lundi 5 mai 2008

La justice andalouse interdit une partie du programme d'éducation civique

Résumé d'articles d'El Pais et El Mundo.

SÉVILLE — La Cour supérieure de justice d'Andalousie (CSJA) a empêché l'utilisation, dans la communauté andalouse, de plusieurs expressions et références controversées utilisées dans le programme d'Éducation civique. Plusieurs de ces expressions font référence à la théorie du « genre », aux relations homosexuelles et aux questions d'options sexuelles. La Justice andalouse considère que ces mentions constituent « une invasion illicite » dans le domaine de la morale, du droit et de l'éthique.

Le jugement du tribunal des contentieux administratifs de la CSJA considère que ces contenus « nuisent aux droits fondamentaux des parents, car puisqu'il s'agit d'une matière obligatoire qui vise explicitement à former moralement les élèves, elle viole la liberté de pensée et de religion des citoyens ainsi que le pluralisme politique, valeurs supérieures de l'ordre juridique ». En mars, la CSJA a reconnu aux parents le droit à l'exemption du programme d'Éducation civique, un fait sans précédent, car ce cours « fait usage de concepts indubitablement idéologiques ou religieux comme l'éthique, la conscience morale ou les conflits moraux. »

Les arguments de la Cour supérieure andalouse

La Cour supérieure (CSJA) fait valoir qu'« en effet, le programme viole » le principe de neutralité idéologique parce que le règlement qui précise le programme « révèle clairement qu'il s'agit de transmettre nettement plus que les principes de liberté, de justice, d'égalité et de pluralisme politique repris dans la Constitution et que le programme dépasse l'apprentissage théorique et pratique des principes démocratiques de coexistence ».

La Cour précise qu'il faut, entre autres, supprimer les références à « l'idéologie du genre », à savoir l'idéologie de la construction sociale du rôle sexuel, à l'« attitude critique envers les stéréotypes homophobes » et aux paragraphes du programme qui disent vouloir favoriser un respect des « diverses préférences sexuelles » et vouloir rejeter « toute discrimination pour raison de genre » et enfin au fait que, selon le programme d'éducation civique, l'école « doit éviter la simplification de la définition des identités » sexuelles.

Le tribunal déclare que « les parents ont le droit d'enseigner à leurs enfants une conception de la sexualité conforme à leurs convictions. » En cela, il récuse le programme d'éducation civique qui affirme « que l'identité sexuelle ne définit pas l'homme et la femme en tant que tels, mais qu'elle est le fruit d'une certaine conception culturelle ou d'un accident biologique ; c'est-à-dire que le sexe biologique ne définit pas une personne, mais que c'est plutôt l'affaire d'un choix sexuel délibéré ».

En outre, la Cour déclare au sujet de l'affirmation selon laquelle les droits de l'Homme dépendent du contexte ou de la conjoncture historique et sont susceptibles d'être créés ou abrogés qu'« il s'agit d'un point de vue idéologique qui ne fait pas partie de la norme constitutionnelle ».

Toutefois, même si le tribunal considère que ces parties du programme sont incompatibles avec la neutralité obligée de l'État, il rejette les recours contre le reste du programme relatifs aux cellules mères ou à la liberté de chaque établissement de choisir les contenus de ce programme.

Les passages litigieux du programme abrogés

— « L'exercice responsable de ces droits et devoirs comportera une préparation aux défis soulevés par une société en mutation qui nécessite des citoyens et citoyennes disposés à une coexistence fondée sur le respect mutuel et une culture de paix et de la non-violence, capables de reconnaître et de respecter les différences culturelles et qui rejettent tout type de discrimination pour raison de naissance, de ressources économiques ou de condition sociale, de genre, de race ou de religion». Abroge « de genre » (Programme du primaire et du secondaire).

— « L'éducation doit viser au respect des diverses préférences sexuelles des personnes et des groupes sociaux ». Abroge « des diverses préférences sexuelles » (« options vitales » en espagnol). (Programme du secondaire)

— « Puisque la construction de l'identité [sexuelle] est une tâche complexe, il est nécessaire que la contribution de l'école à ce processus de construction évite toute simplification et analyse essentialiste et qu'elle assume plutôt une perspective complexe et critique ». Le paragraphe au complet est abrogé.(Programme du secondaire).

