vendredi 27 novembre 2020

France — L’instruction en famille pointée du doigt


Article d’Anne Coffinier paru dans Causeur le 26 novembre 2020

Il fallait oser le faire : interdire le régime déclaré de l’instruction en famille parce qu’on veut qu’il n’y ait plus en France d’enfants exposés à des formes non déclarées d’instruction, échappant de ce fait à tout contrôle de l’État ! C’est pourtant ce que proposent les articles 18 à 20 du projet de loi confortant les principes républicains, qui sera présenté le 9 décembre prochain en Conseil des ministres. Cela défie toute logique, puisque cette loi repose sur un raisonnement absurde : prétendre mieux contrôler les enfants non déclarés en supprimant l’un des quatre régimes d’instruction dûment déclarés et contrôlés, l’instruction en famille, instaurée par Jules Ferry lui-même en 1882 ! C’est sans doute pour cela que nos interlocuteurs des cabinets ou de la haute administration place Beauvau et rue de Grenelle se montrent jusqu’à présent incapables d’expliquer le but de cette mesure. Tout au plus, avancent-ils qu’il s’agirait de repérer des enfants qui seraient actuellement « hors de tout radar », qui ne seraient ni en école publique, ni en école privée sous ou hors contrat, ni dans le régime déclaré de l’instruction en famille. Il y aurait « des trous dans la raquette ». Il est facile alors de leur faire remarquer que les enfants scolarisés dans le cadre du régime légal et réglementé de l’instruction en famille ne peuvent pas être concernés par leur inquiétude puisque précisément ils sont déclarés et connus de l’administration qui peut donc les inspecter autant de fois qu’elle le souhaite.

Comment comprendre qu’aucune disposition dans ce projet de loi ne concerne l’Éducation nationale, en particulier les enfants absentéistes ou décrocheurs, qui ne sont scolarisés que de manière erratique ? L’État n’est alors pourtant plus capable de garantir leur accès à l’instruction. De plus, ils sont les premiers exposés aux influences islamistes. De même, on ne trouvera pas un mot sur les établissements scolaires musulmans, auxquels l’État a accordé un contrat donc des financements publics, alors qu’ils sont ouvertement rattachés aux très sulfureux Frères musulmans : l’école Éva de Vitray, le collège Al Kindi à Lyon, le lycée Averroès à Lille, le groupe scolaire Ibn Khaldoun à Marseille, etc.

Les mots « islamisme » et « séparatisme islamiste » ont disparu du projet de loi

Plus fondamentalement, on notera que les mots d’« islamisme » ou de « séparatisme islamiste » n’apparaissent même pas dans un projet de loi que le président de la République lui-même nous avait dit leur être consacré. Comment pourrait-on arriver à gagner une guerre contre un ennemi qu’on s’interdit de désigner précisément ? On risque de livrer inconsidérément les musulmans, en tant que personnes, à la vindicte populaire sans pour autant avancer d’un iota dans la lutte concrète contre le séparatisme islamiste. Par contre, et l’on peut se demander à l’intention de qui ce lot de consolation a été octroyé, c’est le mot « famille » que le projet de loi veut éradiquer dans le Code de l’éducation. Ainsi, s’il prévoit quelques cas de dérogations à l’obligation de scolarisation en école, ce n’est plus pour permettre « l’instruction en famille » d’enfants porteurs de handicap ou sportifs de haut niveau, mais pour leur accorder un droit, valable pour un an seulement, et sur autorisation expresse de l’État, à recourir à « l’instruction à domicile ». Même si cette loi affirmait ouvertement lutter contre les formes de séparatisme islamiste auxquelles certains enfants pourraient être exposés, nous ne pourrions pas davantage retirer à tous les parents le droit d’instruire leurs enfants en famille, de peur que ce droit ne soit dévoyé par certains, et encore moins de peur qu’il existe « quelque part » des enfants non déclarés ou scolarisés, mais absentéistes et décrocheurs.

