mardi 26 septembre 2017

France — L’indépendance d’esprit y serait en danger dans les universités

L’Université devrait constituer l’espace de débat par excellence et l’a assurément été à certaines périodes de son histoire. L’est-elle aujourd’hui ? Deux exemples récents, révélateurs du climat intellectuel pesant qui règne dans l’Université française, semblent démontrer le contraire.

Le cas de Fabrice Balanche est exemplaire. Enseignant-chercheur à l’université de Lyon-2, agrégé de géographie et docteur en géographie politique, ce spécialiste du monde arabe et du Moyen-Orient a vécu dix ans au Liban et en Syrie. Or, il a été exclu du processus final de sélection à un poste de maître de conférences sur le monde arabe à l’Institut des études politiques de Lyon pour un motif surréaliste : sa surqualification ! Pour tous ceux qui suivent le conflit syrien, Fabrice Balanche n’est pas un inconnu. Il livre sur ce conflit des analyses très fouillées qui vont à rebours de ce qui est avancé d’ordinaire. L’enseignant-chercheur avait établi que le régime de Damas, quelles que soient ses turpitudes, disposait de réels soutiens dans la population syrienne et était plus solide qu’on ne le prétendait habituellement.

Facteur aggravant, ses analyses se sont avérées justes. Fabrice Balanche, après cette exclusion, ne s’est pas laissé faire. Il a formé un recours devant le tribunal administratif, qui a annulé la décision du comité de sélection de Sciences Po Lyon au motif que celui-ci a commis une « erreur manifeste d’appréciation » et, plus grave, a méconnu « le principe d’impartialité ». L’enseignant-chercheur a ainsi brisé l’omerta sur certaines pratiques de sélection et de recrutement des candidats dans des établissements d’enseignement supérieur. Il aurait ainsi mis en lumière les vraies raisons — clientélistes, politiques — qui président à des exclusions, en particulier dans les sciences humaines et sociales. Fabrice Balanche a révélé la domination de certains courants de pensée sur les études consacrées au Moyen-Orient, souvent marquées soit par une complaisance envers l’islamisme, soit par un prisme d’extrême gauche, soit par les deux à la fois. Précisons que Fabrice Balanche, de guerre lasse, s’est expatrié aux États-Unis et est aujourd’hui chercheur invité au réseau pensant du Washington Institute for Near East Policy.

Le cas de Marc Crapez semble aussi révélateur. Brillant chercheur indépendant dans le domaine des idées politiques, il a publié de nombreux ouvrages dont deux dérangeants s’agissant de l’histoire de la gauche : La Gauche réactionnaire, ouvrage issu de sa thèse, et Naissance de la gauche. Nombre de spécialistes de l’histoire des idées ont qualifié ces livres de remarquables, avec raison. Mais problème, Marc Crapez démontre qu’il a existé au XIXe siècle, au sein de la gauche, un courant antisémite, voire racialiste. Il montre aussi que le clivage gauche-droite tel qu’on le connaît aujourd’hui ne s’est constitué qu’au moment de l’affaire Dreyfus. On se doute de la suite décrite par l’auteur dans un chapitre au titre évocateur : « Comment on ne devient pas universitaire ».

Il n’existe qu’une discipline caractérisée par le vrai pluralisme qui devrait être la règle dans toutes les sciences sociales, c’est l’économie. C’est d’ailleurs une situation insupportable pour des centaines d’enseignants-chercheurs en économie qui se proclament « hétérodoxes », « atterrés » et prennent la pose de résistants face à l’hégémonie prétendue de leurs collègues libéraux. Curieusement, les mêmes ne se soucient nullement de la liberté d’expression et de recherche des enseignants-chercheurs de sensibilités minoritaires en sociologie ou en histoire, disciplines où le pluralisme est soit très faible, soit inexistant.

On aurait tort, pour autant, de penser que cette situation dramatique pour l’enseignement supérieur et la recherche en France ne serait que la conséquence d’un étouffement de la droite par la gauche à l’université. Les nouveaux progressistes sont assez éloignés de la gauche historique. Et des indépendants classés à gauche comme Michéa ou Onfray auraient été confrontés aux mêmes problèmes que les impertinents de droite ou classés comme tels.

Dans le système de recrutement qui est celui de notre Université, un indépendant a peu de chance de survivre. Dès ses premiers pas dans la carrière, le chercheur comprend que c’est sa dépendance qui sera sa planche de salut. Dépendance interpersonnelle et dépendance par rapport aux réseaux qui font une carrière. Marcel Gauchet, lorsqu’il parle de mœurs mafieuses (revue Le Débat, n° 156, septembre-octobre 2009), emploie les mots justes. Un sociologue italien, Diego Gambetta, a explicité les ressorts de ce processus dans un article de la revue des Annales des Mines, « Gérer et Comprendre » (septembre 2006), article intitulé « La valeur de l’incompétence : de la mafia tout court à la mafia universitaire : une approche méthodologique ».

