mercredi 6 août 2025

Laïcisme — Défendre la signification « profonde et commune » du parvis d'une basilique en y interdisant les prières catholiques ?

Au Québec, le christianisme se trouve entre le marteau et l’enclume, entre le laïcisme et l’islam, je ne saurais dire lequel est le marteau et lequel est l’enclume, mais cela n’a pas une grande importance, le christianisme est coincé entre les deux.

Tout récemment, dimanche dernier en fait, une manifestation contre les prières de rues islamiques a eu lieu devant la Basilique Notre-Dame de Montréal, son message cependant, ne s’arrêtait pas aux seules prières de rues islamiques, il demandait au gouvernement l’interdiction de toute prière publique...

En effet, lors de cette manifestation, la militante laïque d’origine iranienne, Mandana Javan, déclarait devant la foule d’une centaine de personnes que « Depuis plusieurs mois, ce lieu emblématique devient le théâtre de prosélyte ostentatoire, sans égard pour la signification profonde et commune de cet espace », avant d’appeler plus loin le gouvernement à interdire la prière sur la place publique, rapporte Le Devoir.

L’événement a attiré divers groupes et individus, tel que Nouvelle Alliance ou La Meute, on pouvait voir dans la foule un homme qui tenait une pancarte disant « Le Québec restera chrétien ». On comprend que ce qui unissait ces gens (malgré les dissociations d’usage, mises en avant par certains) c’était la défense du symbole que représente la basilique et la Place d’Armes au milieu de laquelle est sise la magnifique statue de Paul Chomedey de Maisonneuve, un symbole fort du Québec, face aux provocations des prières islamiques qui ont fréquemment lieu devant le vénérable bâtiment.

On comprend aisément le motif, mais le remède proposé est-il le bon ?

On voit mal comment on peut défendre la signification « profonde et commune » de ce lieu en bannissant de la place publique, en même temps que l’islam, ce qui en fait partie.

En effet, c’est ce catholicisme prosélyte (oh ! le vilain adjectif que j’emploie...) qui a présidé à la fondation de Montréal, alors Ville-Marie, une ville qui devait être le tremplin de l’évangélisation des Autochtones en Amérique du Nord. Oui, c’est dans le but de fonder une ville missionnaire que Paul Chomedey de Maisonneuve a été envoyé.

Or, vous ne pouvez pas défendre la signification « profonde et commune » d’un lieu aussi emblématique en prétendant entraver par la bande ce même catholicisme prosélytique. C’est une position intenable. Quid des processions de la Fête-Dieu, des chemins de croix du Vendredi Saint et des pèlerinages ?

Qu’on me pardonne, d’ailleurs, de souligner que ce n’est pas en empêchant les musulmans de prier dans la rue que vous allez empêcher la propagation de l’islam. Ce n’est pas en empêchant la manifestation d’un symptôme que vous allez en empêcher la cause.

Du reste, le motif invoqué par le gouvernement pour envisager d’interdire la prière publique, « On ne souhaite pas voir des prières dans les rues », est très peu élevé pour une interdiction aussi large : le peuple ne le souhaite pas ; les gens en ont assez — depuis quand est-ce qu’on fait des lois sur de simples sentiments ? Qu’on revienne avec des raisons plus sérieuses et avec des solutions qui visent précisément leur objectif et on pourra en parler sérieusement. La politique actuelle semble malheureusement ne devoir être menée qu’à l'aune des sentiments, ce qui ne présage rien de bon dans bien des domaines.

Chine — L'année dernière, il y avait 12 millions d'élèves de maternelle de moins qu'en 2021


Il y a moins de trois ans, Mme Jiang rangeait des jouets et chantait des comptines comme éducatrice dans une crèche à Pékin. Elle se souvient que les parents frappaient à la porte pour inscrire leurs enfants. Cela est devenu de plus en plus rare, jusqu'à ce que Mme Jiang se retrouve l'année dernière à distribuer des prospectus pour la crèche pendant ses pauses déjeuner. Elle a compris que l'avenir était scellé. En mai dernier, Mme Jiang a décidé de se tourner vers un secteur offrant de meilleures perspectives de croissance : les maisons de retraite. « Il est plus facile de s'occuper de personnes âgées que de jeunes enfants », estime-t-elle. Et ses compétences en matière de loisirs créatifs et de jeux lui sont très utiles.

Entre 2017 et 2022, le taux de fécondité total de la Chine, c'est-à-dire le nombre de naissances par femme, est passé de 1,8 à 1 [1,2 selon la Banque mondiale]. Ce chiffre est bien inférieur au taux de remplacement de 2,1, qui permet de maintenir la population à un niveau stable. Afin de stimuler les naissances, la Chine vient d'annoncer des subventions de 3 600 yuans (500 dollars) par an pour chaque enfant de moins de trois ans. Mais cette chute a déjà des répercussions sur les crèches. De 2021 à 2024, le nombre d'élèves dans les écoles maternelles est passé de 48 millions à 36 millions, selon les données officielles. Environ 42 000 des 295 000 écoles maternelles ont fermé leurs portes, et 360 000 des 3,2 millions d'enseignants du préscolaire ont quitté leur emploi.

