mercredi 28 novembre 2018

Humour — L'inclusivité est-il/elle un·e progrès ?


Québec — 220 nouvelles classes de maternelle d'ici septembre 2019 ? De qualité ? À quel coût ?

Le ministre du Monopole de l'Éducation, Jean-François Roberge, veut ouvrir 220 nouvelles classes de préscolaire 4 ans en septembre 2019. Les commissions scolaires de la région de Montréal lui rétorquent que c’est mission impossible à cause du manque de personnel et de locaux.

Le dépistage précoce des élèves à risque de difficultés ou d’adaptation peut contribuer à leur réussite éducative (en apprenant par exemple plus tôt le français aux enfants allophones) et pourrait réduire le décrochage scolaire.

Toutefois, le ministre doit considérer les difficultés signalées par les commissions scolaires et comment y remédier. S’il prévoit recourir à des enseignants moins qualifiés pour contrer la pénurie du personnel, il n’améliorera pas la situation auprès des ces élèves « vulnérables. À défaut, la création de ces classes n'améliorera sans doute rien et ne fera qu’augmenter les coûts pour les contribuables. Augmentation des coûts qui semble la seule certitude dans le domaine de l'Éducation au Québec.

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Qualité des professeurs plutôt que la taille des classes

Extrait :
Francesco Avvisati va plus loin en affirmant que « les classes à taille réduite dégradent le niveau moyen d’expérience, car elles amènent à embaucher plus de contractuels pour faire face au besoin plus important d’enseignants ».

La majorité des Québécois d'accord pour réduire l'immigration de 20 %

Les deux tiers des répondants sont d’accord à la fois avec le projet de réduire à 40 000 personnes (-20 %) le seuil d’immigration annuel de la province et avec l'affirmation que celle-ci n'est tout simplement pas en mesure d'intégrer convenablement tous ceux qui viennent s'y installer.


« Espaces sûrs » : des étudiants qui ne supportent plus la contradiction

De plus en plus d’étudiants, aux États-Unis, refusent l’étude de certains sujets, la lecture de certains auteurs. Ils les jugent « offensants ».


J’ai déjà abordé à plusieurs reprises le phénomène très inquiétant qui s’est répandu dans les universités d’Amérique du Nord, ces dernières années. Paradoxalement, au nom de la lutte contre les inégalités, contre les discriminations, un climat d’intolérance autrefois inimaginable s’est répandu sur les campus. Par de multiples procédures, comme les « trigger warning » [difficile à traduire, quelque chose comme « avertissement de vexation »] ou la constitution de « safe spaces » (espaces sûrs), certains étudiants exigent de ne pas être exposés à des idées qu’ils risqueraient de ne pas approuver. Ils les jugent « offensantes ».

Un certain nombre d’universitaires commencent enfin à s’en inquiéter. C’est tout à leur honneur, car le fait de dénoncer publiquement certains agissements est dorénavant risqué et expose ses auteurs à des représailles. Ainsi Jonathan Haidt, psychologue et professeur d’éthique à l’Université de New York, n’a cessé de mettre en garde contre ces dérives depuis déjà quelques années. L’article qu’il a publié à ce sujet avec Grek Lukianoff dans la revue The Atlantic, a eu un énorme retentissement.

Haidt y déplorait notamment l’inflation sémantique subie, dans un certain milieu intellectuel, par l’adjectif « violent ». Une mode intellectuelle, disait-il, tend à dénoncer comme « violente » toute opinion qui dérange. Or, une opinion n’est pas violente. Mais, au nom de cette pseudo « violence », ont été commises de bien réelles et pas du tout virtuelles s agressions. Nombre de conférenciers invités dans des universités américaines, ont été interdits de parole par des groupes d’étudiants intolérants, au nom de leur droit de ne pas subir la « micro-agression » que constituerait cette présence sur le campus. Des personnalités telles que Ayaan Hirsi Ali, ou Christine Lagarde en ont été victimes. Des professeurs ont été agressés, comme Bret Weinstein, un professeur de biologie à l’Evergreen College de Washington. Il avait refusé de participer au « Jour d’absence » durant lequel les étudiants et professeurs blancs étaient priés de rester chez eux.



Trop maternés dans leur enfance, ils ne supportent pas la contradiction.

Dans la dernière lettre Phébé, Cécile Philippe rend compte du livre que Jonathan Haidt et Greg Lukianoff viennent de consacrer à ce sujet, sous le titre Le maternage de l’esprit américain : comment les bonnes intentions et de mauvaises idées préparent une génération à l’échec (The Coddling of the American Mind: How the Good Intentions and Bad Ideas are setting up a Generation for Failure”?)

Depuis 2013, écrivent ces auteurs, le climat sur les campus est devenu franchement délétère. Cela a coïncidé avec l’arrivée des premiers étudiants de la génération internet, nés entre 1995 et 2012. Habitués à ne communiquer, sur les réseaux sociaux, qu’avec des individus qui leur ressemblent, partagent leurs idées et leurs goûts, la différence, le dissensus, la contradiction les laissent désemparés.

En réalité, on a affaire à une génération de jeunes Américains qui ont été trop protégés sur le plan émotionnel durant leur enfance. Leurs parents, s’étant exagéré leur fragilité, les ont maternés. Ils ne supportent tout simplement pas la contradiction. En outre, on leur a trop répété qu’ils devaient se fier à leurs impressions, protéger leur susceptibilité, préserver leur authenticité. Personne ne les a prévenus que nos jugements pouvaient être biaisés par nos émotions. Au contraire, leur éducation les a habitués à considérer que leur vérité particulière devait être respectée et jamais contestée.

Par ailleurs, leur manichéisme ne fait que refléter l’ambiance politique américaine actuelle, terriblement polarisée depuis l’élection de Trump. « Leur monde est composé de bons et de méchants ». Le juste combat, c’est « nous » contre « eux ».

Enfin, il faut compter avec les bureaucraties universitaires, créées, au départ, pour lutter contre le racisme, le sexisme et les discriminations. Elles ont été parfois détournées de leur fonction et justifient leur existence en montant des sortes de procès contre des enseignants, coupables de péchés plus ou moins imaginaires, comme cela a été illustré par un certain nombre de romans récents.

Propre à l’entre-soi des universités d’élite.

Haidt a observé que cette intolérance se manifestait tout particulièrement dans les universités d’élite, celles qui préparent au doctorat. Les étudiants y vivent en circuit fermé. Ils développent un « ordre moral » spécifique. Au contraire, dans les community colleges, ces collèges communautaires, où l’on acquiert une formation professionnelle en deux ans, et où beaucoup d’étudiants payent leurs études en ayant un job à l’extérieur, les choses se présentent différemment. D’où le conseil pratique qu’il donne : renouer avec la vieille habitude de l’année sabbatique après le bac. En parcourant le vaste monde, comme le faisaient leurs prédécesseurs des années 60 et 70, les étudiants se confronteraient à d’autres mentalités, à d’autres modes de vie. Ils en reviendraient plus tolérants, davantage aptes à supporter la contradiction.

Source : France culture, 16-11-2018

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Le genre et l'université : une chape de plomb s'abat

lundi 26 novembre 2018

Suicide : déclin mondial mais augmentation chez les blancs américains

ZOJ est un néologisme russe, né d’un acronyme signifiant « mode de vie sain » (Здоровый образ жизни). Il est très présent sur Instagram, où des millions de messages célèbrent des corps redevenus sains et musclés, dans les clubs de santé en plein essor des villes russes ; dans la multiplication des cafés où les jeunes sirotent des sodas et mâchouillent du muesli.

Le mot est si populaire que le groupe de rock le plus célèbre de Russie, Leningrad, en a fait une satire (voir vidéo ci-dessous, vue plus de 53 millions de fois) : « Ils disent que boire de l'alcool n’est pas dans le vent, la mode est à une sorte de zoj. Avant il était ivre, et maintenant c’est Monsieur Muscle. » La vidéo de la chanson décrit des hommes en train de mourir d’une mort atroce pendant l’exercice. Pour un groupe qui pratique le cynisme dégénéré, la zoj peut être l’objet de sarcasme, mais pour le reste de la Russie, c’est une bonne nouvelle. Cela fait partie d’une transformation sociale qui a contribué à exorciser les démons de la Russie. Alors qu’exercice et frappés aux fruits (smoothies à Paris) remplaçaient désespoir et vodka, le taux de suicide en Russie s’est effondré. Et cette tendance n’est pas propre à la Russie (voir le graphique ci-dessous).



À l’échelle mondiale, ce taux a diminué de 38 % par rapport au sommet atteint en 1994. En conséquence, plus de 4 millions de vies ont été sauvées, soit quatre fois plus de personnes que de personnes tuées au combat au cours de cette période. Le déclin a eu lieu à des époques et des rythmes différents selon les régions du monde. En Occident, ce déclin a commencé depuis longtemps : en Grande-Bretagne, par exemple, le taux de suicide chez les hommes atteignait environ 30 pour 100.000 habitants par an en 1905, il remonta au même niveau en 1934, pendant la Grande Dépression ; chez les femmes, il a culminé à 12/100.000 en 1964. Dans la plupart des pays occidentaux, il est resté stable ou a diminué au cours des deux dernières décennies.

Dans d’autres parties du monde, les taux ont baissé plus récemment. La Chine a commencé à baisser dans les années 90 et a progressivement décliné pour se stabiliser ces dernières années. Les taux de la Russie, du Japon, de la Corée du Sud et de l’Inde, toujours élevés, ont tous baissé. Les États-Unis sont la grande exception. Jusqu’au tournant du siècle, le taux a baissé de concert avec celui d’autres pays riches. Mais depuis lors, il a augmenté de 18 % à 12,8 %, soit bien au-dessus du taux actuel de 7/100.000 en Chine. Les baisses enregistrées dans ces autres grands pays dépassent toutefois de loin la hausse en Amérique.

Bien que les chiffres américains sont probablement fiables, il y a lieu de traiter certaines de ces données avec prudence. Certains pays où des religions pregnantes interdisent le suicide ont historiquement sous-déclaré le nombre de suicides ; certains le font encore. Par exemple, une étude récente menée en Iran sur les tentatives de suicide révèle un taux dix fois supérieur à celui du ministère de la Santé. Mais les tendances sont probablement globalement correctes. Les experts estiment généralement que les données s’améliorent plutôt que d’empirer, ce qui (compte tenu des sous-déclarations antérieures) aurait tendance à pousser les taux à la hausse plutôt qu’à la baisse, mais l’inverse se produit. Pourquoi ?


L’une des principales raisons semble être l’amélioration du sort des femmes asiatiques. Dans la plupart des pays, les hommes sont plus susceptibles de se suicider que les femmes et les personnes plus âgées plus que les plus jeunes. Mais en Chine et en Inde, le taux de suicide chez les jeunes femmes a longtemps été exceptionnellement élevé. Cela a changé. Parmi les femmes chinoises dans la vingtaine, ce taux a diminué de neuf dixièmes depuis le milieu des années 90 ; ce groupe représente environ un demi-million de ces 4 millions de vies sauvées.

