La mairesse de Montréal Valérie Plante souligne le 78e anniversaire du bombardement d'Hiroshima, mais pas le 322e anniversaire de la Grande Paix de Montréal. Pourquoi ?
— Rémi Villemure (@RemiVillemure) August 7, 2023
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Ce traité met fin à plusieurs décennies de conflits opposant les Iroquois aux Français et à leurs alliés autochtones. Les Français de Nouvelle France, alliés des Hurons entre autres, se heurtent durant tous les premiers temps de la colonie à l’hostilité des Iroquois. À la fin du XVIIe siècle, des délégations de nombreuses nations amérindiennes arrivent à Montréal à l’été 1701. Le 4 août, la Grande paix de Montréal est signée. Tous s’engagent à favoriser le dialogue au conflit, et surtout les Iroquois garantissent leur neutralité en cas de conflit entre Français et Anglais.
Trente nations, dont les Iroquois des cinq nations envoient au total 1 300 délégués pour signer la paix avec les Français à Montréal : avec la promesse de rester neutre dans d’éventuelles guerres entre Anglais et Français. Les représentants de chacune des nations apposent la marque de leur tribu au bas du traité, le plus souvent un animal. Les nations s’engagent aussi à vivre en paix entre elles. En cas de conflit, c’est le Gouverneur général de la Nouvelle-France qui servira d’intermédiaire et d’arbitre. Un grand banquet achève cette cérémonie.
À compter de la signature du traité, le commerce et les expéditions de découvertes peuvent reprendre en toute quiétude. Le sieur de Cadillac quitte Montréal pour aller fonder dans la région des Grands Lacs le poste de traite du Détroit, promis à un bel avenir, tandis que les missionnaires jésuites reprennent leurs missions spirituelles dans les « pays d’en haut ».
Au niveau diplomatique, la paix de Montréal apparaît comme un fait unique dans toute l’histoire de l’Amérique. Détail étonnant, celui-ci est toujours valide et reconnu comme tel par les communautés amérindiennes.
À l’inverse de la politique espagnole marquée par l’asservissement des indigènes et dénoncée par les auteurs de l’époque comme Las Casas, les Français choisirent en Nouvelle-France de privilégier les alliances et un modus vivendi globalement respectueux des différents peuples. Certes, les conflits furent nombreux et sanglants avec les nations amérindiennes et ils ne cessèrent pas après 1701, mais jamais ils ne s’inscrivirent dans les dérives de la politique espagnole ou anglaise.
De fait, de tous les colonisateurs d’Amérique, seuls les Français n’ont ni exterminé les autochtones ni tenté de les réduire en esclavage ou de les repousser dans des réserves. On pourrait même arguer que la fonction « officielle » d’évangélisation des autochtones conférée à la Nouvelle-France constitue de la part des Français une admission tacite d’égalité entre les « blancs » et les autochtones, en les considérant « dignes » d’être évangélisés. Il ne faut toutefois pas oublier que l’économie ou la sécurité de la Nouvelle-France dépendait d’une bonne entente avec les autochtones, les Français n’étant tout simplement pas assez nombreux pour se passer de ces précieux alliés.
Copie du traité de paix de 1701
(Le document original du traité de paix de 1701 est conservé aux Archives nationales d’outre-mer.)
Pictogrammes des nations signataires :
- Ouentsiouan représente la nation iroquoise des Onontagués et signe un échassier.
- Pour les Tsonnontouan, c’est Tourengouenon qui appose la signature de la tortue.
- Pour les Onneeiouts, la signature représente une fourche au milieu de laquelle se trouve une pierre.
- Chez les Goyogouins (« peuple de la grande pipe »), le dessin d’une pipe va de soi !
- La marque de Kondiaronk, dit le Rat [un rat musqué], figure sur le traité de 1701. Un autre chef huron a pu apposer cette marque au nom de ce grand chef, mort deux jours avant la signature du traité.
- L’ours, la signature du chef Kinongé, dit le Brochet, pour les Outaouais du Sable.
- La marque des Abénaquis de l’Acadie, par le chef Mescouadoué.
- L’ours, la marque des Outaouais Sinagos.
- Pour les Gens du Sault, l’ours également, signature apposée par Haronhiateka.
- La signature du chef des Gens de la Montagne est un chevreuil.
- Le chef Kileouiskingié signe d’un poisson pour les Outaouais Kiskarons.
- La fourche représente le lieu où vivent les Outaouais de la Fourche, à la confluence de trois rivières.
- Représentés par Onanguicé, chef pouteouatami, les Mississagués [nation ojibwée] signent d’un oiseau-tonnerre.
- Les Amikoués apposent la marque du castor.
- Pour les Sauteux [Ojibwés], le chef Ouabangué appose la marque d’une grue.
- Chez les Algonquins, on trouve deux signatures : un échassier ou une grue et, à côté, un être humain.
- Une perche surmontée d’un scalp sert de signature pour le village des Pangichéas [Piankashaws].
- La marque de Chichicatalo, chef très respecté chez les Miamis, regroupe deux symboles, dont une grue.
- La marque du chef Outilirine pourrait représenter les Cris. En langue crie, le suffixe — irin signifie « homme ».
- Représentés par Onanguicé, les Koueras Koueatenons [groupe illinois] signent d’un arc et d’une flèche.
- La marque du village des Peorias [nation illinoise] est une tortue à longue queue.
- L’emblème des Tapouaroas [groupe illinois].
- L’emblème des Monisgouenars [nation illinoise], établi à la rivière des Moines.
- Le village des Marouas [groupe illinois], signe d’une grenouille.
- Pour les Pouteouatamis, la marque d’un chicot et trois racines.
- Pour les Kaskaskias [nation illinoise], une plume encochée.
- La marque du village des Ouiatanons [nation miamie] est une carrière.
- L’esturgeon est la marque des Sakis [Sauks].
- Chez les Outagamis, ou Renards, la signature est celle du… renard.
- L’oiseau-tonnerre représente le symbole clanique des Puants.
- La marque des Malominis [Folles Avoines] est celle d’un oiseau-tonnerre tenant une tige de folle avoine.
- Le chevalier de Callière, Brochart de Champigny, et autres.
[Notes tirées de La Grande Paix, Chronique d’une saga diplomatique, par Alain Beaulieu et Roland paru à Montréal, Éditions Libre Expression, 2001, p. 109-111.]
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