samedi 10 novembre 2007

Imposition « maladroite » d’un programme « vaporeux » et « relativiste »

C’est en ces termes que s’expriment plusieurs acteurs de la scène éducative ou religieuse quand ils parlent du programme que le gouvernement québécois veut imposer à tous les écoliers québécois, qu’ils fréquentent une école privée ou publique. Dans ce nouveau programme, Jésus et Moïse voisineront désormais avec Mahomet, Bouddha, Glouscap et les idées de la mort de Dieu.

Le cardinal Marc Ouellet, archevêque de Québec, qui apparaissait la semaine passée devant la commission itinérante Bouchard-Taylor a accusé le Ministère de l’Éducation de vouloir imposer une « dictature du relativisme ».

Il ajouta que le « plus scandaleux est le sort réservé aux écoles privées catholiques qui se voient contraintes par le jeu des subventions gouvernementales, de marginaliser leur propre enseignement confessionnel au profit du cours d’État imposé partout et à tous les niveaux. »

Lifesite rapporte que le programme préconise de considérer l’homosexualité comme une forme de vie familiale normale dès la première année du primaire. Sous le terme d’« éthique » pour les deux premières années du primaire, le cours doit « amener [les enfants] à explorer la diversité des relations d’interdépendance entre les membres de différents types de familles. »

Rachida Azdouz, psychologue à l'Université de Montréal, déclarait, lors d’une session de formation organisée dans le cadre de l’imposition du programme d’éthique et de culture religieuse que « le rôle des intervenants scolaires c'est d'apprendre à cet enfant de composer avec des enfants qui ont d’autres croyances religieuses et dire qu’elle est tout aussi légitime que la leur ou, des enfants qui n’ont pas de croyances religieuses et que cette position-là est tout aussi légitime que la leur. »

Il n’est d'ailleurs pas clair comment les groupes religieux vont amener les enfants de leurs écoles sociologiquement homogènes à discuter, dans le sens relativiste et pluraliste que le Ministère préconise, des modèles de famille qu’ils réprouvent ou des religions qu’ils considèrent fausses... Le ministère croit-il vraiment que les protestants évangéliques ou les juifs orthodoxes vont enseigner dans leurs écoles que toutes les religions se valent ou que tous les modèles familiaux sont respectables, mêmes les « familles » homosexuelles ?

M. Paul Donovan, directeur de l’école secondaire Loyola à Montréal, interrogé par le National Post, déclarait que son plus grand souci en ce qui a trait au nouveau programme n’est pas l’inclusion d’autres religions, mais sa façon « vaporeuse » d’aborder l’éthique. « Nous enseignons aux enfants qu’il faut s'astreindre à une certaine moralité. [...] Je vais avoir de la difficulté à enseigner ce qui n’est, dans les faits, qu’un code moral nettement plus relativiste que celui-ci que nous enseignons actuellement. Afin d’être pluraliste, ce cours n’ose en fin de compte pas prendre position. »

Barry Levy, professeur de religion à l’Université McGill, spécialiste en études judaïques, déclare que ce programme pourrait être conçu comme une tentative de créer une culture québécoise commune. « Je pense qu’en ce moment le Québec remet totalement en cause la valeur de la religion » ajoute-t-il dans le National Post. « C’est relié à des prises de positions laïques récentes, au rejet de l’Église catholique, à la peur des groupes ethniques, dont de nombreux sont issus de l’immigration, qui amènent avec eux des pratiques religieuses qui ne semblent pas appropriées aux Québécois. » M. Levy trouve la méthode du gouvernement maladroite et pense que les écoles orthodoxes juives vont vraiment avoir des difficultés à admettre qu’il leur faut enseigner toute la gamme des religions du monde. « Dès que vous commencez à enseigner aux jeunes enfants que Noël, Hannoukah et Kwanza et parfois le ramadan ont lieu en même temps et que toutes ces fêtes se valent – alors soit le message sera celui-là ou le message sera que tout cela n’a guère d’importance – mais les gens pour qui une de ces célébrations est importante ne vont pas trouver facile d’enseigner ce programme à leurs enfants. »

M. Boudreau de la faculté de l’Éducation de l'Université McGill se demande comment les enseignants feront pour donner un cours si vaste en connaissance de cause : « Le gros défi, selon moi, concerne les compétences des enseignants et s'ils seront capables de donner un bon cours. Car, enfin, beaucoup d’entre eux ne connaissent même pas bien leur propre tradition religieuse ! Alors, comment présenter de manière délicate celle des autres ? »

M. Lévy résume : « Ce qui risque de se produire, dans ce contexte, c’est que ce cours sera totalement superficiel et dénué de sens. Le seul message sera [que] tout cela est de même valeur. Et les gens qui sont convaincus dans leur foi ne peuvent admettre cette conclusion. »