Cette dépendance entraîne le conformisme de la pensée et l’esprit courtisan dont beaucoup s’accordent à penser qu’il est un des fléaux de l’Université. La réforme universitaire de 2007 due à Valérie Pécresse n’a fait que généraliser ces pratiques en octroyant aux présidents d’université les pleins pouvoirs - dont celui académique en oubliant que ces mêmes présidents, qui se présentent volontiers comme des gestionnaires neutres, sont très souvent des politiques. Donner aux universités le pouvoir de recruter et promouvoir tous leurs enseignants-chercheurs en supprimant l’échelon national du Conseil national des universités serait, de ce point de vue, désastreux. La déconnexion entre pouvoir gestionnaire et pouvoir académique est une absolue nécessité et devra être mise en œuvre. Dans une même perspective, il serait souhaitable que, pour les disciplines concernées, la majorité des épreuves du concours de l’agrégation dite du supérieur soient anonymes et écrites.

Ce manque de pluralisme et cette chasse — car c’est le mot — aux esprits indépendants à l’Université interrogent. La France n’est-elle jamais sortie de cette tentation toute soviétique qui consiste à envisager le débat qu’en termes d’élimination des adversaires ? Élimination physique hier, élimination ou marginalisation professionnelle et sociale aujourd’hui. Et qui s’en inquiète ?

Source : Jean-Claude Pacitto, Maître de conférences en sciences de gestion à l’université Paris-Est, dans Le Figaro

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Procréation médicalement assistée (PMA) : une gauche commencerait-elle à douter ?

Eugénie Bastié signale des évolutions intéressantes parmi les intellectuels et médias habituellement classés à gauche.

« La procréation n’est pas un droit, mais une fonction biologique. (…) L’exiger pour tous au nom de la “justice sociale” comme le revendique Marlène Schiappa est parfaitement absurde. » Cette phrase n’est pas extraite d’un tract de la Manif pour tous ou d’un discours de Laurent Wauquiez, mais d’un éditorial du journaliste Gérard Biard dans le Charlie Hebdo de la semaine dernière. L’hebdomadaire satirique a fait sensation en prenant fermement position contre l’extension de la procréation médicalement assistée (PMA). En plus de cet éditorial et de dessins éloquents, on y trouvait une interview de Jacques Testard. L’inventeur du « bébé-éprouvette » mettait en garde contre l’eugénisme. La PMA, un marqueur de gauche destiné à faire avaler la pilule des réformes économiques ? Une opinion de moins en moins évidente.

« Débat sur la question : rien. Néant. Nada. Comme si être de gauche et soutenir la reproduction artificielle de l’humain allaient nécessairement de pair », s’étonnait Alexis Escudero dans son livre La reproduction artificielle de l’humain (Le monde à l’envers) paru en 2014. Dans cet essai, le membre du collectif technocritique grenoblois « Pièces et main d’œuvre » fustigeait le « chantage » à l’homophobie qui empêche la gauche de réfléchir sur le sujet de la PMA. Il s’érigeait contre la fabrication des humains en laboratoire, la soumission du couple à l’expertise médicale, la transformation de la procréation en marchandise et l’eugénisme qui en découle. Il dénonçait « cette gauche cyberlibérale [qui] travestit le combat pour la liberté individuelle en apologie de la liberté marchande ». Radicalement opposé à la technicisation de l’engendrement, il prônait la « PMA pour personne ».

Escudero n’est pas le seul à gauche à trouver que l’extension de la PMA n’est pas forcément un progrès. Chez les écolos, José Bové, en disciple du penseur de la décroissance Jacques Ellul, a marqué fermement son opposition au nom même de son engagement écologique : « À partir du moment où je conteste les manipulations génétiques sur le végétal et sur l’animal, il serait curieux que, sur l’humain, je ne sois pas dans la même cohérence », déclarait le faucheur d’OGM en 2014. Outre la grande tradition technocritique toujours vivante, c’est la lutte contre la marchandisation qui gouverne certains opposants de gauche à la PMA. Ceux-ci voient dans l’extension d’un « droit à l’enfant » la porte ouverte à une possible légalisation de la GPA, soit un asservissement et une extension du domaine du libre-échange au corps des femmes. C’est le cas du philosophe Michel Onfray, qui prévient : « Au nom de l’égalité, nous allons vers la prolétarisation des utérus des femmes les plus pauvres. »

Rares sont ceux à gauche qui emploient l’argument anthropologique de la filiation, qui semble le monopole de la droite catholique. La philosophe Sylviane Agacinski s’y est pourtant risquée, affirmant la nécessité d’une filiation sexuée. Tout comme la sociologue Nathalie Heinich.

