jeudi 22 octobre 2009

Mgr Schooyans : Barack Obama, Tony Blair et le messianisme réinterprété

Extrait d'un discours de Mgr Michel Schooyans [prononcé Skô-yann-se], membre de trois académies pontificales : celle pour la vie, celle des sciences sociales et l'Académie Saint-Thomas d'Aquin. Ce discours prononcé au Vatican en français, lors de la séance plénière de l'Académie pontificale pour les sciences sociales le 1er mai 2009, permet sans doute de mieux appréhender, pour les catholiques, l'imposition du cours d'éthique et de culture religieuse dans un contexte planétaire.
«Refaire les religions ? Refaire le christianisme ?

Dans ces programmes, le Président Obama pourra compter sur l’appui du couple Tony Blair et Cherie Booth. Le think-tank fondé par l’ex-premier ministre britannique sous le nom de Tony Blair Faith Foundation aura, parmi ses attributions, de reconstruire les grandes religions comme son collègue Barack Obama reconstruira la société mondiale. Dans ce but, la fondation en question devra répandre les "nouveaux droits", en utilisant à cette fin les religions du monde et en adaptant celles-ci à leurs nouvelles tâches. Ces religions devront être réduites au même commun dénominateur, c’est-à-dire vidées de leur identité. Cela ne pourra se faire que moyennant l’instauration d’un droit international inspiré de Hans Kelsen (1881-1973) et appelé à valider tous les droits propres aux nations souveraines. Ce droit devra aussi s’imposer aux religions du monde de telle façon que la "foi" nouvelle soit le principe unificateur de la société mondiale. Cette "foi" nouvelle, ce principe unificateur, devra permettre de faire avancer les Millenium Development Goals. Parmi ceux-ci figurent sous le n° 3: "Promote gender equality and empower women"; sous le n° 5: "Improve maternal health". Nous savons ce que recouvrent et ce qu’impliquent ces expressions. Pour faire démarrer le programme de la Foundation, une campagne anti-malaria est annoncée. Elle fait partie de l’objectif n° 6: "Combat HIV/AIDS, malaria and other diseases". Cette annonce est faite de façon à ce que, en souscrivant à cette campagne, on souscrive à l’ensemble des objectifs du Millénaire.

En fait, le projet de Tony Blair prolonge et amplifie l'Initiative des Religions Unies, apparue il y a plusieurs années. Il prolonge également la Déclaration pour une éthique planétaire, dont Hans Küng est l’un des principaux inspirateurs. Ce plan ne pourra se réaliser qu'au prix du sacrifice de la liberté religieuse, de l'imposition d'une lecture "politiquement correcte" des Écritures et du sabotage des fondements naturels du droit. Déjà Machiavel recommandait l'utilisation de la religion à des fins politiques…

La "conversion" très médiatisée de l’ancien premier ministre au catholicisme ainsi que son interview en avril 2009 à la revue gay "Attitude" permettent d’encore mieux comprendre les intentions de Tony Blair concernant les religions, à commencer par la religion catholique. Le discours du Saint-Père, notamment sur le préservatif, serait d’une autre génération. Le récent "converti" n’hésite pas à expliquer au pape non seulement ce que celui-ci doit dire, mais aussi ce qu’il doit croire ! Est-il catholique? Mr Blair ne croit pas à l’autorité du pape.

Nous voici revenus au temps de Hobbes, sinon à Cromwell: c’est le pouvoir civil qui définit ce qu’il faut croire. La religion est vidée de son contenu propre, de sa doctrine; n’en reste qu’un résidu de morale, défini par le Léviathan. On ne dit pas qu’il faille nier Dieu, mais dorénavant Dieu n’a plus rien à faire dans l’histoire des hommes et de leurs droits: nous revenons au déisme. Dieu est remplacé par le Léviathan. A celui-ci de définir, s’il le veut, une religion civile. A lui d’interpréter, s’il le veut et comme il le veut, les textes religieux. La question de la vérité de la religion n’a plus de pertinence. Les textes religieux, et en particulier bibliques, doivent être compris dans leur sens purement "métaphorique"; c’est ce que recommande Hobbes (III, XXXVI). A la limite, seul le Léviathan peut interpréter les Écritures. Il faut en outre réformer les institutions religieuses pour les adapter au changement. Il faut même prendre en otages quelques personnalités religieuses, appelées à cautionner la nouvelle "foi" sécularisée, celle du "civil partnership".

Les droits de l’homme tels qu’ils sont conçus dans la tradition réaliste sont passés ici au fil de rasoir. Tout est relatif. Il ne reste de droits que ceux définis par le Léviathan. Comme l’écrit Hobbes, "La loi de nature et la loi civile se contiennent l’une l’autre, et sont d’égale étendue." (I, XXVI, 4). Il ne reste de vérité que celle énoncée par le même Léviathan. Seul celui-ci décide comment le changement doit être conduit.


