insubstantial, with his or her ability to act in accordance with that practice or belief.
[166] La preuve montre-t-elle que la représentation globale des religions, telle que proposée par le programme ÉCR, porte atteinte à la religion de Loyola et Zucchi ?[166] Does the evidence show that a global representation of religions, as outlined by the ERC program, violates Loyola and Zucchi’s religion?
[167] Même en supposant gue Loyola a fait la preuve de sa croyance sincère de devoir enseigner la matière ECR avec son propre programme, c'est-à-dire selon une perspective catholique87 , ce que retient le juge de première instance lorsqu'il écrit:
[265] En l'occurrence, la preuve est claire et non contredite. Loyola et ses membres, dont le directeur Donovan et son président, le Révérend Brennan, sont sincèrement convaincus que pour réaliser leur mission en tant qu'établissement d'enseignement confessionnel catholique, Loyola doit enseigner la matière ÉCR avec son propre programme et selon les préceptes de la religion catholique.
[167] Even if one assumes that Loyola has demonstrated its sincere belief that it must teach ERC with its own program, that is, from a Catholic perspective87 , position the trial judge adopted when he wrote:
[265] In the present case, the evidence is clear and uncontradicted. Loyola and its members, including Principal Donovan and President Fr. Brennan, are sincerely convinced that, to accomplish their mission as a Catholic educational institution, Loyola must teach ERC with its own program and according to the precepts of the Catholic religion.
[168] Et même en supposant également que, comme personne morale, elle bénéficie de la protection de la liberté religieuse et qu'elle s'est déchargée de son fardeau d'établir la sincérité de sa croyance, Loyola ne fait pas la démonstration d'une atteinte plus que négligeable. Je m'explique.[168] Even assuming also that, as a corporation, it enjoys the protection of religious freedom and that it has discharged its burden of proving the sincerity of its belief, Loyola does not demonstrate more than a negligible violation. Let me explain.
[169] Sur la sincérité de la croyance, la partie subjective du test, je ne reviendrai pas sur la détermination du juge qui a décidé que Loyola s'est déchargée de son fardeau.[169] On the sincerity of belief, the subjective part of the test, I will not come back to the determination of the trial judge who ruled that Loyola has discharged its burden.
[170] Pour la démonstration du caractère non négligeable de l'atteinte à cette croyance, le juge retient essentiellement le témoignage non contredit de l'expert Farrow. En résumé, l'atteinte serait l'exclusion de Dieu de l'enseignement de la morale et de la religion. Le juge la résume ainsi: « Bref, le programme ÉCR établi par la Ministre impose à Loyola une pédagogie qui est contraire aux enseignements de l'Église catholique88».[170] To demonstrate a significant violation of this belief, the judge essentially retains the uncontradicted testimony of the expert, Farrow. In summary, the violation would be the exclusion of God from moral and religious training. The judge summarizes this as follows: “In short, the ERC program established by the Minister requires of Loyola a pedagogy contrary to the teachings of the Catholic Church88
[171] Avec égards, je crois qu'il commet une erreur alors que, évidemment, au moment d'écrire son jugement, il n'a toujours pas le bénéfice de l'enseignement de la Cour suprême dans S.L c. Commission scolaire des Chênes.[171] With all due respect, I think he errs while, of course, at the time of the writing of his decision, he did not have the benefit of the lessons drawn by the Supreme Court in SL v. Commission scolaire des Chênes.
