Texte de Jean-Baptiste Noé, historien et écrivain.
Les libéraux [Note du carnet: classiques] français ont bâti l’éducation du pays, en permettant à chaque commune d’avoir son école, et à chaque enfant de s’y rendre. Ce système de liberté scolaire a perduré jusqu’aux lois Ferry des années 1880, qui ont éteint toute concurrence et ont mis l’école au service d’une idéologie politique ; nous leur devons les problèmes actuels de l’enseignement. Après les 25 ans de révolutions qui ont causé le démantèlement des congrégations religieuses enseignantes, l’école en France est à rebâtir. Cette reconstruction se fonde sur les concepts essentiels de liberté et d’universalité. Deux hommes illustrent ce combat pour l’école : François Guizot (ci-contre) et Alfred de Falloux, tous deux ministres de l’Instruction publique. Au premier, on doit la loi de 1833 qui oblige tous les départements à créer une école normale pour former les instituteurs. Chaque commune de plus de 500 habitants doit financer une école (publique ou confessionnelle), laquelle doit recevoir tous les garçons. Les plus pauvres se voient dispensés de frais d’inscription. Le deuxième a donné la loi Falloux de 1850. Celle-ci porte création d’écoles publiques pour les filles dans chaque commune. Elle reconnaît et garantit la liberté d’enseignement, en facilitant la création d’écoles et en laissant une grande autonomie aux instituteurs. Ces lois de liberté assurent l’essor de l’instruction en France, si bien qu’en 1870 l’analphabétisme est quasiment vaincu, et tous les Français peuvent recevoir une instruction libre et gratuite. Guizot et Falloux s’attellent aussi aux programmes scolaires en insistant sur la lecture, l’écriture et les mathématiques. Ils introduisent également des disciplines pratiques.
Une floraison d’écoles. L’originalité du système est d’assurer la saine concurrence entre les écoles publiques et les écoles libres. Dans le grand mouvement d’essor industriel du pays, nombreux sont les chefs d’entreprise qui financent la construction d’écoles afin d’instruire les enfants de leurs ouvriers. Ces financements sont accordés à des associations qui s’occupent de la gestion de l’école. Oui, la France a connu une époque où l’école était libre. Les patrons ont tout intérêt à former la jeunesse française et à faire en sorte qu’elle reçoive une très bonne instruction, n’en déplaise aux antilibéraux. Wendel, Michelin et d’autres patrons ont financé les écoles de leur ville. Victor Duruy, ministre sous le Second Empire, amplifie les lois Guizot et Falloux. Il introduit des méthodes modernes de pédagogie, notamment dans l’organisation des cours. De très nombreux enfants se rendent dans les écoles gérées par les Frères des écoles chrétiennes, fondées au XVIIe siècle par Jean-Baptiste de la Salle. Les jésuites s’occupent davantage du secondaire : ils ont 20 collèges en 1870, pour 6500 élèves. C’est important, mais on est loin d’une domination. En 1870 toujours, les congrégations religieuses enseignantes gèrent 13 000 établissements, ce qui représente 20 % des élèves. C’est le même chiffre que l’enseignement sous contrat aujourd’hui. Napoléon Ier avait imposé le monopole de l’Université, un « communisme intellectuel » selon Charles de Montalembert. Les Libéraux y mettent un terme et instaurent la liberté jusque dans le supérieur. Jules Ferry reviendra sur cette liberté, pour des motifs d’embrigadement politique.
Voir aussiLes libéraux [Note du carnet: classiques] français ont bâti l’éducation du pays, en permettant à chaque commune d’avoir son école, et à chaque enfant de s’y rendre. Ce système de liberté scolaire a perduré jusqu’aux lois Ferry des années 1880, qui ont éteint toute concurrence et ont mis l’école au service d’une idéologie politique ; nous leur devons les problèmes actuels de l’enseignement. Après les 25 ans de révolutions qui ont causé le démantèlement des congrégations religieuses enseignantes, l’école en France est à rebâtir. Cette reconstruction se fonde sur les concepts essentiels de liberté et d’universalité. Deux hommes illustrent ce combat pour l’école : François Guizot (ci-contre) et Alfred de Falloux, tous deux ministres de l’Instruction publique. Au premier, on doit la loi de 1833 qui oblige tous les départements à créer une école normale pour former les instituteurs. Chaque commune de plus de 500 habitants doit financer une école (publique ou confessionnelle), laquelle doit recevoir tous les garçons. Les plus pauvres se voient dispensés de frais d’inscription. Le deuxième a donné la loi Falloux de 1850. Celle-ci porte création d’écoles publiques pour les filles dans chaque commune. Elle reconnaît et garantit la liberté d’enseignement, en facilitant la création d’écoles et en laissant une grande autonomie aux instituteurs. Ces lois de liberté assurent l’essor de l’instruction en France, si bien qu’en 1870 l’analphabétisme est quasiment vaincu, et tous les Français peuvent recevoir une instruction libre et gratuite. Guizot et Falloux s’attellent aussi aux programmes scolaires en insistant sur la lecture, l’écriture et les mathématiques. Ils introduisent également des disciplines pratiques.
Une floraison d’écoles. L’originalité du système est d’assurer la saine concurrence entre les écoles publiques et les écoles libres. Dans le grand mouvement d’essor industriel du pays, nombreux sont les chefs d’entreprise qui financent la construction d’écoles afin d’instruire les enfants de leurs ouvriers. Ces financements sont accordés à des associations qui s’occupent de la gestion de l’école. Oui, la France a connu une époque où l’école était libre. Les patrons ont tout intérêt à former la jeunesse française et à faire en sorte qu’elle reçoive une très bonne instruction, n’en déplaise aux antilibéraux. Wendel, Michelin et d’autres patrons ont financé les écoles de leur ville. Victor Duruy, ministre sous le Second Empire, amplifie les lois Guizot et Falloux. Il introduit des méthodes modernes de pédagogie, notamment dans l’organisation des cours. De très nombreux enfants se rendent dans les écoles gérées par les Frères des écoles chrétiennes, fondées au XVIIe siècle par Jean-Baptiste de la Salle. Les jésuites s’occupent davantage du secondaire : ils ont 20 collèges en 1870, pour 6500 élèves. C’est important, mais on est loin d’une domination. En 1870 toujours, les congrégations religieuses enseignantes gèrent 13 000 établissements, ce qui représente 20 % des élèves. C’est le même chiffre que l’enseignement sous contrat aujourd’hui. Napoléon Ier avait imposé le monopole de l’Université, un « communisme intellectuel » selon Charles de Montalembert. Les Libéraux y mettent un terme et instaurent la liberté jusque dans le supérieur. Jules Ferry reviendra sur cette liberté, pour des motifs d’embrigadement politique.
France — « L’école laïque, gratuite et obligatoire » constitue un mythe fondateur
Guizot et la politique — L’Instruction publique
Mythe — C’est grâce à la République que l’enseignement est devenu obligatoire, public et gratuit