lundi 23 mars 2015

Débat sur ECR, cette « patate chaude » auquel les Québécois tiendraient

Émission radio : Isabelle
On a sorti la religion des écoles. Pourtant, deux Québécois sur trois tiennent au cours d'éthique et de culture religieuse à l'école. Est-ce un retour en arrière? • 98,5 fm Montréal

Écoutez l'émission (38 minutes)




  • Titre : « On a sorti la religion des écoles. Pourtant, deux Québécois sur trois tiennent au cours d'éthique et de culture religieuse à l'école [Note du carnet : faute de mieux, plus de parents était encore pour un choix de matières "religieuse" à l'école]). Est-ce un retour en arrière? »


  • Intervenants :
    • Isabelle Maréchal (qui ne comprend pas bien ce que demandait Loyola et pense que le cours ECR a commencé en 1998, elel serait plutôt pour un cours de morale et sortir la religion du cours), 
    • Luc Phaneuf (qui est étonné par la décision Loyola, théologien très « humaniste » et qui prétend que le programme ECR permet la critique de la radicalité religieuse, notons que Phaneuf enseigne dans un collège français privé qui n'est même pas obligé d'enseigner le cours ECR, son pendant Marie-de-France ne le fait pas, enfin le fait « transversalement »),
    • Hassan Serraji qui se pose des questions sur la difficulté pour les professeurs catholiques d'enseigner les croisades (il a beaucoup aimé ce qu'Antoine Robitaille a écrit dans le Devoir...).

    • Et des auditeurs dont un parle du bien et du mal dont on parlerait dans le cours ECR « neutre ».
    ECR populaire chez les jeunes : aiment surtout le débat (seul cours où ils peuvent parler autant), pas de devoir, mais peu d'intérêt pour la spiritualité religieuse, par contre intérêt sur pourquoi les autres feraient ceci ou cela. (C'est également ce que nos contacts nous disent. Mais est-ce une éducation, du temps utilisé au mieux ?)

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    Finlande — Fin des matières cloisonnées, bienvenue aux compétences transversales

    Depuis des années, la Finlande est considérée comme l’un des pays ayant le système scolaire et éducatif le plus performant du monde. Souvent sans comprendre pourquoi ou en avançant de mauvaises raisons, selon certains chercheurs.

    C’est d’ailleurs un des pays les mieux notés dans le classement PISA (Programme international pour le suivi des acquis des élèves) bien que ses résultats soient en baisse récemment. La 12e place de la Finlande dans le classement PISA avait constitué une grosse déception pour le pays. En 2009, le pays nordique était troisième du classement, ce qui lui avait valu l’attention du monde entier. Des politiciens et experts en éducation venus du monde entier se rendaient à Helsinki dans l’espoir de trouver la recette miracle de ce système éducatif. Aujourd’hui, une nouvelle formule d’enseignement est en train d’y voir le jour.

    École finlandaise
    « Un enseignement pour préparer les jeunes à la vie active »

    La Finlande s’apprête à lancer un tout nouveau système de cours. Il s’agit d’une réforme radicale du programme scolaire finlandais, selon The Independent qui rapporte cette information. Fini d’enseigner les traditionnelles matières comme les mathématiques, la géographie ou l’histoire. La Finlande veut les remplacer par des « sujets » transversaux. « Cela représente un grand changement dans l’enseignement en Finande qui n’en est qu’à son début », précise Liisa Pohjolainen, chargée de l’éducation des jeunes et des adultes à Helsinki.

    « Ce dont on a besoin aujourd’hui, c’est d’un genre différent d’enseignement qui prépare à la vie active », explique Pasi Silander, directeur du Développement de la capitale finlandaise. « Nous devons effectuer des changements en matière d’éducation qui sont nécessaires pour l’industrie et la société moderne. »

    Des cours de cafétéria et d’Union européenne

    La manière classique d’enseigner est déjà en train de disparaitre pour les jeunes de 16 ans dans certaines écoles d’Helsinki. Les Finlandais appellent ça « l’enseignement phénomène », mais on peut l’appeler plus sobrement l’« enseignement par sujets ».

    Par exemple, un étudiant de la filière professionnelle peut prendre comme cours « service de cafétéria ». Ce cours transversal permet à l’étudiant d’apprendre les mathématiques, les langues pour servir des clients étrangers, ainsi que des compétences en écriture et en communication.

