mercredi 1 juillet 2020

Le climat change mais ce n'est pas la fin du monde, ni même le principal problème écologique

Michael Shellenberger est un « héros de l’environnement » pour l’hebdomadaire Time et président de Environmental Progress, une organisation indépendante de recherche et de politique. Il vient de publier Apocalypse Never : Why Environmental Alarmism Hurts Us All qui dénonce le catastrophisme climatique.

Michael Shellenberger se bat depuis des décennies pour une planète plus verte. Il a participé à sauver les derniers séquoias non protégés du monde.  Il a également dirigé avec succès les efforts des climatologues et des militants pour maintenir les centrales nucléaires en fonctionnement, pour limiter une augmentation des émissions de CO2.




Nous proposons ci-dessous la traduction d’un article dans Quillette où il explique ce qui l’a mené à écrire ce livre.

Au nom des écologistes du monde entier, je voudrais présenter mes excuses officielles pour la peur climatique que nous avons créée au cours des 30 dernières années.

Le climat change. Ce n’est pas la fin du monde. Ce n’est même pas le problème environnemental le plus grave. Je peux paraître étrange quand je dis cela. Pourtant, je suis un activiste climatique depuis 20 ans et un écologiste depuis 30 ans.

Mais en tant qu’expert en énergie auquel le Congrès a demandé de témoigner à titre d’expert objectif et invité par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) à servir de réviseur expert pour son prochain rapport d’évaluation, je me sens obligé de présenter mes excuses pour la façon dont nous, écologistes, avons induit le public en erreur.

Voici quelques faits que peu de gens connaissent :
  • Les humains ne provoquent pas une « sixième extinction de masse » ;
  • L’Amazonie n’est pas « le poumon de la planète » ;
  • Le changement climatique n’aggrave pas les catastrophes naturelles ;
  • Les incendies ont diminué de 25 % dans le monde depuis 2003 ;
  • La quantité de terres que nous utilisons pour produire la viande — la plus grande utilisation des terres par l’humanité — a diminué d’une superficie presque aussi grande que l’Alaska ;
  • L’accumulation de combustible ligneux (la broussaille) et davantage de maisons construites près des forêts, et non le changement climatique, explique pourquoi il y a davantage d’incendies plus dangereux en Australie et en Californie ;
  • Les émissions de carbone diminuent dans la plupart des pays riches et diminuent en Grande-Bretagne, en Allemagne et en France depuis le milieu des années 1970 [Ces émissions ont été déplacées avec les emplois industriels associés vers l’Asie.] ;
  • Les Pays-Bas sont devenus riches, pas pauvres tout en s’adaptant à la vie sous le niveau de la mer ;
  • Nous produisons 25 % de nourriture en plus que ce dont nous avons besoin et les excédents alimentaires continueront d’augmenter à mesure que le monde se réchauffera ;
  • La perte d’habitat et la mise à mort directe d’animaux sauvages sont des menaces plus importantes pour les espèces que le changement climatique ;
  • Utiliser du combustible ligneux (du bois) est bien pire pour les humains et la faune que les combustibles fossiles ;
  • La prévention de futures pandémies nécessite une agriculture qui sera davantage « industrielle » et non le contraire.
Je sais que les faits énoncés ci-dessus sonneront comme du « déni climatique » pour beaucoup de gens.

Mais cela ne démontre que la puissance de l’alarmisme climatique.

En réalité, les faits ci-dessus proviennent des meilleures études scientifiques disponibles, y compris celles menées par le GIEC ou acceptées par le GIEC, l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) et d’autres organismes scientifiques de premier plan.

Certaines personnes s’imagineront, en lisant ceci, que je suis un anti-environnementaliste de droite. Je ne le suis pas. À 17 ans, j’ai vécu au Nicaragua pour montrer ma solidarité avec la révolution socialiste sandiniste. À 23 ans, j’ai recueilli des fonds pour les coopératives de femmes guatémaltèques. Au début de la vingtaine, je vivais dans la semi-Amazonie, faisant des recherches avec de petits agriculteurs luttant contre les invasions de leurs terres. À 26 ans, j’ai participé à la dénonciation les mauvaises conditions de travail dans les usines Nike en Asie.