[172] Comme dans l'affaire S.L. c. Commission scolaire des Chênes, Loyola et Zucchi plaident que la neutralité du programme ÉCR ne serait pas réelle et qu'elle entraverait leur capacité à transmettre leur foi. La Cour suprême décide que le fait d'exposer des élèves à l'étude globale des religions, dans une perspective neutre, sans les obliger à y adhérer, ne constitue pas une atteinte à la liberté de religion89. En l'espèce, je ne crois pas qu'obliger Loyola à enseigner les croyances religieuses d'une manière globale et l'éthique, sans qu'il soit question d'y adhérer, constitue une réelle atteinte. Le « relativisme » demandé à l'enseignant ne brime pas la liberté d'enseigner la religion catholique de l'école. Comme Loyola l'indique dans son mémoire, il s'agit de mettre de côté, le temps d'un cours, la perspective catholique.[172] As in S.L. v. Commission scolaire des Chênes, Loyola and Zucchi argue that the neutrality of the ECR program is not real and that it interferes with their ability to transmit their faith. The Supreme Court decides that exposing students to a comprehensive study of religions in a neutral perspective without requiring them to adhere to any of these is not an infringement on freedom of religion89. In this case, I do not believe that compelling Loyola to teach a comprehensive religious belief and ethics course, without any obligation to adhere to these, is a real infringement. The “relativism” required of the teachers does not infringe on the school’s freedom to teach the Catholic religion. As Loyola states in its brief, it is a matter of setting aside, during a lesson, the Catholic perspective.
[173] En effet, s'il y a atteinte, elle est négligeable. Voici comment la Cour suprême définit ce concept dans l'arrêt Alberta c. Hutterian Brethren of Wilson Colony : « Une atteinte « négligeable ou insignifiante » est une atteinte qui ne menace pas véritablement une croyance ou un comportement religieux90 ».Indeed, if there is an infringement, it is insignificant. Here is how the Supreme Court defines this concept in Alberta v. Hutterian Brethren of Wilson Colony: “‘Trivial or insubstantial’ interference is interference that does not threaten actual religious beliefs or conduct90.”
[174] L'atteinte est négligeable, car il ne s'agit que d'un cours parmi plusieurs. De plus, il n'est pas demandé à l'enseignant de réfuter les préceptes de la religion catholique, mais de s'abstenir d'exprimer son opinion ou ses convictions. Voici des passages du programme ÉCR relatifs au rôle de l'enseignant et de la posture professionnelle qu'il doit adopter 1 :
[…] il lui faut comprendre de conserver une distance critique à l'égard de sa propre vision du monde, notamment de ses convictions, de ses valeurs et de ses croyances.
[…] l'enseignant fait preuve d'un jugement professionnel empreint d'objectivité et d'impartialité. Ainsi, pour ne pas influencer les élèves dans l'élaboration de leur point de vue, il s'abstient de donner le sien.
[…] Dans ce contexte, l'enseignant n'a pas le monopole des réponses. Il sait utiliser l'art du questionnement pour amener les élèves à apprendre à penser par eux-mêmes.
[Je souligne]
[174] The damage is insignificant, because it is only one course among many. In addition, teachers are not required to refute the teachings of the Catholic religion, but to refrain from expressing their opinion or convictions. Here are some passages from the ERC program on the role of the teacher and the professional stance that he is to adopt:
[…] it is important that teachers maintain a critical distance regarding their own world-views especially with respect to their convictions, values and beliefs.
[…] Teachers show professional judgment imbued with objectivity and impartiality in order to foster students’ reflection on ethical questions or understanding of the phenomenon of religion. Thus, to ensure against influencing students in developing their point of view, teachers abstain from sharing theirs.
[…] In this context, teachers do not hold a monopoly on answers. They know how to use the art of questioning to help students learn to think for themselves.
[Emphasis added]
[175] En résumé, je crois que le juge erre en fondant son jugement sur l'opinion de l'expert Farrow. Il n'y a pas de réelle atteinte ou, du moins, elle n'est pas significative.[175] In summary, I think the trial judge errs in basing his judgment on the opinion of the expert, Farrow. There is no real infringement or, at least, it is not significant.
[176] En supposant même qu'il y a atteinte, je suis d'avis que cette atteinte est justifiée.[176] Even assuming that there is a violation, I believe that this infringement is justified.