Selon Jing Jun, professeur à l’Université Ts'inghoua (Tsinghua) de Pékin « L’indépendance des femmes a sauvé beaucoup de femmes ». Dans une étude réalisée en 2002 sur les taux élevés de suicide parmi les jeunes femmes rurales, les deux tiers les tentatives de suicide s'expliqueraient des mariages malheureux, les deux cinquièmes déclarent avoir été battues par leur conjoint et un tiers se plaint d’un conflit avec leur belle-mère. Le professeur Jing explique : « elles se sont mariées dans les familles de leurs maris ; elles ont quitté leur ville natale ; elles déménageaient là où elles ne connaissaient personne. » De nos jours, la pénurie de femmes renforce la valeur et le pouvoir des femmes rurales : dans les villages chinois, parmi les 30 à 34 ans,  on trouve trois hommes célibataires pour chaque femme célibataire. Ajoutons que, plus globalement, les conditions économiques se sont grandement améliorées en Chine depuis quelques décennies.

Il se peut qu’il se passe quelque chose de similaire en Inde. Le taux de suicide chez les jeunes femmes a diminué plus rapidement que chez tout autre groupe depuis 1990 en Inde. En Chine comme en Inde, le taux élevé chez les jeunes femmes était inhabituel haut, mais en Russie, il était élevé chez les hommes d’âge moyen. Ils semblent avoir été les victimes de l’énorme bouleversement social survenu après l’effondrement de l’Union soviétique. Svetlana Alexievitch, une écrivaine récompensée par un prix Nobel, se distingue par son histoire ténébreuse : ses personnages continuent de se tuer eux-mêmes. Épuisé par la faim et la pauvreté, un homme s’est immolé par le feu dans son potager. Un ancien combattant vieillissant a survécu à la Seconde Guerre mondiale, avant de se jeter dans un train en 1992. Un officier qui a pris part à la tentative de coup d’État contre Mikhaïl Gorbatchev en 1991 s’est par la suite pendu au Kremlin. « Tout ce que j’ai considéré jusqu’à présent comme le sens de ma vie est en train d’être détruit », écrit-il dans une note de suicide. L’hyperinflation, la libéralisation forcenée, le dépècement de l’Empire soviétique, la chute des revenus et le chômage endémique dans les premières années de la transition ont laissé de nombreuses personnes dans la misère et le désir. La crise financière de 1998, due au non-remboursement de la dette par le gouvernement russe, a anéanti l’épargne de nombreuses familles. Depuis le début des années 2000, toutefois, les tendances se sont inversées. La Russie de Vladimir Poutine s’est redressée. Le taux de suicide en Russie se situe maintenant à 25, ce qui reste très élevé par rapport aux normes mondiales, mais il a diminué de moitié par rapport à son sommet. La baisse s’est produite de manière disproportionnée chez les hommes d’âge moyen, le groupe qui avait le plus souffert dans les années 90.


En 2016, l'espérance de vie des hommes russes est remontée à 66,5 ans.

Une des principales raisons est probablement que la société s’est rétablie après le bouleversement de l’ère postsoviétique. Selon Olga Kalachnikova, psychologue au département de psychiatrie du suicide et des crises de l’hôpital numéro 20 de la ville de Moscou, « les gens savent maintenant comment se débrouiller et se débrouiller sans l’État ». Depuis 2000, le PIB par habitant a presque doublé. Les salaires ont récupéré leurs pertes des années 1990 et plus. Le chômage est inférieur à 5 %. L’hypothèse socio-économique est renforcée par les taux de suicide relativement élevés observés chez les hommes des zones rurales, qui ont tendance à être moins aisés. Ilnour Aminov, démographe, souligne que près de 40 % de tous les suicides dans sa région d’origine de Bachkirie sont dus à des chômeurs.

Il existe des parallèles entre la montée du suicide dans la Russie postsoviétique et la « mort par désespoir » aux États-Unis identifiée par Anne Case et Sir Angus Deaton, économistes à l’Université de Princeton. Les taux de suicide chez les Blancs américains sont plus élevés et ont augmenté plus rapidement depuis 2000 que chez tout autre groupe, à l’exception des Amérindiens (voir graphique ci-dessous). La même tendance peut être observée chez les personnes d’âge moyen. Au tournant du siècle, les personnes âgées étaient beaucoup plus susceptibles de se tuer que celles âgées de 50 ans, mais ce n’est plus vrai. Les taux parmi les habitants des zones rurales sont plus élevés et ont augmenté plus rapidement que ceux des habitants des villes et des villages.


Anne Case et Angus Deaton au congrès annuel de l’association américaine d’histoire économique, en septembre 2018 à Montréal.

La Grande Récession n’est donc pas responsable de l’augmentation du nombre de « morts par désespoir » dans la population blanche aux États-Unis, précise le Prix Nobel d’économie Angus Deaton. L’« océan de souffrances » et le mal-être, auxquels certains attribuent l’élection de Donald Trump, avaient commencé à sévir bien avant la crise et continueront vraisemblablement de s’aggraver avant que les choses puissent s’améliorer.

Lauréat du prix Nobel d’économie en 2015 pour ses recherches sur la consommation et le bien-être des populations, Angus Deaton a longtemps fait parler de lui dans le grand public pour sa démonstration des spectaculaires progrès socioéconomiques accomplis par l’humanité au cours des derniers siècles aussi bien dans les sociétés riches que dans un grand nombre de pays en développement. Ses recherches avec sa consœur économiste à l’Université Princeton et conjointe dans la vie, Anne Case, les ont toutefois amenés, il y a quelques années, à remarquer un phénomène étonnant et beaucoup moins réjouissant : au lieu de continuer de reculer comme partout ailleurs, le taux de mortalité des Américains blancs s’est soudainement mis à remonter, particulièrement chez les personnes peu scolarisées âgées de 45 à 54 ans.



« Nous commencerons par être sinistres, avant d’être plus sinistres encore », a prévenu d’entrée de jeu Anne Case, au début de leur conférence au congrès annuel de l’association américaine d’histoire économique qui se tenait exceptionnellement à Montréal en septembre 2018. Par hausse du nombre de « morts par désespoir », les deux économistes entendent l’augmentation des décès par surdose, suicide et maladies dues à l’alcool. « Sous ce décompte des cadavres, il y a un océan de souffrances » physiques, comme le stress, l’obésité, les maux de dos chroniques et les maladies liées au tabagisme. Il y a aussi un mal-être qui découle de la précarité économique, l’exclusion du marché du travail, la fragilisation de la famille et la perte de liens sociaux.

Concentré chez les Américains blancs peu scolarisés, le phénomène s’observe à la grandeur des États-Unis, aussi bien dans les campagnes que dans les centres-villes, chez les hommes, mais aussi chez les femmes. Dans certains cas, la situation de ces tranches de la population s’est tellement détériorée que l’avantage dont ont historiquement bénéficié les Blancs sur les Noirs a complètement fondu et que l’espérance de vie dans une grande partie des Appalaches est inférieure à celle du Bangladesh.

Ce phénomène n’est pas uniquement attribuable à la dernière crise financière ni à la Grande Récession qui a suivi, a insisté en entrevue au Devoir Angus Deaton. « Le problème pouvait être observé au début des années 2000 et remontait probablement avant. On parle d’une accumulation de détresse qui se fait sur 30, 40, 50 ans de vie. »

Le phénomène ne peut pas non plus être uniquement attribué à la mondialisation, aux nouvelles technologies ou aux valeurs individualistes prêchées par le capitalisme, poursuit l’économiste. « Ces facteurs touchent aussi les autres pays et pourtant on n’y a pas vu de rebond du nombre de morts par désespoir. Non. C’est un mal américain principalement lié à des choix politiques. »

Les politiques sociales peuvent atténuer les effets de la récession alors que les corps sociaux intermédiaires (la famille élargie, l’église) sont en déclin rapide. Selon les recherches de David Stuckler de l’Université Bocconi de Milan, le nombre de suicides n’a pas augmenté en Suède, que ce soit durant la récession de 1991-1992 ou après 2007. M. Stuckler attribue cela en partie à l’amélioration des services de santé accessibles à tous et aux efforts du gouvernement pour ramener les gens au travail. Une étude menée dans 26 pays européens a montré que les taux de suicide étaient inversement corrélés aux dépenses consacrées aux politiques actives du marché du travail. Les observateurs japonais de suicides attribuent ce recul en partie au succès des Abenomics dans la réduction du chômage. Pour Michiko Ueda de l’Université Waseda, l’économie est la « première raison » du recul du suicide. L’alcool est également clairement lié au suicide. Au moins dans les cultures de « consommation à sec », comme la Russie, l’est du pays. L’Europe et la Scandinavie, où les gens boivent pour se saouler, mais pas dans des endroits où l’on boit bien, comme le sud et le centre de l’Europe, où l’on boit en société pendant un repas. En Russie, l’alcool et le suicide ont augmenté et diminué en même temps. La consommation d’alcool a diminué de moitié entre 2003 et 2016 ; à ce moment-là, les Russes buvaient moins par tête que les Français ou les Allemands. Alors que les Russes adoptent des modes de vie plus sains, la part du marché de la bière augmente et celle des spiritueux est en baisse.

Suicide et alcool semblent aller de pair, mais les deux pourraient être l’effet de la turbulence sociale. Les preuves antérieures à l’effondrement de l’Union soviétique suggèrent toutefois que, dans une certaine mesure du moins, l’alcool mène au suicide. En 1985, M. Gorbatchev a imposé des règles strictes à la production et à la distribution d’alcool. Les ventes de vodka ont diminué de moitié entre 1984 et 1986. Au cours de cette période, le taux de suicide chez les hommes a diminué de 41 % et le taux chez les femmes de 24 %. Lorsque l’Union soviétique s’est effondrée, le monopole de l’État sur l’alcool a été aboli et la réglementation a été abolie. La consommation d’alcool et le suicide ont tous deux augmenté.

L’intervention de l’État est probablement en partie responsable de la récente chute du suicide. En 2006, de nouvelles règles sur la production et la distribution d’alcool ont fait monter les prix. L’analyse statistique suggère que ces restrictions ont entraîné une baisse de 9 % du nombre de suicides chez les hommes, ce qui a permis de sauver 4 000 vies par an. Une politique similaire en Slovénie en 2003 a entraîné une baisse de 10 %.

L’amélioration de la vie des personnes âgées aurait également contribué à réduire les taux de suicide. Globalement, le taux chez les personnes âgées a tendance à être plus élevé que chez les jeunes et les personnes d’âge moyen, mais il a également diminué plus rapidement dans la plupart des pays.

