dimanche 18 novembre 2018

Arrêter le cannabis et la mémoire revient

Un mois d’abstinence de cannabis et la mémoire reviendrait.. Une étude menée au Massachusetts General Hospital, aux États-Unis, et parue dans le Journal of Clinical Psychiatry montre que suspendre la consommation de cannabis sur cette période chez des utilisateurs réguliers entraîne aussitôt une amélioration de la mémoire. Un constat important quand on sait que dans cette étude les utilisateurs sont âgés de 16 à 25 ans, en pleine période d’apprentissage scolaire ou universitaire.

Le lien entre cannabis et altération des fonctions cognitives n’est plus à démontrer. «Cette évidence clinique est désormais prouvée par des études robustes en termes de qualité et de suivi des sujets sélectionnés, explique la Dre Geneviève Lafaye, spécialisée dans la prise en charge des adolescents et jeunes adultes dans le service d’addictologie de l’hôpital PaulBrousse à Villejuilf. Le cannabis altère non seulement la mémoire, mais aussi l’attention, la concentration, et de façon très handicapante les fonctions exécutives qui permettent de s’organiser, d’anticiper, de planifier, de prendre des décisions. »

Cette étude a donc porté sur des jeunes de 16 à 25 ans fumant du cannabis au moins une fois par semaine. Les chercheurs ont demandé à la moitié d’entre eux de suspendre leur consommation (moyennant rémunération) et à l’autre moitié de poursuivre ses habitudes. Pendant le mois qui a suivi, ils ont vérifié l’absence de cannabis dans les urines du groupe abstinent et ont évalué à plusieurs reprises les capacités d’attention et de mémorisation de l’ensemble des volontaires. Dès la première semaine, ils ont constaté une amélioration de la mémoire chez ceux qui avaient suspendu leur consommation alors qu’aucun effet n’était observé dans l’autre groupe.

Au terme d’un mois, les abstinents se souvenaient plus facilement de nouvelles informations et pouvaient aisément les restituer. En revanche, le degré d’attention n’avait pas bougé. Pour les auteurs, ces résultats sont un véritable encouragement au sevrage. «Il est vrai que les jeunes sont sensibles à l’argument de l’amélioration des fonctions cognitives, car ils souhaitent ne pas échouer scolairement et pouvoir suivre une orientation qui leur convienne. Or, il y a une réversibilité importante de ces fonctions après l’arrêt de la consommation. Mais attention, si la mémoire s’améliore vite, comme le montre cette étude, les fonctions exécutives mettent du temps à rentrer dans l’ordre et il ne faut pas s’attendre à un retour normal des choses en un mois. En particulier quand la consommation est ancienne, importante, ou a débuté précocement. Dans ces situations, la réversibilité est plus laborieuse voire incomplète. Mais le bénéfice est évident sur la motivation, l’engagement dans les études et le sentiment général d’aller mieux», explique Geneviève Lafaye.

En France, environ 40% des adolescents de 17 ans avaient déjà fumé du cannabis dans leur vie en 2017 et 7,2% étaient des consommateurs réguliers, dont le double de garçons par rapport aux filles (4,5% vs 9,7%). L’âge de la première expérimentation est en moyenne de 15 ans pour les deux sexes et plus l’initiation est précoce plus les effets cognitifs sont importants. «Il y a aujourd’hui une banalisation effrayante du cannabis qui retarde la prise en charge des jeunes dépendants et réduit malheureusement leurs chances de succès dans les études », rappelle l’addictologue.


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