lundi 1 avril 2013

Du Grand Rattrapage au Déclin Tranquille (vidéo)



Nous avons quelques réserves sur cette présentation. Mais elle est cependant intéressante à plus d'un titre.

Parmi nos réserves : dire que l'Église au début du XXe siècle aurait privé de main-d'œuvre les industries locales en insistant sur la colonisation de terres ingrates éloignées. Ceci alors que des centaines de milliers de Canadiens français émigrèrent dans les villes de Nouvelle-Angleterre pour y travailler dans les « manufactures » plutôt que dans des usines québécoises... Migration qui frappait aussi les autres provinces canadiennes (le trait gris en haut dans le graphique ci-dessous, le Québec est en bas). Cette émigration canadienne-française est non seulement due à une frilosité envers la ville et l'industrie contrôlées par des étrangers protestants, elle est aussi due à un manque de dynamisme de l'industrie canadienne et à un manque de volonté de laisser les Canadiens français coloniser l'Ouest : on paiera ainsi le voyage et l'établissement d'Allemands et de Russes pour coloniser le Manitoba, mais on évitera d'en faire de même pour les Canadiens français, le but des orangistes étant de s'assurer que le Manitoba ne devienne pas un nouveau Québec à l'ouest de l'Ontario. La suppression des droits linguistiques et des écoles catholiques des francophones de l'Ouest ne les encouragera évidemment pas à émigrer vers ces régions.



De même dire (à la 16e minute) que les « familles deviennent de plus en plus petites » lors du Grand Rattrapage (1946-1960) est quelque peu trompeur : le taux de natalité et de fécondité a augmenté partout en Occident pendant cette période par rapport aux années 20 et 30... Ce pic de natalité se nomme le Baby Boom ! Voir les graphiques pour le Québec ci-dessous. Le taux de natalité annuel, tout au long des années d'après-guerre, tournera autour de 30 ‰, c'est-à-dire 30 naissances par 1000 habitants chaque année. Il en va de même du taux de fécondité : s'il tombe à 3,11 enfants par femme en 1934, il se situera au-dessus de 3,5 pendant toute l'après-guerre jusqu'en 1962.

Natalité du Québec de 1926 à 2011
 (entre les deux traits verticaux les années 1946 à 1960)


Ce qui est vrai, en revanche, c'est que l'urbanisation (les maisons sont chères en ville), le salariat (l'enfant ne peut plus aider dans l'entreprise familiale) et l'État-providence (chacun pense que les enfants des autres vont payer sa retraite) dépriment fortement la natalité.


Fécondité du Québec de 1926 à 2011
 (entre les deux traits verticaux les années 1946 à 1960)




Source ISQ, Université de Sherbrooke.





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Idées reçues sur les blancs américains, écart moral et culturel croissant des classes sociales

Charles Murray, chercheur à l’American Enterprise Institute, vient de publier Coming Apart: The State of White America, 1960-2010. À ses yeux, la division de plus en plus marquée entre les valeurs et comportements de la classe supérieure blanche et de la classe moyenne-inférieure blanche menace les fondements mêmes de l’Amérique. Dans cet article publié en février 2012 pour The Washington Post, il corrige cinq idées reçues sur la population blanche américaine.



Charles Murray parle de la bifurcation sociale, culturelle et morale entre les classes supérieure et inférieure américaines, le sujet de son dernier livre Coming Apart. Pour Murray, si l'État providence explique en grande partie ces changements, aujourd'hui la culture de la classe inférieure blanche a changé : les comportements autrefois stigmatisés dans cette classe ne le sont plus. Il rejoint ici les constats du britannique Theodore Dalrymple (ici en anglais et là en français).


Par Charles Murray — Pendant des décennies, les tendances de la société américaine ont généralement été analysées à travers le prisme de la race, et les Américains blancs ont servis de point de référence – en comparant le chômage des Noirs à celui des Blancs, par exemple, ou le pourcentage de lycéens Latinos qui accédaient aux études supérieures à celui des élèves blancs. Ces comparaisons sont éclairantes, mais elles négligent le fait que ce point de référence est lui-même en train de changer. Notre compréhension de l’Amérique blanche est soumise à des hypothèses dépassées qui devraient être repensées.