L’une des raisons pourrait en être que, comme le souligne Diego de Leo, ancien directeur de l’Institut australien de prévention et de recherche du suicide, les taux de pauvreté dans le monde parmi les personnes âgées (le plus souvent le groupe le plus pauvre de la société) ont diminué plus rapidement que ceux d’autres tranches d’âge. De meilleurs services de santé, utilisés par les personnes âgées plus que par les jeunes, peuvent être une autre raison. Une maladie de longue durée est un motif courant de suicide et les efforts visant à soulager la douleur des patients peuvent faire toute la différence. Le système britannique de soins palliatifs, considéré comme le meilleur au monde, contribue à expliquer une baisse remarquable du taux de suicide chez les personnes âgées.

Les soins à domicile peuvent également rendre l’espoir aux personnes âgées. Les enfants italiens sont réticents à confier leurs parents chez des personnes âgées, mais ils n’ont souvent ni le temps ni la volonté de s’occuper eux-mêmes des personnes âgées. Les prestataires de soins à domicile y ont apporté « une amélioration considérable ».

Les gens ont tendance à croire que ceux qui ont l’intention de se tuer risquent fort de finir par le faire. Une enquête réalisée par Matthew Miller de l’Université Harvard a révélé que 34 % des personnes interrogées pensaient que toutes les personnes ayant sauté du Golden Gate Bridge avaient fini par trouver un autre moyen de se suicider si un obstacle les avait arrêtées ; 40 % pensaient en outre que la plupart de ces suicidaires avaient finalement mis fin à leur vie. Mais une étude portant sur 515 personnes ayant survécu au saut de pont entre 1937 et 1971 a montré que 94 % d’entre elles étaient encore en vie lorsque l’étude a été réalisée en 1978, ce qui suggère que le suicide est souvent une impulsion éphémère plutôt qu’une intention bien établie sur le long terme.

La Grande-Bretagne dans les années 1960 illustre parfaitement ce qui peut arriver si l’accès à un moyen facile de se tuer vient à disparaître. Lorsque le pays est passé du gaz de charbon toxique — le moyen de suicide préféré alors des femmes et des hommes âgés — au gaz inoffensif de la mer du Nord, les taux de suicide parmi ces groupes se sont effondrés. À l’époque, les taux étaient en hausse chez les jeunes hommes, ce qui conforte l’idée que le changement de type de gaz a bien joué un rôle.

C’était la conséquence fortuite d’une découverte de gisements de gaz naturel, mais une politique délibérée peut également jouer un rôle dans la restriction à l’accès à des moyens de suicide. Une série d’interdictions au Sri Lanka — la plus récente en 2008-2011 concernant le paraquat (un pesticide ayant un effet herbicide) — a permis de ramener le taux de 45 au début des années 90 à 20 aujourd’hui. Lorsque la Corée du Sud a interdit le paraquat en 2011, on estime que la réduction du nombre de décès par suicide a contribué pour moitié à la baisse globale du nombre de suicides au cours des deux prochaines années. Le paraquat est maintenant interdit dans l’UE ; La Chine a dit qu’elle l’interdirait, sa distribution est restreinte en Amérique ; mais dans de nombreuses régions du monde, il reste librement disponible.

En Europe occidentale, où les pesticides ne constituent plus un risque sérieux, l’accent a été mis sur la limitation de l’accès aux pilules dangereuses. En Grande-Bretagne, par exemple, une loi a été adoptée en 1998 pour limiter le nombre d’aspirines et de paracétamol pouvant être vendu dans un seul emballage. L’année suivante, les suicides liés à l’aspirine ont diminué de 46 % et ceux au paracétamol de 22 %.

Le principal moyen de suicide en Amérique est les armes à feu. Ils représentent la moitié des suicides, et les suicides représentent plus de décès par arme à feu que les homicides. Les armes à feu sont plus efficaces que les pilules, de sorte que les personnes qui se tirent impulsivement risquent davantage de se retrouver à la morgue qu’à l’urgence. Selon Matthew Miller, de l’Université de Harvard, les niveaux de possession d’armes à feu expliquent en grande partie la variation des taux de suicide, allant de 26 sur 100 000 dans le Montana à cinq à Washington, DC pour certains, si les États-Unis abandonnaient leurs armes, le nombre de suicides dégringolerait.

Sources : Le Devoir, The Economist, statistiques du CDCP

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Québec — Premier pour le suicide des hommes au Canada

À la lumière de six études Remafedi trouve que le suicide chez les jeunes homosexuels s'explique peu par l'homophobie, mais davantage par la prostitution, la famille désunie, l'agression sexuelle en bas âge, les peines d'amour et l'étiquetage prématuré de l'orientation sexuelle.

Brésil — Nomination d'un ministre de l'Éducation conservateur

Le nouveau président du Brésil, Jair Bolsonaro, qui prendra fonction en janvier 2019, a dévoilé le nom du nouveau ministre de l’Éducation du Brésil. Il s’agit d’un philosophe et théologien colombien connu pour ses vues conservatrices.

Favorable aux religieux conservateurs, le futur ministre de l’Éducation est actuellement professeur émérite à l’École de l’état-major de l’armée. Colombien, naturalisé Brésilien il y a plus de 20 ans, Ricardo Vélez Rodriguez est connu pour son opposition à la théorie des genres, il est contre l’éducation sexuelle à l’école — à l’image de Jair Bolsonaro.

Très proche des intellectuels brésiliens de droite, il ne cache pas une certaine nostalgie pour le régime militaire qui a dirigé le pays de 1964 à 1985. Ricardo Vélez Rodriguez compte mettre « les valeurs traditionnelles, de la préservation de la famille, la protection de la vie » au centre de l’éducation. Elles doivent, selon lui « prévaloir pour ce qui est de l’éducation morale, sexuelle et religieuse ». Il a publié plusieurs livres qui s’attaquaient à la corruption de l’ancien parti travailliste au pouvoir du temps de Lula et de Roussef.

(Vidéo en portugais : « En premier lieu, que l’on se débarrasse tous les déchets marxistes qui ont repris les propositions éducatives de nombreux fonctionnaires du ministère de l’Éducation. »)

Sa nomination est aussi le résultat des pressions du groupe parlementaire évangélique, le plus puissant désormais au Congrès. Leur influence sur le président élu ne cesse de grandir.

Selon le journal Estadão, Ricardo Vélez Rodriguez a écrit qu’il est nécessaire de « refonder » le ministère de l’Éducation dans le « contexte de valorisation de l’éducation pour la vie et la citoyenneté des municipalités », dans la ligne droite du slogan Jair Bolsonaro « Davantage de Brésil, moins de Brasilia ». Il a également déclaré que Bolsonaro avait gagné parce qu’il exprimait le mécontentement de tous les Brésiliens contre les gouvernements du Parti travailliste.

Le ministre désigné dénonce également l’examen national de l’enseignement secondaire (Enem) comme un « instrument d’idéologisation ».

Sur l’éducation, Vélez Rodríguez a soutenu des projets comme l'École sans parti (Escola sem Partido – ESP). Le mouvement École sans parti (Escola sem Partido – ESP) se présente comme une « initiative conjointe d’élèves et de parents préoccupés par le degré de contamination politico-idéologique des écoles brésiliennes à tous les niveaux : du primaire au supérieur. » Fondé en 2004 par l’avocat Miguel Nagib, ESP est resté dans l’ombre jusqu’au début des années 2010 lorsque le mouvement s’est imposé comme une voix incontournable des débats sur l’éducation au Brésil. L’émergence d’ESP dans le débat public est contemporaine de l’apparition d’une nouvelle thématique dans le discours conservateur, la lutte contre « l’idéologie du genre », alors qu’auparavant la cible était la « doctrine marxiste ». La question du genre, qui avait fait son entrée dans les écoles avec les combats contre l’homophobie et le sexisme, est devenue un sujet majeur pour les groupes religieux conservateurs. ESP se positionne ainsi sur un terrain en apparence « moral » (par opposition au « politique ») pour relancer le débat sur le rôle de l’école et de la famille dans l’éducation des enfants.


Le futur ministre brésilien de l’Éducation a déclaré sur son carnet que les Brésiliens sont « otages d’un système d’éducation étranger à leur vie et à l’écoute de la tentative d’imposer à la société un endoctrinement ancré dans l’idéologie marxiste [...] telle que l’éducation sexuelle. » Pour Vélez Rodríguez, l’éducation actuelle serait « destinée à démanteler les valeurs traditionnelles de notre société, en ce qui concerne la préservation de la vie, de la famille, de la religion, de la citoyenneté. En somme, du patriotisme ».

Le philosophe s’oppose aux quotas raciaux, y compris à l’université. Vélez Rodríguez les considère comme des « palliatifs qui font avancer l’exclusion ».


Source : RFI, Estadão.


dimanche 25 novembre 2018

On devient vite accro aux applications linguistiques, mais elles ne sont pas très efficaces


Plusieurs parents qui instruisent leurs enfants à la maison utilisent des applications informatiques pour apprendre une langue étrangère. Nous avons donc trouvé qu’un article récent de The Atlantic sur le sujet pourrait leur être utile. Extraits traduits ci-dessous.

[…]

Pendant la majeure partie de l’année précédente, j’avais assisté religieux à mes rencontres quotidiennes d’une quinzaine de minutes avec l’application d’apprentissage de langues Duolingo. Je l’ai utilisée dans le train, en traversant la ville, alors que passaient les bandes-annonces au cinéma. Je préparais mon voyage à Rome à la fin du printemps et j’ai toujours pensé que profiter à plein d’un pays, il faut essayer de se mettre à la langue de celui-ci.

Mais j’avais une autre raison de m’accrocher : Duolingo crée une dépendance. Cela m’a aidé à me fixer des objectifs quotidiens, puis à prononcer des phrases simples. Parfois, il fallait que je dise une phrase en italien (ce que j’ai toujours fait correctement, si j’en crois Duolingo). Mais le plus souvent, Duolingo m’a demandé de traduire des phrases et des bouts de phrases de l’italien en anglais, ou inversement, en me proposant des réponses à choix multiples. Aucun exercice fastidieux de grammaire ou de vocabulaire — je devais apparemment assimiler ce genre de choses grâce à des phrases de plus en plus variées, complexes et intéressantes.

Duolingo m’a constamment félicité pour avoir répondu correctement plusieurs fois de suite, pour avoir terminé une partie de la leçon de la journée, pour avoir corrigé erreurs d’inattention. La fin d’une leçon était marquée d’une célébration numérique complète avec des coffres au trésor dont les couvercles enthousiastes s’ouvraient et se fermaient pour m’applaudir. L’application m’a tenu au courant de mes progrès au moyen de divers systèmes de points et a utilisé des notifications par courriel et par téléphone pour m’inciter à tenir le rythme, en faisant même le pari à l’aide de points que je ne parviendrais pas à tenir le rythme pendant une autre semaine. Quel pigeon j’ai été ! Je suis devenu riche en points sans valeur alors que je les considérais comme précieux.

