dimanche 15 décembre 2024

Les enfants cobayes de la révolution trans

Texte de Mathieu Bock-côté par ce samedi dans le Figaro.

Ils sont nombreux à confesser leur surprise devant les révélations concernant le rapport ayant fuité dans Le Figaro sur la transition de genre de la Haute Autorité de santé (HAS). Car la HAS entend la rendre accessible à tous, même aux mineurs de 16 ans, sans exprimer la moindre prudence, alors qu’ailleurs en Occident, se dévoile une vive inquiétude à ce sujet. Rappelons l’esprit et les grandes lignes de ces révélations.

Mais faisons d’abord un détour. L’idéologie du genre s’est concentrée ces derniers temps sur la transition « sociale » en expliquant qu’il suffisait pour une femme de se dire homme pour que la société soit obligée de la considérer comme tel. C’est ce qui a poussé le planning familial à soutenir en 2022 qu’un homme pouvait être enceint. C’est aussi dans cet esprit qu’on a vu se multiplier les non-binaires, prétendant se dérober au féminin comme au masculin, ou alors les embrasser ensemble.

Mais nous venons de franchir une étape. C’est désormais la société dans son ensemble qui doit se reprogrammer pour faciliter non plus la transition « sociale », mais la reconstruction médicale des trans. Le personnel de santé est ainsi invité à accueillir le jeune trans en utilisant les pronoms qu’il exige - un homme biologique se prenant pour une femme devra ainsi se faire appeler «elle». L’inverse s’imposera aussi. D’aucune manière, on ne devra se demander si ce désir de changer de sexe n’est pas le signe d’un trouble psychiatrique ou psychique - la dissociation entre l’identité de genre et le corps sexué est ainsi légitimée par le corps médical.

Le système de santé est ensuite poussé à engager le plus rapidement possible la thérapie hormonale engageant le «changement de sexe», puis les opérations chirurgicales qui le rendront absolument définitif. Ces opérations devront être accessibles aux mineurs de 16 ans. Par ailleurs, les parents qui remettraient en question la transition de genre de leur enfant, et qui refuseraient de l’accompagner, pourraient être accusés de maltraitance parentale, et voir à terme leur autorité parentale remise en question, et même abolie. L’État, à terme, se donnera le droit d’arracher leurs enfants aux parents trop conservateurs, trop traditionnels. La déconstruction de la famille culmine ici.
La mouvance trans est parvenue à créer un dispositif technomédical autoréférentiel où ses militants se citent les uns les autres pour produire un « savoir » orientant ensuite le système de santé
La première chose qui frappe, ici, est la pénétration de la théorie du genre dans les instances censées produire l’expertise médicale. Le néolyssenkisme triomphe. La mouvance trans est parvenue à créer un dispositif techno-médical autoréférentiel où ses militants se citent les uns les autres pour produire un « savoir » orientant ensuite le système de santé. Cet entrisme s’accompagne souvent d’une stratégie de harcèlement des médecins pour voir lesquels se soumettent à cette idéologie et lesquelles s’y refusent, ce qui justifiera ensuite leur dénonciation pour transphobie.

La banalisation de la notion d’identité de genre a pour fonction d’empêcher de se demander pourquoi tant de jeunes, aujourd’hui, en viennent à se croire étrangers à leur corps. La vérité existentielle d’un être se trouverait dans son « ressenti de genre », et non pas dans son corps sexué, désormais traité comme une carcasse charnelle encombrante et le résidu réactionnaire d’une phase antérieure de l’humanité, avant la révélation constructiviste, expliquant que la biologie comme la nature sont désormais des catégories périmées. On parle ainsi non plus de chirurgies de changement de sexe mais de « réassignation sexuelle », pour modeler un corps jugé traître, ou du moins réfractaire, à l’esprit flottant qu’on croit porter en soi.

