vendredi 11 janvier 2008

École à la maison : les familles fuient l’Allemagne

Une famille allemande a quitté l’Allemagne pour trouver refuge au Royaume-Uni après que le maire de leur ville eut tenté de saisir les enfants de ce couple allemand et de les confier à la « protection » de l’État. Le crime de ces parents : vouloir enseigner à leur progéniture à la maison.

Des représentants du Netzwerk Bildungsfreiheit, un groupe de pression partisan de la légalisation de l’éducation à domicile, ont affirmé que Klaus, Kathrin Landahl et leurs cinq enfants sont « en sécurité en Angleterre. Ils ont rejoint Douvres samedi à minuit. »

Un porte-parole de Netzwerk Bildungsfreiheit a déclaré que « Le maire savait que la famille voulait quitter l’Allemagne car ils l’avaient fait savoir aux services de leur commune (il faut toujours déclarer son lieu de résidence en Allemagne), il a donc essayé de faire en sorte que le tribunal de la famille prive les parents de leurs droits de garde à l’aide d’un mandat préliminaire qui permet de retirer les enfants sans avoir à entendre les parents. »

Le porte-parole d’ajouter que, dans le cas des Landahl, l’administration ne cherchait pas seulement à usurper le droit des parents de décider de l’éducation des enfants, mais également de les priver « du droit de résidence ». Une action réminiscente de l’Allemagne de l’Est à l’époque soviétique.

Joel Thornton, président du International Human Rights Group, un groupe qui soutient les parents éducateurs en Allemagne, s’est déclaré « inquiet des derniers développements dans l’affaire Landahl puisque le gouvernement allemand viole apparemment ses propres règlements pour priver des parents de la garde de leurs enfants pour le simple fait qu’ils désirent éduquer leurs enfants à la maison. On pourrait comprendre ce genre de mesures si les parents commettaient ou s'apprêtaient à commettre des actes criminels, bien que le système administratif n’aurait probablement pas agi aussi rapidement. Il est scandaleux qu’on puisse séparer des parents de leurs enfants pour ce simple motif. Les tribunaux allemands doivent intervenir et protéger les familles de ce type d’abus de la part de l’administration. »

Le tribunal régional n’a pas émis de jugement dans ce cas, mais depuis que la Cour suprême allemande a admis que l’État pouvait interdire l’éducation à la maison en 2007, la plupart des familles qui enseignaient à leurs enfants se sont réfugiées à l’étranger. Rappelons que l’éducation à la maison est interdite en Allemagne depuis une loi de 1938 imposant la « Schulpflicht » (obligation scolaire). À l’époque, l’Allemagne nazie voulait s’assurer de pouvoir former tous les futurs citoyens selon un modèle pédagogique unique. La loi fut modifiée en 1945 sans profiter de ces amendements pour autoriser l'enseignement à la maison en préconisant simplement, comme c’est le cas ailleurs en Europe, une « Bildungpflicht » (obligation d'enseignement). Il fallait alors dénazifier tous les enfants et aucun enfant ne devait échapper à l’enseignement d’État désormais revu. Ces dernières années, on a vu plusieurs parents mis à l'amende et même emprisonnés pour avoir refusé d'envoyer leurs enfants à une école publique dont ils trouvent les enseignements incompatibles avec leurs principes religieux. Les griefs les plus fréquents de ces parents concernent l'éducation sexuelle précoce de leurs enfants (dès le primaire) et du non-respect du fait religieux sous le couvert d'une neutralité laïque qu'ils considèrent athée et militante.

Une autre famille qui éduquait également leurs enfants à leur domicile de Brême, les Neubronner, doit également être mentionnée. Voici ce que déclarait Dagmar Neubronner déclarait à World Net Daily : « Nous quittons l’Allemagne pour l’instant. Mon mari Tilman et mes enfants ont signalé aux autorités qu’ils quittaient l’Allemagne. Je dois, pour ma part, garder ma résidence permanente à Brême, car j’y suis copropriétaire d’une petite maison d’édition… Heureusement, de nombreuses personnes nous ont invités à travers l’Europe. »

La famille Neubronner a décidé de quitter l’Allemagne devant les menaces persistantes du ministère de l’Éducation qui leur ont imposé des amendes s’élevant à 10 000 $ et les menace d’autres « mesures coercitives ». Le gouvernement a déjà saisi les biens bancaires et meubles de la famille Neubronner. Selon l’avocat de la famille, « il ne reste plus que la prison et la perte du droit de garde comme autres mesures. »

Melissa Busekros, une jeune adolescente, a pu rentrer chez ses parents après avoir été enlevée de force par la police allemande et internée pendant plusieurs mois dans un institut psychiatrique parce qu’elle était éduquée à la maison. Melissa Busekros, aujourd’hui âgée de 16 ans, a pu rentrer chez elle maintenant qu’elle n’est plus désormais soumise à l’obligation de scolarisation par l’État.