[177] Il est clairement expliqué dans l'arrêt récent Doré c. Barreau du Québec que le test développé dans Oakes concernant la sauvegarde d'une règle de loi portant atteinte à un droit protégé par la Charte ne s'applique pas à une décision administrative discrétionnaire92. Le test est inadapté, car il repose sur l'examen d'une règle de droit.[177] It is clearly explained in the recent case of Doré v. Barreau du Québec that the test set out in Oakes for the safeguarding of a rule of law that infringes a right protected by the Charter does not apply to a discretionary administrative decision92. The test is inadequate because it is based on the consideration of a rule of law.
[178] L'arrêt Doré offre donc un test similaire fondé sur la proportionnalité. Il faut se demander si le décideur administratif, en exerçant son pouvoir discrétionnaire, a correctement mis en balance le droit consacré par les Chartes et les objectifs visés par la loi93. En l'espèce, le droit est la liberté de religion et les objectifs sont ceux visés par le régime législatif de l'éducation au Québec.[178] The Doré decision therefore offers a similar test based on proportionality. The question now is whether the administrative decision maker in exercising his discretionary power, properly weighed the right enshrined in the Charters and objectives of the law93. In this case, the right is freedom of religion and the objectives are those covered by the legislative framework for education in Quebec.
[179] La première étape consiste en la détermination des objectifs en question94. En l'espèce, voici les objectifs du cours ÉCR selon le programme du ministère :[179] The first step is to determine the objectives94. In this case, following are the objectives of the ERC program according to the ministerial curriculum:
Dans ce programme, la formation en éthique vise l'approfondissement de questions éthiques permettant à l'élève de faire des choix judicieux basés sur la connaissance des valeurs et des repères présents dans la société. Elle n'a pas pour objectif de proposer ou d'imposer des règles morales, ni d'étudier de manière encyclopédique des doctrines et des systèmes philosophiques. 
Pour ce qui est de la formation en culture religieuse, elle vise la compréhension de plusieurs traditions religieuses dont l'influence s'est exercée et s'exerce toujours dans notre société. Sur ce chapitre, un regard privilégié est porté sur le patrimoine religieux du Québec. L'importance historique et culturelle du catholicisme et du protestantisme y est particulièrement soulignée. Il ne s'agit ni d'accompagner la quête spirituelle des élèves, ni de présenter l'histoire des doctrines et des religions, ni de promouvoir quelque nouvelle doctrine religieuse commune destinée à remplacer les croyances particulières.
In this program, training in ethics aims to deepen the understanding of ethical questions so that the student may make informed choices based on knowledge of values and references that are present in society. It does not aim to propose or impose moral rules, nor an encyclopaedic study of doctrines and philosophical systems.
Regarding training in religious culture, it is aimed at the understanding of several religious traditions which have influenced or still influence our society. In this area, special attention is given to the religious heritage of Quebec. The historical and cultural importance of Catholicism and Protestantism is particularly emphasized. It aims neither to support the spiritual quest of students, nor to present the history of doctrines and religions, nor to promote a new common religious doctrine intended to replace specific beliefs.
[180] Je renvoie à l'opinion de la juge Deschamps à ce sujet : « Le but formel du Ministère ne paraît donc pas avoir été de transmettre une philosophie fondée sur le relativisme ou d'influencer les croyances particulières des jeunes95». Elle note aussi que la recherche de la neutralité religieuse dans la sphère publique est un défi important96. À cet effet, le programme s'articule autour de deux grandes finalités: « la reconnaissance de l'autre » et« la poursuite du bien commun97».[180] I refer to the opinion of Justice Deschamps in this regard: “The Ministry’s formal purpose therefore does not appear to have been to transmit a philosophy based on relativism or to influence young people’s specific beliefs95.” It also notes that the search for religious neutrality in the public sphere is a major challenge96. To this end, the program focuses on two main objectives: “the recognition of others” and “the pursuit of common good97.”
[181] La loi, dans son ensemble, vise à atteindre ces objectifs. L'éducation de la jeunesse est un objectif important selon la Cour suprême. En effet, le préambule de la Loi sur le ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport énonce un objectif important : l'épanouissement de la personnalité de l'enfant98.[181] The law, in its entirety, strives to achieve these objectives. Education of youth is an important objective according to the Supreme Court. Indeed, the preamble to An Act respecting the Ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport sets out an important goal: the full development of the child’s personality98.
