samedi 21 septembre 2019

Trudeau « mecsplique » à une femme qu'il ne faut plus dire mankind (« humanité ») mais peoplekind (« personnité »)

Mise à jour du vendredi 9 février 2018

Butts et Trudeau, étudiants à McGill
Un des principaux conseillers de Justin Trudeau, Gerald Butts, a fait entendre que ceux qui ont ri de « peoplekind » seraient des nazis. Cette remarque n’est pas restée sans réponse de la part de certains journalistes, comme Piers Morgan, qui s’étaient moqué de ce néologisme frappé au coin de la rectitude lexicale la plus ridicule.

Gerald Michael Butts est le principal conseiller politique du Premier ministre Justin Trudeau. Depuis novembre 2015, il est le secrétaire principal du Premier ministre. De 2008 à 2012, il a été président et chef de la direction du World Wildlife Fund Canada, un organisme mondial de conservation de la faune. En 2014, le magazine Maclean’s a déclaré que Butts était le quatorzième Canadien le plus puissant. Il est diplômé (maîtrise) en littérature anglaise de l’Université McGill à Montréal. C’est à McGill qu’il a été présenté à Justin Trudeau par un ami commun.

L’hilarité générale provoquée par le commentaire ridicule de son patron suscita rapidement ce gazouillis de sa part :
La leçon à tirer de cette blague déformée par Infowars et d’autres amis nazis d’extrême droite de The Rebel, c’est qu’ils nous écoutent. Allez l’ #ÉquipeTrudeau.


Le célèbre journaliste britannique Piers Morgan qui avait osé se moquer du néologisme de Justin Trudeau n’a pas goûté ce tweet. Agacé de l’amalgame fort peu subtil que Butts fait entre les nazis et les détracteurs de Trudeau, il répondit :
a) Je ne suis pas nazi.
b) Ce n’était pas une blague.
c) Si vous êtes l’un des principaux conseillers de @JustinTrudeau, pas étonnant qu’il fasse autant de gaffes.


Piers Morgan a poursuivi en faisant remarquer que

« Le monde entier a ri de votre patron et de son #peoplekind absurdement politiquement correct qui suinte l'exhibitionnisme vertueux [le pharisaïsme]. Si vous décidez de traiter tous ceux qui ont ri de nazis, alors je vous suggère poliment que vous êtes un demeuré absolu. »


Piers Morgan finit par se demander « s’il ne manquait pas une case à Butts. Incroyable qu’un conseiller aussi proche de votre Premier ministre puisse lancer de telles âneries aussi dangereusement incendiaires en son nom. »

Mise à jour de ce mercredi 7 février

Justin Trudeau a affirmé avoir fait une « blague stupide », la semaine dernière, quand il a proposé en anglais l’utilisation du terme « peoplekind » plutôt que « mankind », des propos critiqués autant au Canada qu’à l’international.

« J’ai fait une blague stupide il y a quelques jours », a déclaré le Premier ministre du Canada, mercredi matin à son arrivée au caucus libéral.

Le député conservateur Gérard Deltell a jugé mercredi matin que Justin Trudeau a fait la bonne chose en s’excusant pour sa « blague niaiseuse », mais il doute de la sincérité du Premier ministre.

« Ça va dans la logique de M. Trudeau de neutraliser à peu près tout », a-t-il observé, rappelant que les libéraux ont fait changer les paroles de l’hymne national pour le rendre plus inclusif, un changement dénoncé par l’opposition officielle.

Billet originel

Lors d’une assemblée publique à l’Université MacEwan à Edmonton, vendredi dernier, le Premier ministre Justin Trudeau a interrompu une femme qui avait utilisé le mot « mankind » (« humanité »).

Il a alors mecspliqué [1] que « nous préférons le terme de “peoplekind” » (quelque chose comme « personnité ») puisque le terme « mankind » en anglais fait référence à l’homme (“man”).   

Justin Trudeau a expliqué que cela serait plus « inclusif », un peu comme vouloir remplacer « patrimoine » par « héritage culturel » (une idée de Québec solidaire) en français. Certaines féministes, encore plus radicales, préconisent « matrimoine ».

Notons que nous ne savons pas trop qui est « nous » dans cette remarque de Justin Trudeau. Aucun site gouvernemental canadien ne semble utiliser « peoplekind »... Alors qu’on trouve près de 10 000 occurrences de mankind sur ces mêmes sites... En fait, nous soupçonnons M. Trudeau d’avoir oublié que « humankind » ou « humanity » sont parfois proposés comme alternative non « genrée » en anglais par la fonction publique canadienne.

Remarquons enfin que la dame interrompue pour des raisons de correctivisme genré avait aussi utilisé le terme « d’amour maternel », mais Justin Trudeau ne l’a pas reprise ici (« people’s love » ?)