Les atteintes contre les principes républicains et la propagande islamiste sont bien plus largement diffusées sur Internet que dans les lieux d’instruction des enfants

La mesure d’interdiction de l’instruction en famille, outre qu’elle est illogique, est manifestement disproportionnée. Dans un État de droit, on ne peut réduire qu’avec une infinie précaution les libertés des citoyens. S’il reconnaît le caractère constitutionnel de l’instruction en famille comme c’est hautement probable, le Conseil constitutionnel ne pourra que censurer de telles atteintes à un droit qui a reçu un baptême on ne peut plus républicain des mains de Jules Ferry lui-même et qui n’a jamais été remis en cause en 138 ans. Constitutionnelle ou simplement législative, l’interdiction de l’instruction en famille ne doit de toute manière pas conduire à des atteintes disproportionnées aux libertés. Est-il vraiment raisonnable de supprimer la liberté de tous par peur qu’une poignée de gens en mésusent ? Les atteintes contre les principes républicains et la propagande islamiste sont bien plus largement diffusées sur Internet que dans les lieux d’instruction des enfants ; nul n’a jamais pensé pour autant à interdire Internet ou à soumettre la publication des articles à un régime d’autorisation ! Nous parlons tout de même qu’un droit qui est consacré par l’article 26-3 de la Déclaration universelle des droits de l’homme, qui rappelle que « les parents ont, par priorité, le droit de choisir le genre d’éducation à donner à leurs enfants ».

La capacité de chaque parent à protéger son enfant

En se proposant de retirer ce droit aux parents, le gouvernement ne semble pas prendre la mesure de ce à quoi il s’en prend : il touche à ce qu’il y a de plus viscéralement sacré pour chaque homme et chaque femme : son enfant. Et si les parents ressentent le besoin pour le protéger ou mieux l’épanouir de ne pas ou de ne plus le confier au système scolaire, rien ni personne ne pourra les en empêcher. Nul doute qu’ils n’hésiteront pas à rechercher la responsabilité pénale de l’État devant les tribunaux avec une pugnacité supérieure à ce qu’on voit pour la Covid-19. Et vous qui me lisez, si demain votre enfant est harcelé à l’école, l’y laisserez-vous parce que la loi vous a retiré le droit de le déscolariser ? Si votre enfant à haut potentiel végète à l’école parce qu’elle ne répond pas à ses besoins cognitifs et psychologiques, l’y maintiendrez-vous au risque de le voir sombrer dans l’échec scolaire et la dépression ? Nous avons tous besoin d’alternative. En 1984, les Français sont descendus par millions défendre l’école libre que Mitterrand voulait éradiquer à l’absorbant dans un grand service public unique. Aujourd’hui, ce qui est en jeu est encore plus fondamental : c’est la place de la famille aux côtés de l’enfant, c’est la capacité de chaque parent à protéger son enfant.

Les parlementaires ne s’y trompent pas. Ils sont déjà 130 à s’être positionnés contre cette mesure liberticide. Les auditions, manifestations, et consultations juridiques se multiplient. La liberté d’enseignement inclut le choix d’instruire en école ou en famille son enfant. Il serait proprement irresponsable d’interdire l’instruction en famille alors que la crise sanitaire de la Covid a montré que cela pouvait être un recours précieux, et que les difficultés de l’Éducation nationale à assurer un niveau de sécurité et d’enseignement suffisant dans tout point du territoire sont aujourd’hui reconnues par l’État lui-même. Au regard de cette situation, il est franchement malvenu de tirer sur l’ambulance qu’est l’instruction en famille et les établissements libres hors contrat. Alors, mobilisons-nous pour défendre notre légitimité en tant que parents et de veiller sur le bien de notre enfant face aux Danton au petit pied qui s’imaginent que l’enfant appartient à l’État alors qu’il n’appartient qu’à lui-même et que nous lui devons collectivement la sécurité et l’accès à la connaissance.

Anne Coffinier


lnstruction en famille en France : encore une liberté qu’on laisse sacrifier ?

Ingénieur, anciens instituteurs dotés d’une solide expérience en la matière, tous défendent l’instruction en famille, arguments à l’appui.