[182] À mon sens, la décision de la Ministre tient compte de ces objectifs. D'autant plus que la Ministre rappelle à Loyola qu'elle a droit d'utiliser quatre unités d'enseignement dont elle peut, à son gré, établir le contenu. Il n'y a rien dans la décision de la Ministre qui constitue un obstacle à l'enseignement de la foi et de la doctrine catholique à l'occasion d'un tel cours. D'ailleurs, pour toutes les autres matières, le professeur Farrow parle d'une approche sous-jacente qui fait que l'enseignement dans un collège catholique tenu par les Jésuites est toujours imprégné de l'approche catholique. Pourtant, aucune exemption n'est demandée pour les autres matières.[182] In my view, the decision of the Minister takes these objectives into account, especially since the Minister reminds Loyola that it is entitled to use four teaching units for content it may determine at its own discretion. There is nothing in the decision of the Minister that hinders teaching of the Catholic faith and doctrine during such a discretionary course. Moreover, for all other teaching subjects, Professor Farrow speaks of an underlying approach in a Catholic school run by the Jesuits which means that all teaching is imbued with a Catholic approach. However, no exemption was requested for these other subjects.
[183] La deuxième étape consiste en une analyse de la proportionnalité entre la gravité de l'atteinte et les objectifs visés par la loi99. La décision de la Ministre est le fruit d'une mise en balance proportionnée du droit à la liberté de religion et des objectifs de la loi et, à tout le moins, en tenant compte de ce que même sur cette question la norme de contrôle est celle de la décision raisonnable, elle fait partie des issues possibles.[183] The second step is an analysis of the proportionality between the seriousness of the infringement and the objectives of the law99. The decision of the Minister reflects a proportionate balancing of the right to freedom of religion with the objectives of the law, and at the very least, considering that even on this issue the standard of review is reasonableness, it is one of the possible outcomes.
CONCLUSIONCONCLUSION
[184] En résumé, je suis d'avis que le juge de première instance s'est mal dirigé sur la norme de contrôle applicable et qu'il a erré en considérant que le pouvoir de la Ministre est un pouvoir lié.[184] In summary, I am of the opinion that the trial judge has chosen the wrong applicable standard of review and that he has erred in holding that the power of the Minister was non discretionary.
[185] Le pouvoir de la Ministre est de nature discrétionnaire et il n'a pas été exercé à des fins autres que celles prévues par la loi et les règlements. La décision de la Ministre est raisonnable et ne porte pas atteinte à un droit protégé.[185] The power of the Minister is discretionary in nature and it has not been exercised for purposes other than those prescribed by law and regulation. The decision of the Minister is reasonable and does not infringe upon a protected right.
[186] En conséquence, cette décision est à l'abri du pouvoir de surveillance et de contrôle de la Cour supérieure. Comme il s'agit d'une question d'intérêt public dont les enjeux dépassent largement le seul intérêt privé des parties en présence, je suis d'avis que chaque partie devrait supporter ses propres frais tant en appel qu'en Cour supérieure.[186] Accordingly, this decision is beyond the power of supervision and control of the Superior Court. As it is a matter of public interest far beyond the sole interests of the private parties at hand, I am of the opinion that each party should bear its own costs on appeal as in the Superior Court.
[187] À la lumière de ce qui précède, je propose d'accueillir le pourvoi, de rejeter la requête introductive d'instance de Loyola et Zucchi et de confirmer la décision de la Ministre.[187] In light of the foregoing, I propose to allow the appeal, to dismiss the motion instituting proceedings from Loyola and Zucchi, and to confirm the decision of the Minister.