Je ne suis pas un polyglotte sérieux, mais je me suis déjà frotté à demi-douzaine de langues de presque toutes les façons dont il est possible de les apprendre : salle de classe, tuteur, manuel, enregistrements audio, fiches de vocabulaire, logiciels, etc. Apprendre les langues a toujours été une corvée — jusqu’à ce que je mette à Duolingo. J’attendais avec impatience la prochaine leçon. Et j’apprenais l’italien ! Je traversais ma maison avec confiance en parlant de cacher un couteau dans ma botte, alors qu’il fallait rendre mon mémoire de maîtrise, et de l’importance d’écouter la volonté du peuple. Bon, c’est vrai, les phrases de Duo Lingo portent parfois sur des sujets étranges. […]

Une semaine avant notre départ pour Rome, mon épouse, Laurie, m’a mis à l’épreuve. Tu es à l’aéroport de Rome, me dit-elle, et tu veux aller au centre-ville ; que dirais-tu ? Je restai bouche bée. Des mots et des phrases me traversaient l’esprit, mais sans utilité. Laurie a opté pour le scénario du restaurant : « Auriez-vous une table pour quatre ? » « Je voudrais deux verres de vin rouge. » Je savais que j’avais vu tous les morceaux dans les phrases de Duolingo. Mais j’étais absolument incapable de me les rappeler et de les rassembler.

Pris de panique, j’ai démarré Duolingo et j’ai presque immédiatement vu le problème. L’application avait fait de moi un maître de l’italien à choix multiples. Avec un tas de mots parmi lesquels choisir, je parvenais à produire correctement de véritables communiqués. Mais sans ce souffleur informatique, je restais muet, même dans les situations les plus élémentaires, comme le touriste américain moyen. Et cela malgré plus de 70 heures d’études.

[…]

Mais j’avais encore une semaine. Je me suis procuré un livre d’autoapprentissage, un recueil d’expressions utiles aux touristes et un dictionnaire de poche, et j’ai commencé à potasser, à bachoter. Une chose amusante s’est produite : j’ai vite appris ce que Duolingo n’avait pas réussi à faire : la grammaire, le vocabulaire et, surtout, la capacité de participer à des conversations simples dans des situations typiques. J’avais cru que les heures passées avec Duolingo m’apportaient quelque chose d’utile. L’application m’avait exposé à un vocabulaire considérable ; je n’ai plus eu besoin que de peu de répétitions avec ces livres pour me souvenir des mots. Apprendre la conjugaison des verbes était également un jeu d’enfant.

À la fin, je me suis plutôt bien débrouillé à Rome, prenant part à une semi-conversation simple et décousue au cours de la plupart de mes rencontres. Était-ce ce que l’application était censée faire ?
Récemment, j’ai contacté Luis von Ahn, cofondateur et PDG de Duolingo, pour lui demander si mon expérience était typique. Je m’attendais à ce qu’il se montre défensif quand je lui dirai que j’avais eu besoin d’utiliser des livres pour acquérir les compétences de conversation que j’avais espéré acquérir avec Duolingo. Mais au lieu de cela, il a ri et m’a dit que l’application avait fait exactement ce pour quoi elle avait été construite. « Le plus gros problème que rencontrent les personnes qui essaient d’apprendre une langue par eux-mêmes est leur manque de motivation pour persévérer dans l’apprentissage », m’a-t-il dit. « C’est pourquoi nous faisons beaucoup d’efforts pour les garder intéressés. »

Duolingo est essentiellement le résultat d’une participation collaborative. Des bénévoles ont assemblé une grande partie du contenu pédagogique et le comportement des 27,5 millions d’utilisateurs actifs par mois est analysé en permanence pour déterminer quels exercices, quelles phrases et quelles techniques permettent une meilleure adhésion et un apprentissage plus rapide. Le défi, m’a dit von Ahn, est que ces deux mesures ont tendance à être contradictoires : rendre les leçons plus difficiles accélère de manière fiable l’apprentissage, mais elles augmentent également les taux de décrochage. « Nous préférons être plus addictifs que rapides » [note du carnet : ou même efficaces ?], a-t-il expliqué. « Si quelqu’un abandonne, son taux d’apprentissage est de zéro. »

Cet accent mis sur la rétention des utilisateurs explique en partie pourquoi Duolingo est de loin l’application linguistique la plus populaire aux États-Unis. Dans d’autres pays, souligne von Ahn, l’apprentissage d’une langue est souvent crucial pour la communication avec leurs compagnons et leurs familles et pour leur travail ; apprendre l’anglais, en particulier, peut être un moyen de sortir de la pauvreté. « Aux États-Unis, environ la moitié de nos utilisateurs ne sont même pas vraiment motivés à apprendre une langue étrangère ; ils veulent juste passer le temps sur autre chose que Candy Crush », d’ajouter von Ahn.

Joey J. Lee, directeur du Laboratoire de recherche sur les jeux de l’Université de Columbia, a réalisé une étude de 50 applications langagières en 2016, m’a dit qu’il soupçonnait la dépendance d’outils tels que Duolingo avait plus à voir avec les modèles économiques qu’avec l’apprentissage des langues. Selon lui, la plupart des applications échouent plus particulièrement au niveau de la « pragmatique » de la langue. « Il s’agit de l’apprentissage basé sur la réalité : vous êtes au restaurant, vous passez un entretien, vous attendez un bus », a-t-il expliqué. « Cet aspect manque la plupart du temps dans les applications. »

Cela me semblait juste. Geoff Stead, responsable des produits chez Babbel, une application linguistique concurrente, s’est fait l’écho de cette affirmation. « Ce qui aide le plus à apprendre une langue, c’est quand on est plongé dans une situation et qu’on a du mal à parler », m’a-t-il dit. « Notre approche consiste à vous aider à avoir la confiance nécessaire pour parler dans ces situations et à vous y rendre le plus rapidement possible. »

Quand on considère que la base d’utilisateurs de Babbel est environ 15 fois plus petite que celle de Duolingo, ce « dépatouillage » est apparemment moins addictif que la traduction de phrases à choix multiples. (En outre, Babbel n’offre pas de version gratuite de son application, contrairement à Duolingo.) Mais cette approche a de réels avantages, d’insister Geoff Stead. La plupart des leçons de Babbel, explique-t-il, visent à donner aux utilisateurs la possibilité de se débrouiller dans des contextes sociaux (rencontrer des gens, voyager, commander de la nourriture et des boissons), ce qui a tendance à susciter l’intérêt d’apprendre davantage. « Une fois que nous avons démarré, nous introduisons des techniques d’apprentissage cognitives plus classiques », a-t-il déclaré, telles que davantage de vocabulaire et de grammaire.

Mon problème serait donc que je suis un type pragmatique vivant dans un monde de Candy Crush. Mais si j’avais préféré le côté pratique de Babbel à l’attrait conçu par collaboration de Duolingo, aurais-je passé suffisamment de temps avec l’application pour en retirer ce que j’ai obtenu d’un peu plus de mes 70 heures avec Duolingo ?

À l’avenir, je n’aurai peut-être pas à choisir. Duolingo a déployé de nouvelles fonctionnalités (notamment des baladodiffusions, des interactions sociales entre utilisateurs et des récits basés sur les personnages), qui visent à augmenter son pragmatisme linguistique ainsi que son addictivité. Lee prédit que les applications linguistiques intégreront également à terme des robots conversationnels munis d’intelligence artificielle qui engageront la conversation et guideront les utilisateurs dans des conversations réalistes. (Microsoft en propose un appelé Microsoft Learn Chinese, mais je l’ai essayé et cela me semblait bogué.)

Mais je retiens également la leçon de prudence de Tom Roeper, professeur de linguistique à l’Université du Massachusetts, qui étudie l’acquisition des langues étrangères. Roeper m’a dit que les applications ne sont pas près de rattraper deux avantages essentiels d’un enseignant humain : la capacité de retenir l’attention d’un étudiant et d’adapter continuellement une leçon aux progrès, aux difficultés et aux intérêts de chacun. « Il existe toute une série de facteurs contextuels dans l’apprentissage des langues », a-t-il ajouté. « Il sera difficile pour une application de toutes les prendre en compte. »

Mais voilà, un instructeur n’est pas toujours disponible quand vous avez un peu de temps libre.

vendredi 23 novembre 2018

France — Une recherche libre est-elle encore possible en histoire ou en lettres ?

STÉPHANE RATTI(*) est historien de l’Antiquité, agrégé de lettres classiques, professeur des universités, enseigne l’histoire de l’Antiquité tardive à l’université de Bourgogne–Franche-Comté. Il s’alarme de l’entrée en vigueur, à l’université, de nouvelles règles concernant la réalisation de la thèse, qui risquent d’encourager le conformisme et d’appauvrir la vie intellectuelle du pays. Sa lettre ouverte ci-dessous :


« Les doctorants se verront soumis dès la deuxième année de thèse à l’évaluation d’un “comité de suivi de thèse”. Le terme même de comité fait froid dans le dos et on imagine les dérives que ce type » de surveillance collective peut induire.

« Fernand Braudel n’aurait pas écrit “La Méditerranée” sans l’appui intellectuel de son maître Lucien Febvre. Or, au motif de prendre en compte de rares cas d’abus, on a porté atteinte à la spécificité d’une recherche libre qui passe avant tout, pour le futur doctorant, » par le choix sans contrainte d’un maître.

De lourds nuages continuent à s’amonceler à l’horizon de l’université française. Et ils sont chargés de vraies menaces pour les libertés des futurs universitaires. Depuis une décision prise sous le précédent quinquennat, le régime des thèses permettant d’obtenir le doctorat, ce très ancien diplôme créé sous l’Empire, en 1808, et de postuler en principe aux fonctions de maître de conférences dans les facultés a été profondément bouleversé. Afin d’encourager et de stimuler l’avancement de leurs recherches, les doctorants se verront soumis dès la deuxième année de thèse, conformément à un arrêté du 25 mai 2016, à l’évaluation d’un « comité de suivi de thèse » : le terme même de « comité » fait froid dans le dos et on imagine trop aisément les dérives que ce type de surveillance collective peut induire.

Au lieu de fournir l’aide escomptée, les directions collectives risquent de brider le principe originel de toute recherche : le libre choix des méthodes, des lectures, des objectifs affichés et des voies élues pour aboutir à des résultats qui, d’ailleurs, ne seront pas toujours conformes aux objectifs. Par définition, en effet, la recherche est une prise de risque puisqu’elle ne sait pas d’avance ce qu’elle trouvera. De plus, on invite désormais les candidats au doctorat à s’inscrire dans une équipe, un collectif qui dirigera en commun leurs travaux, et ce, parfois, au nom de l’interdisciplinarité, au mépris de la spécialité du candidat.