Le retour de l’aigle à deux têtes

Le projet Blair ne peut se réaliser sans remettre en question la distinction et les rapports entre l'Église et l'État. Ce projet risque de nous faire régresser à une époque où le pouvoir politique s'attribuait la mission de promouvoir une confession religieuse ou d’en changer. Dans le cas de la Tony Blair Faith Foundation, il s'agirait même de promouvoir une et une seule confession religieuse, qu'un pouvoir politique universel, global, imposerait à l'ensemble du monde. Rappelons que le projet Blair, imprégné de New Age, a été préparé idéologiquement par l'Initiative pour les Religions Unies ainsi que par la Déclaration pour une éthique planétaire (déjà citées) et est appuyé par de nombreuses fondations similaires.

Ce projet rappelle évidemment l'histoire de l'anglicanisme et de sa fondation par le "défenseur de la foi", Henri VIII. Le projet des religions unies et réduites à un commun dénominateur est toutefois plus discutable encore que ne l'était le projet d'Henri VIII. En effet, la réalisation de ce projet postule la mise sur pied d'un gouvernement mondial et d’une police globale des idées. Ainsi qu'on l'a vu à propos de Barack Obama, les artisans de la gouvernance mondiale s'appliquent à imposer un système de positivisme juridique faisant procéder le droit de la volonté suprême, de laquelle dépend la validation des droits particuliers. Désormais, si toutefois devait se réaliser le projet de M. Blair, les agents de la gouvernance mondiale imposeront, par un nouvel Acte de Suprématie, une religion unique, validée par les interprètes de la volonté suprême, dont le Vicaire général est peut-être déjà trouvé (Hobbes, III, XXXVI).

Ce que révèle l'analyse des décisions de Barack Obama et du projet de Tony Blair, c'est que se profile une Alliance de deux volontés convergentes, visant, l'une, à subjuguer le droit, l'autre, à subjuguer la religion. Telle est la nouvelle version de l’aigle à deux têtes. Droit et religion sont instrumentalisés pour "légitimer" n'importe quoi.

Cette double instrumentalisation est mortelle pour la communauté humaine. C'est ce qui ressort de diverses expériences réalisées dans le cadre de l'État-Providence. Celui-ci, à force de vouloir plaire aux individus, a multiplié les "droits" subjectifs de complaisance, par exemple en matière de divorce, de sexualité, de familles, de population, etc. Mais ce faisant, cet État-Providence a créé d'innombrables problèmes qu'il est incapable de résoudre. Avec l'extension de ces "droits" de complaisance à l'échelle mondiale, les problèmes de précarisation/marginalisation vont se multiplier à tel point qu'aucune gouvernance mondiale ne pourra les résoudre.

De même pour la religion. Depuis qu'est acquise la séparation de l'Église et de l'État, il est inadmissible que l'État se serve de la religion pour renforcer son emprise sur les cœurs, les corps et les consciences. Comme le dit Mgr Roland Minnerath, l'État ne peut pas enchaîner la vérité religieuse et doit même en garantir la libre recherche.


Vers un terrorisme politico-juridique

Par ces canaux, et avec l’appui du couple Blair, le juriste-président Obama est en train de lancer un nouveau messianisme nord-américain, totalement sécularisé. Il bénéficie en cela de l'appui de son fidèle partenaire, candidat présumé à la présidence de l'Union Européenne. La volonté suprême du Président des USA validera le droit des nations et le droit des relations entre les nations. Dans la foulée, les "Trente-Neuf Articles" de la nouvelle religion devront être promulgués par son collègue britannique.

A partir du sommet de cette pyramide, la volonté du Prince est destinée à circuler par les canaux internationaux de l’ONU et à atteindre les canaux nationaux particuliers. A terme, ce processus, comme on le remarque, éteint l’autorité des parlements nationaux, abolit l’autorité des exécutifs et ruine l’indépendance du pouvoir judiciaire. C’est pour ces raisons que, dans la logique de M. Obama, le rôle d'un tribunal pénal international est appelé à s’étendre et qu’il doit être armé pour réprimer les récalcitrants – par exemple, les catholiques – qui refusent cette vision du pouvoir et du droit, d'un droit vassalisé par le pouvoir. Comment ne pas voir cette vérité aveuglante: nous assistons à l’émergence d’un terrorisme politico-juridique sans précédent dans l’histoire?

Pour finir, empressons-nous de rappeler que l’Église n’a pas le monopole du respect du droit humain à la vie. Ce respect est proclamé par les plus grandes traditions morales et religieuses de l’humanité, souvent antérieures au christianisme. L’Église reconnaît pleinement la valeur des arguments fournis par la raison en faveur de la vie humaine. Comme Mgr Minnerath l’a admirablement montré, l’Église complète et consolide cette argumentation en se prévalant de l’apport de la théologie: respect de la création; l’homme, image de Dieu; amour du prochain: nouveau commandement; etc. Ces arguments sont fréquemment exposés dans les déclarations de l’Église et les nombreux documents chrétiens sur la question.