Il y a toutefois une lueur d'espoir pour ceux qui ont su s'adapter. Alors que le nombre d'enfants âgés de trois à six ans fréquentant les crèches en Chine passera de 49 millions à 35 millions au cours des cinq prochaines années, le nombre de personnes âgées de 65 ans et plus passera de 211 millions à 256 millions pendant cette même période, selon les projections de l'ONU, et continuera d'augmenter. La Chine a cruellement besoin de plus de personnel pour s'occuper d'eux. En 2021, elle ne comptait qu'un demi-million de travailleurs sociaux certifiés, selon le Quotidien du Peuple, organe officiel du Parti communiste chinois.

 Cela représente seulement 0,27 travailleur social pour 100 personnes âgées de 65 ans et plus, un chiffre extrêmement bas. (La même année, le chiffre moyen pour l'OCDE, un club regroupant principalement des pays riches, était de 5,7.) Les universités ont également lancé des diplômes en soins aux personnes âgées pour aider. La première promotion d'étudiants a obtenu son diplôme l'année dernière, apparemment très demandé.

Tout cela a motivé une certaine Mme Wu à ouvrir sa propre maison de retraite dans le Jiangxi en 2023, après avoir travaillé pendant des années dans des crèches. Elle compte neuf résidents qui paient 2 600 yuans (360 dollars) par mois pour y séjourner. Selon elle, les perspectives pour le secteur des soins sont prometteuses. À l'heure actuelle, les personnes vivant dans des maisons de retraite ont plusieurs enfants, mais celles nées dans les années 70 et 80 n'ont pour la plupart qu'un seul enfant, ce qui signifie qu'elles auront moins de personnes pour s'occuper d'elles lorsqu'elles vieilliront. Mme Wu reçoit presque tous les jours des demandes de renseignements de la part de clients potentiels. Elle en a également reçu quelques-unes de la part d'éducateurs de crèche qui souhaitent suivre son exemple.

Le gouvernement apprécie les établissements « à usage mixte » où jeunes et personnes âgées sont pris en charge. L'année dernière, à Chongqing, dans le centre de la Chine, par exemple, un étage vide d'une crèche a été transformé en « centre de soins pour personnes âgées », selon un rapport local. Il disposait d'installations pour le sport (tables de ping-pong) et les arts (tables de calligraphie), et lorsque les éducateurs de la crèche étaient libres, ils enseignaient aux personnes âgées. Un journal publié par la Commission nationale pour le développement et la réforme, le principal organisme de planification économique de Chine, a appelé les gouvernements locaux à accorder des subventions et des avantages fiscaux à ce type de projets. Et les personnes âgées apprécient la compagnie des jeunes ; certains grands-parents déposent même leurs petits-enfants à la crèche avant de se rendre à leur étage.

mardi 5 août 2025

Royaume-Uni : compter sur les migrants pour stimuler l'activité économique pose de « sérieux problèmes » selon Commission

La commission des dépenses de du Bureau pour la responsabilité budgétaire a déclaré que le fait que le Royaume-Uni compte sur les migrants pour stimuler l'activité économique et redresser les finances publiques posait de « sérieux problèmes ».

Scène de rue à White Chapel

Un taux d'immigration élevé n'est peut-être pas toujours bon pour les relations entre les communautés si un grand nombre de nouveaux arrivants s'installent dans un même quartier, mais il contribue au moins à stimuler le PIB en fournissant une source de travailleurs enthousiastes que les employeurs ont du mal à trouver en Grande-Bretagne. Voilà qui résume le point de vue de certains économistes, mais qui vient d'être rejeté en bloc par une voix importante : David Miles, qui siège au comité de du Bureau de la responsabilité budgétaire (OBR). Il écrit qu'il est erroné de penser que la Grande-Bretagne peut résoudre ses problèmes économiques en ouvrant ses portes aux travailleurs étrangers.

 L'un des arguments fréquemment avancés en faveur de l'ouverture des frontières à l'immigration est qu'elle contribue à résoudre le problème du vieillissement de la population, car les travailleurs immigrés ont tendance à être jeunes. Pourtant, selon les calculs de Miles, même si chaque migrant arrivant en Grande-Bretagne était âgé de 24 ans, le pays devrait en accepter 20 millions au cours des 40 prochaines années afin de préserver l'équilibre démographique actuel. Et, bien sûr, comme il le dit, « les jeunes d'aujourd'hui sont les vieux de demain ».