Le directeur de la thèse, en outre, c’est-à-dire le maître choisi par le doctorant, ne fait plus partie du jury de la soutenance. C’est tout juste si les plus courageux des directeurs osent encore prononcer plus ou moins clandestinement quelques mots pour soutenir leur élève au début de la séance. Mais ils ne signent plus désormais le procès-verbal de soutenance. On a cru protéger ainsi les candidats des pressions de tous ordres auxquelles ils pouvaient se croire soumis au cours de leur thèse. Or, sous couvert de lutter contre d’hypothétiques abus de pouvoir, une suspicion généralisée s’installe, qui non seulement renverse les relations entre maîtres et élèves, mais encore dénature celles qui prévalaient entre collègues, en principe des pairs.

On a de ce fait porté atteinte, au motif de prendre en compte de rares cas d’abus, à la spécificité même d’une recherche libre qui passe avant tout, pour le futur doctorant, par le choix sans contrainte d’un maître. Ce type d’affinités intellectuelles et de proximités personnelles faites, il faut bien le dire, de confiance profonde et d’une forme d’admiration scientifique pour les travaux de celui qu’on choisit pour diriger les siens propres n’est plus désormais un critère quand on entreprend une thèse.

Fernand Braudel n’aurait pas écrit La Méditerranée sans l’appui intellectuel de son maître Lucien Febvre. Le grand latiniste et historien Pierre Grimal n’aurait pas été ce qu’il fut s’il n’avait pas été dirigé à ses débuts par Jean Bayet et Jérôme Carcopino. Précisons d’ailleurs que l’admiration n’est pas la servilité. Au cours de leur vie intellectuelle, les plus grands élèves savent d’eux-mêmes s’affranchir. L’on sait, par exemple, que la biographie de Cicéron par Pierre Grimal cherche à répondre dans son interprétation de la fin de la République romaine à celle de César par Jérôme Carcopino.

De surcroît, on tente d’imposer avec cet arrêté du 25 mai 2016 un abrégement draconien aux études doctorales : la thèse devra être achevée en moins de trois ans, contre aujourd’hui cinq à sept ans, en moyenne, en sciences humaines (soit les anciennes facultés des lettres, philosophie, histoire, psychologie, sociologie). On se demande si, dans ces conditions, ce nouveau délai impératif trop resserré auquel on astreint les doctorants, inspiré de ce qui se fait dans les sciences dures, est vraiment adapté à la réalité que vivent en France à la fois les lettres, les humanités et les professeurs de littérature, de philosophie ou d’histoire qui fournissent le contingent le plus nombreux de thésards et qui, sans aucune aide financière, rédigent courageusement leur thèse en même temps qu’ils assument leur charge d’enseignement de professeur agrégé ou certifié. Enfin, on a ainsi appris tout récemment que les futurs recteurs d’Académie, qui sont chanceliers des universités, pourront être choisis en dehors du corps des professeurs d’université ou des titulaires d’habilitation à diriger des recherches. C’est une victoire de plus pour l’administration, qui prend de ce fait encore davantage le pouvoir dans l’enseignement supérieur au détriment des vrais enseignants-chercheurs.

Tous ces maux ont été avec une avance de quelques décennies dénoncés dans un livre admirable et qui, en 1987, rendit célèbre son auteur non seulement sur le campus de l’université de Chicago — où il apparaissait comme le maître vénéré de son ami Saul Bellow (qui raconta sa vie dans un roman à clef, Ravelstein) et aussi comme le digne disciple de Leo Strauss — mais dans le monde entier. Ce livre dû au critique et philosophe Allan Bloom (1930-1992) porte un titre original, The Closing of the American Mind, curieusement traduit en français par L’Âme désarmée. Il vient tout juste d’être réédité par Les Belles Lettres dans l’excellente collection « Le Goût des idées » dirigée par Jean-Claude Zylberstein, augmenté d’un chapitre inédit. [Voir recension ici.]

Allan Bloom y propose une définition de l’éthos universitaire à partir de Platon et du Banquet notamment : il ne saurait y avoir d’enseignement véritable sans amour du Beau et recherche de la Vérité ; il ne saurait y avoir de pédagogie sans échange dialogué avec un public préparé, averti et curieux. L’utilitarisme qui règne en maître sur les esprits de nos technocrates est dénoncé dans l’ouvrage comme la cause première du déclin de la culture générale et la pratique des humanités (les sciences qui rendent l’homme libre de prendre de bonnes décisions) louée comme la seule voie démocratique vers l’affranchissement. On méditera, parmi d’autres, cette sentence du philosophe : « La concentration démocratique sur l’utile, sur la solution des problèmes que l’ensemble de la population croit être les plus urgents, fait paraître la distance théorique non seulement inutile, mais immorale. »


(*) STÉPHANE RATTI(*) a renouvelé notre vision des relations entre chrétiens et païens aux IVe et Ve siècles. Il a publié de nombreux ouvrages remarqués, comme « Le Premier Saint Augustin » (Les Belles Lettres, 2016). Dans son nouvel essai, « Les Aveux de la chair sans masque » (Éditions universitaires de Dijon, 110 p., 10 €), il analyse l’interprétation discutable, par Michel Foucault, de textes des pères de l’Église sur la sexualité.

Alan Bloom : « L'Âme désarmée » republiée

Chronique d’Éric Zemmour à l’occasion de la republication, 30 ans plus tard, de l’ouvrage « L’Âme désarmée » (The Closing of the American Mind) d’Alan Bloom. Allan Bloom (1930-1992), philosophe, élève de Leo Strauss, était un fervent défenseur des textes classiques, fut très critique du système universitaire américain qu’il quitta en 1970 pour aller enseigner à l’étranger. Traducteur de Platon et de Rousseau, il a publié différents essais, le plus célèbre étant L’Âme désarmée.


C’était il y a trente ans. Un essai à la fois profond et acerbe nous décrivait l’envers du décor de cette université américaine que le monde entier admirait. Son auteur s’appelait Allan Bloom. Comme disait son préfacier et ami, Saul Bellow, qui a reçu depuis lors le prix Nobel de littérature : « Ce livre n’est pas un livre de professeur, mais celui d’un penseur qui accepte de prendre les risques que prennent généralement les écrivains. » À la même époque, un film québécois, Le Déclin de l’empire américain, croquait aussi les médiocrités et ridicules des universitaires américains dans une satire réjouissante. Le roi était nu. On ne savait pas alors que ces audacieux iconoclastes écrivaient notre avenir.

On le comprend en lisant aujourd’hui ce livre, réédité aux Belles Lettres avec une traduction inédite d’une partie du texte que les Français avaient alors dédaignée. Certes, nous n’avons toujours pas en France les campus somptueux, les budgets de recherche abondants, les Prix Nobel en bouquets, les meilleurs étudiants du monde qui se pressent aux portes de nos universités. En revanche, nous avons toutes les tares que Bloom décrivait dans son ouvrage : le déclin de la culture générale au bénéfice des « problèmes de société » ; les revendications séparatistes des « minorités » raciales ou sexuelles ; la baisse du niveau scolaire au nom de la lutte contre les inégalités ; la domination du relativisme au détriment de la recherche de la vérité ; ou encore les sciences humaines qui singent les sciences « dures ». Nous avons désormais, de part et d’autre de l’Atlantique, la même jeunesse : « L’objectif de l’éducation qu’ils ont reçue n’était pas de faire d’eux de jeunes gens cultivés, mais de jeunes gens ouverts : il était de les doter d’une vertu morale. » Les jeunes Français, comme les jeunes Américains, ont subi la même éducation, le même endoctrinement, devrait-on dire, où l’enseignement des valeurs (en France, on ajoute « républicaines ») s’est substitué à l’ancienne instruction de la culture générale : « Une telle éducation n’est guère plus que de la propagande. »

Bloom revient sur la scène fondatrice : les années 1960. Il a tout vu, tout compris. Il est à la révolution des années 1960, ce que Burke fut à celle de 1789 : un œil à la fois libéral et conservateur, bienveillant, mais dupe de rien, qui met son immense culture au service de l’analyse fouillée des événements dont il est le contemporain.

Bloom est un grand lecteur de Tocqueville et de Rousseau ; de Hobbes et de Locke ; de Nietzsche et de Hegel. Il vit aux États-Unis avec une culture européenne. Il est une sorte de personnage des Bostoniennes, le célèbre roman de Henry James sur l’Amérique de la fin du XIXe siècle. Il est un homme des Lumières, mais, pour lui, les Lumières débordent largement les philosophes français du XVIIIe siècle, puisqu’il étend leur emprise jusqu’aux grands penseurs du XVIIe, Descartes ou Hobbes. Pour lui, les Lumières, c’est le règne de la « raison » ; c’est la liberté ; c’est l’Occident. Mais il vit dans les années 1960 du XXe siècle, et il observe ses étudiants. Il voit s’imposer le règne de la musique rock sur toute autre forme de musique et sur toute autre forme de culture : « Mick Jagger a joué dans la vie de ces jeunes gens le rôle que Napoléon a joué dans celle des jeunes Français pendant tout le XIXe siècle. » La montée en puissance du féminisme et ses contradictions fondatrices, entre liberté et égalité, libération sexuelle et protection des femmes, libertinage et puritanisme. L’émergence du « pouvoir noir » et les ravages de l’affirmative action (« discrimination positive ») : « Ce qu’exige le pouvoir noir, c’est l’identité noire et non les droits universels […]. La fraternité programmée dans les années 1960 n’a pas abouti à l’intégration ; elle a viré à l’isolement des Noirs ; les Noirs restent entre eux. » Et la révolte de ces élèves qui se sentent humiliés et rejettent ce qu’ils ne parvenaient pas à acquérir : « Les étudiants noirs n’étaient pas des citoyens de seconde classe parce que c’étaient de mauvais élèves, mais parce qu’on les avait obligés à imiter la culture blanche. »

Régis Debray nous a appris que la France et l’Europe étaient devenues une colonie américaine qui cherchait avidement la lumière dans l’œil de son maître. Bloom nous rappelle que le maître américain fut d’abord la fille de l’Europe. Il retrace la généalogie de cette « contre-culture » des années 1960, retrouve sa source dans la pensée de Nietzsche, apportée aux États-Unis par Max Weber, « jetant à la mer le bien et le mal en même temps que la raison » ; pensée de Nietzsche revisitée et approfondie par Heidegger, lui-même traduit et « reconstruit sur une base gauchiste » par les philosophes français de la Libération, les Sartre, Foucault, Derrida, Barthes. Cette « French theory » s’imposera sur les campus américains des années 1960, avant d’être à nouveau importée par des universitaires français pour qui tout ce qui vient d’Amérique est parole d’évangile.

