mardi 9 mars 2021

Discuter selon les règles wokes : « pile tu perds, face je gagne »

Les wokes ont droit à toutes les échappatoires, contradictions et arguments circulaires. Explications de Jean-Sébastien Ferjou en 1 minute 20.

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La théorie de la « fragilité blanche »

Et son test de la fragilité blanche, une version modernisée de l’ordalie de l’eau : vous flottez, vous êtes une sorcière ; vous vous noyez, vous ne l’étiez pas.


Journée de la Femme : enfin libres et épanouies

MONTRÉAL, QC — Selon plusieurs sources, l’analyste commerciale Julie Thibault s’est finalement débarrassée des chaînes du patriarcat pour retrouver sa liberté et la valeur associée à une semaine de travail bien remplie et valorisante de 80 heures.

« C’est un vrai bonheur », a déclaré Mme Thibault alors qu’elle assistait à sa quatrième réunion de la journée pour discuter des chiffres de vente du premier trimestre de Becdev Inc. « Mes ancêtres féministes se sont battues pour que je puisse rendre compte à 12 cadres intermédiaires différents dans un travail ingrat avant de rentrer chez moi, dans un appartement vide, et de boire du vin en regardant la SRC. J’ai atteint le summum de la féminité épanouie. »

Thibault a déclaré que même si elle doit faire face à des demandes déraisonnables de la part de collègues masculins et parfois même à du harcèlement sexuel, au moins elle n’a pas à vivre la vie ennuyeuse d’une femme au foyer avec un mari et des enfants.

« Je ne veux pas de tout ce faux bonheur domestique de banlieue, parce que ce n’est pas féministe », répète-t-elle à voix haute. Vous ne voudriez quand même pas que je me retrouve dans ma cuisine, les pieds nus, à la campagne, entourée d’enfants avec un riche mari bûcheron ?

« Maintenant, si vous voulez bien m’excuser, je dois refaire avant demain les premières pages du compte rendu de procédures de tests avant que mon patron ne menace à nouveau de me renvoyer. »

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La sexologue Thérèse Hargot : « La libération sexuelle a asservi les femmes »  

 
    

Sondage : les Français ne connaissent pas les concepts « woke »

Selon l’institut de sondages, l'Ifop, ces concepts ne sont encore connus que par des initiés très diplômés.

Avez-vous déjà entendu parler des notions ou termes suivants?

 

En %

Oui, et vous voyez de quoi il s'agit

Oui, mais vous ne voyez pas vraiment de quoi il s'agit

Non, vous n'en avez jamais entendu parler

L’écriture inclusive

 

Le privilège blanc

 

Le racisme systémique

 

La pensée décoloniale

 

Les luttes en non-mixité

 

La cancel culture (culture bu bâillon)

 

Les études de genre

 

La culture du viol


 

Les personnes racisées

 

La masculinité toxique


 

L’intersectionnalité des luttes


La pensée woke

Enquête menée auprès d’un échantillon de 1 011 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus selon la méthode des quotas.

Glossaire

Racisé

Introduit en 1972 par Colette Guillaumin, ce terme désigne les personnes socialement assignées à une race déterminée. Pour la sociologie, si la race n’a pas de fondements biologiques, elle est en revanche une construction sociale.

Culture du viol

Thèse selon laquelle le viol ne serait qu’une manifestation extrême du sexisme, et qu’il serait minoré et banalisé par l’ensemble de la société.

Privilège blanc

Introduite par Peggy McIntosh en 1989, cette notion traduit le fait que les personnes blanches bénéficient, sans s’en rendre compte, d’avantages et imposent une norme sociale aux autres. [Voir La théorie de la « fragilité blanche »]

Non-mixité

Forme de militantisme réservant des espaces de parole ou de réunion à des groupes opprimés, ce qui exclut les personnes considérées comme appartenant à un groupe de « dominants ».

Masculinité toxique

Qui dit que les stéréotypes traditionnels liés aux hommes ont un impact négatif sur eux-mêmes et sur la société.

Appropriation culturelle

L’idée selon laquelle l’utilisation des éléments d’une autre culture par un membre d’une culture « dominante » ou « néocoloniale » relèverait d’une forme de spoliation.


Baccalauréat en France : « Les candidats des établissements privés hors contrat injustement pénalisés »

Anne Coffinier (ci-contre), présidente de l’association Créer son école, dénonce, dans une tribune au « Monde » de mardi 9 mars, le fait que les lycéens scolarisés dans les établissements privés hors contrat n’aient pas le droit cette année au contrôle continu au baccalauréat, comme leurs camarades du public et du privé sous contrat avec l’État.

Plus de 4 000 candidats au bac risquent d’être injustement pénalisés cette année s’ils n’obtiennent pas très vite gain de cause devant la justice. Le ministre de l’Éducation, Jean-Michel Blanquer, vient de leur imposer de passer la quasi-totalité de leur bac en mai-juin sous forme d’épreuves terminales, tandis que les autres élèves obtiendront leur examen au contrôle continu à plus de 80 %, à la suite notamment de l’annulation des épreuves terminales de spécialités en raison de la crise sanitaire. Leur faute ? Simplement que leurs parents les aient scolarisés en lycée privé hors contrat et non dans un établissement public ou privé sous contrat avec l’État.

