Enfants hongrois |
Procréer ou faire face à l’extinction : le Premier ministre hongrois Viktor Orban s’est fait une nouvelle fois le champion de « la famille traditionnelle », devant un parterre de personnalités venues du Brésil, des États-Unis, d’Afrique et d’Europe de l’Est, rassemblé pour encourager la natalité au nom des « valeurs chrétiennes ».
« Mathématiquement, il n’est pas difficile de concevoir qu’un dernier homme devra éteindre la lumière » dans les pays les plus petits d’Europe centrale, a lancé le Premier ministre.
Le président serbe Aleksandar Vucic, le Premier ministre tchèque Andrej Babis et l’ancien premier ministre australien Tony Abbott ont fait le déplacement, jeudi 5 septembre à Budapest, pour ce « sommet démographique », tout comme des ministres en exercice bulgare, brésilien, letton, polonais, bangladais et cap-verdien, ainsi qu’un représentant du Congrès américain et des personnalités religieuses.
« Oublions le non-sens vert » de la surpopulation
« Oublions ce non-sens vert qui dit que nous avons besoin de moins de monde. L’humanité fait partie de la nature », a poursuivi Viktor Orban, en stigmatisant les préoccupations environnementales liées à la surpopulation.
« Si l’Europe n’est pas peuplée par les Européens à l’avenir, et si nous prenons cela pour acquis, nous parlons d’un échange de populations pour remplacer la population des Européens par d’autres » a ajouté le dirigeant hongrois, en référence à la théorie complotiste d’extrême droite du « grand remplacement ». « Il y a des forces politiques en Europe qui veulent un remplacement de la population pour des raisons idéologiques ou autres ».
Les paroles d’Orbán ont été corroborées par l’un des invités d’honneur du sommet, l’ancien Premier ministre australien Tony Abbott, qui a salué le dirigeant hongrois pour avoir « le courage politique de défier le politiquement correct ». Abbott a déclaré que la dénatalité, et non le changement climatique, constituait la plus grande menace pour la civilisation occidentale. Il a également critiqué le Prince Harry et Meghan Markle qui avaient affirmé récemment qu’ils n’auraient pas plus de deux enfants à cause des effets négatifs sur l’environnement. « Avoir moins d’enfants dans les pays occidentaux n’aura guère d’effet sur le climat alors que tant d’enfants naissent ailleurs », de déclarer l’ancien Premier ministre Abbott.
« L’Europe est devenue le continent des berceaux vides alors que l’Asie et l’Afrique font face à des défis démographiques inverses », a déclaré Katalin Novak, ministre d’État hongroise pour la famille, la jeunesse et les affaires internationales.
De son côté, le président du parlement Laszlo Kover a suggéré que les individus sans enfants n’étaient « pas normaux ». « Avoir des enfants est une question d’intérêt public et non privée », a-t-il martelé.
Depuis la crise des migrants de 2015, Viktor Orban a mis l’opposition à l’immigration au centre de sa rhétorique, tout en cherchant à enrayer le déclin démographique de son pays. La population de la Hongrie pourrait se réduire de 9,8 millions d’habitants à 8,3 millions d’ici à 2050, selon les projections. Selon les statistiques de l’ONU, les dix pays où la population se contracte le plus rapidement dans le monde se trouvent en Europe centrale et orientale : parmi eux, Bulgarie, la Croatie, la Serbie, la Pologne, la Roumanie et la Hongrie.
Le Premier ministre tchèque, Andrej Babiš, et le président serbe, Aleksandar Vučić, ont également assisté à ce sommet de deux jours. Ils ont tous deux déclaré que l’augmentation du taux de natalité était une priorité pour le développement à long terme de leur pays. Vučić a déclaré que, chaque année, la Sernie perdait l’équivalent de la population d’une ville de taille moyenne, « Le peuple serbe a une expression pour désigner cette croissance démographique négative : la peste blanche », a-t-il ajouté.
Augmentation de la fécondité en Hongrie, baisse au Québec et en France
Le gouvernement hongrois affirme avoir doublé les aides familiales entre 2010 et 2019. Le taux de fécondité (nombre moyen d’enfants par femme en âge de procréer) s’est rapproché de la moyenne européenne de 1,6, en passant de 1,2 (en 2010) à 1,5 (2018) par femme, loin toutefois du niveau de 2,1, nécessaire pour le renouvellement de la population. Novak, dans des réponses écrites antérieures aux questions du Guardian, a déclaré que le gouvernement hongrois avait doublé les dépenses familiales entre 2010 et 2019, dans le but de parvenir à « un retournement durable du processus démographique d’ici 2030 ». Notons que l’indice de fécondité au Québec a diminué et est passé de 1,7 en 2010 à 1,59 en 2018, malgré une reprise économique importante. L’indice de fécondité de la France métropolitaine est, pendant la même période, passé de 2,01 enfants par femme en 2010 à 1,84 enfant en 2018.
