vendredi 28 mai 2010

Écoles privées épinglées au sujet du cours ECR

Pour une école libre a eu accès au rapport annuel de la commission consultative de l’enseignement privé rendu public en février 2010. On y retrouve les recommandations (ou non) de renouvellement de permis d’enseignement qui venait à échéance.

Voici une liste des établissements qui officiellement ne se conforment pas au programme d’éthique et culture religieuse.

Quatre remarques :
  1. Cette liste ne comprend pas tous les établissements (on n’y retrouve pas le collège Loyola, par exemple, qui n’enseigne pas le programme) car leur permis n’arrivait pas nécessairement à échéance cette année.

  2. L’inspection ne se penche que sur des aspects formels : les enseignants ont-ils suivi la formation ECR, le programme est-il sur la grille d’étude, sur le bulletin, les élèves sont-ils évalués, le matériel didactique est-il approuvé ou non ?

  3. Même l’école qui satisfait tous ces aspects formels peut très bien ne pas enseigner le programme ECR : nous connaissons deux écoles privées cette année qui ont vu leur permis renouvelé alors qu’en pratique elle ne donne pas le cours ECR, même si leur personnel a suivi la formation au programme ECR. Au primaire, la transversalité des matières et la liberté pédagogique des titulaires permettent facilement de ne pas enseigner le programme ECR comme plusieurs formateurs en ECR l'ont déploré récemment (lors d'un colloque l'ACFAS et d'une conférence du « Politburo » du MELS).

  4. Même l’école qui satisfait tous ces aspects formels peut très bien enseigner le programme ECR « à sa manière ». Comme la journaliste du Devoir qui s’était rendue « incognito » sous le prétexte d'y inscrire des enfants a pu le constater pour une des écoles évangéliques — l’Église-école Académie chrétienne Logos — qui a vu son permis renouvelé jusqu’à la fin de l’année scolaire 2010-2011 : « Pomela Thompson, la femme du révérend qui tient l'établissement, a avoué être en négociation constante avec le ministère. Si elle cède sur certains points, pas question d'enseigner le cours Éthique et culture religieuse en y faisant la promotion d'autre chose que la foi chrétienne. »
Académie Beth Esther (juive, Montréal)

« Les disciplines prévues au régime pédagogique sont enseignées, à l’exception du cours d’éthique et de culture religieuse. »


Académie culturelle de Laval (islamique, Laval)
« Dès la prochaine rentrée scolaire, il suivra une formation sur le cours Éthique et culture religieuse. »


Académie Kells (3 écoles à Montréal, Westmount)

« Ainsi, le cours d’éthique et de culture religieuse en est absent au 2e et au 3e cycle du primaire. Ainsi, la Commission estime que le programme d’éthique et de culture religieuse devrait être enseigné de façon distincte, et non intégré à d’autres disciplines. »


Académie Laurentienne (Val Morin)

« Par ailleurs, des corrections devront être apportées à certains aspects de son organisation pédagogique : deux disciplines artistiques devront être enseignées au primaire ainsi que le cours d’éthique et de culture religieuse. »

Même les bulletins doivent être uniformes et évalués selon l’approche par compétences dans les écoles privées du Québec :

« En ce qui concerne les bulletins, l’établissement contrevient à plusieurs prescriptions du régime pédagogique : notamment, toutes les disciplines prévues au régime pédagogique doivent être évaluées ; le libellé dans les termes usuels des compétences doit être utilisé ainsi que les pondérations établies par le Ministère. »


Académie Lavalloise (Laval)

« [l'école doit] respecter les orientations du programme d’éthique et de culture religieuse »


École Al-Houda (Dollard-des-Ormeaux, islamique)

« le directeur pédagogique [est le] seul à avoir participé au plan de formation en éthique et culture religieuse. »

L'école n'a pas vu son permis renouvelé, mais ce manque de formation du personnel enseignant n'en est pas apparemment la cause.


École communautaire Belz (Montréal, juive)

« Les enseignants n’ont reçu aucune formation particulière pour offrir le cours d’éthique et de culture religieuse, puisque les parents ont refusé d’y inscrire leurs enfants, et cette discipline n’est donc pas offerte. »


École privée Kinderville (Candiac, bilingue non subventionnée)

« Au 1er cycle du primaire, le programme d’éthique et culture religieuse n’est pas enseigné. »


École Sogut (Montréal, turque)

« soulignons, par ailleurs, que le bulletin proposé au secondaire n’utilise pas les formulations des compétences disciplinaires dans les termes usuels et que le programme d’éthique et de culture religieuse en est absent. »


L’École arménienne Sourp Hagop (Montréal, arménienne)

« Le programme d’éthique et culture religieuse n’est pas enseigné comme prévu ».