L’instruction en famille est une liberté fondamentale ancrée en droit français depuis un siècle et demi. En voulant l’interdire, le gouvernement se trompe de cible. Une telle interdiction serait inconstitutionnelle, profondément injuste, et porterait inéluctablement atteinte aux principes républicains, au lieu de les renforcer.

Début octobre 2020, le président de la République a annoncé vouloir supprimer la possibilité pour les parents d’instruire leurs enfants en famille (sauf exception d’ordre médical), c’est-à-dire supprimer une liberté fondamentale pourtant ancrée en droit français depuis un siècle et demi.

L’avant-projet de loi confortant les principes républicains, que nous avons consulté, prévoit de remplacer le libre choix de l’instruction en famille par : « L’instruction obligatoire est donnée dans les établissements ou écoles publics ou privés. » (article 18). Le projet de loi sera présenté en Conseil des ministres le 9 décembre.

Tous concernés

Le projet de suppression du libre choix de l’instruction en famille concerne tous les citoyens : tout parent peut se retrouver dans la nécessité de retirer un enfant de l’école pour un temps (harcèlement, profils atypiques, troubles dys, handicap en cours de reconnaissance, etc.). Savoir que cette possibilité légale existe est rassurant pour les parents comme pour les enfants.

Si cette disposition était adoptée, plus de 20 000 enfants actuellement instruits en famille ne pourraient plus l’être. Ils le sont principalement parce que c’est l’organisation qui convient le mieux aux enfants et à leur famille, ou parce qu’ils ont besoin de reprendre confiance en eux pendant quelques mois. Il est prévu que les parents souhaitant simplement continuer à exercer cette liberté fondamentale encourent six mois d’emprisonnement et 7 500 euros d’amende (article 19) !

L’instruction en famille participe à la résilience du système

L’instruction en famille fait partie intégrante du paysage de l’éducation française depuis les lois de Jules Ferry (1881-1882). Elle participe à la résilience du système et constitue un véritable laboratoire d’innovations pédagogiques. De récentes recherches en sciences de l’éducation et en sociologie montrent que la très grande majorité des enfants instruits en famille sont tout à fait intégrés à la société et socialisés.

Les familles se réunissent régulièrement pour participer à des ateliers, sorties pédagogiques ou activités sportives, favorisant dès lors les interactions et une réelle mixité sociale. De plus, les enfants pratiquent souvent plusieurs activités hebdomadaires avec d’autres enfants de leur âge (musique, sports collectifs en clubs). Et si, en grandissant, les enfants font le souhait d’intégrer l’école, d’y retourner ou de poursuivre des études, ils s’adaptent en général très bien.

Isabelle Filliozat, spécialiste de la parentalité, témoigne : « L’instruction en famille forme des enfants passionnés, à l’aise avec les adultes, autonomes et responsables. Leur esprit civique est souvent manifeste ». Certaines grandes universités de par le monde recherchent explicitement des étudiants avec ce profil.

Un projet inconstitutionnel, déjà écarté par les parlementaires plusieurs fois

En France, selon l’arrêt du Conseil d’État du 19 juillet 2017 (nous soulignons, NDLR), « Le principe de la liberté de l’enseignement, qui figure au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, implique la possibilité de créer des établissements d’enseignement, y compris hors de tout contrat conclu avec l’État, tout comme le droit pour les parents de choisir, pour leurs enfants, des méthodes éducatives alternatives à celles proposées par le système scolaire public, y compris l’instruction au sein de la famille. » Il s’agit d’un garde-fou démocratique inestimable.

