jeudi 11 juillet 2019

Éducation sexuelle : le programme cause malaises chez les enseignants et les élèves

Un nouveau cours d’éducation à la sexualité est désormais imposé à tous les élèves québécois depuis septembre dernier, mais les sujets inscrits au programme causent parfois des malaises chez les enseignants et les élèves. Pour les accompagner, l’école secondaire Jeanne-Mance, à Montréal, a fait appel à un organisme communautaire militant Plein Milieu dont la mission explicitée sur son site internet est l’« amélioration des conditions et de la qualité de vie des jeunes, des personnes qui utilisent des drogues et des personnes en situation d’itinérance. »


Mikaela Lemieux (à gauche) et Ana Miudo, travailleuses de milieu à l’école secondaire Jeanne-Mance pour l’organisme Plein Milieu.

L’atelier sur la contraception allait « bon » train selon La Presse. Il avait été question de la pilule et du timbre contraceptifs. Un stérilet avait circulé en classe et des élèves l’avaient soit prestement passé à la personne suivante, soit examiné avec intérêt.

« Maintenant, notre partie préférée : le condom », a annoncé Mikaela Lemieux en sortant deux pénis en bois d’une boîte. Malgré cela, l’attention des jeunes s’est lentement déplacée au fond de la classe, où un élève se tenait la tête entre les mains. Il a faiblement annoncé qu’il ne se sentait pas bien, avant de quitter le local escorté de son enseignant, s’arrêtant même en chemin pour s’appuyer sur un pupitre. C’était évident, quelque chose n’allait pas.

« Personne d’autre a mal à la tête ? », a demandé l’une des intervenantes avec un sourire narquois quand l’élève a eu quitté la classe. L’atelier s’est poursuivi.

Dans un corridor, la coordonnatrice de Plein Milieu a croisé le jeune homme qui se rendait chez l’infirmière. Elle a su ce qui se passait.

« Je lui ai dit que je voulais qu’il me dise la vérité parce qu’on s’inquiétait pour sa santé, et qu’après on pourrait parler, dit Joëlle Dalpé. Il m’a dit qu’on ne l’avait pas éduqué comme ça. »

Élevé dans une culture où on n’a pas de relations sexuelles hors mariage, il avait eu l’impulsion de quitter la classe, « quitte à jouer la comédie » selon La Presse.

« Je lui ai demandé s’il croyait que c’était pertinent de connaître ces choses, il m’a dit oui. Je lui ai demandé s’il avait senti qu’on le forçait à avoir des relations sexuelles ou à utiliser le condom, il a dit non. Il faut juste relativiser », poursuit Joëlle Dalpé, qui travaille depuis 10 ans entre les murs de l’école secondaire et a l’habitude de composer avec les sensibilités culturelles. Tout est donc bien qui finit bien pour la journaliste. On ne saura pas ce que pense l’élève si ce n’est pas le filtre de Joëlle Dalpé qui, bien sûr, prêche pour sa paroisse.

Les parents qui envoient leurs enfants à cette école savent-ils ce que ces militantes mettent dans la tête de leurs enfants ?

Neuf mois après l’implantation du programme d’éducation à la sexualité, entre la première année du primaire et la cinquième secondaire, la Fédération des syndicats de l’enseignement a récemment fait le constat que « ça ne passe pas » auprès de plusieurs enseignants. Dans trois écoles secondaires de Montréal, les intervenantes de Plein Milieu viennent « en soutien » au personnel. Ça se fait sans frais pour la commission scolaire, puisque l’organisme est financé par Centraide et le ministère de la Santé et des Services sociaux.

Notons que les intervenants ne sont pas enseignants et que les parents ne les ont sans doute jamais rencontrés. Il est vrai qu’ils ne pourraient pas s’opposer à leur « soutien » dans l’imposition de ce programme.

Faible intérêt de la part des enseignants

En septembre, les enseignants de l’école Jeanne-Mance ont été sondés pour savoir s’ils avaient un intérêt à intégrer l’éducation à la sexualité dans un de leurs cours.