Au terme de ces 40 ans, les migrants qui arrivent aujourd'hui à l'âge de 24 ans seront proches de l'âge de la retraite. Ils seront sur le point de faire valoir leurs droits à la retraite. Tout ce que vous auriez obtenu en leur ouvrant les portes, c'est de créer une nouvelle vague de population comme celle des baby-boomers qui prennent actuellement leur retraite et contribuent ainsi à gonfler la population britannique en âge de ne pas travailler.
En outre, tous les arrivants ne sont pas âgés de 24 ans. Ceux qui viennent travailler en Grande-Bretagne sont souvent accompagnés de personnes à charge qui ne travaillent pas. Même ceux qui travaillent consomment les services publics, contribuant ainsi à accroître la pression sur des écoles, des hôpitaux et des logements déjà surchargés. Selon M. Miles, il serait bien plus avantageux sur le plan budgétaire d'investir dans le retour à l'emploi d'une plus grande partie de la population britannique en âge de travailler.

Jusqu'à récemment, le lobby anti-migration était accusé par certains d'être analphabète sur le plan économique. Pourtant, l'OBR calcule aujourd'hui qu'un migrant à bas salaire - en supposant qu'il reste en Grande-Bretagne - finira par coûter 1,55 million de livres au contribuable britannique, car les pensions et les prestations qui lui sont versées l'emportent sur les impôts qu'il paie au cours de sa vie.

Même un migrant percevant le salaire britannique moyen finira par coûter 405 000 livres nettes. Comme nous l'avons vu dans le budget de l'automne dernier et dans la révision des dépenses en mars, les prévisions de l'OBR sont cruciales pour la réflexion du ministre des Finances - Rachel Reeves adapte ses politiques fiscales et de dépenses aux prévisions des marges de manœuvre et des pertes fiscales. Maintenant que l'OBR semble s'éloigner de la vision de l'immigration de masse comme moyen de stimuler l'économie, on peut penser qu'elle aura un effet marqué sur la politique migratoire du gouvernement.

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L'immigration, le remède imaginaire

Croissance du PIB réel par habitant (2015-2024) : Canada à l'avant-dernière place des pays de l'OCDE (« malgré » une immigration record) 

La chimère de la lutte du vieillissement de la population par l'immigration de masse

Canada — L'immigration ne rajeunira pas de manière significative la population active de demain

Au rythme actuel (mai 2023) sous Trudeau et Legault : 12 millions d'habitants à Montréal et 5 à Québec en 2100

lundi 4 août 2025

Ce que Trump apprend à Harvard

À Harvard, vous pouvez étudier la négociation. Comme il s'agit de Harvard, il existe en fait tout un programme universitaire consacré à cet art. Les principes sont simples. Comprenez vos alternatives – que se passe-t-il si vous vous battez plutôt que de faire des compromis – et vos intérêts à long terme. Comme nous sommes dans l'Amérique de Donald Trump, Harvard elle-même fait désormais l'objet d'une étude de cas.

Le gouvernement a cherché à revoir certains cours dispensés à Harvard, M. Trump ayant fait pression pour que l'université embauche moins de « gauchistes idiots » et sanctionne les manifestants pro-palestiniens. Lorsque l'université a refusé, son administration a gelé des subventions fédérales pour la recherche d'une valeur de 3 milliards de dollars et a tenté de l'empêcher d'inscrire des étudiants étrangers.

Harvard a riposté et a poursuivi le gouvernement à deux reprises. Ses nombreux partisans ont bruyamment soutenu cette résistance. Sept professeurs sur dix ayant participé à un sondage réalisé par le Crimson, un journal étudiant, ont déclaré que l'université ne devrait pas accepter un accord. Pourtant, il semble probable que Harvard cédera, à l'instar de l'université Brown et de Columbia ; selon certaines informations, elle devrait payer jusqu'à 500 millions de dollars.

Examinons les options qui s'offrent à Harvard. Le recours en justice a d'abord été couronné de succès : un juge a suspendu l'interdiction d'admettre des étudiants étrangers. Harvard a bénéficié d'une audience favorable dans le cadre de son procès visant à rétablir le financement public. Cependant, l'université sait qu'elle ne peut pas compter sur la Cour suprême, dont la majorité est conservatrice. Parallèlement, les dommages potentiels causés par la campagne de M. Trump semblent à la fois graves et existentiels. La perte des fonds fédéraux transformerait Harvard, qui passerait d'une université de recherche de classe mondiale à une université dépendante des frais de scolarité. Ces fonds représentent 11 % du budget de fonctionnement et la quasi-totalité des fonds discrétionnaires disponibles pour la recherche. Pour s'en passer tout en maintenant le niveau actuel des dépenses, l'université devrait puiser dans sa dotation de 53 milliards de dollars à raison d'environ 2 % par an. Cela est possible pendant un certain temps, mais cela éroderait les revenus futurs et une grande partie de cette dotation est de toute façon soumise à des restrictions imposées par les donateurs.