En juillet 2018, les députées Anne Brugnera et George Pau-Langevin, chargées d’une « mission flash » sur la déscolarisation, précisaient : « le droit, pour tout parent, d’instruire son enfant à domicile, {est} bien établi dans notre pays. (…) dans la grande majorité des cas, la qualité de cette instruction est régulièrement contrôlée et ne fait aucun doute. »

Et en juillet 2020, la rapporteure de la Commission d’enquête sénatoriale sur la radicalisation islamiste expliquait que : « L’instruction est obligatoire, mais elle est libre. Des familles ont fait le choix de la scolarisation à domicile sans avoir la moindre velléité d’éloigner leur enfant de la République. À mon sens, il revient plutôt à l’Éducation nationale de veiller à ce que les enfants présentant un risque de radicalisation ne quittent pas l’école. Il ne s’agit pas de supprimer toute liberté de choix aux familles. »

Une « punition collective » synonyme de déni de droit

Parmi les raisons invoquées par le ministère de l’Éducation nationale, la difficulté de l’exécutif à faire respecter les dispositions légales existantes, notamment à diligenter les contrôles. Faudrait-il alors retirer la liberté de manifestation à tous les Français parce que des casseurs s’infiltrent dans les cortèges ? Et bâillonner la liberté d’expression pour éviter d’éventuels troubles à l’ordre public ? N’est-ce pas le rôle de l’exécutif que de faire appliquer les lois ?

Rappelons qu’en juin 2020, le ministre de l’Éducation déclarait encore devant le Sénat : « La liberté d’instruction en famille a un fondement constitutionnel puissant et qu’on ne peut que reconnaître, et qui est, je pense, positif » (…) « on doit bien appliquer les règles que nous avons établies dans la loi de 2019 (Loi pour l’école de la confiance, NDLR). La mise en œuvre débute ; nous sommes en phase ascendante (…) Sur le plan des principes juridiques, il me semble qu’on est allé à un certain stade qui est le bon. »

Une solution de facilité qui se trompe de cible

L’interdiction de l’instruction en famille n’est pas la réponse à l’existence de formes clandestines d’endoctrinement hors du contrôle de l’État. Les enfants « hors radar », pris en charge dans des « écoles de fait » non déclarées, ou les enfants en décrochage scolaire ne font par définition pas partie de ceux instruits en famille, qui sont quant à eux suivis et contrôlés par l’État. Une telle interdiction ne permettrait pas non plus de prévenir la dérégulation sociale (isolement — y compris vis-à-vis de la famille —, perte de sens et d’estime de soi) qui fait le lit de la radicalisation.

En conclusion

L’interdiction de l’instruction en famille serait non seulement profondément injuste pour les milliers de parents qui ont choisi d’instruire leurs enfants en famille dans le respect des principes républicains, mais aussi inconstitutionnelle.

Se crisper sur des politiques autoritaristes par facilité sonne comme un aveu d’impuissance de l’exécutif. Nous appelons le président de la République, élu sur des idées de progressisme et de pluralisme, à faire preuve de créativité et de rationalité pour garantir le respect des libertés fondamentales en France, et en particulier la liberté d’enseignement.

Restreindre les libertés fondamentales, c’est affaiblir l’état de droit et par là même porter inéluctablement atteinte aux principes républicains au lieu de les renforcer.

Pour les associations et collectifs représentant les familles instruisant leurs enfants :

Claudia Renau, éditrice, ex-professeure agrégée d’histoire-géographie, association Les Enfants d’Abord
Alix Fourest, ingénieure en informatique, association Libres d’Apprendre et d’Instruire Autrement
Denis Verloes, chef de projet multimédia, Fédération pour la Liberté du Choix de l’Instruction et des Apprentissages
Laurence Fournier, ex-institutrice, collectif L’école est la maison
Armelle Borel, auto-entrepreneure, association Union Nationale pour l’Instruction et l’Épanouissement
Thérèse Louvel, ex-enseignante de Lettres, association Choisir d’Instruire Son Enfant

Source : Médiapart


Dans quelle mesure l'orientation politique et le sexe déterminent-ils les valeurs de la tour d'ivoire ?

Une étude d’une équipe en psychologie de l’Université d’État de New York a interrogé près de 200 universitaires de partout aux États-Unis et leur a demandé d’évaluer dans quelle mesure ils accordent la priorité à chacune des cinq valeurs universitaires suivantes :

  • la rigueur scientifique,
  • le progrès des connaissances,
  • la liberté universitaire,
  • le bien-être émotionnel des élèves,
  • la « justice sociale ».

