mardi 27 novembre 2007

Expérimenter pendant une génération...

On trouvera ci-dessous un hyperlien vers un débat qui opposait, le samedi 24 novembre 2007 sur l'antenne de Radio Canada, Mme Morse-Chevrier, présidente de l'Association des parents catholiques du Québec, et M. Louis Rousseau, professeur en sciences des religions de l'UQAM.



Quelques remarques :

Contrairement à ce que prétend M. Louis Rousseau, les évêques catholiques du Québec n'ont jamais approuvé l'intention du gouvernement du Québec d'imposer le programme d'éthique et de culture à tous. En effet, ils ont déclaré d'une part, le 13 mars 2007, que « [l]a situation particulière des écoles privées catholiques a aussi retenu l'attention. Les évêques ont exprimé l'avis qu'elles devraient avoir la possibilité — si elles le désirent — d'offrir un cours d'enseignement religieux catholique en lieu et place du programme annoncé d'éthique et de culture religieuse. »

D'autre part, dans le même communiqué de 2007, l'Assemblée des évêques catholiques du Québec rappelait sa position déclarée dès 2005  : « comment un programme unique et obligatoire parviendra-t-il à respecter également la conscience des jeunes croyants et incroyants ? Il paraît bien difficile de viser une stricte neutralité en matière religieuse. Comment s'en tenir à une approche purement descriptive, phénoménologique, si l'on veut initier les jeunes à une recherche personnelle de sens et les inviter à une appréciation positive des différentes conceptions du monde ? Il est prévisible qu'un programme unique et obligatoire suscite alors certaines difficultés quant au respect de la liberté de conscience. » Les évêques concluaient donc que « [c]ompte tenu de ces risques et de ces difficultés, l'Assemblée des évêques réserve son jugement sur la valeur du programme annoncé. » On voit mal où les évêques se seraient déclarés, comme le prétendait véhémentement M. Rousseau, en faveur de ce programme d'éthique et de culture religieuse et de son caractère obligatoire.

On ne peut qu'être étonné de la remarque narquoise de M. Rousseau qui déclare qu'Allah est le même Dieu que le Dieu chrétien... Si les deux ont beaucoup en commun (créateur suprême unique), M. Rousseau semble passer à l'identité complète en confondant identité lexicale (les chrétiens arabes appellent bien le Dieu chrétien Allah) et identité de nature (le Dieu musulman ne s'incarne pas contrairement à Dieu-le-fils chrétien, ni ne rachète par son sacrifice les péchés du monde, concept incongru pour les musulmans). Notons que, si ça peut rassurer M. Rousseau, le président George Bush, sommité ès théologies comparées, semble être d'accord avec lui quand il déclara en 2003 au sujet des musulmans : « Je crois que nous adorons le même Dieu. ». On se sent gêné de rappeler que M. Rousseau est professeur des religions à l'Université de Québec à Montréal. (Écouter à ce sujet ce qu'Alain Besançon en disait : « Le rapport à Dieu des musulmans est radicalement différent de celui des chrétiens. »

Notons enfin que les meilleurs arguments de M. Rousseau semblent être que, par ce programme, le Québec serait à l'avant-garde, qu'il serait à la pointe du progrès pour faire rentrer ses futurs citoyens laïcs dans le XXIe siècle. Quand on voit les autres succès progressistes du Québec en matière de « renouveau pédagogique » contesté par des syndicats entiers de professeurs ou encore en matières sociales comme l'avortement et la dénatalité, grandes conquêtes modernes, où il brille également par son « avance », on est en droit d'être très inquiet.

Pour conclure, M. Louis Rousseau se veut rassurant : il faudra une génération pour voir les fruits inconnus de cette expérimentation obligatoire en matière d'éthique et de culture religieuse ! Une génération de gâchée, car le progrès est « inéluctable » ?

Rappelons une vertu rétrograde à M. Rousseau : la prudence. Prudence qui commanderait de rendre ce cours facultatif quand on songe à son caractère expérimental et lorsqu'on voit l'opposition qu'il soulève de la part des parents qui se sentent déposséder des choix éducatifs et religieux de leurs enfants.

Confier aux plus vociférants le nouveau programme d'éthique et de culture religieuse dans les écoles.

Michel Vastel s'inquiète dans un éditorial récent de la hargne et des vociférations des anticléricaux québécois à la pointe du combat pour la déconfessionnalisation des écoles au Québec et l'imposition du nouveau programme d'éthique et de culture religieuse à toutes les écoles, primaires et secondaires, publiques et prétendues privées.
Moi aussi j'ai été surpris de la rage qui s'est emparée de tout ce qui grouille et scribouille au Québec. Fallait-il donc qu'il y en ait, du ressentiment accumulé contre l'Église et ses prêtres, pour que se déchaîne tant de violence dans les propos ! Le cardinal n'est pas très adroit, mais il n'est pas un monstre tout de même...

Ce qui m'a frappé le plus, c'est l'outrecuidance de certains commentateurs et leur assurance à discuter de ce qui se passait au Québec dans les années de grande noirceur, alors qu'ils portaient encore des couches, ou qu'ils n'étaient même pas nés !

Leur a-t-on expliqué que certains des Cégeps dans lesquels ils ont étudié sont d'anciens « séminaires » dans lesquels les curés dispensaient le cours classique ? Leur a-t-on expliqué que les hôpitaux dans lesquels ils sont soignés ont été fondés et longtemps tenus par des religieuses ?

Et leur a-t-on expliqué que la situation dans ces établissements d'éducation et de santé n'était pas plus mauvaise — en fait, bien souvent meilleure ! — que dans les établissements publics d'aujourd'hui...

Toute cette hargne témoigne d'un anticléricalisme irréfléchi. Voilà pourquoi je suis moi aussi préoccupé de voir qu'on va confier aux plus vociférants de cette société le nouveau programme d'éthique et de culture religieuse dans les écoles.

Il y a tout de même 83 % de Québécois qui prennent la peine de préciser à Statistique Canada qu'ils sont de religion catholique et qui vont exiger un peu de respect. Le gouvernement ferait bien d'y penser à deux fois avant d'imposer cette réforme...