Harvard a déjà gelé certaines embauches et licencié du personnel de recherche. D'autres difficultés sont à prévoir. Le fisc américain (IRS) envisage de révoquer le statut d'exonération fiscale de Harvard. Elise Stefanik, membre républicaine du Congrès, a suggéré que l'université s'était rendue coupable de fraude boursière lorsqu'elle a émis une obligation en avril et omis dans un premier temps d'informer les investisseurs des exigences du gouvernement. Elle souhaite que la SEC (Securities and Exchange Commission) mène une enquête. Le département de la Sécurité intérieure a demandé des informations sur les étudiants étrangers qui ont participé à des manifestations en faveur de la Palestine.

Les anciens élèves, les professeurs et les étudiants se disent fiers du président de Harvard, Alan Garber, qui résiste au chantage de M. Trump. Pourtant, de plus en plus de professeurs réclament un accord, en particulier dans les domaines de la médecine et des sciences, car ce sont eux qui ont le plus à perdre. Steven Pinker, professeur de psychologie, a plaidé en faveur d'une « sortie qui préserve la dignité » : M. Trump est peut-être « dictatorial », mais « la résistance doit être stratégique, et non suicidaire ».

Un accord similaire à celui de Brown ne serait pas si difficile à accepter. Pour récupérer ses fonds fédéraux, cette université versera 50 millions de dollars à des organisations de développement de la main-d'œuvre. Le modèle le plus probable est celui conclu avec Columbia, qui a versé 200 millions de dollars au gouvernement. La plupart de ses fonds fédéraux, d'une valeur de 1,3 milliard de dollars, ont été rétablis et les enquêtes sur les violations présumées des droits civils ont été closes. Vu de l'extérieur, le prix payé par Columbia semble arbitraire, car aucune explication n'a été donnée sur la manière dont il a été calculé.

Columbia a également accepté de démanteler ses initiatives discriminatoires diversitaires (DEI) et d'embaucher des professeurs spécialisés dans Israël et le judaïsme, entre autres concessions. Un contrôleur externe veillera au respect de ces mesures. Claire Shipman, présidente par intérim de l'université, a déclaré que Columbia n'avait pas accepté de diktats sur ce qu'il fallait enseigner ou sur les personnes à embaucher et à admettre.

C'est peut-être vrai, mais l'accord ressemble fort tout de même à une extorsion. M. Trump a contourné la procédure légale par laquelle le gouvernement peut annuler des fonds. Selon la loi, l'administration doit organiser une audience et soumettre un rapport au Congrès au moins 30 jours avant que la suppression des fonds ne prenne effet. Rien de tout cela n'a été fait. Bien sûr, les accords bilatéraux coercitifs sont le métier de M. Trump : il en a conclu avec des cabinets d'avocats et des partenaires commerciaux.

Harvard a apporté des changements sur le campus qui pourraient être qualifiés de concessions dans le cadre d'un éventuel accord. Certains semblent effectivement destinés à apaiser M. Trump. Depuis janvier, l'université a adopté la définition de l'antisémitisme préconisée par le gouvernement, mis fin à son partenariat avec l'université de Birzeit en Cisjordanie, destitué la direction du Centre d'études sur le Moyen-Orient et suspendu le Comité de solidarité avec la Palestine, un groupe d'étudiants de premier cycle. Les bureaux DEI ont été renommés et leurs sites web ont été nettoyés.

Le manque de diversité idéologique à Harvard ne sera pas résolu par décret. En 2023, un sondage Crimson a révélé que moins de 3 % des professeurs se considéraient comme conservateurs. Aujourd'hui, l'université envisagerait de créer un centre de réflexion conservateur similaire à la Hoover Institution de Stanford. Sur le campus, il semble que trop d'étudiants ne soient pas armés pour faire face à des opinions qui remettent en question les leurs, explique Edward Hall, professeur de philosophie.

Source : The Economist



jeudi 31 juillet 2025

Émission de CO2 par pays

Asie en pleine industrialisation, Occident en déclin économique relatif.




Tout nouvel immigrant au Canada (ne provenant pas des États-Unis) augmente les émissions de CO2 planétaires puisqu'il en consommait nettement moins dans son pays d'origine.

mercredi 30 juillet 2025

Éloïse Boies — Vers l'effondrement des médias de grand chemin ?

Entretien avec Éloïse Boies de la chaîne « Élo veut savoir » sur sa poursuite contre YouTube, son parcours l'ayant mené à fonder son média alternatif, le consensus médiatique actuel, les accusations de complotisme et l'avenir des médias de masse au Québec.