Bloom n’est pas le premier ni le seul à établir sur ces bases la dénonciation de cette « pensée 68 ». Il n’est pas non plus le seul ni le premier à estimer que « l’engagement de Heidegger dans le mouvement nazi n’était pas une conséquence de son innocence politique, mais un corollaire de sa critique du rationalisme ». Mais, confronté à la violence des mouvements étudiants des années 1960 qui menacent et molestent leurs professeurs, il n’hésite pas à écrire : « La formule usée de Marx ne cessait de me revenir à l’esprit : l’histoire se répète toujours deux fois, la première fois comme une tragédie, la seconde fois comme une farce. L’université américaine des années 1960 faisait l’expérience du même démantèlement de la structure de l’investigation rationnelle (du champ de la raison) qu’avait connue l’université allemande dans les années 1930. »

Depuis lors, les étudiants des années 1960, aux États-Unis comme en France, sont devenus les patrons de l’Occident. Ils ont imposé leur relativisme en vérité suprême. « Le rationalisme occidental a abouti à un rejet de la raison. Le relativisme parvient à détruire les prétentions universelles de l’Occident […]. Privé de ce besoin de vérité, l’Occident s’effondrera. » Bloom est mort désespéré.


L’Âme désarmée
de Allan Bloom
Essai sur le déclin de la culture générale
paru le 19 septembre 2018
aux Belles Lettres
à Paris
Broché : 504 pages
ISBN-13 : 978-2251448473

Grande-Bretagne — enfants autistes poussés à s'identifier comme transgenres ?

Le Daily Mail britannique a récemment publié une histoire choquante. Un enseignant lanceur d’alerte y affirme qu’on y convainc des enfants autistes vulnérables qu’ils seraient dysphoriques du genre. Le Mail on Sunday a révélé que 17 écoliers d’une même école britannique suivent une « thérapie » de changement de sexe. La plupart de ces enfants qui subissent cette transformation sont autistes, selon un enseignant, qui a déclaré que les enfants vulnérables souffrant de problèmes de santé mentale étaient « leurrés » en leur faisant croire qu’ils étaient du mauvais sexe. On trouvera ci-dessous des extraits de cette enquête du Mail on Sunday.


La lanceuse d’alerte dit que peu de ces enfants « transgenres » souffrent de dysphorie de genre — le terme médical pour quelqu’un qui se sent né dans le mauvais corps — mais qu’ils sont facilement influençables, s’accrochant à la croyance erronée qu’ils seraient du mauvais sexe, y voyant un moyen de faire face aux problèmes causés par l’autisme.

Plus tôt cette année, le Mail on Sunday a révélé qu’un tiers des jeunes envoyés à la seule clinique d’identité sexuelle pour enfants du NHS [Santé publique] présentait des « traits autistiques modérés à sévères ».

Cela signifie que 150 adolescents autistes ont reçu des médicaments bloquant la puberté qui empêchent leur corps de mûrir.

L’enseignante dit qu’elle s’est sentie obligée de s’exprimer pour protéger ses élèves, dont beaucoup, selon elle, pourraient déjà prendre des médicaments puissants et subir une chirurgie qui pourrait changer leur vie.

Elle croit que les écoles et certains hommes politiques ont avalé « les hameçons, les lignes et les plombs » d’un » sophisme » politiquement correct colporté par un puissant lobby transgenre.

Elle a demandé au Mail on Sunday de cacher son identité de peur d’être licenciée après presque 20 ans d’enseignement, mais dans une interview choquante, la femme, que nous appellerons Carol, raconte comment :

On lui a conseillé de garder les parents et les autres enseignants dans l’ignorance si un élève disait être transgenre ;

Des élèves plus âgés de son école qui ont changé de sexe ont » préparé » des élèves plus jeunes, principalement autistes, à faire de même ;

Une adolescente autiste va bientôt subir une double ablation du sein ;

Les élèves qui disent qu’ils sont nés du mauvais sexe imitent les vedettes transsexuelles de YouTube. Carol croit que c’est en partie à cause de cela qu’ils ont convaincu les enfants vulnérables qu’ils souffrent de dysphorie de genre.

Hier soir, le député conservateur David Davies a déclaré : » Je félicite cette enseignante d’être venue nous dire ce que je soupçonnais depuis longtemps dans les écoles. Il est horrible que les enfants soient encouragés par d’autres élèves à s’identifier comme transgenres, en particulier s’ils sont autistes.

Les parents n’en sont pas informés et il n’y a aucun moyen de contredire ces élèves qui ont été convaincus par les autres qu’ils avaient un problème qu’ils n’ont presque certainement pas. Tragiquement, le résultat final pourrait être des procédures chirurgicales irréversibles. C’est scandaleux.

L’enseignante, qui a son propre enfant, croit aussi que bon nombre de ceux qui disent qu’ils sont du mauvais sexe sont juste homosexuels, mais qu’ils feraient face à de l’intimidation s’ils devaient le dire. En revanche, dit-elle, les enfants transgenres de l’école sont idolâtrés par les autres élèves.

Anna Friel et Callum Booth-Ford dans le feuilleton Butterfly (Papillon),
Max, 11 ans, s'y identifie comme une fille et veut vivre sa vie comme Maxine.

Elle s’est également inquiétée du fait que de nombreux enseignants ont maintenant trop peur de contester les affirmations des élèves selon lesquelles ils sont transgenres parce qu’ils craignent d’être licenciés ou poursuivis pour avoir été transphobes.

Les 17 élèves qui s’identifient aujourd’hui comme transgenres suivent les traces d’une adolescente qui a quitté l’école et prévoit une double ablation du sein.

Cette étudiante, qui est née femme, a dit à Carol qu’elle voulait s’identifier comme personne non binaire — une personne — sans sexe spécifique — en janvier 2014, à l’âge de 16 ans et deux ans après avoir été diagnostiquée comme autiste.

Après avoir consulté ses parents, l’école a accepté de changer le nom de l’élève sur le registre pour un nom non sexiste. Les enseignants ont également accepté d’utiliser des pronoms masculins et féminins selon le sexe de l’élève identifié comme tel un jour donné.

« Ces pronoms pouvaient changer d’une heure à l’autre selon la façon dont l’élève se sentait », de dire Carol.

Carol a mis l’élève en contact avec un groupe de soutien pour transgenres, mais elle dit maintenant qu’elle regrette amèrement d’avoir géré ainsi ce cas. « Cet enfant a été diagnostiqué autiste à l’âge de 14 ans et n’était certainement pas transsexuel », a-t-elle ajouté. Elle avait d’autres problèmes de santé mentale compliqués. C’est une tragédie que sa demande ait été acceptée si facilement. Maintenant, elle va mutiler son corps.

Au cours des quatre années suivantes, les 17 élèves qui se sont » révélés » comme transgenres sont devenus puissants au sein de l’école, dit Carol.

Ils portent des vêtements et des coiffures identiques et adoptent souvent les noms des vedettes transgenres de YouTube. Elle a également été témoin de première main de la façon dont les élèves plus âgés ont persuadé des autistes plus jeunes qu’eux aussi étaient nés du mauvais sexe — un processus qu’elle a comparé au « grooming » [NdeFDS : méthode d’endoctrinement des bandes de prédateurs sexuels musulmans avec les très jeunes filles – les bandes de « dresseurs » de filles].

« Ce sont juste des jeunes ayant des problèmes de santé mentale qui ont trouvé une identité et qui veulent faire partie d’un groupe de personnes aux vues similaires », a-t-elle dit.

J’ai vu des filles ayant changé de sexe endoctriner [groom] des filles plus jeunes à faire la même chose… et dans presque tous les cas, elles sont autistes, dit l’institutrice.

Au cours d’une carrière d’enseignante sans tache qui s’étend sur deux décennies, Carol a consacré une grande partie de son temps au bien-être émotionnel et personnel des élèves dont elle a la charge.

Ainsi, lorsqu’une élève de 16 ans qu’elle connaissait depuis de nombreuses années lui a confié tranquillement qu’elle se sentait piégée dans le mauvais corps et qu’elle envisageait de changer de sexe, son instinct a été de prendre l’adolescent avec amour sous son aile.

Même si Carol savait que l’enfant avait été diagnostiquée autiste deux ans plus tôt, elle a juré de lui fournir le soutien dont elle avait besoin pour la guider dans ce qui serait évidemment un voyage difficile.

Nous étions en janvier 2014 et le débat sur les droits des transgenres, si surchargé aujourd’hui, avait à peine commencé.

L’éventail déconcertant de la terminologie utilisée pour définir les diverses permutations de ce qu’on appelle » l’identité de genre » n’avait pas encore émergé et Carol admet qu’elle ne savait pas vers qui se tourner pour obtenir de l’aide.

Mais parce qu’elle était responsable de la pastorale des élèves, Carol a été contactée par une organisation qui avait pour but d’aider les jeunes transsexuels.

L’organisme, que Carol nous a demandé de ne pas nommer parce qu’elle craignait que cela puisse les identifier, elle et l’élève, avait récemment ouvert un centre à proximité.

L’étudiante, qui est née femme, avait insisté sur le fait qu’elle voulait maintenant s’identifier comme une personne non binaire — une personne n’ayant pas de sexe spécifique — alors Carol l’a favorablement envoyée vers le groupe. Mais la douce mère en est venue à regretter amèrement cette décision.

« Une fois rentrée dans ce groupe, on ne peut rebrousser chemin », dit-elle. « On a décidé qu’elle était transgenre et c’est tout, ça n’a jamais été contesté et je m’en veux pour ça ».

Carol croit maintenant fermement que l’élève n’a jamais souffert de dysphorie de genre — le terme médical pour quelqu’un qui se sent né dans le mauvais corps — mais qu’il était simplement autiste et aurait dû recevoir plus d’aide pour faire face à ses difficultés émotionnelles et sociales.

Ce qui rend la situation encore plus douloureuse pour Carol, et c’est l’une des raisons pour lesquelles elle a choisi de s’exprimer aujourd’hui, c’est qu’elle a appris que la jeune fille prévoit une double ablation des seins dans le cadre de son réalignement de sexe.

Elle dit : « Cet enfant a été diagnostiqué autiste à l’âge de 14 ans et n’était certainement pas transgenre — elle avait des problèmes compliqués de santé mentale. C’est une tragédie qu’elle s’apprête à mutiler son corps. »

Elle se souvient que l’école a fait tout ce qu’elle a pu pour accommoder l’élève. Après avoir consulté les parents de l’enfant, l’école a accepté de changer le nom de l’élève sur le registre pour un nom non sexiste. Les enseignants ont également commencé à utiliser les pronoms masculin et féminin en fonction du sexe auquel l’élève s’identifiait un jour donné. « Les pronoms pouvaient changer d’une heure à l’autre selon la façon dont l’élève se sentait », a dit Carol.

