mercredi 21 janvier 2015

Pays-Bas : fin des bourses d'étude gouvernementales généralisées


Dès la rentrée universitaire 2015, les « bourses universitaires de base », accordées jusqu’ici à tous les étudiants néerlandais, seront remplacées par un système généralisé de « prêt social », remboursable en 35 ans.


« Een studievoorschot », traduisez littéralement « une avance financière pour les études », soit un prêt à taux réduit, étalé sur une très longue période de remboursement. Voilà le nouveau régime auquel seront soumis, dès la prochaine rentrée universitaire, tous les étudiants néerlandais.

DÉMANTÈLEMENT DES BOURSES GRATUITES

Les sénateurs ont approuvé ce mardi le texte adopté mi-novembre par les députés. La deuxième­ chambre du Parlement avait en effet adopté plus tôt, par 97 voix contre 53, la proposition de loi visant à remplacer l’actuel dispositif d’aide au financement des études universitaires par un système généralisé de prêt étudiant.

Cette mesure était inscrite comme prioritaire au programme du gouvernement de coalition libérale-travailliste de Mark Rutte.

Étudiants néerlandais protestant en novembre 2014 contre le nouveau système de prêts.
Son adoption entérine un accord de compromis sur la question, scellé au printemps dernier entre quatre formations politiques – dont les écologistes – pour s’assurer d’une majorité parlementaire.

Le vote des députés n’a donc plus surpris personne aux Pays-Bas, mais chacun mesure pleinement la portée du texte adopté, qui démantèle le système actuel de bourses gratuites.

Stabilité financière et équité sociale

Ce système permettait jusqu’ici aux 670 000 étudiants néerlandais qui fréquentent les 13 universités et les 41 Écoles supérieures professionnelles (hogescholen) du pays de compenser des frais de scolarité académique relativement élevés – 1 900 € pour une inscription en premier cycle cette année – par un dispositif d’aides assez généreux. Mais, il ne s’agit là que d’un coût de base et comme le souligne le journal flamand De Standaard : « il n’est pas rare que des écoles supérieures et des universités aient des frais d’inscription de 15 000 euros » (20.000 $).

Tous les étudiants reçoivent notamment une « bourse de base » forfaitaire d’une durée de quatre ans, éventuellement prorogeable, et ce indépendamment du revenu de leurs parents. Pour cette année universitaire 2014-2015, par exemple, chaque étudiant a droit à 100,25 € (140 $) mensuels s’il vit chez ses parents et 279,14 € (390 $) s’il habite en dehors. Cette « bourse de base » était en réalité un prêt gouvernemental qui se convertissait en une subvention si l’étudiant obtenait son diplôme dans les dix ans.

Mais pour l’actuelle coalition au pouvoir, le système n’est plus ni tenable financièrement, ni juste socialement, car « il force l’ensemble des contribuables à investir pour la formation de jeunes qui, une fois leurs études terminées, bénéficieront de revenus élevés ».

Dégager plus d’un milliard de $

Aux yeux de la ministre de l’Éducation, Jet Bussemaker, « le système des bourses n’est plus de notre temps. Nous préférons investir dans des filières d’excellence qui permettront à nos jeunes de faire la différence. L’accès à un enseignement supérieur de qualité est une telle promesse de bénéfices pour l’avenir professionnel d’un étudiant que nous pensons qu’il peut payer pour cela. »


Le gouvernement table sur des recettes de 800 millions à un milliard d’euros. Il a promis d’investir la totalité des fonds pour perfectionner l’enseignement supérieur.

Exceptions et modalités

Seuls les étudiants dont les parents gagnent moins de 46.000 euros par an (64.000 $) ou refusent de payer continueront de recevoir une aide supplémentaire. Les étudiants dont le revenu des parents est inférieur à 30 000 € (42.000 $) recevront le montant maximum de cette bourse, soit 365 € (510 $) par mois. Le délai maximal de remboursement des prêts étudiants passera de 15 à 35 ans.

Dès le 1er septembre 2015, les « bourses de base » laisseront donc la place à des prêts sociaux, remboursables en trente-cinq ans. La formule retenue prévoit des taux d’intérêt « plafonnés à 4 % », mais calculés au cas par cas « selon les revenus mensuels des futurs diplômés et prélevés uniquement si ces revenus dépassent le salaire minimum » (actuellement 1,501 € bruts par mois, soit 2100 $).

Un diplômé ne devra pas consacrer plus de 4 pour cent de son revenu aux remboursements. Les invalides et les personnes souffrant d’une maladie chronique ne seront également pas tenues de rembourser la totalité de leur emprunt universitaire.

Endettement ou impulsion ?

Les associations étudiantes et les partis d’opposition n’ont pas manqué de dénoncer les failles et les risques du nouveau système : la sélection par l’argent, l’endettement généralisé des étudiants, et enfin des recettes finalement très incertaines et imprévisibles pour l’État. Une pétition contre la réforme a obtenu 28 000 signatures.

Mais le monde universitaire semble satisfait de la formule. Pour Karl Dittrich, porte-parole de l’association des universités néerlandaises (VSNU), « ce nouveau système de prêt social devrait à la fois garantir l’accès de tous à l’enseignement supérieur et donner à ce dernier une impulsion importante ».

Le Bureau central du plan (CPB) estime que la dette moyenne des étudiants néerlandais (aujourd’hui de 15.000 €, 21.000 $) devrait augmenter de 6000 à 9000 € (8.380 à 12.600 $).




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