NOTES

1. S.L. c. Commission scolaire des Chênes, [2012] 1 R.C.S. 235,2012 CSC 7.
2. R.R.Q., c. E-9.1, r. 1.
3. Lettre du 25 août 2008.
4. Décision du 13 novembre 2008, M.A., vol. 1, p. 245.
5. Jugement dont appel, paragr. 3.
6. Ibid., paragr. 15 i).
7. Ibid., paragr. 49.
8. Ibid., paragr. 81.
9. Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, [2008] 1 R.C.S. 190, 2008 CSC 9.
10. Règlement d'application de la Loi sur l'enseignement privé, supra, note 2.
11. Jugement dont appel, paragr. 110.
12. L.R.Q., c. E-9.1.
13. Ibid., art. 111.7°.
14. Jugement dont appel, paragr. 135.
15. Ibid., paragr. 182.
16. Multani c. Commission scolaire Marguerite-Bourgeoys, [2006] 1 R.C.S. 256, 2006 CSC 6.
17. Charte québécoise des droits et libertés de la personne, L.R.Q. c. C-12.
18. Jugement dont appel.
19. Ibid., paragr. 331.
20. Règlement d'application de la Loi sur l'enseignement privé, supra, note 2, art. 22 et 22.1.
21. Loi sur le ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport, L.R.Q., c. M-15, art. 1.
22. L.R.Q., c. 1-13.3.
23. Régime pédagogique de l'éducation préscolaire, de l'enseignement primaire et de l'enseignement secondaire, R.R.Q., c. 1-13.3, r. 8.
24. Loi sur l'enseignement privé, supra, note 12, art. 25.
25. Ibid., paragr. 32.
26. Règlement d'application de la Loi sur l'enseignement privé, supra, note 2, art. 22.
27. Adler c. Ontario, [1996] 3 R.C.S. 609.
28. Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817, paragr. 52.
29. Catalyst Paper Corp. c. North Cowichan (District), [2012] 1 R.C.S. 5, 2012 CSC 2.
30. Pierre lssalys et Denis Lemieux, L'action gouvernementale - Précis de droit des institutions administratives, 3e éd., Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2009, p. 164.
31. Pierre Lemieux, Droit administratif- Doctrine et jurisprudence, 4e éd., Sherbrooke, Éditions Revue de Droit de l'Université de Sherbrooke, 2006, p. 661.
32. P. Issalys et D. Lemieux, supra, note 30, p. 164.
33. Patrice Garant, Droit administratif, 6e éd., Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2010, p. 193.
34. Ibid., p. 196.
35. P. Issalys et D. Lemieux, supra, note 30, p. 212.
36. Ibid., p. 214.
37. Jugement dont appel, paragr. 110.
38. P. Lemieux, supra, note 31, p. 661.
39. P. Garant, supra, note 33, p. 184.
40. Supra, note 22, art. 2.2°.
41. P. lssalys et D. Lemieux, supra, note 30, p. 229.
42. R. c. Harrison, [1977] 1 R.C.S. 238, 245-246.
43. P. lssalys et D. Lemieux, supra, note 30, p. 236.
44. 3682226 Canada inc. c. Agence du revenu du Québec, J.E. 2012-973, 2012 QCCA 782, paragr. 14 à 20.
45. Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, supra, note 9, paragr. 51.
46. Ibid., paragr. 57.
47. Ibid., paragr. 51-57.
48. Montréal (Ville) c. Administration portuaire de Montréal, [2010] 1 R.C.S. 427, 2010 CSC 14, paragr. 36; Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), supra, note 27, paragr. 53.
49. Voir: Québec (Procureur général) c. Germain Blanchard ltée, [2005] R.J.Q. 1881 (C.A.), 2005 QCCA 605, paragr. 46-64, Adler c. Ontario, supra, note 27, paragr. 152.
50. Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, supra, note 9 , paragr. 64.
51. Jugement dont appel, paragr. 91.
52. Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Khosa, [2009] 1 R.C.S. 339, 2009 CSC 12, paragr. 59.
53. Supra, note 1.
54. Chamberlain c. Surrey School District No. 36, [2002] 4 R.C.S. 710, 2002 CSC 86.
55. Charte canadienne des droits et libertés, partie 1 de la Loi constitutionnelle de 1982, constituant l'annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.-U.), 1982, c. 11.