Un autre argumentaire est repris à gauche contre la PMA : celui de la rhétorique libertaire qui dénonce un embourgeoisement de la cause homo, passé du « Familles je vous hais » gidien au « Familles pour tous » taubirien. Ainsi la féministe Marie-Jo Bonnet, fondatrice des « Gouines Rouges », critiquait-elle dans son essai Adieu les Rebelles le ralliement de la cause homosexuelle à l’idéal familialiste. « En réalité, c’est la reconnaissance de l’homosexualité dans sa spécificité qui est niée, puisqu’il s’agit désormais pour les homosexuels de rentrer dans le rang (hétérosexuel). L’impossibilité d’avoir des enfants est une limitation intrinsèque qu’il faut accepter », déclarait-elle au Figaro. Argument repris par Gérard Biard dans Charlie Hebdo : « Ne serait-il pas plus simple, et pour le coup plus juste, d’avoir enfin le courage politique de dire que ne pas avoir d’enfant(s) n’est pas une maladie bien grave ? »

France — le ministre de l'Éducation Blanquer bouscule la « gauche pédago »

L’homme du « prédicat », ce concept grammatical arrivé à l’école primaire et au collège en 2016, a démissionné. Michel Lussault, président du Conseil supérieur des programmes (CSP), l’instance qui a réécrit les programmes de la maternelle à la 3e [secondaire], s’en prend vivement au ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer (ci-contre), qu’il n’hésite pas à qualifier de « réactionnaire » et dont il dénonce les annonces « souvent unilatérales et idéologiques ». Au-delà, c’est bien deux visions de l’école qui s’affrontent. Tandis que Michel Lussault est devenu le symbole du « pédagogisme », Jean-Michel Blanquer met l’accent sur les « fondamentaux » et la méthode de lecture syllabique. « Je suis dans un travail d’organisation de l’Éducation nationale pour que tous les enfants sachent lire, écrire, compter et respecter autrui à la sortie de l’école primaire. Si ça gêne M. Lussault, ce n’est vraiment pas grave qu’il s’en aille », a-t-il réagi, cinglant.

Le géographe Michel Lussault, homme revendiqué de gauche et nommé par la controversée ancienne ministre de l’Éducation Nadjat Blekacem, s’en prend vivement au ministre de l’Éducation actuel, Jean-Michel Blanquer, qui, explique-t-il, par des « annonces souvent unilatérales et idéologiques », « prend grand soin » de se présenter comme « l’anti Najat Vallaud-Belkacem ». Un ministre que Michel Lussault n’hésite pas à qualifier de « réactionnaire » ou tout au moins « trop complaisant par rapport à des gens qui inventent une école de la République qui n’a jamais existé ». « J’aimerais que le modèle de l’école de la République ne soit pas celui de l’école jésuite », lâche-t-il encore, ciblant un camp de l’élitisme et de la sélection, à qui il oppose celui des partisans de « la connaissance pour tous », dans les rangs desquels il se range. « La bataille entre les tenants et les adversaires d’une démocratisation scolaire […], qui se joue depuis les années 1960, n’est pas tranchée », clame Michel Lussault. Au risque de tomber dans les clivages caricaturaux que, précisément, il dénonce…

Face à ces propos, le ministre, lui, a la riposte cinglante. « Je suis dans un travail d’organisation de l’Éducation nationale pour que tous les enfants sachent lire, écrire, compter et respecter autrui à la sortie de l’école primaire. Si cela gêne M. Lussault, ce n’est vraiment pas grave qu’il s’en aille », a rétorqué sur RTL Jean-Michel Blanquer, dénonçant au passage les « termes outranciers » de son pourfendeur. Ce dernier a en effet estimé que la présence du ministre « à la une de médias comme Causeur ou Valeurs actuelles » était destinée à satisfaire « quelques bas instincts d’une clientèle politique ».