Idée reçue n° 1 — Les Blancs de la classe ouvrière sont plus croyants que les blancs des classes supérieures

C’est une idée fausse répandue, encouragée par les progressistes ["liberals" dans le texte] qui mettent la droite religieuse et la classe ouvrière dans le même panier, et par les conservateurs évangéliques qui invectivent la classe dirigeante impie.

Bien sûr, les élites intellectuelles blanches sont devenues peu croyantes. Cependant, dans son ensemble, la classe moyenne-supérieure blanche a depuis longtemps fait preuve d’une plus grande fréquentation des services de culte et d’une plus forte allégeance à leur foi religieuse que la classe ouvrière, si l’on s’en remet aux statistiques recueillies dans les années 1920 et qui perdurent aujourd’hui.

Depuis le début des années 1970, l’Amérique blanche est globalement devenue plus « laïque », mais cette baisse a été bien plus importante dans la classe ouvrière. Or, le sondage social général a indiqué dans les années 2000 que près de 32 % des Blancs de la classe moyenne-supérieure, entre l’âge de 30 et 49 ans, allaient régulièrement à l’église, contre seulement 17 % de la classe ouvrière blanche de la même tranche d’âge.


Idée reçue n° 2 —  Les universités d’élite sont injustement les bastions des privilégiés blancs de classe moyenne-supérieure

Il est fréquent de supposer que les étudiants blancs de classe moyenne-supérieure récoltent plus de places au sein des meilleures universités que les étudiants de la classe moyenne ou de la classe ouvrière, non pas parce qu’ils sont plus intelligents mais parce que leurs parents ont les moyens de les envoyer dans les universités et lycées de meilleure qualité, de payer pour des cours préparatoires au SAT [test de classement d’admission des cégépiens/lycéens à l’université] ou de faire de généreux dons aux universités.

Il y a deux problèmes avec cette logique. Tout d’abord, depuis le fameux Rapport Coleman sur l’égalité dans l’éducation en 1966, les universitaires ont eu des difficultés à démontrer que la fréquentation des établissements primaires et secondaires chics augmente la performance scolaire des élèves. Et, en moyenne, les cours préparatoires hautement racoleurs n’améliorent les scores des élèves au SAT que de quelques douzaines de points (résultat confirmé par de rigoureuses études comparatives des préparations existantes).

D’autre part, le niveau d’éducation est corrélé avec l’intelligence (le QI moyen des Américains blancs avec seulement un diplôme d’éducation secondaire se situe autour de 99 ; le QI moyen des Américains blancs avec un diplôme professionnalisant avoisine les 125). Et le quotient intellectuel des enfants est lié à celui de leurs parents. La question de comment les gènes et l’environnement se conjuguent pour produire ces relations n’est pas pertinente ; cette relation est restée stable pendant des décennies. Par conséquent, les parents blancs ayant fait des études avancées — et qui sont également riches en général — sont inévitablement la raison d’un nombre disproportionné d’élèves blancs avec les plus hauts scores au SAT, les meilleures notes et autres preuves d’excellence académique.

Si l’admission à l’université était purement méritocratique — éliminant le favoritisme pour les enfants des anciens élèves, célébrités et gros donateurs — la classe moyenne-supérieure serait toujours sur-représentée  C’est parce que l’écrasante majorité des candidats qui seraient acceptés à la place viendrait également de cette classe moyenne-supérieure.


Idée reçue n° 3 — Le mariage s’effondre au sein de toute l’Amérique blanche 

Dans l’ensemble, les taux de mariage déclinent effectivement aux États-Unis : les adultes Américains sont mariés à tout juste plus de 50 %, contre 72 % en 1960. Toutefois, il y a parmi les blancs américains un profond fossé de classe sur le mariage.