    Dans les filières plus générales, on pourrait envisager de prendre un sujet « Union européenne », qui mélangerait des éléments d’économie, d’histoire, de langue et de géographie.

    « Une approche active et collaborative »

    Les matières scolaires ne sont pas la seule chose que la Finlande veut voir évoluer dans son système. La manière d’enseigner va elle aussi changer. Généralement, les étudiants sont assis dans la classe, à écouter leur professeur et à attendre d’être interrogés. Le système finlandais veut mettre les élèves à contribution, en instaurant une approche plus collaborative, notamment en les faisant travailler en petits groupes pour résoudre des problèmes tout en améliorant leurs compétences communicationnelles.

    De meilleurs résultats selon certaines données

    Marjo Kyllonen, directrice de l’éducation d’Helsinki, présentera son plan de changement au conseil à la fin du mois, souligne The Independent. Pour elle, « ce n’est pas seulement Helsinki, mais l’ensemble de la Finlande qui doit faire place à ce changement. Nous avons besoin de repenser notre enseignement et de redessiner notre système, pour préparer nos jeunes à leur futur en leur transmettant des compétences utiles pour aujourd’hui et demain. Nous avons besoin d’un enseignement qui convient au XXIe siècle ».

    Les premières données issues des écoles qui ont adopté l’apprentissage transversal montreraient que les étudiants en tirent des bénéfices. Depuis l’instauration de la nouvelle méthode, les résultats s’améliorent. Environ 70 % des enseignants des écoles secondaires de la ville ont été formés à cette nouvelle méthode d’enseignement. Marjo Kyllonen espère que son plan de réforme sera mis en place dans toutes les écoles du pays d’ici 2020.



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    Prof Maclure : « Quitte à utiliser la clause dérogatoire » contre Loyola

    Jocelyn Maclure
    Pour Jocelyn Maclure, professeur à la Faculté de philosophie de l’Université Laval et membre de la commission Bouchard Taylor, la Cour suprême du Canada aurait commis une « erreur » dans le dossier Éthique et culture religieuse.

    Erreur et non, simplement, un souci plus scrupuleux de la liberté de religion ou une plus grande sensibilité aux arguments des appelants (nous pensons que dans ce genre de causes « philosophiques » la sensibilité des juges teinte fortement leurs décisions), non mais bien une erreur pour l’éminent et influent professeur.

    Loyola aurait concédé

    Pour Maclure, comme pour Antoine Robitaille du Devoir, Loyola aurait modifié sa demande initiale :


    C’est pourtant inexact. Dès avant le premier procès, en 2008, l’école Loyola écrivait à la ministre :

    Le directeur de Loyola, Paul Donovan, a toujours dit qu’il invitait des imams pour présenter l’islam et des rabbins pour présenter le judaïsme. En fait, Donovan a insisté dès le 9 mai 2008 qu’il était plus troublé par le volet éthique que par le volet culture religieuse ! Il déclarait ainsi en mai 2008 à la Gazette de Montréal que son « école n’enseignera pas certaines parties de la composante éthique du programme ». « Les enseignants sont supposés rester neutres vis-à-vis des points de vue éthiques que les élèves pourraient défendre. Mais il s’agit d’une “neutralité feinte, pas d’une réelle neutralité” », devait-il ajouter.

    L’école Loyola a donc été très — trop ? — raisonnable dès le début. Pourquoi l’État peut-il même imposer que la présentation d’autres religions soit respectueuse ? Qu’est-ce que cela veut même dire ? Comment espérer que des Coptes persécutés par les musulmans en Égypte représentent l’islam à la manière irénique des manuels québécois approuvés par le Monopole de l’Éducation ? Ces manuels sont très « respectueux » des religions exotiques, peu du christianisme (voir ici et ), sont-ils objectifs ?

    Répéter les mêmes vœux pieux... 

    Maclure ressasse la même vulgate : le cours ECR permettrait de comprendre le « phénomène » religieux.


    Le programme ECR est superficiel, il permettra au mieux de connaître des rites, quelques grands principes, quelques règles, mais pas de comprendre les religions présentées. Le cours est trop superficiel, n’occupe pas assez de temps pour vraiment se familiariser avec les religions et son but n’est pas de vraiment comprendre de l’intérieur les religions au programme, mais d’apprendre aux élèves à toutes les trouver d’une égale valeur, à les « respecter » comme disent certains. Valeur égale qui peut très bien signifier, en fin de compte, qu’elles sont toutes folkloriques ou de vieilles sornettes.