Deux visions de l’école qui s’affrontent. Et un jeu de symboles. Géographe, auteur d’un récent ouvrage intitulé Hyper-lieux. Les nouvelles géographies politiques de la mondialisation, Michel Lussault, nommé en 2014 à la tête du Conseil supérieur des programmes par l’ancienne ministre Najat Vallaud-Belkacem, a fait de cette instance un nid à polémiques. À tort ou à raison, il reste associé à la première version des programmes — bien vite revue au regard du flot de critiques — qui faisait la part belle au jargon pédagogiste et reléguait, en histoire, les Lumières au rang des thèmes facultatifs. La version finale de ces nouveaux programmes, entrés en vigueur en 2016, a conservé le fameux prédicat, auquel son nom reste associé. Face au fougueux Lussault, l’austère Blanquer. Agrégé de droit, ancien recteur, ex-numéro deux de la Rue de Grenelle (le ministère de l’Éducation nationale) sous l’ère Nicolas Sarkozy, il se refuse à élaborer, depuis son arrivée à la tête du ministère sous la présidence de Macron, une énième loi sur l’éducation, tout en montrant clairement le changement de cap. Accent sur les « fondamentaux », mise en place d’évaluations nationales en CP [1ere année du primaire] et en 6e, davantage de chronologie en histoire et en littérature, maîtrise des quatre opérations mathématiques dès le CP et le CE1… Des annonces qui promettent d’entacher l’œuvre du professeur Lussault. Pour asseoir la méthode de lecture syllabique, le ministre se réfère aux neurosciences, quand l’ex-patron du Conseil des programmes explique qu’il ne faudrait pas oublier « la psychologie, la sociologie, l’histoire de l’Éducation ».

Adieu, prédicat, EPI [projet « transversal » mêlant plusieurs disciplines] et déplacements en milieu aquatique profond… Le président du Conseil des programmes, Michel Lussault, dernier héritage de l’ère Vallaud-Belkacem, symbole du pédagogisme, professeur doué d’une évidente disposition pour les périphrases jargonnantes dont il avait truffé les programmes, a démissionné. Ceci pour « envoyer un message au ministre », qui aurait « franchi quelques limites ». On ne peut qu’applaudir. Au geste d’abord : le départ de l’homme qui n’aimait pas la grammaire, voulait supprimer les classes bilangues, le latin et le grec, ou troquer l’enseignement obligatoire de l’histoire de la chrétienté médiévale contre celui des origines de l’islam, ne fera pas de tort à la communauté éducative. Au constat ensuite : Jean-Michel Blanquer a en effet franchi — de manière assez inhabituelle dans l’Éducation nationale — une ligne rouge : il est résolument passé du côté du bon sens. Depuis son arrivée Rue de Grenelle, le ministre décline un programme solide qu’il a construit au fil de sa carrière et abondamment défendu dans ses ouvrages, de sorte qu’il ne prend personne de court : culture de l’évaluation, enseignement des « fondamentaux », approche chronologique en histoire et en littérature, maîtrise des quatre opérations mathématiques en CP et CE1, suppression de la méthode globale, du prédicat et des rythmes scolaires… Une entreprise inespérée après tant d’années de règne du pédagogisme qui lui vaut le qualificatif de « brutal »… Jean-Michel Blanquer satisfait-il de cette façon les « bas instincts » des « réactionnaires », comme le proclame Michel Lussault ?

Priorité aux banlieues ?

Notons que d’aucuns pensent que les mesures du nouveau ministre Blanquer visent principalement les banlieues (les « zones d’enseignement prioritaire », ZEP). Extraits de cette tribune à contre-courant.
Puis, de 2007 à 2009, [le nouveau ministre Blnaquer] devient recteur de l’Académie de Créteil et c’est lui l’initiateur des 20 000 places d’internats d’excellence réservées aux élèves issus de l’immigration, politique mise en cause à la fois par l’Inspection générale et par la Cour des comptes, d’une part en raison de l’atteinte au principe d’égalité, d’autre part en raison du coût prohibitif du projet, les dépenses induites dépassant tous les délires — JM.BLANQUER proposait même de rémunérer les élèves !

Toujours à ce poste, il est à l’origine des « conventions d’éducation prioritaire » qui dispensent les élèves relevant de la politique de la ville et des ZEP du concours de recrutement pour intégrer Sciences Po, l’admission se faisant — pour eux seulement — sur dossier.

A la suite de controverses sur cette politique, il abandonne ce poste en 2009 et devient directeur général de l’enseignement scolaire au ministère de Luc Chatel jusqu’en 2012.

Dans cette fonction, Jean-Michel BLANQUER supprime 80 000 postes d’enseignants et met en œuvre la réforme du lycée qui constitue une véritable révolution culturelle puisqu’elle repose entre autres, sur :

  • Un appauvrissement des contenus matérialisé par une réduction importante des horaires de cours remplacés par des pédagogies de projet …. 
  • Une autonomie des établissements scolaires non plus dans le cadre d’une déconcentration, mais d’une décentralisation où il n’y a pas d’obligation de résultat, mais seulement de moyens, à savoir des activités en remplacement des cours, 
  • Une désagrégation de la transmission de la culture française avec une survalorisation de la LVE (langue étrangère, en réalité c’est l’anglais) au détriment du français.

