Par Joris Karl:
Je vous conseille vivement le dernier James Bond.
J’insiste, car derrière l’image trompeuse d’un film d’action grand public, « Skyfall » [Chute du ciel, le ciel s'effondre] donne à réfléchir, sur notre univers mental, occidental, qui vibre et s’effrite, sous les coups d’une modernité incontrôlée.
Dans cet opus de très belle facture, le rôle titre est tenu par Daniel Craig : virilité suprême, visage d’européen à l’ancienne, taillé à la serpe, dans lequel deux yeux — bleu profond — préfacent la force d’âme. D’emblée, on le voit mal jouer dans une de ces productions françaises où l’acteur malingre et efféminé vivote entre problèmes de couple et aide aux sans-papiers.
Bond, c’est tout le contraire. C’est l’Europe musclée qui, même minoritaire, sait frapper du poing sur la table. [Note du carnet : la chanson du film clame : Que le ciel s'écroule, On se tiendra droits, Ensemble on le confrontera, Au crépuscule. Un nouvel Götterdämmerung ?]
À plusieurs reprises, le film voit s’affronter deux conceptions du monde. Dans l’une, incarnée par le nouveau chef de la Sécurité intérieure, démocratie et transparence se confondent, et les vieilles méthodes sont à jeter aux oubliettes. Finie la Realpolitik, place aux Bisounours…
Dans l’autre, portée par Bond, notre présent est plus noir que jamais et le danger rôde : « Maintenant nous n’affrontons plus des nations. Nous ne savons plus qui nous affrontons. » explique M, sa supérieure directe. Dans cette opposition, le sombre pessimisme de l’européen et traditionaliste 007, son alcoolisme culturel, son jonglage de beautés sexy, font face à l’étrange totalitarisme mou, personnifié par Madame la ministre, froide « politichienne » rappelant ces commissaires européens à la Viviane Reding.
Ce dernier James Bond, c’est aussi ce qui se dresse au milieu du film, l’image inquiétante d’un monde nouveau, nébuleuse populeuse et capricieuse qui s’est levée en extrême-Orient, qui nous fait sentir que notre temps, à nous Occidentaux, s’achève peut-être : c’est Shanghaï, stressante, impressionnante et enivrante ; c’est Macao la sexuelle et ses tables de jeu offertes comme des jambes écartées. Ici où tout est vénéneux, notre héros européen est sublime de sang-froid, un vrai spartiate mâtiné de british.
Le méchant, grand blond bizarre, total cynique, est l’ange maudit du nouveau désordre mondial, un ancien du MI 6 qui renie sa patrie. « L’amour de la patrie, c’est vieux jeu mais j’y crois encore », balance un provocant 007 !
Ce n’est pas un hasard si le film commence dans le chaos poussiéreux des rues stambouliotes. Deux heures 30 plus tard, le combat final se déroule sur les terres d’Écosse, au fond de l’Europe, où Bond retrouve l’antique manoir de son enfance. Pas un hasard non plus : une certaine géographie est dessinée, les contours d’une civilisation enfouie pour l’instant.
Quand Daniel Craig aura tourné les deux derniers Bond de son contrat, on parle de le remplacer par un acteur noir. Comme s’il fallait décidément tuer, jusqu’au dernier, les symboles d’une Europe puissance… [Note du carnet : Moneypenny, jouée auparavant par une Canadienne, a déjà été « modernisée » dans ce sens.]
Joris Karl, le 14 novembre 2012
Je vous conseille vivement le dernier James Bond.
J’insiste, car derrière l’image trompeuse d’un film d’action grand public, « Skyfall » [Chute du ciel, le ciel s'effondre] donne à réfléchir, sur notre univers mental, occidental, qui vibre et s’effrite, sous les coups d’une modernité incontrôlée.
Dans cet opus de très belle facture, le rôle titre est tenu par Daniel Craig : virilité suprême, visage d’européen à l’ancienne, taillé à la serpe, dans lequel deux yeux — bleu profond — préfacent la force d’âme. D’emblée, on le voit mal jouer dans une de ces productions françaises où l’acteur malingre et efféminé vivote entre problèmes de couple et aide aux sans-papiers.
Bond, c’est tout le contraire. C’est l’Europe musclée qui, même minoritaire, sait frapper du poing sur la table. [Note du carnet : la chanson du film clame : Que le ciel s'écroule, On se tiendra droits, Ensemble on le confrontera, Au crépuscule. Un nouvel Götterdämmerung ?]
Après une attaque sur son quartier général, le MI-6 doit se terrer dans le sous-sol londonien |
À plusieurs reprises, le film voit s’affronter deux conceptions du monde. Dans l’une, incarnée par le nouveau chef de la Sécurité intérieure, démocratie et transparence se confondent, et les vieilles méthodes sont à jeter aux oubliettes. Finie la Realpolitik, place aux Bisounours…
Ce dernier James Bond, c’est aussi ce qui se dresse au milieu du film, l’image inquiétante d’un monde nouveau, nébuleuse populeuse et capricieuse qui s’est levée en extrême-Orient, qui nous fait sentir que notre temps, à nous Occidentaux, s’achève peut-être : c’est Shanghaï, stressante, impressionnante et enivrante ; c’est Macao la sexuelle et ses tables de jeu offertes comme des jambes écartées. Ici où tout est vénéneux, notre héros européen est sublime de sang-froid, un vrai spartiate mâtiné de british.
L'hypermodernité de Chang-haï (Shanghai)
Le méchant, grand blond bizarre, total cynique, est l’ange maudit du nouveau désordre mondial, un ancien du MI 6 qui renie sa patrie. « L’amour de la patrie, c’est vieux jeu mais j’y crois encore », balance un provocant 007 !
Bond, tel un nouvel Antée, se réfugie dans un vieux manoir, sur sa terre, avec sa vieille Aston Martin. |
Quand Daniel Craig aura tourné les deux derniers Bond de son contrat, on parle de le remplacer par un acteur noir. Comme s’il fallait décidément tuer, jusqu’au dernier, les symboles d’une Europe puissance… [Note du carnet : Moneypenny, jouée auparavant par une Canadienne, a déjà été « modernisée » dans ce sens.]
Joris Karl, le 14 novembre 2012
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1 commentaire:
Intéressant et bien vu. Mais est-ce que le Québec n'est pas aussi entré dans un Déclin tranquille ?
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