56. R. c. Oakes, [1986] 1 R.C.S. 103.
57. Charte québécoise des droits et libertés de la personne, L.R.Q., c. C-12.
58. Charte canadienne des droits et libertés, partie 1 de la Loi constitutionnelle de 1982, constituant l'annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.-U.), 1982, c. 11.
59. R. c. Big M Drug Mart Ltd., [1985] 1 R.C.S. 295, paragr. 94.
60. Doré c. Barreau du Québec, [2012] 1 R.C.S. 395,2012 CSC 12.
61. Supra, note 1.
62. P. Garant, supra, note 33, p. 187.
63. Doré c. Barreau du Québec, supra, note 60, paragr. 24.
64. Slaight communications inc. c. Davidson, [1989] 1 R.C.S. 1038.
65. Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), supra, note 26, paragr. 53 et 56.
66. Jugement dont appel, paragr. 211.
67. Doré c. Barreau du Québec, supra, note 60.
68. Ibid., paragr. 23-45.
69. Lake c. Canada (Ministre de la Justice), [2008] 1 R.C.S. 761, 2008 CSC 23, paragr. 34.
70. R. c. Big M Drug Mart Ltd., supra, note 59.
71. Hélène Trudeau et Diane Veilleux, « L'intérêt à agir en droit public à la suite de l'arrêt Conseil du patronat du Québec», (1992) 52 R. du B. 437, 437.
72. Jeunes Canadiens pour une civilisation chrétienne c. Fondation du théâtre du Nouveau-Monde, [1979] C.A. 491.
73. Denis Ferland et Benoît Emery, Précis de procédure civile du Québec, vol. 1, 46 éd., Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2003, p. 133-143.
74. Paquet c. Mines S.N.A. Inc., [1986] R.J.Q. 1257.
75. Conseil canadien des églises c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'immigration), [1992] 1 R.C.S. 236.
76. Thorson c. P.G. du Canada, [1975] 1 R.C.S 138.
77. Nova Scotia Board of Censors c. McNeil, [1976] 2 R.C.S. 265.
78. Borowski c. Canada (Procureur général), [1989] 1 R.C.S. 342.
79. Syndicat Northcrest c. Amselem, [2004] 2 R.C.S. 551, 2004 CSC 47.
80. S.L. c. Commission scolaire des Chênes, supra, note 1, paragr. 22.
81. Syndicat Northcrest c. Amselem, supra, note 79, paragr. 39, 43, 46 et 54.
82. S.L. c. Commission scolaire des Chênes, supra, note 1, paragr. 26.
83. Multani c. Commission scolaire Marguerite-Bourgeoys, supra, note 16, paragr. 36.
84 S.L. c. Commission scolaire des Chênes, supra, note 1, paragr. 23.
85. Ibid., paragr. 24.
86. Multani c. Commission scolaire Marguerite-Bourgeoys, supra, note 16, paragr. 34.
87. Jugement dont appel, paragr. 265.
88. Jugement dont appel, paragr. 287.
89. S.L. c. Commission scolaire des Chênes, supra, note 1, paragr. 37.
90. Alberta c. Hutterian Brethren of Wilson Colony, [2009] 2 R.C.S. 567, 2009 CSC 37, paragr. 32.
91. Programme ÉCR, p. 2200 et 2201.
92. Doré c. Barreau du Québec, supra, note 60.
93. Ibid., paragr. 58.
94. Ibid., paragr. 55.
95. S.L. c. Commission scolaire des Chênes, supra, note 1, paragr. 35.
96. Ibid., paragr. 30.
97. Programme ECR, M.A., vol. VI, 2190.
98. Loi sur le ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport, supra, note 21.
99. Doré c. Barreau du Québec, supra, note 60, paragr. 56.
NOTES