[...]

De 2013 à 2016, il devient directeur général de l’ESSEC, École en pointe pour la politique d’« éducation prioritaire » et à l’origine d’une multitude de dispositifs en faveur des élèves des ZEP. 500 000 d’entre eux ont déjà bénéficié de ces différents dispositifs.

Outre ce cursus, il faut signaler que JM.BLANQUER est très proche de l’Institut Montaigne, Institut proche des milieux libéraux optimistes face à la mondialisation.

D’ailleurs, il appartient au comité directeur d’« Agir pour l’école », organisation satellite de l’Institut Montaigne dédié à l’école élémentaire qu’il a aidée pour lancer un projet « lecture » dans les écoles des quartiers populaires « voulant sauver les gamins des banlieues en contournant — ce qu’il considère comme — les “archaïsmes de l’école publique” !

Pour cette année, les classes de CP (cours préparatoire) sont dédoublées, mais pour les REP+ seulement, sachant que les REP+ sont les “réseaux d’éducation prioritaire renforcés” dans lesquels sont scolarisés ceux que nos gouvernants appellent les “migrants” et ce que le système éducatif appelle les “élèves allophones nouvellement arrivés”. 2500 classes et 2500 postes sont redéployés, à raison de 12 élèves par classe, ce qui fait un total de 60 000 élèves, sachant qu’à la rentrée 2018, seront également dédoublées les classes de CP (cours préparatoire) et de CE1 des REP et des REP+ (1100 en tout sur le territoire national) : 12 000 classes seront concernées, à raison de 12 élèves par classe, ce qui donne un total de 144 000 élèves.

Dans ces classes seulement, ce dédoublement est accompagné du maintien du dispositif “plus de maîtres que de classes” et de “la qualité de la pédagogie déployée dans ces classes… enjeu majeur” a bien précisé JM. BLANQUER, son objectif étant de “garantir pour chaque élève, à la sortie du CP, l’acquisition des savoirs fondamentaux”.

Rappelons que, pour nos enfants, cet objectif doit être atteint seulement fin de 3ème !

[...]

JM.BLANQUER rétablirait un véritable enseignement du latin et du grec ? En réalité, Il n’a pas dit qu’il revenait sur l’incorporation, par NV BELKACEM, du latin et du grec dans les “enseignements pratiques interdisciplinaires”, il a simplement déclaré : “les établissements qui le souhaitent peuvent faire évoluer l’organisation par la mise en place d’un véritable enseignement du latin et du grec”, c’est-à-dire qu’en réalité, ceux qui veulent continuer à faire cours peuvent le faire, il s’agit d’un simple assouplissement : il n’organise pas le rétablissement du latin et du grec, il ne prend aucune décision à cet égard et notamment, il n’envisage pas le rétablissement du CAPES de lettres classiques supprimé en 2013.

Au cours de son entretien à “Valeurs actuelles” du 31 août 2017, nous apprenons que “des cérémonies de remise des prix existent dans certains cas,” dit JM.BLANQUER “pudiquement” au journaliste qui l’interroge… il oublie seulement de préciser que c’est uniquement dans les REP puisque c’est uniquement dans ce cadre, que l’excellence est recherchée.


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France — Le “prédicat” ou la grammaire réinventée, où l’on reparle du Québec [où ce concept peu utile en grammaire est enseigné depuis plusieurs années. Notons qu’en France l’introduction du “prédicat” retardait désormais l’apprentissage du COD/COI essentiel aux accords des participés passés.]

« Les écoles privées, c’est pour les riches »

Recension intéressante  Eddie Willers de l’ouvrage de James Tooley « The Beautiful Tree: A Personal Journey into How the World’s Poorest People Are Educating Themselves » (Le Bel Arbre : un voyage personnel dans la façon dont les plus pauvres de notre planète s’instruisent.)

En 2003, le Kenya décide de rendre l’école primaire gratuite pour tous les enfants. La décision est saluée à travers le monde, notamment par l’ancien président Bill Clinton qui n’hésite pas à en faire l’éloge.

A priori quoi de plus beau qu’une éducation gratuite qui permettra à tous les enfants d’acquérir les connaissances et les savoirs nécessaires pour devenir des citoyens éclairés. La décision est d’autant plus louable qu’elle est menée par un pays en voie de développement qui ne dispose pas des ressources financières des pays occidentaux.

