lundi 18 novembre 2024

Pour Justin Trudeau, il ne faut pas que l'urgence de payer son logement ou son épicerie l'emporte sur la lutte contre les changements climatiques

Le Premier ministre Justin Trudeau s'est entretenu le 17 novembre avec Michael Scheldrick, cofondateur du groupe de lutte contre la pauvreté Global Citizen, en marge du sommet des chefs d'État et de gouvernement du G20 à Rio de Janeiro (Brésil).

Pontifiant, il a déclaré :

Il est très, très facile, lorsque vous êtes dans une situation de survie à court terme : je dois payer le loyer ce mois-ci, je dois pouvoir acheter des provisions pour mes enfants, de dire « d'accord, accordons une priorité légèrement moindre au changement climatique ».

Et c'est quelque chose d'instinctif quand la tempête arrive, vous voulez vous blottir, vous recroqueviller et attendre qu'elle se calme. Nous ne pouvons pas faire cela avec le changement climatique. Et malheureusement, nous avons beaucoup d'amplification politique du type de récit qui est directement opposé à cela.

Les Françaises non immigrées ont d'autant moins d'enfants qu'elles ont peu de revenu disponible

En France, le taux de fécondité est positivement associé au niveau de revenu et de diplôme. Si on omet les immigrés, il s’écroule en dessous de 2000€ mensuels.

Les femmes diplômées du supérieur et disposant de 4000€ par mois sont quasiment au niveau de fécondité nécessaire au renouvellement des générations.

Selon un rapport de l’Insee, en 2023, 677 800 bébés sont nés en France, dont 639 533 en France métropolitaine Ce chiffre n’avait pas été aussi bas depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Lecture : parmi les femmes nées à l’étranger, les 20 % les plus modestes (en deçà du 1ᵉʳ quintile de niveau de vie), qui ont un niveau de vie moyen de 587 euros par mois sur la période, ont une fécondité moyenne de 2,63 enfants, d’après leur fécondité observée de 2012 à 2017 par âge et rang de naissance (ICFRA).   

 La fécondité des femmes nées à l’étranger est plus élevée que celle des femmes nées en France (figure ci-dessus). Ces écarts sont accentués en bas de l’échelle des niveaux de vie : 1,5 enfant pour les femmes nées en France contre 2,6 pour celles nées à l’étranger parmi les 20 % les plus modestes (en deçà du 1ᵉʳ quintile de niveau de vie). Alors que la fécondité des femmes nées à l’étranger diminue nettement avec le niveau de vie, celle des femmes nées en France tend à augmenter avec celui-ci. Parmi les femmes nées à l’étranger, les 20 % les plus aisées ont en moyenne 2,0 enfants, soit un niveau de fécondité proche de celui des femmes les plus aisées nées en France (1,9).

Voir les données de l'INSEE, il s'agit de niveau de vie, lequel est égal au revenu disponible du ménage divisé par le nombre d’unités de consommation (UC). Le niveau de vie est donc le même pour tous les individus d’un même ménage.

Des collèges bidon qui vendent la citoyenneté canadienne ?

Québec a autorisé plus de 12 000 étrangers à étudier dans un collège privé méconnu de Montréal, soit plus qu’à n’importe quels autres cégeps ou universités.

Le Collège Supérieur de Montréal, situé au cœur du centre-ville, accueille une minorité d’étudiants québécois.

Son modèle d’affaires est plutôt basé sur le lucratif recrutement d’une clientèle internationale souvent originaire du Maghreb et de l’Inde.

Lors de sa dernière demande de renouvellement de permis, l’établissement privé avait informé le gouvernement qu’il prévoyait accueillir seulement 1147 étudiants en 2024-2025.

Qu’à cela ne tienne, Québec a délivré un nombre record de 12 622 certificats d’acceptation du Québec (CAQ) à des étudiants admis par le Collège entre avril 2023 et janvier 2024. C’est deux fois plus que pour l’Université de Montréal et trois fois plus que pour McGill (voir tableau ci-dessous).