Mais quand les plus hautes autorités des nations, et même de la première puissance mondiale, vacillent face au respect du droit humain fondamental, c’est un devoir pour l’Église d’appeler tous les hommes et toutes les femmes de bonne volonté à s’unir afin de constituer un front unique pour défendre la vie de tout être humain. La première attitude qui s’impose à tous, selon les responsabilités de chacun, est l’objection de conscience, que d’ailleurs M. Obama veut circonscrire. Mais cette objection doit être complétée par un engagement à agir dans la sphère politique, dans les médias et dans les universités. La mobilisation doit être générale et se donner pour but l’objectif central de toute morale, et spécialement de toute la morale catholique: reconnaître et aimer le prochain, à commencer par le prochain le plus ténu et le plus vulnérable.
»

Liens vers des sites de référence

Tony Blair Faith Foundation
Objectifs du millénaire pour le développement
United Religions Initiative
Fondation éthique planétaire
Attitude


Source :Texte complet

Gérard Bouchard vole au secours du cours d'éthique et de culture religieuse

Gérard Bouchard, de la Commission Bouchard-Taylor, a écrit une longue lettre dans Le Quotidien de Chicoutimi. Il y répondait à une lettre de l'animatrice Myriam Ségal sur « La poutine des accommodements raisonnables ». Mme Ségal ne consacrait qu'un paragraphe au cours d'éthique et de culture religieuse :
Laver les cerveaux

Le gouvernement a trouvé mieux que de travailler lui-même. Il a choisi de bien laver et essorer le cerveau des jeunes. Il impose à nos enfants onze années de cours d'Éthique et Culture religieuse, ni plus ni moins un cours d'accommodement raisonnable et de tolérance. Mais, la tolérance doit-elle aller jusqu'à l'effacement de soi ?
Ce à quoi le grand professeur Gérard Bouchard, de retour d'Harvard, répond :
Le cours d'éthique et de culture religieuse, que vous assimilez à un lavage de cerveaux, veut tout simplement familiariser les jeunes aux nouvelles réalités religieuses du Québec.
C'est bien édulcorer le contenu du cours qui cherche bien plus que de transmettre quelques connaissances sommaires sur les religions : il s'agit plutôt de légitimer toutes les croyances, y compris l'absence de croyance religieuse, de faire accepter par l'enfant le fait que plusieurs religions c'est mieux qu'une seule, de « présenter les religions à l'enfant comme des manifestations de l’esprit créateur humain, tout aussi légitimes que la sienne ».

Bref, de rééduquer le colon, le plouc, de relativiser ses références religieuses et culturelles dans l'espoir de mieux intégrer les immigrants et de fonder une société d'accueil plus universelle et métissée. Cette panmixie, ce « métissage culturel » universel étant la dernière illusion théorique dans les sciences sociales pour réaliser le paradis sur Terre.
Car, il y a maintenant de nombreuses religions pratiquées au Québec; certaines nous sont familières, d'autres non. Il est utile de les connaître pour éviter la discrimination et prévenir le genre de crise que nous avons vécue récemment.
À nouveau, surtout au niveau du primaire, l'enfant ne « connaîtra » pas ces religions, mais uniquement quelques phénomènes superficiels. Cela ne garantit en rien la compréhension de ces religions ou même de la religion en général. En outre, on peut parfaitement avoir des notions de christianisme, par exemple, et n'avoir que mépris pour l'« Infâme » comme aurait dit Voltaire, cet intolérant.
Vous reprochez également à ce cours d'être un «cours...de tolérance». Il me semble, pourtant, que la tolérance, c'est bien ce qu'il faut quand on vit dans une société de plus en plus diversifiée au plan culturel où se croisent des mœurs, des croyances et des traditions très différenciées. Autrement, comment gérer les rapports entre cultures ?
Notons d'abord que Gérard Bouchard esquive la question de base : « Mais, la tolérance doit-elle aller jusqu'à l'effacement de soi ? » Il botte en touche et ne mentionne plus ce questionnement de la part de l'animatrice. Nous ne sommes pas impressionnés. Bouchard ne répond donc pas à cette critique implicite de l'hypertolérance. Cette tolérance est au mieux une valeur négative, il s'agit de se supporter, pas de construire, pas de fournir du sens.
Compromis

Il serait bien mal avisé d'imposer, comme vous le proposez, un régime unique à tous les citoyens dans la vie publique, à l'encontre de leurs choix personnels. Où cela conduirait-il? Nous vivons dans une démocratie.
Il serait bien mal avisé d'imposer un régime pédagogique unique à tous les citoyens, à l'encontre de leurs choix personnels, est-ce bien cela ? Un cours de formation morale unique, par exemple ? Où cela conduirait-il? Nous vivons dans une démocratie, paraît-il.

Comment M. Bouchard peut-il donc être en faveur d'un programme qu'il a pourtant fortement recommandé dans son rapport alors qu'il n'en avait qu'une connaissance sommaire comme il l'a reconnu lors du procès de Drummondville ?






Soutenons les familles dans leurs combats juridiques (reçu fiscal pour tout don supérieur à 25 $)