C’est exactement ce que se disait aussi James Tooley lorsqu’il a commencé son enquête sur les écoles privées à destination des plus pauvres. Pourtant, confronté à la réalité, il changea rapidement de point de vue et nous allons voir pourquoi.

Cet article s’appuie sur les éléments développés dans son livre « The Beautiful Tree: A Personal Journey into How the World’s Poorest People Are Educating Themselves » : les écoles privées ne sont pas réservées aux riches et offrent une éducation de meilleure qualité que l’école publique dans les pays les plus pauvres, le tout à un prix tout à fait modeste.

Tooley explique au début de son livre qu’il est parti au Zimbabwe au moment de la révolution socialiste menée par Robert Mugabe. Il s’implique alors dans une des nombreuses écoles gratuites instaurées par le gouvernement, en tant que professeur. Cependant face à l’endoctrinement permanent et les remarques sur le fait qu’il est un néo-colon, il décide de quitter le Zimbabwe.

Quelques années plus tard, Tooley se retrouve en Inde pour une mission sur les écoles privées du pays. Les premiers commentaires qu’il reçoit avant de partir en mission font état d’écoles réservées à une élite sur le modèle des « public schools » anglaises. Pourtant au détour d’une visite dans un bidonville d’Hyderabad, il se rend compte que des écoles privées existent… mais pour les plus pauvres.

Surpris de trouver ces écoles pour les enfants des bidonvilles, il souhaite poursuivre son étude en Inde et par la suite à travers le globe : en Chine, au Ghana, au Nigéria, etc. Son enquête minutieuse réalisée sur près de 10 ans renverse totalement les idées préconçues que nous pourrions avoir sur les écoles privées.

Un premier élément surprenant, les écoles privées sont bien plus nombreuses que nous pourrions l’imaginer. En 2015, The Economist affirmait qu’il y avait plus de 12 000 écoles privées à Lagos et que 26 % des enfants nigérians entre 6 et 14 ans étaient scolarisés dans des écoles privées. Tooley l’explique par le fait que le gouvernement sous-estime sciemment le nombre d’enfants se rendant dans des écoles privées. L’aveuglement est criant dans certains pays tels la Chine où au travers de ses discussions avec des officiels du régime, Tooley s’était vu dire qu’il n’existait pas d’écoles privées dans le pays.

Plusieurs éléments peuvent expliquer cet aveuglement :
  • Pourquoi les parents enverraient-ils leurs enfants dans ces écoles payantes alors que l’école publique est gratuite ? Il ne doit donc pas y en avoir.
  • Afficher un nombre élevé d’enfants scolarisés dans ces écoles ce serait faire la promotion d’un modèle concurrent de l’école publique.
  • Les écoles sont souvent situées au cœur des bidonvilles dans des bâtiments de fortune et il faut oser s’y aventurer et savoir qu’ils existent pour les compter.
  • L’argument du prix de l’éducation privée est souvent mis en avant par ses détracteurs pour la dénoncer. Pourtant, Tooley se rend compte que les prix demandés par les propriétaires des écoles sont relativement faibles, autour de $50/an soit moins de $1/semaine. Les frais d’inscription sont donc tout à fait abordables même pour les parents les plus pauvres.
Mais alors à ce prix là l’éducation doit vraiment être catastrophique ? Loin de là affirme Tooley et c’est peut-être d’ailleurs le point le plus important de son ouvrage. La qualité de l’enseignement est meilleure dans les écoles privées qu’il ne l’est dans les écoles publiques. Tout d’abord parce que l’absentéisme des enseignants est bien plus faible dans les écoles privées que dans les écoles publiques. The Economist révélait que le taux d’absentéisme des enseignants dans les écoles rurales en Inde atteignait 25 % ! Et quand ils sont présents en classe, les professeurs issus souvent de quartiers plus aisés toisent de tout leur mépris les élèves. Les classes surchargées se transforment en garderie si bien que les enfants passent le plus clair de leur temps dans la cour et n’apprennent pas grand-chose.

Soucieux de l’avenir de leurs enfants, les parents préfèrent donc les envoyer dans des écoles privées pour une raison qui change tout par rapport à l’école publique : le directeur de l’école est responsable devant les parents. Les parents peuvent à tout moment décider de placer leur enfant dans une autre école si la qualité de l’enseignement est insuffisante. En conséquence, le directeur de l’établissement va tout mettre en œuvre pour que les parents soient satisfaits : il va s’assurer que les professeurs sont présents, il va assurer leur formation afin qu’ils améliorent leurs méthodes pédagogiques, il va réaliser les investissements nécessaires pour que l’école fonctionne, etc.