L’adolescente a demandé si elle pouvait organiser une assemblée pour dire aux autres élèves de l’école qu’elle était transgenre, mais Carol l’a empêchée.

Elle comprend maintenant que l’élève « éduquait » de manière informelle ses camarades, ce qui, selon Carol, aurait pu être le catalyseur d’une vague de cas « imitateurs » chez les élèves autistes.

Au cours des quatre années suivantes, Carol a été témoin d’une explosion étonnante du nombre d’enfants prétendant être transgenres.

Dans presque tous les cas, dit-elle, les enfants avaient été officiellement diagnostiquées comme autistes par l’autorité scolaire locale. Les personnes qui n’ont pas reçu de diagnostic officiel montraient des signes évidents de leur autisme, dit-elle.

Selon Carol, neuf des 18 écoliers qu’elle a vus s’identifier comme transgenres ont reçu un diagnostic d’autisme, tandis que les autres présentaient des signes précis de cette maladie. « En général, ces enfants sont des introvertis doués », dit-elle.

« Je ne crois pas qu’ils soient réellement transgenres. Ce ne sont que des jeunes ayant des problèmes de santé mentale complexes qui ont trouvé une identité et qui veulent faire partie d’un groupe de personnes aux vues similaires ».

Selon un rapport interne, un tiers des patients envoyés à la Tavistock Clinic, le seul lieu du Service de Santé National (NHS) du Royaume-Uni pour les jeunes dont le sexe est confus, ont de fortes caractéristiques autistiques.

L’augmentation spectaculaire du nombre d’élèves désireux de changer de sexe a coïncidé avec une clameur croissante des militants qui réclament plus de droits pour les personnes transgenres.

Le Gouvernement mène actuellement des consultations sur la question de savoir s’il faut autoriser les gens à changer de sexe sans diagnostic médical.

Cela a déclenché un débat acharné sur la question de savoir si les hommes qui disent qu’ils s’identifient comme des femmes devraient être autorisés à pénétrer dans les espaces réservés aux femmes.

Carol n’est pas favorable à cette initiative, mais elle est sympathique aux transgenres. Elle a déclaré : « Si un enfant souffre réellement de dysphorie de genre, il doit bien sûr recevoir tout l’amour et le soutien dont il a besoin. »

Mais je crois que les enfants autistes qui ne sont pas transgenres sont exploités par le lobby transgenre. On leur fait subir un lavage de cerveau pour leur faire croire qu’ils sont transgenres.

Elle a dit que ce qui était le plus inquiétant, c’est que certains d’entre eux pourraient prendre de fortes drogues » bloqueuses de puberté » qui interrompent le développement physique.

Ils le font à l’insu de leurs parents et sans surveillance médicale, même si les produits chimiques » peuvent leur causer de graves problèmes de santé plus tard dans leur vie « .

L’école, dont Carol a demandé à ce que l’emplacement soit gardé secret, compte 17 élèves qui prétendent être transgenres.

La majorité est formée de filles qui prétendent être » non binaires » ou » s’identifier » comme garçons et un petit nombre de garçons qui s’identifient comme filles. Elle dit qu’il s’agit souvent d’élèves brillants, sympathiques et populaires.

D’autres filles affluent vers elles comme s’il s’agissait d’idoles adolescentes et certaines sortent avec elles.

Il semble, dit Carol, que la transsexualité soit à la mode.

Carol décrit comment certains des enfants transgenres les plus déclarés surveillent le langage et le comportement des autres, accusant souvent les enseignants et leurs camarades de « mégenrer ».

L’infraction est causée par l’utilisation d’un pronom incorrect ou par le fait de ne pas reconnaître la nouvelle identité sexuelle d’un élève.

L’an dernier, le Daily Mail a révélé qu’un enseignant de l’Oxfordshire a été accusé de faute professionnelle quand il a accidentellement traité un élève transgenre de « fille » alors que l’élève se disait alors être un garçon.

Carol dit : « J’ai discuté du sujet des menstruations pendant un cours récemment et j’ai été rappelée à l’ordre par l’une des élèves qui s’identifie maintenant comme un garçon pour ne pas avoir dit que les garçons peuvent aussi avoir leurs règles. Bien sûr qu’ils ne peuvent pas et ça ressemble à une plaisanterie, mais beaucoup d’enseignants sont terrifiés à l’idée de commettre un impair ».

Carol dit que dans le climat actuel, elle » n’oserait pas » suggérer à un élève disant être » trans » qu’il pourrait se tromper. « S’il y avait une plainte, je pourrais être renvoyée. »

Selon elle, les élèves transgenres ont tendance à se convertir par groupe de deux ou trois vers l’âge de 14 ans et d’une manière très uniforme : ils coiffent leurs cheveux avec une raie et se teignent en bleu, noir ou blond, et commencent à porter de grandes lunettes rondes, des bottes du Dr Martens, des vestes d’âne et des pantalons moulants.

Je suppose qu’elles doivent toutes porter des bandes pour le torse [afin d’aplatir les seins] et on m’a parlé d’une fille qui rembourrait ses sous-vêtements pour faire croire qu’elle avait un pénis.

Malgré le grand nombre d’enfants transgenres qui fréquentent l’école, Carol dit que le ministère de l’Éducation ou les cadres supérieurs ne donnent que peu d’indications sur la façon de les gérer.

Son syndicat l’a dirigée vers un groupe de soutien transgenre, Mermaids [les Sirènes], dont les conseils en ligne avertissent les enseignants de ne pas dire aux parents qu’un élève veut changer de sexe à moins qu’il ne s’agisse de sécuriser l’enfant.

Carol ajoute « À mon avis, il y a toujours un problème de sécurisation — surtout quand on sait que l’enfant a des problèmes de santé mentale sous-jacents. Tous les parents ont le droit de savoir. Le conseil de garder le secret enfreint la règle n° 1 de la protection de l’enfance. »

Le groupe des Mermaids n’était pas disponible pour commentaires hier soir,

Carol dit que les élèves transgenres de son école adoptent parfois les noms de trans YouTubers qui ont trouvé la gloire en ligne.

Il est arrivé qu’un groupe d’élèves qui s’identifient comme des garçons utilisent tous le même nom.

Certaines célébrités de l’Internet ont été accusées d’influencer les jeunes enfants à penser qu’ils sont transgenres alors qu’ils ne le sont pas.

Dans une vidéo, la vedette populaire Alex Bertie raconte à un jeune qui a dit qu’il était « confus » et « ne se sentait pas assez trans » qu’il réprimait son identité transgenre.

Carol pense que plusieurs des filles se disant transgenres sont, en fait, lesbiennes. Elles sortent avec d’autres filles qui sont à la fois trans et non-trans, révèle-t-elle.

« En parlant à ces filles, l’idée d’être une femme hétérosexuelle est terrifiante pour elles, mais le fait d’être connue comme lesbienne est aussi désagréable et elles deviennent transgenres. »

« Je pense qu’en tant que lesbiennes, elles feraient face à davantage d’intimidation, mais en tant qu’enfants transgenres, elles deviennent presque populaires ».

L’attrait, dit-elle, c’est qu’« en devenant trans, ces enfants socialement maladroits qui ont lutté pour se faire accepter voient soudainement leur popularité monter en flèche. »

Elles ont des filles qui les entourent comme des servantes parce qu’elles ressemblent à de jolis petits garçons », dit-elle.

Elles reflètent les fantasmes des adolescentes, ressemblant à des vedettes de la pop comme Justin Bieber. « Ces jeunes trans deviennent très puissantes à l’école.»

[…]

Carol a raconté comment des enfants en détresse venaient la voir et lui disaient qu’ils étaient trans, lui expliquant : « Je me sentais très perdue, mais [une élève transgenre plus âgée] m’a trouvée en train de pleurer dans le couloir et m’a aidé à comprendre qui je suis vraiment « .

Ses préoccupations viennent s’ajouter à l’inquiétude croissante face à l’augmentation du nombre d’adolescentes désireuses de changer de sexe.

Plus de 1 000 personnes ont été orientées vers un traitement cette année, comparativement à seulement 40 en 2010. La ministre des Égalités, Penny Mordaunt, a ordonné une enquête pour savoir pourquoi.

Carol dit : « Je suis maintenant tellement alarmée par la force des intentions des transgenres que je ne sais pas combien de temps encore je peux continuer, car je ne peux plus être honnête avec les étudiants.

Nous sommes sous la coupe de groupes qui ne connaissent pas ces enfants, pour prendre des décisions qui leur sont nuisibles.

Et nous donnons aux enfants un grand nombre d’organismes pour qu’ils puissent prendre des décisions quand ils ont besoin de limites pour se sentir en sécurité. C’est comme entrer dans un cauchemar.

Dans 20 ans, nous repenserons la ruée vers le changement du sexe de nos enfants comme l’un des chapitres les plus sombres de la médecine », dit le psychothérapeute BOB WITHERS.

Permettez-moi d’être tout à fait clair : je n’ai aucun doute qu’il y ait des gens qui se sentent être de l’un des sexes, mais ont le corps de l’autre.

Vivre avec un conflit interne aussi constant et constant est horrifiant pour beaucoup de personnes touchées et ne devrait jamais être ignoré.

Personne ne devrait chercher à supprimer l’orientation sexuelle ou l’identité de genre d’une autre personne.

Mais la question que nous devons nous poser aujourd’hui est : comment déterminer quels sont les besoins réels ? Et comment, alors, devrions-nous les traiter ?

[…]

Je suis psychothérapeute depuis plus de 30 ans et, au cours de cette période, j’ai travaillé avec un nombre restreint, mais important de patients qui souhaitaient changer de sexe.

Dans l’intérêt de tous, je crois que la chirurgie — qui est irréversible — ne devrait jamais être qu’un dernier recours. Nous devrions toujours commencer par aider l’esprit à mieux s’adapter au corps avant de commencer à modifier le corps pour l’adapter à l’esprit.

Pourtant, dans le NHS d’aujourd’hui, les professionnels permettent à des centaines, voire des milliers d’adolescents, de subir une intervention chirurgicale majeure pour changer leur sexe.

C’est fait, presque sans contestation, au nom des droits des transgenres. Mais dans 20 ans, je crois que nous considérerons cette folie comme l’une des périodes les plus sombres de l’histoire de la médecine moderne.

On nous demandera pourquoi nous n’avons pas réussi à contester leur croyance qu’ils sont nés dans les “mauvais” corps.

On nous demandera pourquoi nous avons si facilement ignoré les sonnettes d’alarme qui retentissaient, à savoir que beaucoup étaient autistes ou avaient des problèmes de santé mentale.

Ce à quoi nous sommes confrontés aujourd’hui est extrêmement préoccupant. Si 17 enfants sont en transition dans cette école secondaire, il ne fait aucun doute qu’il se produit la même chose dans d’autres écoles. Ce qui se passe, c’est que nous amenons à cela une génération d’enfants qui ont des problèmes de santé mentale assez complexes.

