Texte de Jean-Louis Caccomo, maître de conférences en sciences économiques à l’université de Perpignan-Via Domitia.
Chaque année, la France consacre un budget important aux étudiants sans aucune évaluation de son résultat, juste pour faire du chiffre, faisant croire au passage à certains jeunes esprits qu’ils sont faits pour les études alors qu’ils sont tout bonnement égarés dans des filières de complaisance ou des formations sans débouchés. Je fais ce constat amer sans réjouissance aucune. Mais chaque année, à la rentrée, je suis convoqué pour les examens de rattrapage.
Et chaque année, j’observe que la moitié des étudiants, que l’on cherche pourtant à repêcher, ne s’est pas dérangée. Sur ceux qui sont présents, 60 % sont des étudiants étrangers dont la maîtrise du français est largement insuffisante.
Que l’on ne se méprenne pas sur mes propos. Je n’ai rien contre les étrangers et je consacre une grande partie de mon temps à la coopération universitaire à l’étranger, notamment dans les pays émergents, où je rencontre d’excellents étudiants (il faut dire que, dans la plupart de ces pays, le système d’enseignement supérieur est resté très sélectif, le plus souvent calqué sur le fonctionnement des universités américaines, de sorte que les étudiants refusés dans leur propre pays cherchent à tenter leur chance en France).
Mais il est manifeste qu’une partie non négligeable des étudiants étrangers utilise l’inscription à l’université pour obtenir une carte de séjour et contourner ainsi les lois sur l’immigration, la motivation pour les études étant plus que secondaire (puisque ces étudiants inscrits ne viennent pas en cours). À leurs yeux, la qualité et la générosité du modèle social exercent plus d’attraction que l’excellence annoncée de notre système d’enseignement supérieur.
On ne saurait leur reprocher d’être rationnels. C’est à nous de changer un système qui envoie des incitations qui ne sont pas de nature à faire émerger les meilleurs éléments et les meilleurs comportements.
L’administration universitaire est complice de cette immigration déguisée dans la mesure où la dotation budgétaire que reçoit chaque université est fonction du nombre d’inscriptions. Voilà comment on déchaîne un dérapage de la dépense publique sans aucune garantie de résultats en termes d’orientations et de compétences acquises, dans une spirale inflationniste que plus personne ne contrôle. Voilà pourquoi une réforme de l’université s’impose, basée sur la restauration véritable de l’autonomie et de la responsabilité.
Alors, si l’on est en droit de reprocher aux banques de prendre des risques inconsidérés en prêtant à des ménages insolvables (on leur reprochait jadis de ne prêter qu’aux riches…), on doit aussi épingler les comportements similaires en matière de capital humain, d’autant plus que ce dernier constitue notre capital le plus précieux.
En effet, au nom d’une conception erronée et caricaturale de la démocratisation de l’université, la collectivité se retrouve à financer des études d’individus qui n’en ont aucunement le profil, les capacités et les conditions intellectuelles requises. La dépense publique est un investissement (publiquement rentable à terme) dans la mesure où elle sert à financer les études de ceux — d’où qu’ils viennent — qui auront les aptitudes et la volonté de réussir. Ainsi, grâce à leurs compétences acquises à l’université et valorisées sur le marché du travail, ils deviendront demain de futurs contribuables, ce qui est une façon de rembourser la dépense initiale et de rentabiliser l’effort de la collectivité. Mais pour que cela fonctionne, encore faut-il évaluer et orienter, en d’autres termes, sélectionner.
La sélection n’est pas antidémocratique, tandis que les plus modestes feront les frais de la non-sélection. La sélection s’impose même moralement dans le système public où le coût des études est pris en charge par l’État. En effet, je ne peux pas être libre d’étudier ce que je veux avec l’argent des autres : si je veux être entièrement libre dans le choix de mon orientation, alors je finance intégralement le coût de mes études. Il en est de même pour une entreprise.
Si elle veut être totalement libre dans le choix de ses investissements, elle doit autofinancer ses projets. Si elle finance à crédit ou si elle ouvre son capital, elle devra rendre des comptes à sa banque pour obtenir un crédit ou à ses actionnaires pour continuer à bénéficier de l’accès au marché financier. Dans la mesure où l’on dépend des autres, on doit rendre des comptes aux autres. Dans le cas contraire, la dépense publique reste un pur gaspillage si elle n’engendre pas un flux de revenus futurs, prenant le risque d’augmenter la part de la population définitivement à la charge de la collectivité.