Ces investissements à la différence des écoles publiques se limitent au nécessaire : pas besoin de grands bâtiments ou de tableaux interactifs dans les classes. L’effort est concentré sur le rapport qualité de l’enseignement/prix. La plupart des parents d’ailleurs ne demandent pas aux écoles de fournir des bâtiments extraordinaires pour leurs enfants, leur priorité est qu’ils apprennent à lire, écrire et compter. Le programme des écoles publiques est d’ailleurs parfois inadapté aux besoins des parents.

Certaines personnes s’insurgent contre les écoles privées par principe, car cela reviendrait à « marchandiser » l’éducation. En utilisant le terme « marchandiser » certains estiment que cela le rend péjoratif, j’estime au contraire que cela est bon. Si des marchands décident de prendre en charge l’éducation, ils auront à cœur de produire un service de qualité au bon prix pour satisfaire leurs clients. L’éducation étant capitale au développement de chacun, il est nécessaire que nous puissions avoir du choix et que celui-ci soit de qualité.

Tooley montre dans son livre que les « entrepreneurs de l’éducation » sont bien loin du cliché du méchant patron qui vit grassement sur le dos des enfants. Ce sont souvent des gens simples qui ne gagnent pas beaucoup plus que leurs professeurs et qui offrent la plupart du temps les frais de scolarité aux enfants les plus démunis.

L’école publique ou financée par des ONG semblait être la seule voie pour permettre l’éducation des plus pauvres dans les pays en voie de développement. James Tooley au travers de la richesse de son enquête nous montre qu’une alternative existe. Imposer le modèle de l’école publique c’est imaginer que les parents ne savent pas choisir ce qui est bon pour leur enfant. C’est imaginer qu’ils ne se rendent pas compte des vertus de l’éducation et qu’ils ne sont pas prêts à payer pour cela. C’est idéaliser une école publique qui dans certains pays affiche des carences importantes.

À la fin de son livre dont je vous recommande chaudement la lecture afin d’approfondir les éléments abordés ci-dessus, Tooley se demande si ce modèle des écoles privées est transposable aux pays développés. Il n’apporte pas de réponse à la question, pour autant je suis convaincu que nous pourrions répondre par l’affirmative.

Notre modèle est financé par l’État, c.-à-d. le contribuable qui n’a pas le choix. Les directeurs d’école nommés par le rectorat ne sont absolument pas responsables devant les parents et n’ont que peu de leviers d’actions pour améliorer la situation de leur école : pas de recrutement/licenciement possible, pas de poids dans la formation des enseignants, pas de décision concernant le programme enseigné, etc.

Or chaque enfant est unique. Leurs besoins ne sont pas les mêmes en fonction de leurs prédispositions, de leurs talents et de leurs envies. Une école publique au fonctionnement uniformisé n’est pas en mesure de répondre à ces besoins. Il faut donc donner le choix aux parents d’inscrire leurs enfants dans l’école qui leur convient et donner toute latitude au chef d’établissement pour que son école réponde aux besoins des parents.

Afin de limiter les disparités entre les foyers les plus riches et les plus démunis, la Suède a mis en place un système de « chèque éducation » qui permet à chaque parent d’inscrire son enfant dans l’école de son choix. Cette liberté éducative pousse les écoles à offrir le meilleur pour les enfants qu’elles accueillent et de répondre au mieux aux besoins des parents.

Le modèle de l’école publique républicaine fonctionne pour les enfants qui sont armés pour réussir : il valorise le travail intellectuel au détriment du travail manuel, il sélectionne et casse les élèves qui ne rentre pas dans la norme. En un mot, il favorise les enfants déjà favorisés. Loin d’être un moteur du « vivre-ensemble » prôné par nos politiques, il met sur le banc les plus démunis.

La fin de ce modèle permettrait d’arrêter le dénigrement systématique des filières professionnelles et technologiques où sont envoyés par dépit les élèves « les moins bons ». Il revaloriserait les talents et les envies de chaque enfant afin qu’il puisse développer ses compétences et ses aptitudes.

Le chèque-éducation couplé à la fin du monopole d’État sur l’éducation engagerait alors le développement d’écoles privées. Comme l’a montré James Tooley, celles-ci sont les plus à même de répondre aux attentes des parents de permettre à chaque enfant de s’épanouir. Et si en matière d’éducation, nous n’étions qu’un pays « en voie de développement » ?