L’équipe a demandé à ces professeurs de préciser leur sexe, de leur orientation politique, de leurs traits de personnalité de base (ouverture, conscience, extraversion, amabilité et stabilité émotionnelle) et de leur domaine d’études. Confirmant les résultats que suggérait le professeur Jonathan Haidt (voir vidéo), plusieurs de ces variables étaient fortement liées à l’orientation politique des universitaires.

Voici quelques points saillants des résultats :

Les professeurs relativement conservateurs valorisaient la rigueur scientifique et l’avancement des connaissances plus que les professeurs relativement libéraux.

Les professeurs relativement libéraux valorisaient la « justice sociale » et le bien-être émotionnel des étudiants plus que les professeurs relativement conservateurs.

Les professeurs s’identifiant comme des femmes avaient aussi tendance à privilégier, relativement, la « justice sociale » et le bien-être émotionnel (par rapport aux professeurs qui s’identifiaient comme des hommes).

Les professeurs de commerce accordaient une importance relative à l’avancement des connaissances et à la rigueur académique, tandis que les professeurs en éducation mettaient un accent relatif sur la justice sociale et le bien-être émotionnel des étudiants.

Indépendamment de ces autres facteurs, les professeurs relativement aimables ont tendance à mettre davantage l’accent sur la justice sociale et le bien-être émotionnel des étudiants.

L’étude se conclut sur une discussion qui se concentre en grande partie sur la façon dont ces données sont cohérentes avec un portrait hautement politisé du monde universitaire américain. Une tour d’ivoire où l’orientation politique, le sexe biologique, la personnalité et le domaine d’études façonnent de manière importante les valeurs des professeurs.




L'Art européen selon Google

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Ah, trois Africains...

jeudi 26 novembre 2020

« [En Asie, l]es gens me ressemblent et ça fait du bien » de dire l'immigrée qui se plaint du racisme systémique

Le commentaire de Mathieu Bock-Côté, chroniqueur et blogueur au Journal de Montréal et au Journal de Québec et animateur du balado « Les idées mènent le monde » à QUB radio : une blogueuse voyage asiatique aime se retrouver parmi ceux et celles qui lui ressemblent… physiquement.

Écoutez l'émission (14 minutes)



Sonia Li, née en Chine, explique que le quartier Montréalais de Villeray est trop blanc et trop francophone [« ce n’est pas le plus diversifié culturellement »] et qu’elle se sent mieux en Asie où les gens lui ressemblent ethniquement, tout en accusant le Québec de racisme systémique : 

« Face au racisme [au Québec], j’ai finalement choisi de cesser le silence et de me tenir debout »

« Je suis bien en Asie. Ce sera toujours une de mes maisons. Les gens me ressemblent et ça fait du bien. »

Allez comprendre. Cette apparente contradiction, cet éloge de l’homogénéité interdite au Québec, n’a pas empêché le Huff Post de publier cette « courageuse » chronique.  

 

 

Homogénéité rassurante ?

En marchant vers l’épicerie aujourd’hui, je regardais ces jeunes du secondaire. Ils étaient pleins de vie, beaux et différents. J’habite Villeray à Montréal. Bien que j’aime mon quartier, ce n’est pas le plus diversifié culturellement. Rien à voir avec le centre-ville ou encore Parc-Extension où les langues et les cultures se mélangent. Mais, en marchant à l’heure du lunch aujourd’hui, cette beauté culturelle m’a frappée. Et pourtant, ces jeunes, on les oublie.

Adib Alkhalidey a dit à Tout le monde en parle dernièrement qu’on est en train de sacrifier une génération de talent, d’ambition et de richesse. Et je me suis reconnue dans ça. J’ai 27 ans. Ces jeunes avaient 10 ans de moins que moi, et pourtant, ils vivent les mêmes sentiments que j’ai ressentis à leur âge.

Est-ce que le Québec est chez moi ? Où sont les gens comme moi ?

