vendredi 30 décembre 2022

Italie — pas de « parent 1 » et « parent 2 » : « mère » et « père » restent sur la carte d'identité

Tout reste tel quel. Le gouvernement italien a tranché : les mots « mère » et « père » resteront sur la carte d’identité, sans donner ainsi de poids politique à la récente décision d’un tribunal qui a jugé valide l’utilisation du terme neutre « parent ». L’exécutif ne veut pas reculer, continuant sur sa lancée et confirmant que les mots « mère » et « père » seront conservés même pour les couples de même sexe. Le choix a été fait à la fois par le ministère de l’Intérieur et celui de la Famille, selon lequel il n’y a pas lieu de modifier du tout les dispositions en la matière.

Réaction du chef de la Ligue, Matteo Salvini, vice-président du Conseil des ministres et ministre des Infrastructures et de la Mobilité durable

 

« Mère » et « père » sur la carte d’identité

La volonté de l’exécutif est très claire : verrouiller le contenu du décret signé par Matteo Salvini en 2019 et empêcher l’utilisation des qualificatifs neutres « parent 1" et « parent 2". La nouvelle a été diffusée par l’édition du 27 décembre de La Repubblica, qui a rapporté la position d’Eugenia Roccella, Ministre italienne pour la Famille, la Natalité et l’Égalité des chances, sur l’appel présenté par le couple homoparental : « Il y a eu beaucoup de bruit autour de cette décision, mais c’est une décision de justice individuelle qui ne s’applique qu’au couple célibataire qui avait fait appel ».

Carte d’identité avec deux mères Le gouvernement : système en péril

La ministre de la Famille et de l’Égalité des chances a confirmé que sur la carte d’identité « la mère et le père resteront inscrits », ajoutant que dans tous les cas les couples formés par deux mères ou deux pères — s’ils le voulaient — pouvaient « toujours faire appel ». Depuis novembre, le gouvernement avait exprimé de forts doutes sur la décision du tribunal civil de Rome quant à la qualification de « parent » sur la carte d’identité.

Fratelli d’Italia et Salvini se réjouissent

Des sources au Palazzo Chigi, siège de l’exécutif, avaient immédiatement réagi à la décision du tribunal, faisant savoir que le gouvernement l’examinerait « avec une attention particulière ». En effet, l’exécutif avait mis l’accent sur des « problèmes de mise en œuvre évidents » qui, entre autres, auraient pu mettre le système d’identification personnelle « en danger ». C’est pourquoi le gouvernement a préféré conserver les mots « maman » et « papa », en évitant de changer les formulaires et logiciels en question.

Pour Fratelli d’Italia, il s’agit d’une « bataille de bon sens pour la défense des droits des plus petits ». Matteo Salvini s’était dit choqué, lui qui avait appris l’arrêt du tribunal avec stupéfaction. Désormais, le secrétaire de la Ligue a accueilli avec enthousiasme le choix du gouvernement : « Maman et papa, les mots les plus beaux et les plus doux du monde, on n’y touche pas ».


S'envoyer des vœux de Nouvel An, une pratique antirépublicaine...sous la Révolution

On sait que les révolutionnaires de 1789 tentèrent d'interdire aux Français le vouvoiement et l'usage de Monsieur ou Madame. On sait moins que le parfum et le maquillage étaient suspects et qu'ils tentèrent aussi d'interdire socialement l'envoi de vœux de Nouvel An.

 Ainsi, le Secrétaire des républicains qui paraît sous la Révolution se donne comme mission non seulement d'imposer le tutoiement et de supprimer systématiquement les usages établis sous l'Ancien Régime. « Nous ne sommes plus au temps du cérémonial », explique son auteur, qui rappelle qu'il faut désormais cesser d'envoyer à ses parents des vœux de bonne année, « cette lettre ridicule et bizarre » dont la politesse ancienne faisait une obligation : « Je ne crois pas, écrit ainsi un fils à son père que tu sois fâché de ne plus [les] recevoir [...]. C'est un usage que le républicain doit annuler. Les bienfaits d'un père sont autrement [précieux]; il n'y a point de jour marqué pour lui témoigner la reconnaissance qui, dans un fils, doit être continuelle... » Et le père d'opiner, en réponse : « Combien d'hypocrisie ! Que de faux baisers ! Il faut que le vice n'ait plus de subterfuges, et la vertu n'a plus besoin d'époque ».

Ce qui, dans ce manuel de correspondance républicaine, semble n'être qu'une recommandation prend dans la vie quotidienne un tour parfois plus menaçant. Trois ans plus tard, la République proclamée, la célébration du Jour de l'an — qui correspondant au 12 nivôse dans le calendrier républicain — est interdite : « La mort à qui fera des visites ! » commentent les Goncourt, historiens aussi partiaux que perspicaces. « La mort à qui osera des compliments ! Et les gouvernants vont jusqu'à faire décacheter, ce jour-là, toutes les lettres à la poste, pour s'assurer si tous ont bien oublié le calendrier grégorien et les souhaits de bonne année ». Plus que des historiens, les frères Concourt sont des romanciers, et l'on sent qu'ils dramatisent à plaisir la situation. Pourtant, le fait est que ceux qui célèbrent le « Jour de l'an » sont désormais des suspects, comme le note un agent secret du ministre de l'Intérieur dans un rapport du 31 décembre 1793 : « L'Ancien Régime n'est pas encore supprimé dans les cœurs. On voir partout à Paris les trois quarts des citoyens s'apprêter pour souhaiter une bonne année. » Le lendemain, un autre mouchard, Rolin, confirme dans son rapport : « Les anciens préjugés ont bien de la peine à disparaître. On a remarqué que, quoique l'année [républicaine] soit déjà au quart, beaucoup de citoyens ne la considèrent encore que commençant en ce jour. Les visites ont existé presque comme de coutume dans les rues mêmes on a entendu des citoyens se souhaiter une bonne année » — ce qui est un comble, et une information qui mérite d'être rapportée au ministre. « Il faut du temps, conclut Rolin, pour oublier des préjugés, des habitudes que nous avons contractés en naissant ».

Source : Histoire de la politesse, de Frédéric Rouvillois, pp. 38-39.




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