Relevons ici simplement l'inénarrable Un lobby catholique réclame un accommodement de Clairandrée Cauchy dont le titre contenait déjà trois imprécisions : lobby à un sens précis pour la Loi québécoise (la coalition en question n'en est pas un), cette coalition n'est pas catholique et regroupe des personnes non catholiques (dont M. Caldwell mentionné dans l'article ci-dessous) et il ne s'agit pas d'un accommodement, mais d'un droit et d'une liberté religieuse retirée récemment, mais laissons M. Durand rappeler les faits.
Mme Marie-Andrée Chouinard, vous semblez trouver outrancière la position de la Coalition pour la liberté en éducation [à propos du cours d'éthique et de culture religieuse]. Il ne faudrait quand même pas sombrer dans l'exagération.
Vous parlez de laïcité. Mais vous savez bien que la laïcité admet des modèles multiples, y compris des options en enseignement religieux confessionnel, comme dans la plupart des pays européens, y compris dans une partie de la France (Alsace-Moselle et certains départements d'outre-mer).
Le livre du sociologue et historien français Émile Poulat est très explicite sur l'absence de définition univoque de la laïcité et sur la multiplicité de modèles possibles (Notre laïcité publique. La France est une république laïque, 2003). Le Rapport Stasi, en 2003 (du nom du président de la Commission mise sur pied par le président de la République française pour analyser la question du port des signes religieux dans les écoles), va dans le même sens, affirmant que chaque État aborde le défi de la laïcité « avec la tradition qui est la sienne », y compris « le respect des habitudes et des traditions locales », en sachant « aménager des exceptions », faire «des nuances», admettre « des limites ». Et le rapport de préciser que l'approche de la Cour européenne «repose sur une reconnaissance des traditions de chaque pays, sans chercher à imposer un modèle uniforme de relations entre l'Église et l'État».
Plus spécifiquement, le rapport Stasi n'a pas demandé de changer le système d'options en Alsace et Lorraine « auquel est particulièrement attachée la population de ces trois départements ». De même qu'on ne l'avait pas enlevé en 1919 quand l'Alsace-Moselle est redevenue française parce qu'une grande majorité de la population tenait à sa particularité et préférait ne pas voir appliquée intégralement la loi de séparation de 1905.
Vous parlez d'une «décision collective de laïciser l'école, vieille de dix ans». Vous référez sans doute aux États généraux de 1995-96. Or, dans un premier temps, lors des consultations générales à travers le Québec, la majorité des participants étaient contre la déconfessionnalisation. Hors de Montréal, aucun des mémoires ne la réclamait. Il y eut beaucoup de témoignages en faveur de la pastorale scolaire.
Selon le commissaire dissident Gary Caldwell, le résumé produit par Communication-Québec était biaisé. Dans un deuxième temps, après un changement de ministre et de personnel jouxté à un changement de mandat, ainsi qu'une nouvelle consultation auprès de personnes ciblées, la Commission a prôné la nécessité de la déconfessionnalisation (revue Égards, no 15, printemps 2007).
Dans une entrevue accordée au Devoir, Jean Garon, le ministre de l'Éducation qui avait lancé les États généraux, a dénoncé le changement de mandat, le processus suivi et certaines conclusions. Dans le cas de la déconfessionnalisation, affirmait-il, «ce sont les commissaires seuls qui ont décidé» contre l'avis de la population (Le Devoir, octobre 1996). Incidemment, si les régions du Québec sont effectivement différentes, pourquoi imposer une voie unique ?
Vous êtes aussi insultée du fait que la Coalition parle «d'atteinte aux libertés fondamentales». Mais vous souvenez-vous que pour arriver à la situation actuelle, il a fallu amender deux chartes des droits ? L'article 93 de la Charte fédérale, sous de fausses représentations (engagement du gouvernement à garder des écoles confessionnelles); et l'article 29 de la Charte québécoise, presque en catimini (évoqué lors de la commission parlementaire, l'amendement a été inclus dans la dernière version du projet de loi 95 présenté le matin du 15 juin et voté en moins d'une heure sans vote nominal et donc sans qu'on sache la proportion de députés en faveur).
Savez-vous qu'en 2007-08, selon les statistiques du Secrétariat aux affaires religieuses, une forte proportion de parents choisissent encore les cours d'enseignement moral et religieux catholique et protestant : 76 % au primaire et 57 % au secondaire. Si on trouvait que le choix des options n'était pas clair, il eut été si simple d'ajouter des éléments de culture religieuse à l'option Formation morale et d'observer l'évolution de la population, plutôt que d'imposer d'autorité un cours uniforme.
Bref, si on veut «éviter que cette lutte n'atterrisse devant les tribunaux», comme vous le dites, le plus simple n'est-il pas de trouver une autre solution plus respectueuse de la diversité de la population ?
2 commentaires:
Et il y a des gens qui prétendent que le Devoir est un journal de qualité...
Alors qu'il ne s'agit que du feuillet paroissial de l'élite bobo montréalaise si médiocre et si prévisible.
À ce sujet, Micheline Milot, professeur en sociologie des religions à l'UQAM définit clairement le concept de laïcité.
On peut écouter une entrevue avec l'auteur à propos de son dernier livre (La laïcité en 25 question, éd. Novalis, 2008) à cette endroit :
http://www.publications-universitaires.qc.ca/?p=40
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