Je suis bien en Asie. Ce sera toujours une de mes maisons. Les gens me ressemblent et ça fait du bien.

Je viens tout juste de revenir au Québec. Il y a un mois, je vivais en Thaïlande. Ça faisait près de trois ans que je vivais à l’étranger, principalement en Asie. On m’a souvent demandé pourquoi. Et bien que cette réponse pourrait être répondue de mille et une façons, la plus simple, c’est que je suis bien en Asie. Ce sera toujours une de mes maisons. Les gens me ressemblent et ça fait du bien.

[…] Il y a quelque chose d’extrêmement puissant dans le fait d’être dans un environnement où tu te fonds dans la masse, où tu n’as pas à gérer les micro (parfois grandes) agressions. Quotidiennes pour certains ou événements rares pour d’autres, ces micro-agressions s’accumulent, et à la fin, c’est lourd pour le cœur. […] 

Au gouvernement, il faudrait d’abord reconnaître l’existence du racisme systémique au Québec. Ça fait toujours mal de reconnaître qu’on a eu tort, mais une fois que c’est fait, on apprend et on se relève les manches pour travailler à améliorer les choses. […]


Diversité blanche (capillaire) malvenue ?

mercredi 25 novembre 2020

Célèbre journaliste féministe et travailliste démissionne du Guardian à cause du climat de censure

Après Bari Weiss (voir ce billet) qui a quitté le New York Times, Suzanne Moore, journaliste féministe au Guardian, autre quotidien de gauche, quitte sa rédaction écœurée par le climat « woke ». Extraits traduits de la retranscription de son interview à Unherd.

Nous sommes en mars 2020. Depuis plusieurs mois maintenant, j’essaie d’écrire quelque chose — n’importe quoi — sur le « débat trans » dans ma rubrique du Guardian. Ce débat oppose certaines féministes et des militants pro-transsexuels. Mais si je glisse un jour une ligne sur l’expérience féminine des personnes ayant un corps de femme et sur l’importance de cette expérience, pourtant toujours étouffée. On la fait disparaître. Cette idée est bloquée, pas explicitement, mais elle n’est certainement pas publiée. Mes éditeurs disent des choses comme : « Cela n’ajoute rien à votre propos » ou c’est une « distraction » par rapport à l’argument.

Même si j’écrivais pour eux depuis des décennies, les rédacteurs essaient constamment de m’orienter vers des sujets de « style de vie » pour ma chronique. L’un d’eux suggère même que je ne devrais pas du tout toucher à la politique. Et pourtant, l’année précédente, j’avais remporté le prix Orwell du journalisme politique.

J’ai donc enfin pu écrire un article sur les problèmes des trans. Sur quoi 338 de mes « collègues » se sont plaints par écrit de cet article au rédacteur en chef.

Aujourd’hui, six mois plus tard, j’ai démissionné. Et j’essaie toujours de comprendre pourquoi j’ai été traité d’une façon si épouvantable.

Pourtant, les insultes que j’ai subies sur la question des trans étaient différentes et pires que tout ce qui s’était fait auparavant. Les réseaux sociaux commençaient à faire des efforts. Cela m’a ouvert les yeux. Twitter était rempli de gens qui me disaient comment ils allaient me violer, me décapiter, éjaculer dans ma tête, me brûler. Tout cela était en quelque sorte lié à la remarque du transsexuel brésilien [Suzanne Moore avait cité une phrase sur le corps des transsexuels brésiliens dans un article précédent]. La police est venue me voir, mais elle n’a pas vraiment compris ce qu’était Twitter. Ils ont dit des choses comme : « Ne leur répondez pas par courriel, ma belle ». Les pires menaces venaient de personnes qui savaient où j’habitais et qui disaient qu’elles rosseraient mon fils de 11 ans. […]