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Québec veut fermer une école juive trop religieuse

Radio Canada rapporte que « Québec menace de fermer l'Académie Yéchiva Toras Moché, une école de la communauté hassidique satmar de Montréal, parce qu'elle refuse d'enseigner plusieurs matières prévues au programme d'éducation. [Note du carnet : y compris le cours d'éthique et de culture religieuse.]

L'école, qui existe depuis les années 50 [depuis 1952], ne détient toujours pas de permis. Radio-Canada révélait l'an dernier qu'elle offre un enseignement presque exclusivement religieux à quelque 200 garçons, en contravention de la Loi sur l'instruction publique [Note à Radio-Canada : c'est une école privée, il s'agit plutôt du régime pédagogique et de la Loi sur l'enseignement privé]. »

Dans la requête déposée au tribunal par le Monopole de l'Éducation, on peut lire que des inspections effectuées en 2008 ont révélé de sérieuses lacunes.

« Parmi les matières qui doivent obligatoirement [pléonasme] figurer à la liste [...], seules les matières obligatoires langue d'enseignement et mathématique sont enseignées », peut-on lire dans le document.

Outre l'enseignement des matières obligatoires, le ministère déplorait le matériel pédagogique inadéquat et le nombre insuffisant d'enseignants qualifiés. C'est-à-dire des professeurs qualifiés du Québec (ou de l'extérieur et dont les diplômes sont considérés comme équivalents), or les Satmars ne fréquentent pas les facultés des « sciences de l'éducation » du Québec et ils n'acceptent pas d’enseignants provenant de l’extérieur de la communauté.

L'école refuse d'augmenter le nombre d'heures consacrées aux matières séculaires, affirmant que la charge de travail serait trop élevée. De plus, malgré le fait que le cours d’Éthique et de culture religieuse soit obligatoire depuis septembre 2008, l’établissement n’a pas l’intention de l’offrir. Par ailleurs, le calendrier scolaire, même s’il respecte le nombre de jours prescrits, n’accorde pas dix des treize congés dictés au régime pédagogique.

L'affaire sera probablement entendue en justice en octobre 2010. La direction de l'école a précisé qu'ils contesteront l'injonction en justice.





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France — Les écoles hors contrat se développent sans contrainte

Extraits d'un article de La Croix d'hier.


De nouvelles écoles sont créées un peu partout en France, à l'écart de l'éducation nationale, et sont souvent très peu contrôlées par l'État. [Note du carnet : un appel de la part de La Croix a plus d'uniformité et de contrôles ?]

Implanté à Bessay-sur-Allier, bourg de 1 500 habitants, le Cours Saint-Jean-Bosco accueille 21 élèves, de la grande section de maternelle au CM2 [5e année du primaire], réunis en trois classes. Cette école privée a été fondée il y a quelques années par un groupe de parents estimant que pas plus les établissements publics que les établissements catholiques sous contrat d'association avec l'État n'offraient de liberté de choix, s'agissant des méthodes pédagogiques et éducatives.

Ici, le travail en petits groupes offre « davantage de souplesse » et permet de porter aux élèves « une attention de tous les instants », assure Anne-Françoise de Solere, la directrice. On a opté pour la méthode syllabique d'apprentissage de la lecture, un temps bannie par l'éducation nationale, et on pratique abondamment l'analyse grammaticale. De même, plutôt que de fonctionner par cycles, on préfère « faire chaque jour un peu de chaque matière, en misant sur les vertus de la répétition ».

Si ces familles ont choisi de créer leur propre école, c'est aussi, souligne Anne-Françoise de Solere, qu'elles souhaitent « une continuité, sur le plan des valeurs, entre la maison et l'école ». Dans l'établissement sous contrat où elle enseignait précédemment, à peine deux professeurs sur dix étaient catholiques. « Je me sentais seule », confie-t-elle. Au Cours Saint-Jean-Bosco, au contraire, tout le monde, enseignants comme élèves, prend part à la prière du matin...