Bataille rangée dans six communautés espagnoles

Espagne
La bataille idéologique contre le programme d'Éducation civique que le gouvernement socialiste espagnol veut imposer se livre principalement dans six communautés espagnoles. Parmi quatre de celles-ci (Andalousie, Asturies, Aragon et Catalogne), les tribunaux se sont prononcés, pour ce qui est des deux autres (Madrid et la communauté de Valence), les gouvernements locaux eux-mêmes ont décidé de soutenir la contestation à ce programme. En Murcie, le gouvernement n'appuie pas aussi ouvertement les objecteurs, mais il va leur concéder des avantages. Quand on considère la diversité des arguments et des critères des magistrats des communautés, tout laisse à penser que l'affaire sera portée devant la Cour suprême. Si la Cour suprême ne se prononce pas avant septembre prochain, trois gouvernements autonomes ont déclaré qu'ils appuieraient les objections au programme d'Éducation civique. Il s'agit des communautés autonomes de Madrid, de Valence et de Murcie.

Jugement complet (en castillan)

Plusieurs centaines de manifestants sous la pluie pour le choix et le droit des parents

Selon Corus Nouvelles, plus de 200 personnes ont manifesté sous la pluie, samedi, à Sherbrooke, pour dénoncer l'imposition du cours obligatoire d'éthique et de culture religieuse que le Ministère de l'Éducation veut imposer dans les écoles primaires et secondaires du Québec en septembre prochain.

Les manifestants, principalement des parents, se sont regroupés devant le bureau de comté de Jean Charest au complexe Delta. L'activité était organisée par la Coalition pour la liberté en éducation.

Cortège sous la pluie — « Charest, tu vas trop loin »

Le cortège s'est déplacé le long de la rue King en scandant plusieurs slogans : « Oui à la liberté de choix, non à la religion d'État » et « Charest, tu vas trop loin » avant de revenir écouter — toujours sous une pluie fraîche — plusieurs allocutions, dont celles de deux professeurs.

Le ton monte

Selon La Tribune de Sherbrooke, le ton semble avoir monté dans le débat entourant l’implantation, en septembre prochain, du cours d’éthique et culture religieuse dans les écoles primaires et secondaires de la province, en remplacement de l’actuel cours d’enseignement religieux et moral.

Présent à la manifestation, nous avons également pu noter cette hausse dans le ton alors que le Monopole de l'Éducation continue à déployer des moyens importants pour imposer ce cours. Un des intervenants sur les marches devant le bureau de M. Charest a annoncé que trois millions de dollars allaient être dépensés pour faire la publicité de ce nouveau programme de morale et culture religieuse et tenter de convaincre les parents récalcitrants.

Le libre choix brimé

La présidente de la CLÉ, Mme Marie-Josée Croteau, aurait déclaré à la Tribune qu'« En tant que parents, nous aspirons au libre choix, et nous préférons le retrait complet de l’enseignement religieux que ce nouveau programme&thinsp: on nous avait promis des écoles laïques, mais on ne s’attendait pas à ça ! »

Cette citation attribuée à Mme Croteau par la Tribune pourrait faire penser que la CLÉ est pour une école sans cours de religion. Ce n'est cependant pas le cas, puisque que le Manifeste de la CLÉ déclare clairement :
« la modification de la loi 95 afin que la liberté de choisir pour leurs enfants un enseignement moral et religieux à l'école en accord avec à leurs croyances et convictions soit redonnée aux parents; »