Le Collège Supérieur de Montréal a ainsi profité des largesses du ministère pour accueillir un maximum d’élèves étrangers. Il en compte présentement 3300. Faute de place, certains des 12 000 admis ont opté pour un autre établissement ou ont baissé les bras après que le début de leur session a été repoussé de plusieurs mois.

«Notre objectif n’a jamais été d’octroyer des lettres d’admission à un maximum d’élèves, même si aucune règle ne nous en empêche, mais plutôt d’offrir un enseignement de qualité», s’est défendu par écrit Noureddine Hajibi, directeur général du Collège.

« Impossible de refuser »

La popularité du Collège Supérieur de Montréal, un collège privé subventionné, s’explique en partie par le fait qu’il donne accès à un précieux permis de travail post-diplôme qui mène à la résidence permanente.

Plusieurs étudiants étrangers acceptent donc de payer les frais d’admission et de scolarité s’élevant à plusieurs milliers de dollars par session dans l’espoir de pouvoir immigrer au Canada de façon permanente.

Ces étudiants font partie des 600 000 immigrants temporaires présents au Québec, un nombre que François Legault veut réduire. Dans la dernière année, il a maintes fois interpellé le fédéral à ce sujet. Or, le ministère de l’Immigration du Québec a directement contribué à cette hausse en acceptant en masse les étudiants du Collège Supérieur de Montréal.

Mais pourquoi ne pas en avoir refusé plus, vu la taille du collège? Questionné par notre Bureau d’enquête, le Ministère affirme que les dispositions législatives actuelles l’empêchent de gérer les demandes en fonction de la capacité d’accueil réelle des établissements.

Des «dérapages»

Le mois dernier, le ministre de l’Immigration Jean-François Roberge a néanmoins déposé le projet de loi 74 pour mieux contrôler la venue d’étudiants étrangers, vu les «dérapages» dans le milieu.

Sans les nommer, l’élu a fait allusion à deux collèges privés problématiques.

«C’est comme si l’enseignement n’était plus une mission sociale, une mission économique, mais un modèle d’affaires pour vendre la citoyenneté québécoise et canadienne plutôt que la qualité du diplôme», a-t-il déploré en conférence de presse.

De son côté, le ministère de l’Éducation affirme que si le projet de loi est adopté, il permettra d’assurer une meilleure répartition des étudiants étrangers entre les types de formation. [Pas de limiter ce nombre ?]

L’Ontario a aussi récemment sévi contre l’industrie «d’usines à diplômes» qui s’était développée autour des collèges privés. Pour sa part, le gouvernement fédéral a annoncé dans les derniers mois des plafonds d’admissions pour les étudiants étrangers.


Nombre de certificats d’acceptation octroyés par Québec entre avril 2023 et janvier 2024
  •     Collège Supérieur de Montréal: 12 622
  •     Université Laval: 7778
  •     Université du Québec en Outaouais*: 7176
  •     Université de Montréal: 6174
  •     Collège Ellis (campus de Trois-Rivières): 6086
  •     Université du Québec à Chicoutimi**: 5453
  •     Université du Québec à Trois-Rivières: 5144
  •     Université du Québec à Montréal: 4846
  •     Université Concordia: 4744
  •     Université McGill: 3832

*pour le 1er cycle seulement

**pour les 1er et 2e cycles seulement

Source: Cahier explicatif des crédits 2024-2025, ministère de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration

Qu’est-ce que le CAQ?

Un étudiant doit obligatoirement obtenir un Certificat d’acceptation du Québec (CAQ), remis par le ministère de l’Immigration du Québec, avant de demander son permis d’études au fédéral. L’étudiant peut changer d’établissement sans que son CAQ ne soit mis à jour.

Qui est derrière le Collège Supérieur de Montréal?

Le directeur général de l’établissement est Noureddine Hajibi. L’homme d’origine marocaine a occupé le même poste à l’Institut Teccart par le passé.

Sa femme, Saloua Zraida, et lui sont aussi administrateurs du Collège Supérieur de Sherbrooke et du Collège Universel, à Gatineau. Ces deux établissements privés accueillent également une grande proportion d’étudiants étrangers.