Un peu partout en France, des projets de ce type voient le jour. Difficile, cependant, de mesurer avec précision le phénomène. « Plutôt stable », avance-t-on au ministère de l'éducation sans donner de chiffres. « En progrès », assure-t-on à la Fondation pour l'école. « On compte - de la maternelle au baccalauréat - une quinzaine d'établissements hors contrat supplémentaires par an ; 460 écoles accueillent aujourd'hui un peu plus de 46 000 élèves », précise Anne Coffinier, la présidente de cette fondation reconnue d'utilité publique et qui œuvre en faveur du développement d'établissements « réellement indépendants ».

Pour voir le jour, ces écoles s'appuient sur la notion de liberté d'éducation : en France, l'instruction est obligatoire jusqu'à l'âge de 16 ans, mais les parents peuvent scolariser leur enfant dans l'établissement de leur choix, voire se charger eux-mêmes de transmettre les connaissances. « En matière de création d'écoles privées, la tradition française est extrêmement libérale », estime Bernard Toulemonde, inspecteur général honoraire. De fait, il suffit de procéder à une déclaration d'ouverture auprès du préfet, des autorités académiques et du procureur de la République, qui, le cas échéant, ont un mois pour s'opposer à la création de l'établissement. Le déclarant doit aussi indiquer, plans à l'appui, dans quels locaux ce dernier sera installé. Le maire, lui aussi, peut s'opposer au lancement de l'école, mais uniquement s'il juge les lieux non conformes en termes d'hygiène, de bonnes mœurs ou de sécurité publique. Pour le reste, souligne Bernard Toulemonde, « les contrôles interviennent a posteriori ».

« Effectués à l'initiative des inspecteurs d'académie, ils visent à garantir le droit de l'enfant à l'instruction, précise-t-on au ministère de l'éducation. Il s'agit notamment de s'assurer, en accord avec la loi d'orientation sur l'école de 2005, que les élèves maîtrisent en fin de collège le socle commun de connaissances. » D'autres contrôles s'attachent à vérifier la bonne conduite et la moralité des établissements, notamment l'absence de lien avec des groupes sectaires [Qu'est-ce qu'une secte ?]. Mais, comme le reconnaît un proche du ministre, ils ne sont pas réguliers. « Les inspections interviennent surtout lorsque l'établissement sollicite un contrat d'association avec l'État ou bien lorsqu'il y a plainte ou soupçon de dérive. »

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Les partisans des écoles hors contrat préfèrent, eux, s'attarder sur « la grande diversité » de ces établissements. Certains attendent tout simplement d'avoir plus de cinq ans d'existence - le minimum requis - pour solliciter un accord d'association avec l'État. D'autres font clairement le choix de rester indépendants, souvent pour pouvoir transmettre des valeurs religieuses. « C'est le cas notamment de parents membres de nouvelles congrégations religieuses comme l'Emmanuel », note Anne Coffinier.

Pareille logique est à l'œuvre aussi dans la communauté juive. « La plupart de nos écoles sont sous contrat », explique Patrick Petit-Ohayon, directeur de l'action scolaire au sein du Fonds social juif unifié. « En plus des heures prévues pour chaque matière dans le programme de l'Education nationale, les élèves suivent, selon les niveaux, 4 à 8 heures d'enseignements juifs en plus. Mais certaines écoles fondées par des courants très orthodoxes préfèrent rester hors contrat et aller plus loin, en réduisant les enseignements généraux pour consacrer la moitié du temps de cours à des enseignements juifs, essentiellement l'apprentissage de l'hébreu et l'étude de textes de la Torah et du Talmud. Les parents font alors le choix de donner dans un premier temps à leurs enfants une culture majoritairement juive pour qu'ils puissent ensuite aborder la culture française et occidentale avec des éléments identitaires forts. »

D'autres écoles, elles, se construisent autour d'une pédagogie spécifique (Freinet, Montessori, etc.), parfois pour mieux prendre en compte les enfants surdoués ou ceux qui présentent des phobies scolaires. Il peut s'agir aussi de transmettre une langue et une culture, avec un enseignement bilingue. Cette diversité des écoles hors contrat se reflète aussi dans le montant des frais d'inscription, qui, d'après Anne Coffinier, s'échelonnent « de 70 € [90 $] par mois dans certaines écoles parentales à 1 000 € [1300 $] par mois dans certaines "boîtes à bac" ».

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