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L’Afrique du Sud est le pays de l’OCDE qui consacre une grande partie de son PNB à l’éducation (5 % en 2010), les résultats scolaires des élèves du secteur public y sont pourtant catastrophiques. Pour citer l'OCDE : « Il existe une sévère pénurie de bons enseignants en Afrique du Sud. La connaissance qu'ont les enseignants de la matière qu'ils enseignent a été mise en question dans des tests régionaux (SACMEQ, 2007) ainsi que dans des enquêtes nationales (Taylor et al. 2012). »

Afrique du Sud – Pour la sixième année de suite, le taux de réussite aux examens de fin d'études secondaires diminue

Dépenser plus en éducation, est-ce la solution ?

Uniformiser les universités de la « nation arc-en-ciel » au nom de l'« unité » ? (plus particulièrement la section : Un taux de réussite au secondaire qui gonfle le nombre d’étudiants mal préparés)

Lavez bien ces jeunes cerveaux !

Joseph Facal revient sur l’endoctrinement historiquement correct des manuels scolaires.

Il n’y a pas que chez nous qu’on réécrit les manuels scolaires d’histoire en y gommant les aspects sombres au nom d’un « vivre-ensemble rassembleur­­­ ». [Voir pour le Québec : Manuel d’histoire (1) — chrétiens intolérants, Saint Louis précurseur des nazis, pas de critique de l’islam tolérant pour sa part, Manuel d’histoire (2) — Chrétiens tuent les hérétiques, musulmans apportent culture raffinée, pacifique et prospère en Espagne et Les manuels scolaires québécois d’histoire...]

En France, l’historienne Barbara Lefebvre vient d’examiner les nouveaux manuels d’histoire du niveau secondaire approuvés par le ministère de l’Éducation, en particulier leur présentation de la civilisation arabo-musulmane.

Son verdict : la vérité historique cède devant un cocktail apologétique et javellisé de faussetés, demi-mensonges, approximations et omissions, toujours pour ne pas heurter les susceptibilités.

Manipulation

Elle a livré ses résultats dans un entretien récent sur le site Figaro Vox.

Elle note d’abord la volonté ouvertement exprimée par les autorités de mettre au premier plan « les contacts pacifiques », indéniables, entre l’Occi­dent et le monde arabe, pour faire silence ou presque sur « les contacts belliqueux ».

Bref, ce qu’il s’est réellement passé devient moins important que le « comment-il-faut-lire-le-passé ».

La célèbre bataille de Poitiers, en 732, où Charles Martel stoppa l’inva­sion arabe venue de l’Ouest, n’est plus qu’une anecdote ou disparaît carrément.

On insiste lourdement sur l’« ami­tié » entre Charlemagne et le calife Haroun al-Rashid, qui était purement tactique.

Mahomet est présenté comme un marchand visité par un ange qui fonde une communauté religieuse et celle-ci s’étend ensuite sans difficultés particulières. Il n’y a presque rien sur les guerres de conquête (le djihad) et la violence avec laquelle on traitait ceux qui osaient résister à cette avancée. On ne dit pas que ces guerres avaient pour but explicite d’imposer de force une nouvelle religion.

Pas un mot sur le fait que la fusion du religieux et du politique est présente dès la naissance de l’islam. Est-ce pour ne pas donner une clé pour l’interprétation du présent ?

Par contre, on beurre épais sur la violence indéniable des Croisades chrétiennes et sur les Espagnols qui se battirent « violemment » pour expulser les envahisseurs arabes de chez eux.

On lit que les califes musulmans « développèrent » des villes. Or, Alexandrie, Le Caire, Jérusalem, Damas­­­ étaient plutôt des villes pré­islamiques, conquises et islamisées. C’est plus qu’une nuance.

Les manuels, note Lefebvre, s’appuient souvent sur des sources musulmanes non critiques. C’est comme si on écrivait une histoire du catholicisme en prenant surtout des documents du Vatican.

Les découvertes scientifiques faites dans la civilisation arabe médiévale sont utilisées, poursuit-elle, pour favoriser l’image d’un islam avancé et lumineux.

C’est comme si l’on disait que la physique moderne doit beaucoup au judaïsme [ou à l’Allemagne impérialiste] parce qu’Einstein était juif [et Allemand né sous l’Empire allemand].

Cerveaux

On s’étend longuement sur ce que les Arabes ont apporté à l’Occident, mais très peu sur ce que l’Occident a apporté aux Arabes.

Silence presque complet sur les 17 millions d’esclaves noirs vendus par des marchands arabes, pendant 13 siècles, parmi lesquels beaucoup de jeunes filles utilisées à des fins sexuelles, sans qu’on ait vu poindre des mouvements abolitionnistes comme il y en a eu en Occident.

Mais qu’importent les faits quand il s’agit de reconfigurer la pensée des jeunes...

L’entretien de Barbara Lefebvre au FigaroVox :