vendredi 16 décembre 2011

Prix des crédits carbone en très forte baisse en Europe

Alors que le Québec (enfin le parti libéral du Québec) annonce qu'il deviendra la première province canadienne à faire l'expérience d'une bourse du carbone, le prix des crédits carbone (que certains voient comme les indulgences des temps modernes) est en très forte baisse en Europe. Mercredi 14 décembre, ces crédits avaient atteint un nadir.


Le prix du carbone dans l'Union européenne est tombé à son plus bas niveau historique mercredi. Le prix des contrats à l'ICE ECX (Intercontinental exchange) a chuté de 73 centimes d'euro pour atteindre un creux historique de 6,30 euros, soit une baisse de 10,4 % par rapport au prix de mardi (7,03 euros).

En fin de journée, le prix du contrat s'était légèrement rétabli à 6,41 euros avec un fort volume de 15 millions d'unités. La seule bourse du carbone véritablement encore active est l'ECX.

Bourse concurrente BlueNext : fraude et effondrement

Le concurrent le plus féroce d'ECX était la filiale d’Euronext et de la caisse des Dépôts et Consignation, BlueNext. En 2008, BlueNext les cours s’établirent d’abord à un niveau de 23 à 26 euros, et les volumes échangés se chiffraient à plusieurs millions de tonnes/jour. En fin 2008, avec l’arrivée de la crise économique, les cours chutèrent pour s’établir depuis dans une fourchette de 12 à 15 euros. Le 5 juin 2009, le marché s’effondrait à 1,1 millions de tonnes. BlueNext suspendait les cotations les 6 et 7 juin. Que s’était-il passé ?

On venait de découvrir une gigantesque fraude, un « carrousel de TVA » (taxe sur la valeur ajoutée). Des acteurs créaient des chaînes de sociétés fictives qui achetaient des certificats hors taxe dans certains pays, pour les vendre, en fin de chaîne de blanchiment, en facturant la TVA aux acheteurs, et puis toutes ces sociétés disparaissaient, sans reverser la TVA encaissée au fisc. Le système profitait de l’immatérialité des titres et de l’instantanéité des transactions et des virements de fonds par internet pour mener à bien l’escroquerie en quelques heures, sans disposer ni de bureaux, ni de personnel. Après quelques mois d’enquête, Europol estimait que 90 % des transactions conduites jusqu’en juin 2009 étaient frauduleuses, et que le montant de TVA détourné s’élevait à 5 milliards d’euros.

Pour faire cesser la fraude, les pays européens décidèrent vers le 10 juin 2009 d’accorder la franchise de TVA au marché du carbone. Le volume des transactions s’établit alors à un niveau moyen de 1,7 millions de tonnes jusqu’en fin 2009. La moyenne est tombée à 550.000 tonnes/jours de juillet à octobre 2010. Le système de plafonnement et d'échange des émissions carbone dépérit, dès lors que les occasions de spéculation ou de fraude s’amenuisent...

Bourse du carbone de Chicago fermée

Il y a un an, on apprenait que le Chicago Climate Exchange (CCX), c’est-à-dire la bourse du Carbone aux États-Unis, atteignait son plus bas niveau depuis sa création, soit 0,05 $ / tonne (après avoir culminé à plus de 7 $ en 2008). L'Intercontinental Exchange Inc. (ICE), qui venait d’acquérir le CCX, avait alors annoncé des coupures d’environ 50 % de son personnel…

Puis, en octobre 2010, on apprenait la fin des opérations d'échange de carbone du CCX (pourtant la raison d’être de celui-ci), lequel allait désormais se concentrer sur la vente directe de crédits, une nouvelle embarrassante passée sous silence par les médias conformistes.

Agonisant depuis plusieurs mois, ICE a officiellement annoncé en août 2011 la fermeture prochaine du CCX (début d’année 2012).

Le CCX a été mis sur pied par Richard Sandor en 2000, grâce à une subvention de 1,1 million de la Joyce Fundation, dont Barack Obama (alors avocat) était membre du conseil. On prévoyait une croissance oscillant entre 500 millions et 10 milliards par an. Parmi les investisseurs qui ont participé au CCX, notons Goldman Sachs et Generation Investment Managment (GIM) dont Al Gore est cofondateur et président.

L’espoir de rentabilité du CCX reposait sur la réglementation du CO2 (comme le modèle d’affaire d’Enron). Tous les espoirs étaient permis avec l’élection d’Obama, mais le destin en a décidé autrement…



Le Conseil du patronat québécois inquiet

De son côté, le Conseil du patronat « estime louable la volonté du gouvernement de faire du Québec un modèle en matière de lutte contre les changements climatiques », mais « reste préoccupé quant à l'impact que le projet de règlement pourrait avoir sur les entreprises au Québec à court terme, considérant que la province fait pratiquement cavalier seul sur ce dossier pour le moment ».

