mercredi 26 juin 2024

Les « séminaristes » Israéliens ultra-orthodoxes s'opposent au service militaire

La Cour suprême israélienne ordonne la conscription des étudiants en écoles talmudiques (25 juin)

La Cour suprême israélienne a ordonné la conscription des étudiants ultraorthodoxes en écoles talmudiques, jusqu’ici exemptés, sur fond de débats au Parlement et au sein du gouvernement sur le sujet. «L’exécutif n’a pas l’autorité pour ordonner de ne pas appliquer la loi sur le service militaire aux étudiants de yechiva (écoles talmudiques) en l’absence d’un cadre légal adéquat. Sans ancrer cette exemption dans un cadre légal, l’État doit agir pour imposer la loi», a jugé la Cour.

Celle-ci intervient alors que le parlement israélien a relancé le 11 juin un projet de loi en vue d'une conscription progressive des ultra-orthodoxes. Le service militaire est obligatoire en Israël, mais les juifs ultra-orthodoxes peuvent l'éviter s'ils se consacrent à l'étude des textes sacrés du judaïsme, en vertu d'une exemption instaurée par David Ben Gourion, fondateur de l’État d'Israël, en 1948.

Certains détracteurs estiment que le texte étudié par le parlement, soutenu par le premier ministre Benyamin Netanyahou mais tancé par le ministre de la Défense Yoav Gallant, est loin de répondre aux besoins en effectifs de l'armée israélienne.



Billet du 3 avril 2024

De jeunes « séminaristes » juifs ultra-orthodoxes font la queue devant un bureau de recrutement israélien pour traiter leurs exemptions du service militaire obligatoire dans une base de recrutement à Kiryat Ono.


Les partis juifs ultra-orthodoxes résistent aux pressions visant à lever les exemptions de service militaire accordées aux étudiants religieux, alors que le Premier ministre Benjamin Nétanyahou s’efforce de préserver sa coalition et de répartir équitablement le fardeau de la guerre sur l’ensemble de la société.

À l’approche de la date butoir du 31 mars, à laquelle le gouvernement israélien doit présenter une législation pour résoudre une impasse de plusieurs décennies sur cette question, M. Nétanyahou a déposé une demande de dernière minute auprès de la Cour suprême afin d’obtenir un report de 30 jours.

Dans un souci apparent d’accommodement, la Cour suprême a donné aux représentants du gouvernement jusqu’au 30 avril pour présenter des arguments supplémentaires. Mais, dans une décision provisoire, elle a également ordonné la suspension du financement par l’État des étudiants des séminaires qui seraient soumis à la conscription à partir de lundi.

Que cache cette impasse ?

Les exemptions accordées à la communauté ultra-orthodoxe Haredi (les « pieux ») remontent aux premiers jours de l’État d’Israël, en 1948, lorsque son premier ministre, le socialiste David Ben-Gourion, a exempté quelque 400 étudiants du service militaire afin qu’ils puissent se consacrer à l’étude de la religion. M. Ben-Gourion espérait ainsi maintenir en vie des connaissances et des traditions sacrées presque anéanties par l’Holocauste.

Depuis lors, les exemptions sont devenues un casse-tête de plus en plus important, car cette communauté en pleine expansion représente aujourd’hui plus de 13 % de la population israélienne, une proportion qui devrait atteindre environ un tiers d’ici 40 ans en raison d’un taux de natalité élevé.

La résistance des Haredi à l’enrôlement dans l’armée repose sur leur forte identité religieuse, dont de nombreuses familles craignent qu’elle ne soit affaiblie par le service militaire.
Le président de l’Union européenne, M. Karel, s’est engagé dans le service militaire en dépit d’un désaccord de plus en plus public avec le Premier ministre israélien, Benjamin Nétanyahou. Certains démocrates et groupes arabo-américains ont critiqué ce soutien, estimant qu’il donnait à Israël un sentiment d’impunité.

Certains hommes haredi servent dans l’armée, mais la plupart ne le font pas, ce qui, de l’avis de nombreux Israéliens laïques, exacerbe les divisions sociales. Vivant souvent dans des quartiers fortement orthodoxes et consacrant leur vie à l’étude de la religion, de nombreux hommes haredi ne travaillent pas pour gagner de l’argent, mais vivent de dons, d’allocations publiques et des salaires souvent dérisoires de leurs épouses, dont beaucoup travaillent.

Pour les Israéliens laïques, dont les impôts subventionnent les Haredim et qui sont eux-mêmes obligés de servir dans l’armée, les exemptions ont longtemps suscité du ressentiment, qui s’est accru au cours des six mois qui ont suivi le début de la guerre à Gaza.

De nombreux Israéliens considèrent la guerre contre le Hamas comme une bataille existentielle pour l’avenir du pays, et quelque 300 000 réservistes se sont engagés pour combattre. Les sondages d’opinion indiquent que l’opinion publique est très largement favorable à la suppression des exemptions relatives à l’enrôlement des Haredim.

Quels sont les enjeux pour Nétanyahou ?

Pour M. Netanyahou, l’enjeu est de taille. Alors que l’opinion publique semble favorable à la suppression des exemptions, son gouvernement comprend deux partis haredi dont le départ pourrait déclencher de nouvelles élections, qu’il perdrait selon les sondages.

Jeudi, les deux partis, Judaïsme uni de la Torah et Chas, ont dénoncé la dernière décision de la Cour suprême et promis de la combattre, bien qu’ils n’aient pas jusqu’à présent menacé explicitement de quitter le gouvernement.

De l’autre côté, les alliés du ministre de la Défense Yoav Gallant, dont le centriste Benny Gantz, un ancien général de l’armée qui est en position de tête pour devenir Premier ministre si des élections étaient organisées, souhaitent que davantage d’Israéliens servent afin de répartir plus largement le fardeau.

M. Gallant a récemment déclaré que toute nouvelle loi sur la conscription nécessiterait le soutien de tous les partis, laissant entendre, selon Reuters, qu’il s’opposerait à toute nouvelle législation qui maintiendrait les exemptions.

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