mercredi 5 février 2020

Anglicisation du Québec : nouveau campus anglophone à Montréal

Le cégep [fin du lycée en France] de la Gaspésie et des Îles a pris les grands moyens pour compenser la baisse de son effectif : le collège a ouvert un campus anglophone à Montréal, qui recrute uniquement des étudiants étrangers venus surtout de l’Inde et de la Chine.

Ce cégep anglophone connaît une croissance fulgurante, au point que certains le qualifient de véritable vache à lait : depuis sa fondation en 2015, le nombre d’inscriptions a bondi de 35 étudiants à 2200 étudiants. L’établissement situé dans un bâtiment anonyme du quartier Ahuntsic, au nord de Montréal, accueille deux fois plus d’étudiants que l’ensemble des quatre autres campus du cégep, situés en Gaspésie et aux Îles-de-la-Madeleine (qui comptent au total 1010 étudiants).

Comme bien des cégeps situés en région, celui de Gaspé a perdu environ 10 % de son effectif depuis une dizaine d’années, conséquence de l’implosion démographique des Québécois de naissance (1,5 enfant/femme soit une contraction de 25 % par génération). Pour maintenir de précieux programmes d’enseignement, le cégep mise sur le recrutement d’étudiants internationaux. Mais il n’est pas facile d’attirer de jeunes étrangers à Gaspé ou aux Îles-de-la-Madeleine, explique Sylvain Vachon. C’est beaucoup plus facile à Montréal. Et il est plus simple de recruter des étudiants maîtrisant l’anglais que le français.

Anglicisation de Montréal


Le Mouvement Québec français (MQF) s’insurge contre la création, sans aucun débat public, d’un autre cégep offrant un enseignement en anglais dans l’île de Montréal. « Ce campus anglophone d’un cégep régional, qui accélère l’anglicisation de la région métropolitaine, n’a pas lieu d’être. On demande au ministre de l’Éducation de faire ses devoirs et de stopper l’hémorragie », dit Maxime Laporte, président du MQF.

Certains cégeps en région sont tellement sous-financés, à cause de la baisse de la population, qu’ils doivent se livrer à une véritable course à la « clientèle » pour survivre, déplore-t-il. Plutôt que de forcer un cégep à enseigner en anglais à des étudiants venus d’Asie, il faut investir des fonds publics pour lui permettre de remplir sa mission régionale en français, fait valoir Maxime Laporte.

« En autorisant l’ouverture de ce campus, le MEES [ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur] a abandonné toute prétention à faire du français la langue d’intégration de ces étudiants internationaux, immigrants au Canada. Le MEES saccage la dynamique linguistique à Montréal et contribue à l’anglicisation des allophones », renchérit Frédéric Lacroix, militant pour la défense du français, dans un texte paru dans le dernier numéro de L’aut’journal.

Il y a fort à craindre que ces étudiants anglophones anglicisent bien Montréal non seulement pendant leurs études, mais qu’un nombre important d’entre eux cherche également à rester au Québec tout en n’apprenant pas le français, ou si peu.

Le campus anglophone montréalais se finance sans aucuns fonds publics, car les étudiants étrangers paient la totalité de leurs frais d’inscription — 7387 $ par semestre ou 14 774 $ par année. Cette somme inclut une assurance maladie privée, car ces jeunes venus d’ailleurs n’ont pas droit à la couverture de la Régie de l’assurance maladie du Québec.

La loi 101, obligeant la scolarisation des immigrants en français, malgré des velléités de la part du PQ par le passé, ne s’applique pas au collégial. Si le Québec, comme le reste de la planète, avait un secondaire jusqu’à 18 ans ou 19 ans, cette anomalie n’existerait pas.