Pour rejoindre le recours collectif contre Google et Facebook, allez sur ce site des avocats.

Une de ses émissions récentes: 

lundi 28 juillet 2025

Immigration et opinion publique : le cas de 5 pays européens.

En Allemagne, les sondages les plus récents montrent une progression constante du refus d'accueillir des réfugiés : en janvier 2025, 68% des Allemands souhaitent en accueillir moins, contre 20% en 2014.
 

En Espagne, récemment confrontée à des flux venant d'Afrique, l’opinion publique rejette largement la politique d'immigration actuelle. 73 % des Espagnols estiment qu’elle est trop importante dans leur pays, y compris une majorité des électeurs de la gauche traditionnelle.
 

En Italie peu d'enquêtes sont réalisées, mais on constate via un sondage international que 69 % des Italiens considèrent les immigrés comme un fardeau.

Par ailleurs, 56 % estiment que l’immigration a eu un impact négatif sur le pays, le plus fort taux en Europe.

Les Britanniques sont aussi très critiques de la gestion actuelle.

49% estiment que l'immigration au cours des 10 dernières années a été plutôt mauvaise pour le pays.

L'immigration est redevenue l'enjeu n°1 pour les Britanniques, comme à l'époque du Brexit.


La France ne fait pas exception à ce malaise face à l'immigration : un sondage CSA de janvier 2025 indique que 65 % considèrent que la France est « submergée par l’immigration ».

Confirmé par une enquête Cevipof : 63 % pensent qu’il y a trop d’immigrés.

Ce rejet de l'immigration n'est pas nouveau, il ne date pas de la crise des réfugiés ou de la forte hausse des entrées en Europe.

Dès le printemps 1992, dans un @EurobarometerEU, une majorité d'Européens estimaient qu'il y avait trop d'extra-Européens dans leur pays.


dimanche 27 juillet 2025

Et soudain, l'hystérie autour du changement climatique a disparu

Seuls 4 % des Canadiens considèrent le changement climatique comme notre principal problème. Mais beaucoup d'entre eux sont des militants purs et durs prêts à bloquer des projets.

Joe Oliver, ancien ministre des Ressources naturelles et des Finances du gouvernement Harper, a été incité par l'actualité à écrire l'article ci-dessous dans le National Post. 

Au cours des derniers mois, l'inquiétude du public concernant le changement climatique a consi­dé­ra­blement diminué, remplacée par un nouvel enthousiasme pour l'exploitation des vastes réserves de pétrole et de gaz du Canada [et potentiellement du Québec, mais il refuse d'explorer...]. Le gouvernement fédéral subit désormais une pression politique croissante pour accélérer la construction de pipelines vers les côtes, qui apporteront croissance économique, emplois, sécurité énergétique et financement pour les programmes sociaux ou allégements fiscaux.

Qu'est-ce qui a provoqué ce revirement radical de l'opinion publique ? Et le gouvernement tiendra-t-il ses promesses ?

Le Premier ministre Mark Carney a longtemps défendu le catastrophisme climatique et l'engagement envers la neutralité carbone, tant dans ses différentes fonctions sur la scène internationale que dans son livre Value(s), publié en 2021. Cependant, après son entrée en politique, il s'est rallié aux énergies fossiles, et les médias traditionnels l'ont suivi dans un abandon vertigineux de leur obsession pour la menace existentielle que le réchauffement climatique ferait peser sur l'humanité. La question de savoir si la transformation de Carney relève de l'opportunisme politique conjoncturel ou d'une reconnaissance tardive de la réalité économique et scientifique est désormais déterminante pour les perspectives économiques du Canada.   

Au cours des quatre dernières décennies, le plaidoyer incessant des milieux scientifiques subventionnés, des médias et des faiseurs d'opinion a fait du réchauffement climatique, puis du changement climatique [et enfin du dérèglement] une opinion consensuelle. Tout écart par rapport à la doxa mettait en péril la réputation et la carrière des scientifiques et des universitaires, qui risquaient de perdre leur financement, voire leur emploi. Il n'est donc pas surprenant qu'en 2022, 73 % des Canadiens estimaient que nous étions confrontés à une urgence climatique. Mais aujourd'hui, selon un récent sondage Léger, seuls 4 % des Canadiens considèrent le changement climatique comme le problème numéro un auquel leur pays est confronté. [Andrew Enns, vice-président exécutif chez Léger, explique que les enjeux économiques dominent désormais les priorités citoyennes. Les relations commerciales et les tensions avec les États-Unis arrivent en tête (20 %), suivies de près par l’inflation (18 %), le logement (11 %), l’état général de l’économie (10 %), les soins de santé (9 %) et l’immigration (6 %).