La part des blancs mariés de classe moyenne-supérieure, âgés de 30 à 49 ans, est constante depuis 1984, oscillant autour de 84 %. Sur la même période, le mariage de la classe ouvrière blanche du même groupe d’âge a chuté de 70 à 48 %. Ce n’est pas un artéfact statistique qui s’expliquerait par la différence entre les classes de l’âge de mariage ou la fréquence des remariages, ni par une conjoncture économique difficile pour la classe ouvrière. Le mariage constitue désormais une ligne de faille culturelle, divisant les classes socio-économiques parmi les Américains blancs.


Idée reçue n° 4 — Les hommes de la classe ouvrière blanche sont plus industrieux

Ce fut le cas, mais ne l’est plus tellement aujourd’hui. En 1968, 97 % des hommes blancs âgés de 30 à 49 ans qui détenaient tout au plus un diplôme d’études secondaires étaient dans la population active – ce qui signifie qu’ils occupaient un emploi ou cherchaient activement un travail. En mars 2008 (avant la Grande Récession), ce chiffre était tombé à 88 %, ce qui veut dire que près d’un homme blanc de la classe ouvrière sur huit dans la force de l’âge n’était même pas à la recherche d’un emploi. Ce n’est pas seulement une question de « travailleurs découragés » ; ce taux de décrochage de la population active avait augmenté lors du boom des années 1980, 1990 et 2000 aussi rapidement que pendant les années de récession.

Parmi les hommes blancs âgés de 30 à 49 ans, avec un travail ouvrier ou de services peu qualifiés, un plus petit nombre travaille à temps plein. Le pourcentage de ceux qui travaillaient moins de 40 heures par semaine est passé de 10 % dans les années 1960 à 20 % en 2008, augmentant dans les bonnes comme les mauvaises périodes économiques.

Des enquêtes sur l’utilisation du temps ont précisé ces changements de comportement parmi les hommes au chômage. Au début des années 2000, comparées à l’année 1985, ces hommes consacraient moins de temps à la recherche de travail, à l’éducation et à la formation, aux tâches ménagères ou aux activités civiques et religieuses, et passaient plus de temps à regarder la télévision et à dormir.


Idée reçue n° 5 —  L'ère des Américains blancs, désormais peu féconds, est révolue

Vous n’avez pas besoin de voir une jeune famille noire à la Maison Blanche pour comprendre que la démographie américaine se transforme. Lors du recensement de 2010, les Blancs non-Latinos formaient 64 % de la population, contre 69 % en 2000, 76 % en 1990 et 80 % en 1980. En 2011, les Blancs non-Latinos constituaient pour la première fois une minorité des enfants âgés de moins de deux ans — signe avant-coureur d’une nation au sein de laquelle les Blancs deviendront minorité. Ce n’est pas un mythe.

Pourtant, 45 des 50 gouverneurs et 96 des 100 sénateurs américains étaient toujours des Blancs non-Latinos en 2010. Les Blancs représentaient aussi 92 % des dirigeants nommés aux Academy Awards entre 2000 et 2011. Ils formaient 96 % des p.d.-g. de Fortune 500 en 2011. Les chiffres sont similaires pour d’autres postes influents de la société américaine. Pour l’instant du moins, la rhétorique sur le rôle déclinant des Blancs au sein de la société américaine excède la réalité.


Entrevue (en anglais) sur son dernier livre et ses ouvrages précédents



Reportage critique de PBS sur la thèse de Charles Murray, ce manque de mobilisation de la classe ouvrière blanche serait plutôt surtout lié à la désindustrialisation des États-Unis.