« Les employeurs du Québec sont favorables au principe d'un marché virtuel du carbone [...] à condition de tenir compte des efforts passés des entreprises au Québec. Il semble toutefois précipité et risqué de la part du gouvernement d'imposer un modèle similaire aux entreprises opérant au Québec alors qu'aucune autre juridiction en Amérique du Nord, sauf la Californie, n'a confirmé son intention d'adhérer à un tel système, surtout dans une période où la province doit maintenir un environnement d'affaires concurrentiel pour attirer davantage d'investissements », a indiqué le président du Conseil du patronat du Québec, M. Yves-Thomas Dorval.

Détournement et effets pervers du marché du carbone

Indulgences modernes ?
Le « marché » du carbone n’a aucun sens, on l’a créé artificiellement à partir du néant, on y manipule des choses qui n’ont aucune valeur intrinsèque, et les sommes engagées sont pharaoniques, à la hauteur de cet « enjeu » qui manifeste un orgueil grotesque tellement il est démesuré : « sauver la planète ».

Une ONG nommée, CDM Watch, vient de mettre au jour un nouveau scandale impliquant à la fois, d’une manière particulièrement perverse, le mécanisme du CDM (Clean Development Mechanism) - mis en place par l’Union européenne pour satisfaire les engagements pris à Kyoto - et celui du MLF (Multi Lateral Fund), mis en place par l’ONU pour protéger la couche d’ozone (protocole de Montréal).

CDM Watch avait, dès le 2 juillet dernier, soulevé un coin du voile dans un communiqué de presse : « CDM Panel Calls for Investigation over Carbon Market Scandal » (« Le groupement CDM demande une enquête sur un scandale du marché carbone »).

CDM Watch a, le 14 juillet dernier, publié une note de synthèse « HFC-23 Offsets in the context of the EU Emissions Trading Scheme » (« Les compensations HFC-23 dans le contexte du marché européen des droits d’émission »). Des carnets qui se sont saisis de l’affaire, WattsUpWithThat bien sûr, le plus percutant semble être celui de Joanne Nova dont une partie est traduite ci-dessous.
Dans le monde entier, des milliers d’économistes verts recommandent une « solution de libre marché » pour ce que nous appelons un problème de pollution. Mais, je ne cesse de le dire, ce « marché libre » n’est pas gratuit. C’est une pâle et lamentable imitation d’un « marché organisé ».

En Europe, si une entreprise produit du CO2 — et quelle entreprise ne le fait pas ? — elle peut payer des gens, en Chine et en Inde, pour ne pas produire une quantité équivalente de CO2. Cela paraît bien à première vue, sauf que payer quelqu’un pour ne pas faire quelque chose qu’il allait faire nécessite de connaître l'avenir (en plus de nous rappeller un procédé nommé l'extorsion). C'est la première faille. Officiellement, cela s’appelle « l’additionalité », ce qui est une façon sophistiquée de dire que des gens n’auraient pas fait quelque chose de particulier pour réduire leurs émissions, à moins qu'on ne les paie en crédits carbone.

Les Chinois et Indiens, qui ne sont pas idiots, ont immédiatement détourné le système. Pourquoi ne l’auraient-ils d'ailleurs pas fait ?

Les effets pervers du système :
  1. Le trifluorométhane (HFC-23) est le « grand-père » des gaz à effet de serre. Il est 11 000 fois plus réchauffant que le CO2.
  2. Les industriels de la chimie sont payés, en crédits carbone, 100 000 dollars pour chaque tonne de HFC-23 détruite.
  3. Tout à coup, fabriquer du HFC-23 pour le détruire devient une activité très lucrative, les gens se précipitent donc pour satisfaire cette « demande ».
  4. Le trifluorométhane (HFC-23) est un sous-produit de la production du chlorodifluorométhane (HCFC-22), un gaz réfrigérant également connu sous le nom de fréon 22 qui est fabriqué, comme par hasard, pour satisfaire le traité ONU de réduction de l’ozone. Puisque le HC-23 est maintenant beaucoup plus rémunérateur, c’est le HCFC-22 qui devient le sous-produit, et qui est maintenant en surproduction.
  5. Et maintenant le comble : le HCFC-22 est lui-même un gaz à effet de serre… L’effet réchauffant global de la production de HCFC-22… est cinq fois plus élevé que celui du HFC-23 du fait des grands volumes de HCFC-22.

[Ce que JoNova ne dit pas explicitement, mais qui est parfaitement clair dans l’article de WattsUpWithThat, c’est que ceux qui sont ainsi payés par l’Union européenne (mécanisme CDM) pour détruire le HHC-23 – pour sauver la planète du réchauffement - sont également payés par l’ONU pour produire le HCFC-22 – afin de sauver la planète de la destruction de sa couche d’ozone...!

lls mangent donc aux deux râteliers avec une seule machine à faire des dollars particulièrement efficace, machine qui, au mieux, ne fait rien. Elle n'est pas belle ma subvention ?]
Pour mettre les choses en perspective : en 2009, les industriels européens ont acheté 46 millions de crédits HFC-23, pour une valeur évaluée à 550 millions d’euros [« évaluée », car les « certificats » sont cotés en bourse, leur prix varie]. Ces crédits (HFC-23) représentent la majorité des crédits carbones achetés par les industries européennes (59 % en 2009).

