samedi 22 avril 2017

« Le taux de réussite », mesure contestée

Le taux de diplomation au Québec, déjà l’un des plus faibles au pays, serait encore pire que les chiffres couramment véhiculés par le gouvernement. Cette fausse impression résulterait de la méthodologie utilisée pour le calculer.

Loin dans les pages du récent budget 2017-2018, le gouvernement écrit que le taux de réussite scolaire atteignait les 78,8 % en 2014-2015, non loin de l’objectif de 80 % d’ici 2020. Cette cible a été fixée par le ministère de l’Éducation il y a près de 25 ans et, malgré l’augmentation des fonds consacrés à l’éducation dans le récent budget provincial, rien n’y indique que l’objectif sera revu à la hausse.

Le taux de réussite suscite d’ailleurs une certaine controverse, puisqu’il comprend à la fois les taux de diplomation et les taux de qualification.

Taux de diplomation : diplômes d’études secondaires, diplôme d’études professionnelles, attestation spécialisée professionnelle ou attestation d’études professionnelles –  63 449 jeunes en 2014-2015

Taux de qualification : certificats de formation visant à préparer au marché du travail un élève en difficultés d’apprentissage, sans exigences quant aux résultats scolaires — 3466 jeunes en 2014-2015.
« L’indicateur de réussite au secondaire est confus présentement parce qu’on inclut une certaine forme de reconnaissance qui ne représente pas des diplômes du secondaire, explique le professeur de l’Université Laval Égide Royer, pour nous prévenir du discours gouvernemental. J’ai l’impression qu’on semble compenser des chiffres qui sont trop faibles. »

« Je n’aime pas qu’on discrimine de la force ou de l’importance, mais je comprends que, pour des fins statistiques, les gens demandent plus de clarté. Peut-être qu’on peut en faire plus », reconnaît le ministre de l’Éducation, Sébastien Proulx.

Le taux de diplomation réel

Dans la réalité, le taux de diplomation au Québec est de 74,7 %. Et quand on se compare à l’Ontario, on ne se console pas. Dans cette province, le taux d’obtention de diplômes secondaires en cinq ans a été supérieur à l’objectif de 85 % en 2015, en hausse de 17 points de pourcentage par rapport à 2004.

Pour Égide Royer, alors que nous évoluons de plus en plus vers une société du savoir, il s’agit d’une illustration évidente que le Québec est sous-scolarisé. « C’est indécent qu’autant de jeunes aient plus de difficultés à réussir que de l’autre côté de la rivière des Outaouais. »

Les garçons tirent toujours de l’arrière par rapport aux filles, soit un retard de plus 10 %.

Pour corriger le tir, le ministre Proulx rappelle que son gouvernement injectera 1,8 milliard de dollars d’investissements supplémentaires au cours des cinq prochaines années. Il ouvre également la porte à de nouvelles initiatives au sujet du taux de diplomation lors du dévoilement de sa politique sur la réussite éducative d’ici l’été.

Des certificats controversés

« Diplômes bidon », « médailles en chocolat »... Les certificats de qualification ont déjà reçu leur lot de critiques par le passé. « Avoir un niveau de lecture de sixième année, avoir 18 ans et être considéré comme un diplômé au Québec, il y a quelque chose qui ne fonctionne pas », déplore M. Royer, spécialiste en éducation.

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