La remarque du Premier ministre adulé a été aussitôt applaudie de façon nourrie par salle y compris par la jeune femme qui avait laissé glisser le rétrograde « mankind ». La jeune femme en question, Aimee, est membre de l’Église de Dieu société de la mission mondiale, une église féministe controversée fondée en Corée du Sud. Cette église croit en Dieu le père et Dieu la mère.

La remarque de Trudeau a été nettement moins bien accueillie ailleurs, plusieurs commentateurs dans l’anglosphère ont vertement critiqué cette « rectitude linguistique » qui semble primer sur le fond chez Justin Trudeau. L’animateur britannique Piers Morgan a qualifié M. Trudeau d’« imbécile de première, côté rectitude politique ».



L’émission « Fox and Friends », qui serait suivie tous les matins par le président Trump, a consacré à cette « affaire » tout un segment, mardi matin. Les trois animateurs ont interviewé le professeur de psychologie de l’Université de Toronto, Jordan Peterson, connu pour sa volonté de ne pas plier devant les dictats et les modes de la « rectitude politique post-moderne et marxiste ». Le professeur Jordan Peterson a qualifié cette interruption d’assez typique et de pavlovienne : « Je crains que la pensée de Premier ministre ne soit capable de suivre que quelques pistes idéologiques très étroites. Nous en avons vu les prémices quand M. Trudeau a constitué son cabinet. Il tenait à ce que 50 % des postes reviennent à des femmes malgré le fait que seuls près de 22 % des députés sont des femmes. Il était plus facile pour lui d’utiliser ce critère que de sélectionner ses ministres en ne considérant que les compétences nécessaires. On a déjà vu pas mal de ce genre de comportements. Mais là on a affaire à un exemple extrême. Trudeau écoutait une femme qui voulait sérieusement discuter d’une question importante et il est intervenu pour faire une déclaration idéologique au milieu de ce dialogue. Cela trahit clairement, à mon sens, sa façon de penser. Mais je ne crois pas qu’il pense, son esprit fonctionne à l’idéologie. Et il en accepte le résultat sans se poser de questions. Et nous allons vraiment en payer le prix au Canada d’une manière insoupçonnée pour l’instant. »

Les réseaux sociaux se sont copieusement moqués du « peopleskind »,
ici Manhattan est rebaptisé « Peoplehattan »

Pour l’universitaire et chroniqueur québécois Mathieu Bock-Côté, « Immédiatement, ivre de vertu inclusive, [Trudeau] a corrigé la demoiselle en lui disant qu’elle devrait plutôt parler de “peoplekind”. Fiou ! Un terme “genré” venait d’être banni de l’assemblée, et on s’en doute, l’égalité entre les sexes s’est mieux portée. On lutte contre les discriminations un mot à la fois ! [...] Mais nous ne sommes pas ici simplement devant les lubies amusantes d’un Premier ministre qui confond la modernité et l’ouverture d’esprit avec l’adhésion à toutes les modes idéologiques. Ce qui se dévoile, c’est la tentation de plus en plus forte de soumettre le langage à une perpétuelle reconstruction idéologique. Quels sont les prochains mots que nous bannirons ? »

Comment parler anglais comme Justin Trudeau :
le Manitoba devient le Personnetoba

La CBC a interrogé un lexicographe et, apparemment, M. Trudeau ne serait pas le premier à utiliser le mot « peopleskind ». Même si le mot est très rare, le lexicographe ajoute « J’en ai trouvé une attestation assez tôt en 1988 dans un livre sur l’écriture non sexiste. Et ce livre citait en fait quelqu’un d’autre, disant : “Eh bien, évidemment, ce mot ne prendra jamais.” »

M. Trudeau doit amorcer mercredi une visite officielle aux États-Unis pour parler commerce, notamment pour mousser les dispositions d’égalité hommes-femmes que son gouvernement tente d’intégrer à un nouvel Accord de libre-échange nord-américain. Visiblement une priorité économique ! (Voir ce que Jordan Peterson pense de l’imposition gouvernementale de l’égalité de résultats entre les hommes et les femmes.)

La gouverneure générale, Julie Payette, doit accorder bientôt la sanction royale à un nouvel « Ô Canada » de genre neutre, afin qu’en anglais, « un vrai amour de la patrie » n’anime plus « tous tes fils », mais qu’il « nous anime tous »...






[1] « Mecspliquer », néologisme qui désigne le fait qu’un homme explique quelque chose de façon paternaliste à une femme (et l’interrompe ici de façon inopportune). Radio-Canada avec nos impôts fait la promotion de « pénispliquer » (En F [sic] rançais SVP : remplacer mansplaining par « pénispliquer »).

Voir aussi

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