Dernier ouvrage de Jean-Louis Caccomo : Histoire des Faits Économiques, Ellipse, Paris, 18 août 2015, 304 pages, ISBN-13: 978-2340007017
Chaque année, la France consacre un budget important aux étudiants sans aucune évaluation de son résultat, juste pour faire du chiffre, faisant croire au passage à certains jeunes esprits qu’ils sont faits pour les études alors qu’ils sont tout bonnement égarés dans des filières de complaisance ou des formations sans débouchés. Je fais ce constat amer sans réjouissance aucune. Mais chaque année, à la rentrée, je suis convoqué pour les examens de rattrapage.
Et chaque année, j’observe que la moitié des étudiants, que l’on cherche pourtant à repêcher, ne s’est pas dérangée. Sur ceux qui sont présents, 60 % sont des étudiants étrangers dont la maîtrise du français est largement insuffisante.
Que l’on ne se méprenne pas sur mes propos. Je n’ai rien contre les étrangers et je consacre une grande partie de mon temps à la coopération universitaire à l’étranger, notamment dans les pays émergents, où je rencontre d’excellents étudiants (il faut dire que, dans la plupart de ces pays, le système d’enseignement supérieur est resté très sélectif, le plus souvent calqué sur le fonctionnement des universités américaines, de sorte que les étudiants refusés dans leur propre pays cherchent à tenter leur chance en France).
Mais il est manifeste qu’une partie non négligeable des étudiants étrangers utilise l’inscription à l’université pour obtenir une carte de séjour et contourner ainsi les lois sur l’immigration, la motivation pour les études étant plus que secondaire (puisque ces étudiants inscrits ne viennent pas en cours). À leurs yeux, la qualité et la générosité du modèle social exercent plus d’attraction que l’excellence annoncée de notre système d’enseignement supérieur.
On ne saurait leur reprocher d’être rationnels. C’est à nous de changer un système qui envoie des incitations qui ne sont pas de nature à faire émerger les meilleurs éléments et les meilleurs comportements.
L’administration universitaire est complice de cette immigration déguisée dans la mesure où la dotation budgétaire que reçoit chaque université est fonction du nombre d’inscriptions. Voilà comment on déchaîne un dérapage de la dépense publique sans aucune garantie de résultats en termes d’orientations et de compétences acquises, dans une spirale inflationniste que plus personne ne contrôle. Voilà pourquoi une réforme de l’université s’impose, basée sur la restauration véritable de l’autonomie et de la responsabilité.
Alors, si l’on est en droit de reprocher aux banques de prendre des risques inconsidérés en prêtant à des ménages insolvables (on leur reprochait jadis de ne prêter qu’aux riches…), on doit aussi épingler les comportements similaires en matière de capital humain, d’autant plus que ce dernier constitue notre capital le plus précieux.
En effet, au nom d’une conception erronée et caricaturale de la démocratisation de l’université, la collectivité se retrouve à financer des études d’individus qui n’en ont aucunement le profil, les capacités et les conditions intellectuelles requises. La dépense publique est un investissement (publiquement rentable à terme) dans la mesure où elle sert à financer les études de ceux — d’où qu’ils viennent — qui auront les aptitudes et la volonté de réussir. Ainsi, grâce à leurs compétences acquises à l’université et valorisées sur le marché du travail, ils deviendront demain de futurs contribuables, ce qui est une façon de rembourser la dépense initiale et de rentabiliser l’effort de la collectivité. Mais pour que cela fonctionne, encore faut-il évaluer et orienter, en d’autres termes, sélectionner.
La sélection n’est pas antidémocratique, tandis que les plus modestes feront les frais de la non-sélection. La sélection s’impose même moralement dans le système public où le coût des études est pris en charge par l’État. En effet, je ne peux pas être libre d’étudier ce que je veux avec l’argent des autres : si je veux être entièrement libre dans le choix de mon orientation, alors je finance intégralement le coût de mes études. Il en est de même pour une entreprise.
Si elle veut être totalement libre dans le choix de ses investissements, elle doit autofinancer ses projets. Si elle finance à crédit ou si elle ouvre son capital, elle devra rendre des comptes à sa banque pour obtenir un crédit ou à ses actionnaires pour continuer à bénéficier de l’accès au marché financier. Dans la mesure où l’on dépend des autres, on doit rendre des comptes aux autres. Dans le cas contraire, la dépense publique reste un pur gaspillage si elle n’engendre pas un flux de revenus futurs, prenant le risque d’augmenter la part de la population définitivement à la charge de la collectivité.
Dernier ouvrage de Jean-Louis Caccomo : Histoire des Faits Économiques, Ellipse, Paris, 18 août 2015, 304 pages, ISBN-13: 978-2340007017
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