Je suis devenu environnementaliste à 16 ans lorsque j’ai organisé une collecte de fonds pour Rainforest Action Network. À 27 ans, j’ai aidé à sauver les derniers séquoias séculaires non protégés de Californie. Dans la trentaine, j’ai défendu les énergies renouvelables et j’ai réussi à persuader l’administration Obama d’y investir 90 milliards de dollars. Au cours des dernières années, j’ai aidé à éviter de remplacer suffisamment de centrales nucléaires par des combustibles fossiles pour éviter une forte augmentation des émissions de gaz à effets de serre.

Mais jusqu’à l’année dernière, j’ai surtout évité de dénoncer la peur du climat. En partie parce que j’étais gêné. Après tout, je suis aussi coupable d’alarmisme que n’importe quel autre environnementaliste. Pendant des années, j’ai qualifié le changement climatique de menace « existentielle » pour la civilisation humaine et l’ai parlé de « crise ».

Mais surtout, j’avais peur. Je suis resté silencieux au sujet de la campagne de désinformation climatique parce que j’avais peur de perdre des amis et du financement. Les quelques fois où j’ai appelé le courage de défendre la science du climat contre ceux qui la dénaturent, j’ai subi des conséquences sévères. Et donc je me suis surtout tenu à côté et je n’ai pratiquement rien fait alors que mes collègues environnementalistes terrifiaient le public.

Je suis même resté les bras croisés alors que des gens à la Maison-Blanche et de nombreux médias ont tenté de détruire la réputation et la carrière d’un scientifique exceptionnel, d’un homme bon et d’un de mes amis, Roger Pielke, Jr., un démocrate et environnementaliste progressiste de longue date qui a témoigné en faveur d’une réglementation carbone. Pourquoi ont-ils fait ça ? Parce que ses recherches prouvent que les catastrophes naturelles n’empirent pas.

Mais, l’année dernière, les choses sont devenues incontrôlables.

Alexandria Ocasio-Cortez a déclaré : « Le monde prendra fin dans 12 ans si nous ne nous attaquons pas au changement climatique. » Le groupe environnemental le plus en vue de Grande-Bretagne a déclaré que « le changement climatique tue les enfants ».

Le journaliste écologiste le plus influent du monde, Bill McKibben, a qualifié le changement climatique de « plus grand défi auquel les humains aient jamais été confrontés » et a déclaré qu’il « anéantirait les civilisations ». Les journalistes traditionnels ont rapporté à plusieurs reprises que l’Amazonie était « le poumon de la planète » et que la déforestation s’apparentait à l’explosion d’une bombe nucléaire.

En conséquence, la moitié des personnes interrogées dans le monde l’année dernière ont déclaré qu’elles pensaient que le changement climatique entraînerait l’extinction de l’humanité. Et en janvier, un enfant britannique sur cinq a déclaré aux sondeurs qu’il faisait des cauchemars sur le changement climatique. Que vous ayez ou non des enfants, vous devez savoir à quel point c’est faux.

J’avoue que cela me touche probablement parce que j’ai une fille adolescente. Après lui avoir parlé des faits scientifiques, elle a été rassurée. Mais ses amis sont profondément mal informés et donc, naturellement, effrayés. J’ai donc décidé que je devais parler. Je savais qu’écrire quelques articles ne serait pas suffisant. J’avais besoin d’un livre pour présenter correctement toutes les preuves.

Et donc mes excuses formelles pour notre alarmisme viennent sous la forme de mon nouveau livre, Apocalypse Never : Why Environmental Alarmism Hurts Us All All. Il est basé sur deux décennies de recherche et trois décennies d’activisme environnemental. Avec 400 pages, dont 100 de notes et références, Apocalypse Never couvre le changement climatique, la déforestation, les déchets plastiques, l’extinction des espèces, l’industrialisation, la viande, l’énergie nucléaire et les énergies renouvelables.

Quelques faits saillants du livre :
  • Les usines et l’agriculture moderne sont les clés de la libération humaine et du progrès environnemental ;
  • La chose la plus importante pour sauver l’environnement est de produire plus de nourriture, en particulier de la viande, sur moins de terres ;
  • La chose la plus importante pour réduire la pollution atmosphérique et les émissions de carbone est de passer du chauffage au bois à celui au charbon, puis au pétrole, puis au gaz naturel et finalement l’uranium ;
  • 100 % d’énergies renouvelables nécessiteraient d’augmenter la superficie utilisée pour l’énergie de 0,5 % aujourd’hui à 50 % ;
  • Nous devrions demander que les villes, les fermes et les centrales électriques aient des densités de puissance plus élevées, et non plus faibles ;
  • Le végétarisme réduit nos émissions de moins de 4 % ;
  • Greenpeace n’a pas sauvé les baleines, le passage de l’huile de baleine au pétrole et à l’huile de palme ;
  • Le bœuf « fermier » nécessiterait 20 fois plus de terres et produirait 300 % d’émissions en plus ;
  • Le dogmatisme de Greenpeace a aggravé la fragmentation des forêts de l’Amazonie ;
  • L’approche colonialiste de la conservation des gorilles au Congo a produit un contrecoup qui pourrait avoir entraîné la mort de 250 éléphants.
Pourquoi avons-nous tous été induits en erreur ?