On touche ici les programmes d’éducation à la sexualité à l’école. Les enfants subissant la propagande du genre auront plus de chance de se retrouver un jour devant un médecin du genre ayant la mission de piloter leur transition. Si cet adolescent doute soudainement des bienfaits de la démarche dans laquelle il s’est engagé, une association de militants trans présentés comme des experts par l’état lui dira de ne pas avoir peur. La diffusion accélérée du fantasme voulant qu’on puisse naître dans le mauvais corps est le symptôme d’une perte du rapport au réel et d’un effondrement psychique à l’échelle d’une civilisation.

La modernité porte en elle une tentation démiurgique et rêve d’une humanité informe qu’elle pourra modeler selon son bon désir, dans une rationalité utopique, qui culmine toujours dans une logique totalitaire. La médecine doit fabriquer un homme nouveau, dénaturalisé, modifié aux hormones et au scalpel, persuadé désormais de s’autoengendrer. Nous sommes devant les enfants cobayes de la révolution trans.

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Canada n'est pas une société qui désavantage les minorités. Les données fiscales indiquent plutôt le contraire.

Une nouvelle étude ne parvient pas à prouver que les différences de revenus sont dues au racisme systémique.

D'importantes dépenses de programmes fédéraux reposent sur l'idée que les minorités visibles au Canada sont systématiquement désavantagées.

Prenons l'exemple le plus récent : plus tôt cet automne, le gouvernement fédéral a publié une stratégie de lutte contre le racisme de près de 45 pages pour 2024-2028, qui « vise à confronter le racisme systémique et à la rendre nos communautés plus inclusives et prospères.». Une telle stratégie est nécessaire, selon le gouvernement, parce que le racisme systémique existe dans toutes nos institutions et « (perpétue) une situation de désavantage relatif pour les personnes racisées ».

Mais où sont les preuves de ce postulat ? Pas dans les statistiques sur les revenus.

Contredisant directement l'idée que les minorités visibles sont systématiquement opprimées, une nouvelle étude de Statistique Canada montre que de nombreux Canadiens issus de minorités s'épanouissent et réussissent même mieux en moyenne que leurs homologues blancs.

L'étude de Statistique Canada s'est appuyée sur les données des recensements de 1996 et 2001, a utilisé les relevés fiscaux T1 (déclaration générale)  et T4 (rémunération payée) et d'autres données pour mesurer les revenus cumulés sur 20 ans des hommes et des femmes nés au Canada appartenant à quatre cohortes raciales - Blancs, Asiatiques du Sud, Chinois et Noirs - et a constaté que les minorités obtenaient des résultats supérieurs à ceux de la majorité de la population.


Plus précisément, parmi les hommes nés au Canada, les revenus cumulés sur 20 ans étaient en moyenne les plus élevés chez les Chinois (1,58 million de dollars en 2019), suivis par les hommes originaires d'Asie du Sud (1,51 million de dollars). Seuls les hommes noirs (1,06 million de dollars) gagnaient moins que les hommes blancs (1,31 million de dollars).

De toute évidence, si les hommes chinois et sud-asiatiques ont une capacité de gain supérieure à celle des hommes blancs, il est difficile de conclure que le Canada est systématiquement raciste à l'égard des minorités.

Qu'en est-il de l'inverse ? Les données suggèrent-elles que le Canada est systématiquement raciste à l'égard des hommes blancs ? Non, pas à cette époque. « Le fait que les hommes chinois et sud-asiatiques aient un niveau d'éducation plus élevé que les hommes blancs et qu'ils soient plus susceptibles de travailler dans les domaines des sciences, de la technologie et de l'ingénierie (STIM) est le facteur le plus important expliquant pourquoi ces deux groupes ont des revenus cumulés plus élevés que les hommes blancs », indique le rapport de StatCan. (Ils se concentrent aussi dans les grandes villes où les salaires sont plus importants qu'à la campagne.)

En d'autres termes, c'est l'éducation, et non le racisme, qui expliquerait les écarts de revenus.