1. S.L. v. Commission scolaire des Chênes, [2012] 1 SCR 235.2012 SCC 7.
2. R.R.Q., v. E-9.1, r. 1.
3. Letter dated August 25, 2008.
4. Decision November 13, 2008, M.A., vol. 1, p. 245.
5. Judgment under appeal, para. 3.
6. Ibíd., para. 15i).
7. Ibíd., para. 49.
8. Ibid, para. 81.
9. Dunsmuir v. New Brunswick, [2008] 1 SCR 190, 2008 SCC 9.
10. Regulation respecting the application of the Act respecting private education, supra, note 2.
11. Judgment under appeal, para. 110.
12. R.S.Q., v. E-9.1.
13. Ibid, s. 111.7.
14. Judgment under appeal, para. 135.
15. Ibid., para. 182.
16. Multani v. Commission scolaire Marguerite-Bourgeoys, [2006] 1 SCR 256, 2006 SCC 6.
17. Quebec Charter of Rights and Freedoms, RSQ v. C-12.
18. Judgment under appeal.
19. Ibid, para. 331.
20. Regulation respecting the application of the Act respecting private education, supra, note 2, s. 22 and 22.1.
21. An Act respecting the Ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport, RSQ, v. M-15, s. 1.
22. R.S.Q., v. 1-13.3.
23. Basic school regulation for preschool, primary and secondary education, RRQ, v. 1-13.3, r. 8.
24. Private Education Act, supra, note 12, s. 25.
25. Ibid, para. 32.
26. Regulation respecting the application of the Act respecting private education, supra, note 2, art. 22.
27. Adler v. Ontario, [1996] 3 S.C.R. 609.
28. Baker v. Canada (Minister of Citizenship and Immigration), [1999] 2 SCR 817, at para. 52.
29. Catalyst Paper Corp. v. North Cowichan (District), [2012] 1 SCR 5, 2012 SCC 2.
30. Pierre Issalys and Denis Lemieux, L’Action gouvernementale - Précis de droit des institutions administratives, 3rd ed., Cowansville, Yvon Blais Publishers, 2009, p. 164.
31. Pierre Lemieux, Droit administratif, Doctrine et Jurisprudence, 4th ed., Sherbrooke, Revue de droit Publishers, Université de Sherbrooke, 2006, p. 661.
32. P. Issalys and D. Lemieux, supra, note 30, p. 164.
33. Patrice Garant, Droit administratif, 6th ed., Cowansville, Yvon Blais Publishers, 2010, p. 193.
34. Ibid., P. 196.
35. P. Issalys and D. Lemieux, supra, note 30, p. 212.
36. Ibid, p. 214.
37. Judgment under appeal, para. 110.
38. P. Lemieux, supra, note 31, p. 661.
39. P. Garant, supra, note 33, p. 184.
40. Supra, note 22, art. 2.2°.
41. P. Issalys and D. Lemieux, supra, note 30, p. 229.
42. R. v. Harrison, [1977] 1 S.C.R. 238, 245-246.
43. P. Issalys and D. Lemieux, supra, note 30, p. 236.
44. 3682226 Canada inc. v. Québec Revenue Agency, JE 2012-973, 2012 QCCA 782, para. 14 to 20.
45. Dunsmuir v. New Brunswick, supra, note 9, para. 51.
46. Ibíd., para. 57.
47. Ibíd., para. 51-57.
48. Montreal (City) v. Montreal Port Authority, [2010] 1 SCR 427, 2010 SCC 14, at para. 36, Baker v. Canada (Minister of Citizenship and Immigration), supra, note 27, para. 53.
49. See: Quebec (Attorney General) v. Germain Blanchard Ltd., [2005] RJQ 1881 (CA), 2005 QCCA 605, para. 46-64, Adler v. Ontario, supra, note 27, para. 152.
50. Dunsmuir v. New Brunswick, supra, note 9, para. 64.
51. Judgment under appeal, para. 91.
52. Canada (Citizenship and Immigration) v. Khosa, [2009] 1 S.C.R. 339, 2009 SCC 12, para. 59.
53. Supra, note 1.
54. Chamberlain v. Surrey School District No. 36, [2002] 4 SCR 710, 2002 SCC 86.
55. Canadian Charter of Rights and Freedoms, Part 1 of the Constitution Act, 1982, being Schedule B of the 1982 Act on Canada (UK), 1982, v. 11.