    ... et décréter que seul ECR peut assurer le bien commun

    Maclure semble aussi penser que seule la version « laïque » d’ECR peut assurer le bien commun et la reconnaissance de l’autre, sans preuve :

    Peut-être Maclure n’a-t-il pas bien suivi la cause en justice ?

    Ces objectifs font partie de la doctrine catholique, notamment de Dignitatis humanae... Loyola ne peut y être opposé, en fait elle promeut ces objectifs. Quand un des pères d’ECR, Georges Leroux, fut interrogé dans le cadre du procès Loyola, il dut admettre que rien dans le programme de Loyola n’empêchait d’atteindre les objectifs fixés par le programme ECR. C’est d’ailleurs ce qui a poussé les trois juges minoritaires de la Cour suprême à considérer que le programme Loyola est équivalent à ECR, voir par exemple :
     « [148] À notre avis, il n’y a rien d’inhérent aux objectifs du programme ÉCR (reconnaissance des autres et poursuite du bien commun) ou aux compétences qu’il vise à inculquer aux élèves (religions dans le monde, éthique et dialogue) qui exige que l’on adopte une démarche culturelle et non confessionnelle. »

    Ajoutons que rien ne prouve en fait que le programme ECR « laïque » atteindra ses objectifs, surtout s’il est « neutre », ou qu’il le fera mieux que le programme proposé par Loyola. Où sont les études, les faits qui permettraient de l’affirmer ?


    Maclure n’aime pas l’éthique de référence catholique dans une école catholique

    Pour Maclure, « Concrètement, la décision signifie que la morale catholique sera le système éthique de référence dans les discussions sur les dilemmes éthiques à l’école secondaire Loyola. » Cela lui semble très grave. Il déclare également que « Puisque Loyola est un collège privé jésuite, il est tout à fait normal qu’il fasse la promotion de la foi catholique. »

    Le philosophe déclare que « le volet “éthique”, pour sa part, n’est pas conçu comme un prêchiprêcha moraliste et vaguement humaniste. Il s’agit plutôt d’outiller les élèves pour qu’ils acquièrent les aptitudes à la réflexion automne [sic] et critique sur les questions éthiques, c’est-à-dire qu’ils apprennent à réfléchir par eux-mêmes et avec les autres sur les enjeux éthiques et politiques qui meublent la discussion publique. »

    Apprendre la logique, le dialogue, réfléchir, c’est bien. L’école Loyola a clairement dit qu’elle est d’accord avec cela. Mais pour Loyola la discussion comprend la présentation non neutre (la défense) par le professeur de la position catholique sur la question éthique posée. L’État ne peut l’empêcher de faire sans brimer sa liberté de religion. Car, en fin de compte, sur quoi aboutiront les discussions éthiques « neutres » en classe ? Des matchs nuls ? Une absence de conclusion selon que les participants adoptent une position éthique utilitariste, déontologiste, émotiviste, maximaliste, minimaliste, relativiste, égoïste, etc.

    Dans les classes « laïques » souhaitées par Maclure, il y a fort à parier qu’on aboutira à une absence de conclusion ou alors à une recherche du consensus guidée par un mimétisme entre les élèves ou la recevabilité des opinions selon leur rectitude politique. En général, le programme ECR souffre d’une aporie : comment peut-il former au vivre ensemble et à la reconnaissance d’autrui, tout en étant neutre ?

    Des parents qui envoient leurs enfants à des écoles comme Loyola pensent que c’est là un exercice tronqué, qu’il peut aboutir à un certain relativisme ou une légitimation de positions morales contraires à leur foi. Ils veulent compléter l’apprentissage de la logique, du dialogue par un enseignement des préceptes catholiques. Où est le problème, à moins que M. Maclure veuille expressément détacher les enfants des convictions de leurs parents ?

    Appel au collègue devenu ministre : utilise la clause « nonobstant » s’il le faut !

    Le billet du philosophe se termine par un appel au nouveau ministre de l’Éducation :

    Mise à jour : Le ministre rejette l’appel à la clause dérogatoire.





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