Que se passe-t-il lorsque l'on tient compte de l'éducation et d'autres facteurs tels que la taille de l'employeur, le secteur d'activité et la géographie ? L'écart de rémunération entre les hommes blancs et les hommes noirs demeure. De même, alors que les hommes chinois et sud-asiatiques gagnent plus que les hommes blancs, après contrôle de l'éducation et d'autres facteurs, les hommes blancs gagnent en fait plus.

Avons-nous  trouvé là la preuve d'un racisme systémique parce que les employeurs paient les minorités moins que leurs homologues blancs avec un niveau d'éducation similaire ?

Il n'y a aucune preuve tangible de cela. Tout d'abord, la discrimination des employeurs à l'égard des minorités visibles est illégale depuis des décennies. (L'inverse ne l'est pas...) Deuxièmement, comme le suggère l'étude elle-même, de nombreux facteurs influencent les revenus en dehors de ceux que les chercheurs peuvent observer et contrôler, notamment les différences dans les réseaux sociaux, les méthodes de recherche d'emploi et les préférences pour certaines conditions de travail, si bien qu'il n'est pas très logique d'accuser automatiquement le racisme. Troisièmement, si le Canada est systématiquement raciste à l'égard des minorités, comment les hommes chinois et sud-asiatiques se sont-ils retrouvés surreprésentés dans les domaines STIM les plus rémunérateurs ?

Et si le racisme à l'égard des Canadiens noirs est à l'origine de l'écart de rémunération entre les hommes, comment expliquer que les femmes noires gagnent un peu plus que les femmes blanches ? Parmi les femmes nées au Canada, avant de tenir compte de l'éducation et d'autres facteurs, la cohorte qui a gagné le moins sur deux décennies était celle des femmes blanches (0,80 million de dollars). Les femmes chinoises avaient les revenus cumulés les plus élevés (1,14 million de dollars), suivies par les femmes d'Asie du Sud (1,06 million de dollars), puis par les femmes noires (0,82 million de dollars). Le Canada est-il rempli de racistes qui ne pratiquent la discrimination qu'à l'égard des hommes noirs, mais pas à l'égard des femmes noires ?

Un autre résultat de l'analyse de StatCan est qu'après avoir contrôlé les mêmes facteurs (par exemple l'éducation), le revenu des femmes chinoises est supérieur à celui des femmes blanches de 38 000 dollars en moyenne. Les employeurs racistes favorisent-ils donc systématiquement les hommes blancs par rapport aux hommes chinois, tout en défavorisant les femmes blanches par rapport aux femmes chinoises ?

La thèse selon laquelle les Canadiens issus de minorités visibles sont systématiquement désavantagés ne résiste pas aux données.

En outre, cette dernière étude de StatCan n'a pris en compte que quatre groupes (Chinois, Sud-Asiatiques, Blancs et Noirs) de personnes nées au Canada, mais d'autres recherches de StatCan fournissent des preuves similaires contre le racisme systémique. Les données sur les revenus hebdomadaires de 2016 montrent qu'en plus des hommes chinois et sud-asiatiques, les hommes japonais et coréens nés au Canada ont des revenus plus élevés que leurs homologues blancs. Chez les femmes, sept des dix groupes minoritaires (coréennes, chinoises, sud-asiatiques, japonaises, philippines, « autres minorités visibles » et arabes ou ouest-asiatiques) avaient des revenus hebdomadaires moyens supérieurs à ceux de la population blanche.

En clair, les données sur les revenus ne prouvent pas que le Canada est une société qui désavantage systématiquement les minorités. Au contraire, elles démontrent exactement le contraire. Les politiciens et les bureaucrates devraient peut-être tenir compte de ces faits avant de gaspiller des sommes considérables de l'argent des contribuables pour élaborer de longs plans de « lutte contre le racisme ».

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TEIMS/TIMSS 2023 - Résultats inquiétants pour les élèves de 4e année/CM1 en Belgique francophone et France, Québec dans la moyenne basse (Résultat des allophones au Québec et Ontario sont meilleurs en maths que les franco/anglophones. C'est différent en France et Belgique.)