La séquence hallucinante mettant en scène bien malgré lui Graham Linehan nous en convaincra. Le 1er septembre, l’humoriste irlandais, s’est posé à Heathrow, au Royaume-uni, et fut à sa grande surprise accueilli par cinq policiers armés, qui l’amenèrent au poste, avant de l’emprisonner et de l’interroger plusieurs heures. On lui reprochait trois tweets, parus en avril, et décrétés haineux, où il s’en prenait vertement, avec un humour « trash », à l’idéologie transgenre, postulant qu’il suffit pour un individu de se proclamer d’un genre, sans égard pour son sexe biologique, pour être reconnu ainsi.
Cette autoproclamation serait même à inscrire dans le registre de la vérité - qui s’opposera à cette thèse sera dans le « faux ». Il conjuguera donc la haine et la désinformation, en plus de mettre en danger la vie des trans, qui seraient pour cela condamnés à évoluer dans un environnement toxique, il inciterait à l’agression contre eux, ou les pousserait au suicide. Au cœur de cette théorie, on trouve une révolution anthropologique, vécue comme une révélation religieuse, absolument indiscutable. Au terme de son interrogatoire, Linehan fut remis en liberté, à condition toutefois de ne pas publier sur X. Comment ne pas y voir une censure ?
Plusieurs ont vu le Royaume-uni confirmer là sa dérive vers l’état policier. Cette impression n’est pas sans lien avec le plus vaste contexte qui a vu les autorités britanniques, à l’automne 2024, réprimer férocement des hommes ordinaires coupables eux aussi d’avoir publié des tweets trop virulents contre l’immigration massive et ses conséquences. Le Royaume-uni marquait là sa volonté de punir sévèrement ceux qu’il faut bien considérer comme des délinquants idéologiques transgressant les principes que le régime diversitaire juge non négociables.
L’épisode est à bien des égards indissociable de la récente polémique autour du drapeau dans ce pays. On l’a vu, de nombreux Britanniques revendiquent le droit de hisser les couleurs du Royaume-uni, et même de l’Angleterre, sous le signe de la protestation patriotique, et même nationaliste, pour peu qu’on ne connote pas négativement ce terme. Encore une fois, les forces de l’ordre sont intervenues pour sanctionner cette manifestation politique que le régime diversitaire assimile de plus en plus à la haine.
Naturellement, l’état de droit, comme il aime se présenter, formule ces interdictions et ces sanctions dans des termes généraux, indirects, qui lui permettent de sanctionner les déviants en laissant croire qu’il a seulement le souci de l’ordre public. Ce qui permet ensuite d’affirmer publiquement que tel homme ou telle femme n’ont pas été arrêtés parce qu’ils brandissaient le drapeau du pays mais parce qu’ils manifestaient sans en avoir le droit, par exemple. De même, les manifestations d’opposition à l’immigration massive sont systématiquement caractérisées par la plupart des grands médias comme racistes et haineuses.
Nos sociétés, et le Royaume-uni ne fait pas exception, sont aujourd’hui marqués par une criminalité conquérante, et il peut sembler étonnant de consacrer les ressources de la police et de la justice à la lutte contre les mauvaises pensées des uns et des autres, alors que la sécurité au quotidien de la population est compromise. Mais ce ne l’est qu’à condition d’oublier ce qui est le propre d’un régime idéocratique, d’abord occupé à maintenir le dogme sur lequel il repose. Quand la diabolisation et la peur de la mort sociale ne suffisent plus, il n’hésite pas à se radicaliser, à pénaliser tout simplement les propos qu’il réprouve, le délit d’opinion se présentant ici comme un délit de blasphème.
Il n’hésite même pas à se couvrir de ridicule, comme on l’a vu en avril 2005, quand le gouvernement britannique a refusé de laisser entrer sur son territoire Renaud Camus. Sa présence avait été déclarée « non propice à l’intérêt public ». On pensera ce qu’on veut de l’écrivain, associé pour le grand public au thème du « grand remplacement », mais on pourra difficilement ne pas s’amuser de ce refus quand on sait que le même pays accueille régulièrement, et sans souci, les prêcheurs islamistes les plus fanatiques.
Le régime diversitaire se sait contesté, et se radicalise. Ce n’est plus l’immigration massive qui fait scandale, mais le fait de s’y opposer, et le régime diversitaire, partout, se donne les moyens de mater les rebelles qui le défient, lui et ses dogmes. Le Royaume-uni n’est peut-être que le miroir grossissant de ce qui arrive partout en Europe occidentale où la police se voit assigner une fonction de plus en plus ouvertement politique.
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