vendredi 24 juillet 2020

Baisse des naissances, l’Italie s’enfonce dans l’hiver démographique

L’Italie a enregistré un nouveau record négatif de naissances. Le pays a perdu un demi-million d’habitants en cinq ans, rapporte l’organisme statistique national Istat. Gérard-François Dumont démographe français en analyse les conséquences.

Un père et son enfant (unique ?) à Milan en 2020


Le taux de natalité en Italie est au plus bas depuis l’unification du pays en 1861. Avec 420 170 naissances en 2019, moins 19 000 sur un an (-4,5 %) la péninsule a atteint un record négatif historique. Par ailleurs, les Italiens sont de plus en plus nombreux à quitter le pays, et leur départ n’est pas compensé par les arrivées d’étrangers. Conséquence : au 31 décembre 2019, la population résidente en Italie était de 60 244 639 personnes, 189 000 de moins qu’au début de l’année, selon un rapport de l’Istat publié le 13 juillet 2020.

L’Italie est en train d’affronter un bouleversement démographique historique avec, malgré l’arrivée de personnes de 194 nationalités différentes, un vieillissement de la population. Aujourd’hui dans le pays, le nombre de décès dépasse celui des naissances. Cette faible natalité a plusieurs origines, relève Gérard-François Dumont, professeur à la Sorbonne à Paris, président de la revue Population et Avenir et membre de l’Académie pontificale des Sciences sociales.

Les Italiens se marient de plus en plus tard, ce qui retarde les naissances où les rendent impossibles. Autre facteur qui explique la chute de la natalité dans le pays : « la faiblesse de la politique familiale », notons aussi la baisse du niveau de la vie depuis une bonne décennie en Italie. À cela s’ajoute le départ de nombreux Italiens en raison, observe Gérard-François Dumont, « de la situation économique dans le pays » et le chômage des jeunes, départs qui ne sont pas compensés par l’immigration.

De lourdes conséquences économiques et politiques

L’Italie en dépopulation depuis 1993, fait face à un vieillissement accru de ses habitants avec des conséquences multiples. Au niveau économique, l’effet est direct, relève le président de la revue Population et Avenir, « cela signifie moins de consommateurs donc la demande économique va s’appauvrir notamment concernant les enfants et adolescents ». « Il y a par ailleurs une baisse de la population active et ainsi une baisse des personnes susceptibles de produire de la richesse ».

Les effets au niveau politique se mesurent essentiellement au sein de l’Union européenne dans la mesure où « le nombre de voix dont dispose un État au sein du Conseil européen est proportionnel à sa population ». « Un pays dont la population diminue voit donc son nombre de voix diminuer au sein du Conseil ».

Dans ce contexte, Gérard-François Dumont souligne le rôle important de l’Église catholique pour alerter sur le péril de cet hiver démographique, alors qu’« une mentalité malthusienne s’est développée et transparait dans de nombreux discours concernant notamment l’environnement ». « L’Église a donc un travail considérable à faire » pour lutter contre cette tendance.

Analyse de Gérard-François Dumont


Voir aussi

Le salaire net moyen, hors inflation, n'a progressé que de 29 euros par mois en dix ans, révèle la Banque d'Italie. Entre 2006 et 2010, la succession des crises l'a même fait baisser de 50 euros en moyenne.

Certes le pourvoir d'achat ne baisse pas en Italie mais avec seulement 1% de hausse du pouvoir d'achat sur l'ensemble de la période [2011-2017] il n'y en a pas pour tout le monde, d'autant que les inégalités se sont accrues : une partie des Italiens s'est donc appauvrie entre 2011 et 2017.