56. R. v. Oakes, [1986] 1 S.C.R. 103.
57. Quebec Charter of Rights and Freedoms, RSQ, v. C-12.
58. Canadian Charter of Rights and Freedoms, Part 1 of the Constitution Act, 1982, being Schedule B of the 1982 Act on Canada (UK), 1982, v. 11.
59. R. v. Big M Drug Mart Ltd.., [1985] 1 SCR 295, at para. 94.
60. Doré v. Barreau du Québec, [2012] 1 SCR 395.2012 SCC 12.
61. Supra, note 1.
62. P. Garant, supra, note 33, p. 187.
63. Doré v. Barreau du Québec, supra, note 60, para. 24.
64. Slaight Communications Inc. v. Davidson, [1989] 1 S.C.R. 1038.
65. Baker v. Canada (Minister of Citizenship and Immigration), supra, note 26, para. 53 and 56.
66. Judgment under appeal, para. 211.
67. Doré v. Barreau du Québec, supra, note 60.
68. Ibid, para. 23-45.
69. Lake v. Canada (Minister of Justice), [2008] 1 SCR 761, 2008 SCC 23, para. 34.
70. R. v. Big M Drug Mart Ltd., supra, note 59.
71. Hélène Trudeau and Diane Veilleux, « L’intérêt à agir en droit public à la suite de l’arrêt Conseil du patronat du Québec » (1992) 52 R. du B. 437, 437.
72. Jeunes Canadiens pour une civilisation chrétienne c. Fondation du théâtre du Nouveau-Monde, [1979] C.A. 491.
73. Denis Ferland and Benoît Emery, Précis de procédure civile du Québec, vol. 1, 46 ed., Cowansville, Yvon Blais, 2003, p. 133-143.
74. Paquet v. Mines S.N.A., Inc. [1986] R.J.Q. 1257.
75. Canadian Council of Churches v. Canada (Minister of Employment and Immigration), [1992] 1 SCR 236.
76. Thorson v. A.G. of Canada, [1975] 1 R.C.S 138.
77. Nova Scotia Board of Censors v. McNeil, [1976] 2 S.C.R. 265.
78. Borowski v. Canada (Attorney General), [1989] 1 SCR 342.
79. Syndicat Northcrest v. Amselem, [2004] 2 S.C.R. 551, 2004 SCC 47.
80. S.L. v. Commission scolaire des Chênes, supra, note 1, para. 22.
81. Syndicat Northcrest v. Amselem, supra, note 79, para. 39, 43, 46 and 54.
82. S.L. v. Commission scolaire des Chênes, supra, note 1, para. 26.
83. Multani v. Commission scolaire Marguerite-Bourgeoys, supra, note 16, para. 36.
84. S.L. v. Commission scolaire des Chênes, supra, note 1, para. 23.
85. Ibid., para. 24.
86. Multani v. Commission scolaire Marguerite-Bourgeoys, supra, note 16, para. 34.
87. Judgment under appeal, para. 265.
88. Judgment under appeal, para. 287.
89. S.L. v. Commission scolaire des Chênes, supra, note 1, para. 37.
90. Alberta v. Hutterian Brethren of Wilson Colony, [2009] 2 SCR 567, 2009 SCC 37, at para. 32.
91. ERC program, p. 2200 and 2201 (Note from translators: pages indicated are French version.).
92. Doré v. Barreau du Québec, supra, note 60.
93. Ibid., para. 58.
94. Ibid., Para. 55.
95. S.L. vs. Commission scolaire des Chênes, supra, note 1, para. 35.
96. Ibid., para. 30.
97. ERC program, M.A., vol. VI, 2190.
98. An Act respecting the Ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport, supra, note 21.
99. Doré v. Barreau du Québec, supra, note 60, para. 56.

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