Pluralisme enseigné dès six ans

Plusieurs intervenants, dont une enseignante au primaire, ont souligné l'ambition démesurée du programme qui semble dès le plus jeune âge vouloir tout aborder quand on parle d'un phénomène comme les cérémonies et rites entourant la naissance ou les fêtes religieuses. On ne sait trop si c'est un travers des « experts » cooptés par le Monopole qui veulent épater la galerie ou la crainte de délaisser une « grande tradition » et d'apparaître alors trop peu pluraliste. Quoi qu'il en soit, l'ambition pluraliste et la pléthore de concepts introduits sont sans commune mesure avec ce qu'on demande aujourd'hui aux enfants de 6 ou 7 ans où la simple étude des grandes fêtes d'une seule religion constitue l'horizon actuel du cours. Humilité dans les ambitions qui semble nettement plus adaptée aux jeunes enfants. Mais comme on le sait, pour la ministre du Monopole, « Nos enfants sont intelligents, ils comprennent souvent plus que nous. »

Mme Croteau a poursuivi : « On ne parle pas de cours offerts seulement aux grands de secondaire quatre et cinq, mais bien d’un cours d’une durée de onze ans qui sera donné aux enfants dès qu’ils sont petits. Et ça, ça nous inquiète. »

La liberté de conscience des professeurs brimée

Me Jean-Yves Côté, un des avocats de la CLÉ, a souligné les nombreux droits soustraits par le gouvernement pour imposer ce programme aux parents et aux professeurs qui s'y opposeraient. C'est ainsi que les professeurs ne pourront plus invoquer désormais l'article 20 de la Loi sur l'instruction publique qui permettait de se soustraire aux programmes équivalents que va remplacer l'ECR :
Liberté de conscience.

20. L'enseignant a le droit de refuser de dispenser l'enseignement moral et religieux d'une confession pour motif de liberté de conscience.

Audi alteram partem

Me Côté s'est également insurgé contre les déclarations récentes de la ministre du monopole de l'Éducation, Mme Courchesne. Déclarations où elle affirmait que toutes les demandes d'exemption du cours d'ECR en vertu de l'article 222 de la Loi sur l'instruction publique seraient refusées.

Ceci alors que, d'une part ce n'est pas la prérogative de la ministre à l'heure actuelle, mais celle des commissions scolaires et des directeurs d'écoles privées. Il s'agirait donc là d'un abus de pouvoir. D'autre part, la ministre a affirmé refuser ces demandes d'exemption avant même que les parents aient pu être entendus lors du processus normal de révision par les commissaires scolaires, enfreignant de la sorte l'antique maxime romaine Audi alteram partem, quintessence même de l'État de droit : permettre que la partie adverse soit entendue.

Il faut dire que la ministre Courchesne avait annoncé avec son tact coutumier que renforcent son monopole et ses moyens administratifs abondants (d'aucuns diraient pléthoriques) : « On ne négocie pas un virage aussi important sans écraser d’orteils ». Elle avait également déclaré le 18 avril 2008 aux journalistes convoqués qu'elle ne ferait aucune concession et refuse les exemptions pour les parents qui voudraient retirer leur enfant du nouveau cours.

Demande de révision

Si les commissions scolaires refusent systématiquement les demandes d'exemption, Me Jean-Yves Côté a indiqué qu'il formulera une demande de révision adressée aux différents conseils des commissaires. Si la CLÉ n'obtient pas satisfaction, le dossier pourrait bien se retrouver en Cour supérieure. Selon Me Côté, la ministre du Monopole de l'Éducation, Michelle Courchesne, a mis les pieds dans les plats en affirmant que toutes les demandes d'exemption seraient refusées.

« Elle n'en a pas le pouvoir. La loi précise que les conseils des commissaires se prononcent sur une demande de révision. Ces conseils ont une certaine autonomie que la ministre leur a totalement usurpée. »

Indélicatesse, motif suffisant de démission

« Quand une ministre commet l'indélicatesse d'interférer dans un processus judiciaire, il s'agit d'un motif de démission » a soutenu Me Côté devant une foule conquise, rappelant le cas de la démission de M. Charest alors ministre des Sports à Ottawa. En 1990, M. Jean Charest avait dû démissionner de son poste après avoir commis l'indélicatesse de téléphoner à un juge chargé de trancher un litige entre un entraîneur et l'équipe canadienne d'athlétisme.