Les droits de douane choquants imposés par le président Donald Trump et ses propos sur la création d'un 51e État ont détourné l'attention des Canadiens du changement climatique. Il en va de même pour les coûts exorbitants des politiques écologiques, la prise de conscience croissante que rien de ce que fait le Canada ne peut avoir un impact mesurable sur les températures mondiales, et le fait que les politiques écologiques n'ont pas été adoptées dans de nombreux pays ou sont devenues politiquement toxiques dans ceux où elles l'ont été. Malgré les billions (les milliers de milliards en français) de dollars dépensés à l'échelle mondiale pour réduire les émissions, les hydrocarbures représentent toujours plus de 80 % de l'énergie primaire mondiale. Selon McKinsey, atteindre la neutralité carbone à l'échelle mondiale d'ici 2050 coûterait aux pays occidentaux entre 275 et 550 billions (275 000 et 550 000 milliards) de dollars, un coût prohibitif. Cela rend cet objectif politiquement intenable.

Andy Kessler, chroniqueur au Wall Street Journal, a récemment fait valoir que les politiques écologiques sont en grande partie responsables de la chute du PIB européen, qui est passé d'un niveau équivalent à celui des États-Unis en 2008 à seulement deux tiers de celui-ci aujourd'hui. La flambée des prix de l'énergie a entraîné une désindustrialisation, aggravant les effets des impôts élevés et des dépenses sociales, des réglementations intrusives et d'une main-d'œuvre protégée. Le Canada a également connu une décennie perdue pour des raisons similaires : une croissance de seulement 0,5 % du PIB réel par habitant, contre 20,7 % aux États-Unis. [Un autre élément fut l'immigration massive de gens moins bien payés ou moins productifs que la moyenne, ce qui mécaniquement fait baisser le PIB par habitant.]

Enfin, peut-être le public est-il enfin devenu sceptique face aux prophéties sans fin annonçant des catastrophes imminentes : les ours polaires « en voie de disparition » ont presque triplé au cours des 50 dernières années ; des centaines d'îles du Pacifique ont vu leur superficie augmenter ; les décès dus à des conditions météorologiques extrêmes ont diminué de 99 % au cours des 100 dernières années ; neuf fois plus de personnes meurent du froid que de la chaleur ; etc. Le petit âge glaciaire a pris fin à la fin du XIXe siècle avec une hausse progressive des températures — sinon, nous serions toujours dans une période glaciaire. Pourtant, il y a seulement 14 mois, Simon Stiell, secrétaire exécutif de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, déclarait encore que nous n'avions que deux ans pour sauver la planète.

Les futurs psychologues, économistes et historiens examineront le phénomène de l'hystérie climatique collective du début du XXIe siècle, ce qui l'a provoqué, ce qui y a mis fin (si tant est qu'il ait pris fin) et les dégâts qu'il a causés. Une chose est presque certaine : personne n'admettra sa culpabilité pour les énormes dommages infligés au Canada et à d'autres économies. Bien que le public soit passé à autre chose, un groupe de militants climatiques purs et durs est prêt à exploiter tous les obstacles juridiques et réglementaires au développement des ressources au Canada. Le gouvernement fédéral devra utiliser tous ses pouvoirs législatifs et exécutifs pour mener à bien les nouveaux projets énergétiques qu'il dit favoriser. Ce n'est qu'alors que les Canadiens sauront si Mark Carney a vraiment changé ses convictions profondes.
 
Voir aussi 
 
Les journalistes du Washinton Post ont récemment cité une nouvelle étude sur les températures à la surface de la Terre au cours des 485 millions d’années écoulées. En 2023, la température moyenne de la Terre atteindra 14,98 °C, bien en deçà de la moyenne de 36 °C relevée par l’étude il y a environ 100 millions d’années. La tendance montre que les températures de la Terre baissent depuis 50 millions d’années... 
 

samedi 26 juillet 2025

Le fédéral a dépensé près de 2,6 milliards pour accueillir les candidats réfugiés

Un demandeur d'asile qui se trouve au Canada depuis novembre 2024 retourne à son hôtel de Niagara Falls, en Ontario, le 30 janvier 2025. Le gouvernement fédéral a commencé à héberger les demandeurs d'asile dans des hôtels en 2017, à titre de mesure temporaire visant à soulager les refuges surpeuplés.

Depuis 2017, le gouvernement fédéral a dépensé :
  • 1,1 milliard $ pour loger temporairement les demandeurs d’asile dans des hôtels, en raison de la surcharge des refuges.
  • 1,5 milliard $ supplémentaires ont été versés aux provinces et municipalités via le programme Programme d'aide au logement provisoire (PALP) pour les aider à couvrir les coûts liés à l’accueil.
Contexte et évolution
  • Le recours aux hôtels a commencé en 2017, comme solution d’urgence.
  • Le nombre de demandeurs d’asile au Canada est passé de 50 365 en 2017 à 173 000 en 2024.
  • En 2024, les principales villes d’arrivée sont Montréal et Toronto.
Coûts actuels

  • En 2024, le coût moyen par demandeur d’asile hébergé à l’hôtel est de 132 $/jour, en baisse par rapport à 199 $/jour en janvier 2024. 