Pour ces jeunes, après les perturbations induites par le Covid-19 dans leur scolarité et leur vie sociale, c’est la mauvaise nouvelle de trop. Ils ne comprennent pas ce deux poids deux mesures qui les expose au stress et à l’échec en cette année déjà tellement bouleversée par la pandémie. Personne n’anticipait d’ailleurs que le ministère de l’Éducation nationale infligerait un traitement différencié à une catégorie de jeunes pour le bac de cette année, vu la situation sanitaire.

Traitement punitif

Sam Piter, athlète de haut niveau et membre de l’équipe de France de surf, est scolarisé à l’institut Hackschooling à Soorts-Hossegor dans les Landes depuis sa classe de 3e. Cet établissement privé hors contrat lui permet de mener au plus haut niveau sa carrière sportive et sa scolarité. Sam est bon élève et mène de front ces deux projets qui lui tiennent à cœur. Mais en juin, il sera condamné à choisir entre passer son bac ou concourir lors d’importantes compétitions sportives qui se déroulent au même moment. Mérite-t-il ce traitement punitif uniquement parce qu’il étudie dans un lycée privé hors contrat ?

Ils sont des centaines à se joindre au référé-suspension doublé d’un recours pour excès de pouvoir organisé par l’association Créer son école devant le Conseil d’État, afin de tenter d’obtenir le droit de valider eux aussi un maximum de matières en contrôle continu.

La situation sanitaire étant la même pour tous, qu’est-ce qui peut justifier d’exposer à un risque accru de contamination une catégorie de jeunes, qui, pour composer leurs épreuves, devront converger vers des centres d’examen de grande taille et souvent éloignés de leur domicile quand les autres candidats obtiendront leur bac « en restant au chaud » ?

Certains affirment que les établissements privés hors contrat n’auraient pas la capacité juridique d’attribuer des notes destinées à être prises en compte officiellement dans un diplôme national, parce que ce processus ne se déroulerait pas sous l’autorité de l’éducation nationale. Et que, depuis Bonaparte, l’État possède le monopole de la « collation » des grades universitaires, et donc du bac qui en constitue théoriquement le premier échelon.

Mais l’argument ne tiendrait que si, dans les établissements publics, les notes étaient exclusivement attribuées par des fonctionnaires de l’État — auxquels leur statut offre les garanties déontologiques et académiques censées assurer leur incorruptibilité. Ce n’est pas le cas, à l’heure où les contractuels sont de plus en plus nombreux. Sans compter que les professeurs des établissements d’enseignement privé sous contrat avec l’État sont pour leur part habilités à noter alors qu’ils n’ont pas le statut de fonctionnaires.

Quatre inspections en moyenne

Serait-ce alors le fait d’être supervisés par un proviseur ou un directeur fonctionnaire qui habiliterait les enseignants à noter ? Si tel était le cas, il faudrait supprimer à ceux de l’enseignement privé sous contrat le droit d’évaluer les élèves puisqu’ils sont placés sous les ordres de directeurs d’établissement de droit privé qui ne dépendent aucunement de l’éducation nationale. Et quid des établissements privés sous contrat dirigés par un fonds d’investissement étranger, comme c’est de plus en plus fréquemment le cas ? La tendance à « surnoter » pour satisfaire les actionnaires et veiller à la bonne valorisation de l’actif ne peut alors pas être exclue !

Dans l’enseignement catholique, les directeurs d’établissements privés sous contrat sont placés sous l’autorité de l’organisme — tout à fait privé — de gestion des établissements catholiques (dans lequel siège souvent le représentant de l’évêque). Ils étaient matériellement en capacité de relever les notes attribuées par leurs enseignants pour le bac au contrôle continu en 2020. Difficile alors de ne pas considérer que ce sont eux les notateurs de dernier ressort.

Mais il y a les inspecteurs, me direz-vous… Les enseignants de l’éducation nationale sont inspectés par l’éducation nationale, qui garantit ainsi leur aptitude à bien évaluer les élèves. Qui peut toutefois croire que cela constitue réellement une garantie lorsque l’on sait que ces enseignants sont inspectés moins de quatre fois dans leur carrière en moyenne ? A contrario, depuis la loi Gatel de 2018, les établissements privés hors contrat subissent contrôle sur contrôle, de façon inopinée la plupart du temps, et portant sur les diplômes et la moralité des enseignants autant que des directeurs ainsi que, bien entendu, sur la bonne acquisition des connaissances. À quoi bon monopoliser tant d’inspecteurs de l’éducation nationale pour inspecter autant les établissements hors contrat, si les contrôles qu’ils diligentent ne servent aucunement à en garantir le sérieux académique et la moralité ?

La motivation réelle pour imposer à ces milliers de jeunes de passer un bac plus difficile et plus dangereux en pleine pandémie reste bien énigmatique. Il semblerait si naturel de reproduire cette année la solution de bon sens retenue l’an dernier par Jean-Michel Blanquer, en permettant aux lycéens ayant un dossier de contrôle continu de présenter les épreuves de spécialité, voire tout le bac, en contrôle continu. Le Conseil d’État tranchera d’ici quelques jours.