« J’aurais cru qu’en 2019, la plupart des profs auraient dit que c’est une matière comme une autre », dit le conseiller pédagogique Tarik Elbabarti. Le tiers des enseignants s’est montré enthousiaste, dit-il, mais la même proportion a exprimé une réticence, tandis que l’autre tiers n’a tout simplement pas voulu s’impliquer.

Pourtant, le contenu enseigné est indispensable, prétend Tarik Elbabarti. Tout le contenu ?

« Je comprends que ça peut être plus sensible au niveau culturel ou religieux pour certains. Mais les élèves ont besoin de cette éducation à la sexualité ! C’est un programme qui a été relancé parce que ça manquait à l’éducation des élèves. » — Tarik Elbabarti, conseiller pédagogique à l’école secondaire Jeanne-Mance. Même la partie sur la théorie du genre ou la lutte contre les stéréotypes sexuels ? Voir Cours d’éducation à la sexualité, l’imposition de la théorie du genre est cruciale...


« Les jeunes ne sont pas préparés à vivre une vie sexuelle saine », poursuit M. Elbabarti. Il faudrait toutefois d’abord définir ce qu’est une vie sexuelle saine.

Dans la classe où Mikaela Lemieux et Ana Miudo donnent leur atelier, un mot fait justement tiquer un élève, qui lève la main.

« C’est quoi, un cunnilingus ? », demande-t-il. Ana Miudo l’explique sans détour. « Ah, un tibèf [petit bœuf, veau] ! », rétorque l’élève, suscitant une franche rigolade dans la classe selon la Presse. Dans ce milieu multiculturel, c’est l’expression en créole « qui s’est imposée »... À qui ?

Dissiper les malaises chez les enseignants en parlant « franchement » aux élèves

La directrice générale de l’organisme Plein Milieu est récemment allée présenter ce que fait son organisme au conseil des commissaires de la Commission scolaire de Montréal pour proposer d’étendre les tentacules de l’organisme dans les écoles.

« On l’a entendu, il y a des professeurs qui ne sont pas à l’aise avec le cursus. Nous, on est prêts à épauler, soutenir et former les professeurs ; proposer notre expertise [sic] et notre expérience », dit Lyne St-Amour. Elle souhaite que le ministère de l’Éducation accorde du financement pour appuyer les enseignants dans l’implantation du programme.

Sur le terrain, les intervenantes de Plein Milieu distinguent sans peine où sont les difficultés des enseignants.

« Pour parler du côté abstrait comme les relations amoureuses, [les enseignants] sont plus à l’aise. Mais quand on parle de relations sexuelles, de pornographie, de méthodes contraceptives, c’est plus sensible parce que c’est forcément plus cru. Il y a aussi le rapport prof-élève qui les rend mal à l’aise. » — Joëlle Dalpé, coordonnatrice de l’organisme Plein Milieu

Il n’y a pas que les enseignants du secondaire qui ont besoin de soutien pour répondre aux questions des élèves dans le sens « progressiste » désiré. Dans son bureau, Joëlle Dalpé égraine la liste que lui a envoyée une enseignante de sixième année qui doit aborder le sujet de la puberté avec ses élèves et qui a requis l’aide de Plein Milieu.

Éducation à la sexualité obligatoire

À la rentrée 2018, l’éducation à la sexualité est redevenue obligatoire dans toutes les écoles du Québec (patrie de libertés...), une décision du gouvernement Couillard en utilisant le prétexte du mouvement #moiaussi [#balancetonporc en Europe]. L’ADQ que l’ont dit un parti plus conservateur et plus pragmatique que le PLQ a maintenu ce programme tout comme le programme ECR que l’ADQ avait pourtant promis d’abolir au primaire... Ce sont les enseignants qui, dans le cadre de leurs cours habituels, doivent former les élèves à raison d’environ 5 heures par année au primaire et jusqu’à 15 heures au secondaire.

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