Dans les trois derniers chapitres d’Apocalypse Never, je dénonce les motivations financières, politiques et idéologiques. Les groupes environnementaux ont accepté des centaines de millions de dollars provenant du lobby des combustibles fossiles. Des groupes motivés par des croyances anti-humanistes ont forcé la Banque mondiale à cesser d’essayer de mettre fin à la pauvreté et de rendre la pauvreté « durable ». La peur du déclassement social, la dépression et l’hostilité à la civilisation moderne sont à l’origine d’une grande partie de l’alarmisme.

Une fois que vous vous rendez compte à quel point nous avons été mal informés, souvent par des personnes aux motivations manifestement peu recommandables ou malsaines, il est difficile de ne pas se sentir dupé. Apocalypse Never changera-t-il quelque chose ? Il y a certainement des raisons d’en douter.

Les médias font des déclarations apocalyptiques sur le changement climatique depuis la fin des années 80 et ne semblent pas disposés à s’arrêter. L’idéologie derrière l’alarmisme environnemental — le malthusianisme — a été démystifiée à plusieurs reprises pendant 200 ans et pourtant elle est plus puissante que jamais.

Mais il y a aussi des raisons de croire que l’alarmisme environnemental, s’il ne prend pas fin, verra sa puissance culturelle s’émousser. La pandémie de coronavirus est une véritable crise qui met en perspective la « crise » climatique. Même si vous pensez que nous avons réagi de manière excessive, COVID-19 a tué près de 500 000 personnes et bouleversé les économies du monde entier.

Les institutions scientifiques, parmi lesquelles l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et le GIEC, ont sapé leur crédibilité par leur instrumentalisation politicienne répétée de la science. Leur existence et leur pertinence futures dépendent de nouveaux dirigeants et de réformes sérieuses. Les faits ont encore de l’importance et les médias sociaux permettent à un plus large éventail de voix nouvelles et indépendantes de contourner les journalistes environnementaux alarmistes dans les médias traditionnels.

Les nations reconsidèrent ouvertement leur intérêt propre et s’éloignent du malthusianisme et du néolibéralisme, ce qui est bon pour le nucléaire et mauvais pour les énergies renouvelables. Les preuves sont accablantes que notre civilisation fortement consommatrice d’énergie est bien meilleure pour les gens et la nature qu’une civilisation faiblement consommatrice d’énergie vers laquelle les alarmistes climatiques veulent nous ramener.

Les invitations du GIEC et du Congrès que j’ai reçues sont des signes d’une ouverture croissante à une nouvelle réflexion sur le changement climatique et l’environnement. Un autre signe encourageant a été la réponse à la publication de mon livre de la part de climatologues, d’écologistes et de spécialistes de l’environnement. « Apocalypse Never est un livre extrêmement important », écrit Richard Rhodes, auteur primé par le prix  Pulitzer pour The Making of the Atomic Bomb. « Il s’agit peut-être du livre le plus important jamais écrit sur l’environnement », déclare l’un des pères de la science climatique moderne, Tom Wigley.

[...] L’ancien chef de The Nature Conservancy, Steve McCormick [a écrit au sujet d’Apocalypse Never]:  « Shellenberger nous livre une dose d’“amour vache” : il remet en cause nos croyances orthodoxes bien ancrées, nos mentalités rigides et autodestructrices. Apocalypse Never lance à l’occasion des piques, mais elles sont fondées sur des preuves,  elles sont bien argumentées qui aideront à développer le “muscle mental” dont nous avons besoin pour envisager et concevoir non seulement un avenir plein d’espoir, mais réalisable. »

Voilà ce que j’espérais accomplir en écrivant ce livre. Si vous êtes arrivé jusqu’ici, j’espère que vous conviendrez que ce n’est peut-être pas aussi bizarre qu’un écologiste de longue date, progressiste et militant pour le climat ait ressenti le besoin de dénoncer l’alarmisme.

J’espère en outre que vous accepterez mes excuses.

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