Les autorités allemandes ont exprimé à plusieurs reprises leur ferme détermination d’éradiquer les « sociétés religieuses ou philosophiques parallèles » et ceci comprend l’éducation à la maison. Wolfgang Drautz, consul général allemand à Chicago, expliquait que le gouvernement a un « droit légitime d’empêcher l’apparition de sociétés parallèles et de s’assurer de l’intégration des minorités dans la société générale. » Même si les résultats des enfants éduqués à la maison sont aussi bons que ceux des enfants scolarisés par l’État, « l’école n’apprend pas uniquement des sujets techniques, mais également une conduite sociale, encourage le dialogue entre les personnes de différentes croyances et aide les élèves à devenir des citoyens responsables. » Ceci n’est pas sans rappeler les propos de M. Jean-Pierre Proulx qui veut imposer un programme de morale commun à tous les élèves québécois, même ceux des écoles prétendument privées, pour en faire des citoyens « cultivés, tolérants et capables de dialogue » Les enfants éduqués à la maison au Québec seront-ils encore longtemps à l’abri des prétentions de plus en plus envahissantes de l’État formateur de citoyens conformes ?

L’administration allemande a également ciblé récemment une famille de missionnaires baptistes en les menaçant de déportation parce qu’ils appartiennent à un groupe qui refuse « d’abandonner leurs enfants au système scolaire étatique ».

Dans une réponse officielle envoyée à une famille qui se plaignait que la police vienne chercher des enfants pour les forcer à aller à l’école de l’État, le ministère de l’Éducation de Baden-Wurtemberg écrivait : « Le ministère de l’Éducation ne partage pas votre point de vue en ce qui concerne les enfants soi-disant éduqués à la maison. Vous vous plaignez de l’escorte forcée d’écoliers par les agents de police… Afin d’éviter que ceci ne se reproduise, les autorités éducatives ont engagé un dialogue avec la famille concernée afin de voir s’il est possible qu’elle modifie ses convictions religieuses pour les faire coïncider avec les exigences imprescriptibles d’envoyer les enfants à une école. »

Benoît XVI reparle de l’enseignement catholique

Alors que certains universitaires et ministres québécois interprètent la pensée des autorités catholiques en matière éducative et morale dans le cadre du nouveau programme obligatoire d'Éthique et de culture religieuse, il nous paraît utile de rapporter les propos récents de Benoit XVI en la matière.

Recevant les élus de Rome et du Latium dans la Salle Clémentine du Vatican, jeudi, Benoît XVI est revenu sur un thème qu’il avait déjà longuement développé lors d’une convention du diocèse de Rome, celui de l’enseignement.

Parlant de « l’importance décisive » de l’éducation et de la formation de la personne aussi bien pendant l’enfance que pendant toute la vie, le Pape commenta :

« Si nous considérons la réalité de notre situation, nous ne pouvons nier que nous nous trouvons face à une véritable et grande "urgence éducative". (...) Il semble en effet toujours plus difficile de proposer de manière convaincante aux nouvelles générations des certitudes solides et des critères sur lesquels fonder la construction de leur propre vie. Ils le savent bien, les parents et les enseignants, qui pour cette raison même sont souvent tentés d’abdiquer leur rôle éducatif propre. Les mêmes, du reste, dans le contexte social et culturel actuel, empreint de relativisme et même de nihilisme, parviennent difficilement à trouver des points de référence sûrs pour les soutenir et les guider dans leur mission d’éducateurs et plus largement dans l’ensemble de la conduite de leur vie.

« Une telle urgence (...) ne peut laisser indifférente l’Église, ni votre Administration. Se trouvent clairement en jeu, en réalité, avec la formation de la personne, les bases même de la vie en société et de son avenir.

« Il existe ici une claire priorité : le respect et le soutien de la famille fondée sur le mariage. (...) Nous constatons tous les jours combien les attaques et les incompréhensions sont insistantes et menaçantes à l’égard de cette réalité humaine et sociale fondamentale. Il n’en est que plus nécessaire que les administrations publiques ne se portent pas au secours de telles tendances négatives, mais qu’au contraire elles offrent aux familles un soutien affirmé et concret, avec la certitude d’œuvrer ainsi en vue du bien commun. »