Doublement des aides familiales
De nouvelles mesures ont été annoncées par les autorités hongroises en février : une exonération fiscale pour les femmes ayant quatre enfants ou plus ; un prêt de 10 millions de florins (30 000 €, 44 000 $ canadiens) accordé aux familles de trois enfants ; et des incitations financières en faveur des familles nombreuses pour l’achat de véhicules à sept places. Fin août, selon les statistiques gouvernementales, 23 000 couples avaient demandé le prêt et 10 000 familles avaient sollicité l’aide à la voiture.
La Hongrie doit également compter avec une forte émigration. Environ un million de citoyens hongrois auraient quitté le pays entre 2008 et 2018, selon l’OCDE. Cet exode se traduit par des pénuries de main-d’œuvre dans les services publics comme la santé et la poste. En dépit de sa rhétorique officielle hostile à l’immigration, le gouvernement hongrois autorise l’arrivée de « travailleurs invités » venus des pays voisins.
Les gouvernements d’Europe centrale ont mis en place des incitations financières pour les enfants. La Pologne a mis en place le programme « 500+ », qui verse aux parents 500 złoty (144 €, 166 $ canadiens) par mois et par enfant à partir du deuxième enfant. Le régime polonais a été étendu en juillet de cette année à tous les enfants, y compris le premier, sans condition de revenu.
Babiš a déclaré que la République tchèque souhaitait également encourager les familles nombreuses. « C’est le troisième enfant qui revêt une importance capitale... Nous ne souhaitons pas soudoyer quiconque à avoir un troisième enfant, mais nous devons apporter un soutien principalement aux familles qui entreprennent volontairement d’avoir un troisième enfant », dit-il.
Novak a nié que ces politiques poussent les femmes à avoir des enfants : « Contrairement aux accusations injustifiées et motivées par des considérations politiques, nous ne voulons forcer personne à avoir des enfants… Il est choquant de constater que nous sommes constamment attaqués pour avoir essayé de soutenir les familles par tous les moyens disponibles... »
Rappelons que les familles européennes et nord-américaines veulent en moyenne, cela varie d’un pays à l’autre, un peu moins d’un enfant de plus qu’elles n’auront. On parle en termes techniques de « déficit important entre descendance idéale déclarée et descendance réelle ». C’est ainsi que les Françaises ont moins d’enfants que ce qu’elles souhaiteraient idéalement et ça fait plusieurs décennies que ça dure. À l’heure actuelle, si elles avaient le nombre d’enfants qu’elles disent vouloir idéalement, l’indice conjoncturel de fécondité serait de ~2,4 enfants par femme au lieu de ~1,9 enfant par femme. Voir https://ifstudies.org/blog/the-global-fertility-gap. Une des raisons de cet écart entre le nombre idéal d’enfants voulu et le nombre obtenu : le coût lié à l’accueil d’un enfant supplémentaire.
Voir aussi
Hongrie — Exonération fiscale à vie pour les mères d'au moins 4 enfants
Le Québec prend un coup de vieux, aucune mesure d'aide à la naissance malgré un désir d'enfants ?
« Mathématiquement, il n’est pas difficile de concevoir qu’un dernier homme devra éteindre la lumière » dans les pays les plus petits d’Europe centrale, a lancé le Premier ministre.
Le président serbe Aleksandar Vucic, le Premier ministre tchèque Andrej Babis et l’ancien premier ministre australien Tony Abbott ont fait le déplacement, jeudi 5 septembre à Budapest, pour ce « sommet démographique », tout comme des ministres en exercice bulgare, brésilien, letton, polonais, bangladais et cap-verdien, ainsi qu’un représentant du Congrès américain et des personnalités religieuses.
« Oublions le non-sens vert » de la surpopulation
« Oublions ce non-sens vert qui dit que nous avons besoin de moins de monde. L’humanité fait partie de la nature », a poursuivi Viktor Orban, en stigmatisant les préoccupations environnementales liées à la surpopulation.
« Si l’Europe n’est pas peuplée par les Européens à l’avenir, et si nous prenons cela pour acquis, nous parlons d’un échange de populations pour remplacer la population des Européens par d’autres » a ajouté le dirigeant hongrois, en référence à la théorie complotiste d’extrême droite du « grand remplacement ». « Il y a des forces politiques en Europe qui veulent un remplacement de la population pour des raisons idéologiques ou autres ».
Les paroles d’Orbán ont été corroborées par l’un des invités d’honneur du sommet, l’ancien Premier ministre australien Tony Abbott, qui a salué le dirigeant hongrois pour avoir « le courage politique de défier le politiquement correct ». Abbott a déclaré que la dénatalité, et non le changement climatique, constituait la plus grande menace pour la civilisation occidentale. Il a également critiqué le Prince Harry et Meghan Markle qui avaient affirmé récemment qu’ils n’auraient pas plus de deux enfants à cause des effets négatifs sur l’environnement. « Avoir moins d’enfants dans les pays occidentaux n’aura guère d’effet sur le climat alors que tant d’enfants naissent ailleurs », de déclarer l’ancien Premier ministre Abbott.
« L’Europe est devenue le continent des berceaux vides alors que l’Asie et l’Afrique font face à des défis démographiques inverses », a déclaré Katalin Novak, ministre d’État hongroise pour la famille, la jeunesse et les affaires internationales.