  • À ce coût doit s'ajouter le prix des repas, environ 84 $/jour.
  • À son pic en 2023, 46 hôtels étaient utilisés à travers le pays, pour un coût moyen de 205 $/nuit.
  • Le fédéral finance encore actuellement 500 demandeurs dans 5 hôtels (1 au Québec, 4 en Ontario).



Installations et mesures

Le gouvernement maintient environ 3 500 lits en réserve.
En 2024, des avis de quitter les hôtels ont été envoyés à des demandeurs d’asile pour les inciter à se reloger dans les communautés. Résultat : 13 000 personnes ont quitté les hôtels entre janvier et mars 2024.
Le plus grand centre d’accueil au pays a ouvert récemment dans la région de Peel, près de Toronto, avec une capacité de 680 places, financé à hauteur de 22 millions $.

Financement municipal et provincial (2017 à 2024)

Destinataire Montant reçu (en million $)
Ville de Toronto  669,7
Québec (province)    542,7
Ottawa (ville)        105,7
Colombie-Britannique     14,4
Région de Peel        97,8

Réactions et critiques

Des élus (NPD, conservateurs) jugent que le système actuel n’est pas viable, trop coûteux et perçu comme injuste pour les Canadiens vivant une crise du logement.
Le ministère reconnaît que l’hébergement en hôtel n’est pas une solution durable, et que le but est d’aider les demandeurs à accéder à un logement autonome le plus tôt possible. Également subventionné ?

Nouvelles politiques

Le projet de loi C-2, déposé avant la pause estivale du Parlement, vise à réduire le nombre de demandes d’asile, notamment en limitant les audiences à ceux arrivés depuis moins d’un an et en refusant l’accès à ceux qui franchissent illégalement la frontière depuis les États-Unis.

En résumé

Depuis 2017, 2,6 milliards $ au total ont été engagés pour loger les demandeurs d’asile.
Le recours aux hôtels, bien qu’important, est officiellement considéré comme transitoire.
L’afflux continue, notamment au Québec et en Ontario, ce qui sature les systèmes d’hébergement locaux et suscite des tensions politiques.




L'IA peut combler les lacunes des inscriptions latines fragmentaires


Comment un historien peut-il interpréter un texte dont l'auteur ou dont l'âge sont incertains, et dont certains mots manquent ? La question n'est pas nouvelle. Mais là où les experts ont échoué, les historiens se tournent vers les modèles d'intelligence artificielle (IA) pour obtenir des suggestions, avec des résultats impressionnants.  Au cours des cinq dernières années environ, les capacités prédictives des réseaux neuronaux informatiques sont de plus en plus utilisées pour reconstruire le passé.

Au cours des cinq dernières années environ, les capacités prédictives des réseaux neuronaux artificiels ont été de plus en plus utilisées pour reconstruire le passé. Au cours de cette période, ils ont contribué à toutes sortes de tâches, depuis la reconstitution de tablettes babyloniennes brisées jusqu'au déchiffrage des caractères inscrits sur d'anciennes carapaces de tortues chinoises. L'exemple le plus marquant est celui d'adeptes de l'IA qui ont utilisé des numérisations de haute qualité pour dérouler des rouleaux de papyrus impossibles à ouvrir car carbonisés lors de l'éruption du Vésuve en 79 après J.-C.

Désormais, les scientifiques pourront utiliser des modèles d'IA pour suggérer des dates et des origines géographiques probables pour des échantillons d'inscriptions latines, et même prédire les parties manquantes du texte. Yannis Assael, chercheur chez Google DeepMind à Londres, et Thea Sommerschield, historienne à l'université de Nottingham, ont décrit leur modèle, Aeneas (du nom latin d'Énée, l'ancêtre mythologique des Romains), dans un article publié cette semaine dans Nature. Aeneas peut traiter des images de textes latins ainsi que des inscriptions transcrites, il s'agit d'une version améliorée d'un modèle antérieur qui se concentrait sur les inscriptions grecques.

Aeneas représente la dernière étape vers l'objectif des chercheurs : utiliser des modèles d'IA pour faire plus que simplement lire des textes isolés. Assael et Sommerschield espèrent utiliser de grands modèles, entraînés sur des dizaines de milliers de sources écrites, pour découvrir des liens invisibles sur la vie dans l'Antiquité. Aeneas a été entraîné sur plus de 175 000 inscriptions, datant du VIIe siècle avant J.-C. au VIIIe siècle après J.-C., et couvrant les provinces romaines de la Grande-Bretagne à la Mésopotamie.  Le modèle peut être extrêmement précis : lors d'essais, il a daté des textes qu'il ne connaissait pas à 13 ans près de la date admise.