S’identifier comme trans peut apparaître être un moyen d’expliquer cette souffrance. Plutôt que de comprendre d’où cela pourrait provenir — se sentir seul ou isolé, être victime d’intimidation, avoir un trouble du spectre autistique ou être aux prises avec de nombreux problèmes allant des sévices sexuels à l’automutilation — nous leur permettons de changer de sexe.

C’est une solution paresseuse et dommageable que les professionnels du NHS [Ministère de la Santé], les enseignants, les politiciens et la loi sont impatients d’adopter pour faire valoir leurs points de vue progressistes.

En 2015, j’ai publié un article primé, mais controversé, sur la question de savoir si un traitement pourrait remplacer le besoin perçu par certains patients en matière de chirurgie.

Personnellement, je pense qu’en tant que société, nous devrions célébrer la variabilité entre les sexes. Certains de mes patients ont été capables de vivre de manière créative avec le décalage entre leur esprit et leur corps. Là où ce n’est pas possible — et où un patient souffre manifestement — nous devrions toujours faire quelque chose à ce sujet.

Pourtant, le débat sur cette question a été réduit au silence par des activistes transgenres qui qualifient de “transphobes” quiconque ose défier leur dogme.

Cette adhésion aveugle à l’idéologie a des conséquences réelles et dangereuses.

Dans mon domaine, par exemple, de nombreux psychothérapeutes ont maintenant peur d’interroger correctement un patient qui s’identifie comme trans : peur d’explorer leur passé, de poser des questions sur leur sexualité ou de s’intéresser à leur santé mentale. Ils n’y aventureront pas, de peur d’être radiés.

Le principal problème qui se pose aujourd’hui est que si vous ne prétendez pas que le patient est transgenre, vous risquez d’être accusé de pratiquer une “thérapie de conversion”.

La thérapie de conversion consiste à essayer de convaincre une personne homosexuelle qu’elle est vraiment hétéro. [...] À présent, des organismes puissants, dont le NHS et les principales organisations de conseil, ont signé un protocole d’accord — un accord sur les modalités de pratique — qui étend la définition de la thérapie de conversion aux patients transgenres.

Et cette note de service bien intentionnée est utilisée par les activistes trans pour empêcher les thérapeutes, les psychologues et d’autres personnes de poser des questions rigoureuses pour savoir si un patient souffre réellement d’une véritable “dysphorie de genre”.

Un thérapeute peut avoir de bonnes raisons de croire que l’adolescent qui se dit trans qui le consulte déteste son corps parce qu’il a subi des sévices sexuels dans son enfance et se sent vulnérable. Mais ils ne peuvent plus explorer cette possibilité.

Ils pourraient alors peut-être se rendre compte qu’un groupe d’écolières se sont prétendues trans après avoir vu qu’une de leurs camarades est devenue un papillon social (très populaire) après avoir dit qu’elle se sentait “garçon”.

Il faut négliger l’effet de mode et l’attrait de la popularité

Pourtant, psychothérapeutes, psychiatres et enseignants ne peuvent plus évoquer aucune de ces possibilités sans encourir des risques pour leur carrière. Récemment, 650 activistes trans ont signé une lettre publiée dans Therapy Today, la revue de la British Association of Counselling and Psychotherapy, pour demander l’exclusion de toutes les personnes ne pratiquent pas la “thérapie d’affirmation”. Si le gouvernement persiste dans ses projets visant à permettre aux gens de s’identifier comme bon leur semble, sans validation externe, je crains que cela ne renforce la position de ceux qui plaident en faveur d’un traitement "transaffirmatif”.

À mon sens, éviter de poser des questions aussi pénétrantes à des patients que prétendent être transsexuels — en particulier à des adolescents — constitue un manquement lâche à notre devoir.

Nous renonçons à notre responsabilité si nous devenons simplement des béni-oui-oui et ne faisons que les référer machinalement à la prochaine étape du processus de changement de sexe.

Le danger est qu’une fois sur la voie médicale menant à un changement de sexe, il est très difficile d’en revenir.

Les écoliers envoyés au Service de développement de l’identité de genre géré par The Tavistock et le Portman NHS Foundation Trust à Londres ont déclaré n’avoir subi que six séances pour déterminer s’ils étaient oui ou non trans. Plusieurs membres du personnel m’ont dit qu’ils étaient consternés en leur âme et conscience par le fait que, trop souvent, aucune psychothérapie n’est proposée avant le début du traitement médical.

On leur donne ensuite des médicaments “bloqueurs de la puberté” qui arrêtent les développements physiques — des médicaments puissants non autorisés pour le traitement des transgenres adultes car, c’est attesté, ceux-ci peuvent affaiblir les os, peut-être à vie. Il existe peu de données à long terme sur leur sécurité, mais le NHS les distribue régulièrement à des adolescents.

Ensuite, la plupart recevront des hormones de réassignation sexuelle, qui comportent leurs propres risques. Donner de la testostérone aux femmes, par exemple, peut augmenter le risque de cancer de l’ovaire.

On ne sait pas exactement combien d’entre eux effectuent la transition chirurgicale complète vers le sexe “opposé ‘. Que celle-ci apporte un bonheur durable est encore moins clair. Des études à court terme, généralement menées peu de temps après l’intervention, suggèrent que les patients sont immédiatement plus heureux. Mais les quelques études à long terme qui existent brossent un tableau différent.

L’une d’elles, qui suivait des hommes qui avaient fait la transition pour devenir des femmes pendant 15 à 20 ans après l’opération, a montré qu’ils avaient 20 fois plus de risques de suicide que les autres hommes dont l’âge, la classe sociale et les problèmes de santé mentale étaient comparables.

Sur YouTube, certains transsexuels publient maintenant des vidéos qui avertissent les jeunes de ne pas procéder à une réaffectation.

Le ressac a commencé

Il ne faudra certainement pas longtemps avant qu’une nouvelle génération ne pose des questions plus difficiles. Ils se demanderont pourquoi personne ne les a arrêtés, ne leur a dit que le traitement pourrait détruire leur vie sexuelle – ou ne les ont avertis que cela les rendrait infertiles et ne les rendrait peut-être pas heureux après tout. Il se peut aussi que des avocats posent les mêmes questions, ayant en vu des millions en guise de compensation.

Nous avons besoin d’un peu d’honnêteté maintenant, libérée du correctivisme politique.

Sinon, nous nous dirigeons vers la catastrophe. »

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L’Alberta menace de retirer les subventions aux écoles dont le règlement interne est trop religieux

Pour faire suite à notre billet Le Ministère de l’Éducation de l’Alberta (NPD) veut couper le financement d’écoles chrétiennes.

Le Centre de justice pour les libertés constitutionnelles (JCCF.ca) a répondu mercredi à l’ordonnance du ministère de l’Éducation d’Alberta imposant aux écoles religieuses les politiques du gouvernement NDP (gauche dite progressiste).

L’ordonnance, émise mercredi matin, impose une politique ministérielle aux écoles dont les règlements ne seraient pas conformes à l’article 45.1 de la Loi scolaire de l’Alberta (The School Act).

Cette ordonnance remplace d’autorité les règlements et politiques propres aux écoles par des règlements et politiques uniques prescrites par le gouvernement. Politiques et règlement qui s’accordaient avec leur caractère religieux et l’identité propre à chaque école.

L’ordonnance du ministère exige également des écoles qu’elles s’engagent à collaborer avec lui même si les parents de l’école s’y opposent, raisons protégées par la Constitution, en acceptant de ne pas divulguer aux parents la [possible] participation de leurs jeunes enfants à des Clubs d’alliance homo-hétéro (Gay Straight Alliance).

Au cours de la semaine du 1er au 5 octobre, plusieurs écoles dont les règlements « sûrs et bienveillants » avaient été déclarés non conformes par le Ministère de l’Éducation de l’Alberta ont demandé au ministère de préciser en quoi le point de vue religieux de leurs règlements s’opposait à la diversité ou étaient « peu accueillants, insensibles ou irrespectueux ». La correspondance d’octobre démontre que le Ministère de l’Éducation albertain justifie l’interdiction des références religieuses dans les politiques scolaires sur la seule base de « l’opinion du ministre ».

Le ministère de l’Éducation albertain ordonne que ces passages soient supprimés des règlements scolaires de ces écoles :

  • « Nous pensons que les hommes et les femmes ont été créés à l’image de Dieu, et ont donc une valeur intrinsèque transcendante » (violerait prétendument la Loi sur l’Instruction parce que : « peu accueillant, insensible ou irrespectueux »).
  • « Développer une attitude pieuse envers le mariage et la famille, ainsi que la compréhension et les compétences nécessaires pour établir un foyer honorant Dieu. »
  • « … Les parents ont la responsabilité d’élever leurs enfants et sont les principaux éducateurs de leurs enfants. Par conséquent, l’école impliquera les parents de manière appropriée et nécessaire en ce qui concerne la participation de leurs enfants aux groupes d’élèves conformément aux pratiques habituelles de notification. » (violerait la Loi sur l’Instruction)
  • « La vérité immuable et infaillible de la Parole de Dieu » (censé enfreindre l’exigence de la Loi selon laquelle la « diversité » doit être « respectée »).
  • « Dès réception d’une demande pour la création d’un cercle ou la tenue d’une activité, le directeur d’école déterminera si ledit cercle ou ladite activité créerait un environnement sûr, attentionné, accueillant et respectueux compatible avec la vision et la mission de l’école. »
  • « Dieu a créé l’homme et la femme, égaux en dignité et en valeur, mais avec des rôles distincts et complémentaires » (violerait l’exigence de la Loi sur l’Instruction relative à « un environnement d’apprentissage accueillant, attentionné, respectueux et sûr »).
  • « L’institution du mariage de Dieu, une relation d’alliance entre un homme et une femme, constitue le seul environnement dans lequel les activités sexuelles sont autorisées et constitue le contexte dans lequel les enfants doivent être élevés. »
  • « Les enseignants et le personnel de l’école ne peuvent être obligés d’enseigner une morale ou des doctrines religieuses contraires aux engagements de la communauté scolaire en matière de foi ou de valeurs de telle sorte que ces doctrines ou cette morale soient aussi dignes de foi. »


« L’ordonnance du ministère imposant sa volonté sans explication, sans égard à la sécurité de l’enfant et sans égard aux droits parentaux qui sont protégés par la Déclaration des droits de l’Alberta et la Charte canadienne des droits et libertés, donne à penser que cette ordonnance ne se base pas sur la loi, » déclare Jay Cameron, avocat des parents et des écoles appelantes dans le dossier du projet de loi 24.

La contestation judiciaire de la constitutionnalité des articles de la School Act (loi scolaire, en français), dont l’article 45.1, est en cours.

Une audience est actuellement prévue pour le 3 décembre 2018.