Charles Murray invité de Uncommon Knowledge (en anglais). Charles Murray y revient sur la chute du « capital social » (l'entraide, la participation à la vie communautaire) dans la société américaine. Comme Robert Putman l'avait identifié dans Bowling Alone: plus on est croyant, plus on participe à la vie communautaire (religieuse et laïque). Les mêmes chiffres ont également été vérifié au Canada. Pour Charles Murray, la classe moyenne-supérieure doit prêcher ce qu'elle fait :  il est bon de rester marié, d'être plus industrieux, d'être plus religieux que la classe inférieure ne l'est devenue. C'est ce que fit la classe moyen-supérieure victorienne en son temps : en pleine industrialisation et urbanisation elle réussit à faire baisser le taux de criminalité en Angleterre.


 Traduit de l’Anglais par Estelle Devisme pour Le Bulletin d’Amérique.

À lire




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France — le prénom comme prédicteur de résultat et de filière au bac

Les prénoms vieille France ont de bons résultats au bac (D.E.C.)

En 2012 , plus de 25 % des Madeleine, Irène  Côme et Ariane qui ont passé le bac ont reçu mention « très bien ». Plus d’une Marie-Anne, d’une Anne-Claire et d’un Gaspard sur cinq ont reçu cette mention. Même mention pour 15 % et plus des Violette, Apolline, Iris, Béatrice, Judith, Domitille, Hortense, Fleur, Daphné  Noé, Lara, Henri, Adèle, Rose, Augustin, Astrid et Éléonore.

À ces prénoms sont associés relativement peu d’échecs au bac, repérés ici par l’indication « Passe second groupe » (ce qui signifie probablement rattrapage à l’oral). Seules 3% des Madeleine sont dans ce cas.

Les prénoms musulmans et anglo-saxons à la traîne

À l’opposé de cette dimension de l’espace social : aucun des quelques 125 Youssef et 105 Nabil n’ont obtenu de mention TB. Mais plus de 30% d’entre eux sont dans la situation de passer l’oral de rattrapage. Seules une ou deux Sandy, Alison ou Sofiane décrochent la mention TB. 4 Christopher (sur 300) et 5 Mohamed (sur 400). 8 Cassandra et 8 Sabrina sur 470. Plus d’un tiers des 140 Yacine et Linda devront passer les épreuves de rattrapage.

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Uniformité des résultats par prénom

La différence entre la proportion de personnes ayant reçu la mention TB et la proportion de personnes devant passer en second groupe nous renseigne indirectement sur l’uniformité de la population. Certains prénoms semblent beaucoup plus concentrés sur l’une ou l’autre option. Pour Côme  Ariane et Madeleine, la différence est de 20 points ou plus. Pour d’autres prénoms, le contraire se remarque: les Aude et les Hippolyte sont 15 % à recevoir la mention TB, ils sont aussi 15 % à passer au rattrapage, signalant que ces “Aude” et ces “Hippolyte” ont des origines sociales variées.

Les prénoms chics dans les filières générales, prénoms musulmans et anglo-saxons pour le professionnel


Il y a des prénoms sur-représentés dans plusieurs terminales (dernière année de cégep au Québec), prénoms « chics » en section générale qui ouvre aux études universitaires, d’origine étrangère ou séries télévisées populaire en professionnelle qui marque souvent la fin de la scolarisation.

À chaque filière est associée un groupe de prénoms sur-représentés. Ainsi, les “Aliénor” représentent au total 2 candidates au baccalauréat (D.E.C au QUébec) sur 10 000, mais elles sont 6 sur 10 000 candidates au bac “L” (littéraire) : elles sont 3 fois plus nombreuses à passer le bac “L” (littéraire) que ce qui est attendu à partir de leur nombre total. Et les prénoms diffèrent. Dans certaines séries (“S” sciences et “STG” gestion par exemple), ce sont des prénoms masculins qui sont sur-représentés  mais ce ne sont pas les mêmes : Augustin est plus fréquent en prestigieuse série S, Ahmed en série de gestion STG moins prisée.

Aliénor en bac L (littéraire) ;
Augustin en bac S (scientifique) ;
Ahmed en bac STG (gestion) ;
Teddy en ST2 (industrie) ;
Priscilla ou Allison en ST2S (sanitaire et social).


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