Il peut également suggérer d'autres sources potentiellement connexes. Avec environ 1 500 nouvelles inscriptions latines découvertes chaque année, allant des épitaphes d'esclaves aux décrets impériaux, l'identification de parallèles pertinents est l'une des tâches les plus importantes – et les plus difficiles – des historiens. Les experts humains, même ceux qui ont une mémoire particulièrement impressionnante, ne possèdent une connaissance approfondie que de domaines spécialisés, tandis que les recherches automatisées dans un corpus plus large se limitent généralement à des chaînes de caractères. Aeneas, en revanche, peut rechercher des liens thématiques à travers les millénaires et dans tout le monde romain. Aeneas « nous aide à faire les choses plus rapidement et mieux », explique le Dr Sommerschield, mais va également « au-delà de ce que nous pouvions faire auparavant ».

Les chercheurs ont également testé leur modèle sur des inscriptions controversées telles que les Res Gestae Divi Augusti, un récit de la vie du premier empereur romain, Auguste, gravé sur le mur d'un temple à Ancyre (Ankara), en Turquie, ainsi qu'un texte datant du IIIe siècle après J.-C. provenant d'un autel de Mayence, dans l'Allemagne actuelle. Ils ont conclu qu'Aeneas surpassait de loin les recherches informatiques existantes, identifiant « des liens historiques subtils et significatifs au-delà des correspondances littérales, d'une manière qui reflète le raisonnement d'experts ». Aeneas a trouvé d'autres textes composés à des décennies d'intervalle qui présentaient des similitudes avec le texte de l'autel s'étendant notamment de la ville de Bonn à la Bulgarie, suivant les mouvements de l'armée romaine. Assael et Sommerschield affirment qu'il s'agit essentiellement de modéliser la manière dont l'Empire romain était connecté, à travers les mouvements de personnes, de croyances et d'idées.

C'est toutefois la capacité d'Aeneas à suggérer des passages correspondant à des lacunes de longueur incertaine qui enthousiasme le plus certains historiens. De nombreuses inscriptions latines qui ont survécu sont gravement endommagées, ce qui signifie qu'un tel outil pourrait générer de nouvelles perspectives à partir du matériel existant. Pour l'instant, les capacités d'Aeneas à combler les lacunes sont moins impressionnantes que ses capacités de datation. Lorsqu'on lui a présenté un texte délibérément en partie masqué, les segments avérés (d'une longueur maximale de 20 caractères) figuraient parmi les 20 meilleures prédictions d'Aeneas dans 46,5 % des cas. Lorsque la longueur du segment est inconnue, ce taux tombe à 32,7 %. Néanmoins, selon Charlotte Tupman, qui enseigne les lettres classiques et les humanités numériques à l'université d'Exeter, cela représente un bond en avant considérable. La capacité d'Aeneas à expliquer son raisonnement, en fournissant des « cartes de pertinence » qui mettent en évidence les parties de la source qui ont influencé ses prédictions, est peut-être le plus utile.

Collaborer

Pour tester la manière dont leur modèle d'IA augmente les capacités humaines, l'équipe a demandé à 23 historiens d'analyser et de restaurer une liste de textes dont les données d'identification avaient été supprimées. Ils ont constaté que, dans l'ensemble, les historiens travaillant en collaboration avec l'IA obtenaient des résultats plus précis que lorsqu'ils travaillaient sans l'aide de l'IA. Cela constitue un « argument convaincant » en faveur de l'intégration d'Aeneas comme outil des historiens, explique le Dr Tupman. Les volontaires ont déclaré que le contexte fourni par Aeneas était utile dans 90 % des cas et avait amélioré leur confiance dans les tâches clés de 44 %. L'un d'eux a déclaré que les textes similaires récupérés par Aeneas avaient « complètement changé sa perception » d'une inscription ; un autre a déclaré avoir accompli en 15 minutes ce qui lui aurait normalement pris plusieurs jours.

Assael et Sommerschield suggèrent que des outils spécialisés tels qu'Aeneas pourraient bientôt être intégrés à des assistants virtuels, permettant ainsi aux historiens d'interroger les données dans le cadre d'une conversation plus naturelle. Ils espèrent que des techniques similaires seront appliquées à d'autres langues et à d'autres types de textes, des tablettes aux papyrus, voire même à des archives de différentes civilisations. « Plus nous disposons de données, plus nous pouvons extraire de modèles intéressants », explique le Dr Assael.

Source : The Economist