Sur la base des prix actuels du marché européen (autour de 12 €), les quantités de HFC-23 qui seront produites en 2012 vaudront approximativement 6 milliards d’euros.

Donc, lorsque les classes dirigeantes « inventent » un marché à partir de rien, il est possible que les honnêtes travailleurs européens payent plus pour l’avantage d’aider une industrie de banquiers-avocats-auditeurs-comptables qui empirent le problème qu’ils étaient supposés régler.

Voir aussi

Danemark — Marre des taxes carbone !

Les compensations carbone: indulgences, assignats, ou nouvelle devise ?

Why BC Isn't Rushing to 'Cap and Trade' Carbon




Soutenons les familles dans leurs combats juridiques (reçu fiscal pour tout don supérieur à 50 $)

9 commentaires:

Tristan a dit…

Je ne parviens pas à comprendre comment le Québec peut s'engager dans ce marché seul.

1) ça ne changera rien que le Québec y participe, on doit faire bien moins qu'1 % des émissions de GES à l'échelle mondiale.

2) On va juste augmenter le prix de nos bien set services. Où est l'analyse d'impact de la part du gouvernement?

3) La Californie risque d'avoir un tel poids que le Québec n'aura aucune marge de manoeuvre et sera juste le petit caniche des Californiens.

Willem a dit…

Je ne comprends même pas le sens de cette mesure... Engendrer du Co2 (brûler du pétrole) n'est déjà pas gratuit, les entreprise ont déjà de très bonnes raisons d'économiser la consommation de pétrole ou de gaz, pourquoi vouloir serrez encore artificiellement la vis ? Alors que l'on sort (peut-être) à peine d'une récession ? Alors que les autres pays et provinces ne feront pas de même ?

Hou ! Hou ! Pourquoi ?????

Anonyme a dit…

Pourquoi?
Eh bien, à cause des intérêts occultes

Très bien a dit…

Anonyme :

«Des intérêts occultes.»

Je dirais plutôt un désintérêt de la part des États pragmatiques : donc baisse des actions.

Anonyme a dit…

Tax and spend liberals.

Que dire de plus tellement cette expression s'applique bien.

David A a dit…

Cette semaine, le Québec a annoncé qu’il allait pleinement intégrer le Western Climate Initiative en mettant en place un marché du carbone. Pour le moment, seule la Californie a aussi décidé de mettre en place un tel marché. Conséquence, pour atteindre les objectifs fixés par ce traité, le Québec devra acheter des droits d’émission en Californie.

Comme chaque fois que le gouvernement impose une taxe aux corporations, cette dernière sera refilée aux consommateurs. Donc, la mise en place de ce marché du carbone signifie que les Québécois vont payer une taxe aux entreprises californiennes !

À titre indicatif, le revenu des Québécois est de 28 084$ US (PPA) alors que celui des Californiens est de… 41 353$ US. Le marché du carbone c’est comme la péréquation, mais à l’envers !

En bref, une autre patente à gosse environnementale du gouvernement Charest qui va nous coûter cher…

Anonyme a dit…

Les Californiens doivent bien se marrer d’avoir trouvé une bande d’idiots québécois (des "pollueurs") qui vont envoyer de l’argent (en achetant cher des assignats carbones) pour subventionner la fermeture de leurs centrales thermiques au charbon afin de financer celles au gaz naturel ou leurs éoliennes.

Fernand se déchaine a dit…

La bourse du carbone a été créé sur le même modèle que la bourse sur les pluies acides d'Enron qui a conduit à la plus vaste fraude américaine. D'ailleurs le professeur Richard Sandor est le même qui amis en place les deux bourses avec l'appui dans les deux cas d'Al Gore...

Le lobby intensif d'Enron et de Gore pour inclure les bourses du carbone dans le protocole de Kyoto a été décrit dans l'article de Lawrence Solomon : L'autre secret d'Enron.

http://www.iedm.org/main/content_fr.php?content_id

Il demeure que Gore avec son hedge Fund (Generation Investment) gravite dangereusement dans ce lobby financier et certains n'ont pas hésité à publier comment faire du fric avec le climat. Un économiste de Chicago, Michel-François Clérin, a publié une analyse de l'empire financier derrière tout ça dans un article intitulé : Les cachotteries de Copenhague

http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va

Fernand se déchaine a dit…

Le lobby intensif d'Enron et de Gore pour inclure les bourses du carbone dans le protocole de Kyoto a été décrit dans l'article de Lawrence Solomon : L'autre secret d'Enron.

http://www.iedm.org/main/content_fr.php?content_id

Il demeure que Gore avec son hedge Fund (Generation Investment) gravite dangereusement dans ce lobby financier et certains n'ont pas hésité à publier comment faire du fric avec le climat. Un économiste de Chicago, Michel-François Clérin, a publié une analyse de l'empire financier derrière tout ça dans un article intitulé : Les cachotteries de Copenhague

http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va

D'ailleurs Richard Sandor est le même qui a mis en place la bourse d'Enron et celle du carbone de Chicago sur le même modèle que celle d'Enron.

On sait que la bourse de Chicago est affiliée à celle de Montréal, de Londres et d'Europe...