De son côté, le président du parlement Laszlo Kover a suggéré que les individus sans enfants n’étaient « pas normaux ». « Avoir des enfants est une question d’intérêt public et non privée », a-t-il martelé.
Depuis la crise des migrants de 2015, Viktor Orban a mis l’opposition à l’immigration au centre de sa rhétorique, tout en cherchant à enrayer le déclin démographique de son pays. La population de la Hongrie pourrait se réduire de 9,8 millions d’habitants à 8,3 millions d’ici à 2050, selon les projections. Selon les statistiques de l’ONU, les dix pays où la population se contracte le plus rapidement dans le monde se trouvent en Europe centrale et orientale : parmi eux, Bulgarie, la Croatie, la Serbie, la Pologne, la Roumanie et la Hongrie.
Le Premier ministre tchèque, Andrej Babiš, et le président serbe, Aleksandar Vučić, ont également assisté à ce sommet de deux jours. Ils ont tous deux déclaré que l’augmentation du taux de natalité était une priorité pour le développement à long terme de leur pays. Vučić a déclaré que, chaque année, la Sernie perdait l’équivalent de la population d’une ville de taille moyenne, « Le peuple serbe a une expression pour désigner cette croissance démographique négative : la peste blanche », a-t-il ajouté.
Augmentation de la fécondité en Hongrie, baisse au Québec et en France
Le gouvernement hongrois affirme avoir doublé les aides familiales entre 2010 et 2019. Le taux de fécondité (nombre moyen d’enfants par femme en âge de procréer) s’est rapproché de la moyenne européenne de 1,6, en passant de 1,2 (en 2010) à 1,5 (2018) par femme, loin toutefois du niveau de 2,1, nécessaire pour le renouvellement de la population. Novak, dans des réponses écrites antérieures aux questions du Guardian, a déclaré que le gouvernement hongrois avait doublé les dépenses familiales entre 2010 et 2019, dans le but de parvenir à « un retournement durable du processus démographique d’ici 2030 ». Notons que l’indice de fécondité au Québec a diminué et est passé de 1,7 en 2010 à 1,59 en 2018, malgré une reprise économique importante. L’indice de fécondité de la France métropolitaine est, pendant la même période, passé de 2,01 enfants par femme en 2010 à 1,84 enfant en 2018.
Doublement des aides familiales
De nouvelles mesures ont été annoncées par les autorités hongroises en février : une exonération fiscale pour les femmes ayant quatre enfants ou plus ; un prêt de 10 millions de florins (30 000 €, 44 000 $ canadiens) accordé aux familles de trois enfants ; et des incitations financières en faveur des familles nombreuses pour l’achat de véhicules à sept places. Fin août, selon les statistiques gouvernementales, 23 000 couples avaient demandé le prêt et 10 000 familles avaient sollicité l’aide à la voiture.
La Hongrie doit également compter avec une forte émigration. Environ un million de citoyens hongrois auraient quitté le pays entre 2008 et 2018, selon l’OCDE. Cet exode se traduit par des pénuries de main-d’œuvre dans les services publics comme la santé et la poste. En dépit de sa rhétorique officielle hostile à l’immigration, le gouvernement hongrois autorise l’arrivée de « travailleurs invités » venus des pays voisins.
Les gouvernements d’Europe centrale ont mis en place des incitations financières pour les enfants. La Pologne a mis en place le programme « 500+ », qui verse aux parents 500 złoty (144 €, 166 $ canadiens) par mois et par enfant à partir du deuxième enfant. Le régime polonais a été étendu en juillet de cette année à tous les enfants, y compris le premier, sans condition de revenu.
Babiš a déclaré que la République tchèque souhaitait également encourager les familles nombreuses. « C’est le troisième enfant qui revêt une importance capitale... Nous ne souhaitons pas soudoyer quiconque à avoir un troisième enfant, mais nous devons apporter un soutien principalement aux familles qui entreprennent volontairement d’avoir un troisième enfant », dit-il.
Novak a nié que ces politiques poussent les femmes à avoir des enfants : « Contrairement aux accusations injustifiées et motivées par des considérations politiques, nous ne voulons forcer personne à avoir des enfants… Il est choquant de constater que nous sommes constamment attaqués pour avoir essayé de soutenir les familles par tous les moyens disponibles... »
Rappelons que les familles européennes et nord-américaines veulent en moyenne, cela varie d’un pays à l’autre, un peu moins d’un enfant de plus qu’elles n’auront. On parle en termes techniques de « déficit important entre descendance idéale déclarée et descendance réelle ». C’est ainsi que les Françaises ont moins d’enfants que ce qu’elles souhaiteraient idéalement et ça fait plusieurs décennies que ça dure. À l’heure actuelle, si elles avaient le nombre d’enfants qu’elles disent vouloir idéalement, l’indice conjoncturel de fécondité serait de ~2,4 enfants par femme au lieu de ~1,9 enfant par femme. Voir https://ifstudies.org/blog/the-global-fertility-gap. Une des raisons de cet écart entre le nombre idéal d’enfants voulu et le nombre obtenu : le coût lié à l’accueil d’un enfant supplémentaire.
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