En 2018, l’atmosphère était toxique. Un collègue chroniqueur du Guardian a répondu à un message que j’avais envoyé sur le fait d’être courtois lors de la fête de Noël : « Vous avez provoqué la transphobie la plus dégoûtante, pour laquelle vous ne vous êtes jamais excusés, vous avez qualifié l’islamophobie de mythe et vous vous en prenez publiquement aux gens de gauche ». Cette personne a poursuivi en disant que je me sentais en insécurité « parce qu’une nouvelle génération de jeunes gauchistes avait pris l’ascendant dans l’opinion publique ». Je n’ai même pas compris l’accusation d’islamophobie. […]

Ce qui nous amène à mars 2020 [l’article en question]. Finalement, un grand rédacteur m’a permis d’écrire sur la façon dont les femmes critiques en matière du genre voulaient faire valoir leurs droits fondamentaux. Un professeur d’histoire de la classe ouvrière à Oxford, Selina Todd, a été désinvité d’un événement. J’ai noté, à propos de cet incident, que ce sont encore les femmes, jamais les hommes, qui perdaient des emplois, des revenus et des plateformes publiques si elles s’exprimaient. 

[La veille de la prise de parole de Todd, elle dit avoir été désinvitée au motif qu’elle s’était adressé à une réunion du groupe Woman’s Place UK, qui a été formé en 2017 après des modifications proposées à la loi sur la reconnaissance des genres. Le groupe fait campagne pour que les femmes aient des espaces séparés et des services distincts sur la base de notre sexe biologique. Todd, une professeur respectée d’histoire de la classe ouvrière, a, par conséquent, été accusée sur les réseaux sociaux d’être transphobe. Woman’s Place UK a récemment été défini comme un « groupe de haine transexclusionniste » dans un engagement mis en place par le Campagne travailliste pour les droits trans. Engagement que les candidates à la direction travailliste Lisa Nandy et Rebecca Long-Bailey se sont engagées à respecter.]

Beaucoup de femmes m’ont écrit : elles ne prenaient pas position, mais elles étaient dans l’ensemble inquiètes. J’ai écrit que je croyais que le sexe biologique était réel et qu’il n’était pas transphobe de comprendre la science fondamentale. À mon avis, la chronique était assez modérée. 

Elle a été publiée. Puis, j’apprends que nombre de gens sur les réseaux sociaux me remercient d’avoir dit ce qu’il fallait dire. Mais il existe d’autres réactions : le lot « Crève dans un fossé, terf » qui, chose extraordinaire, me disait de mourir dans un fossé. [terf = acronyme signifiant féministe radicale transexclusionniste]. Une nouvelle fois. […]

Puis est venue la lettre au rédacteur en chef, exprimant la consternation que le Guardian soit une publication « hostile aux droits des trans et aux employés trans », puisque trois personnes trans avaient apparemment démissionné au cours de l’année dernière. Cette lettre me l’apprenait. Bien que je n’aie pas été nommée dans la lettre, c’était très clairement une réponse à ma chronique. Trois cent trente-huit personnes l’ont signée.

Aucun d’entre eux n’a eu la décence de me téléphoner. Le Guardian devrait-il être un lieu de travail accueillant pour les transgenres ? Oui, bien sûr. Devrait-il être un lieu où l’on discute de questions compliquées ? Encore une fois, oui.

Mon expérience est que j’ai été plus censuré par la gauche que par la droite et cela ne me fait pas plaisir de le dire. […]

La lettre affirmait clairement que ce n’était pas seulement les activistes des réseaux sociaux qui voulaient que je quitte le journal. Mes collègues m’avaient en ligne de mire : il était temps de passer la main à la jeune équipe de Corbyn, qui passe sa vie à se moquer des médias grand public, mais qui est impatiente d’en faire partie. Savaient-ils bien écrire ? Dire quelque chose qui vienne du cœur ? Est-ce que cela compte ? Apparemment non, ils pensent simplement comme il faut.

La lettre a ensuite été transmise à Buzzfeed, puis les noms ont été rendus publics. J’étais dévasté de voir que des gens que j’aimais et avec qui j’avais travaillé avaient fait cela. En 30 ans de journalisme, j’ai souvent été en désaccord avec les gens et j’ai eu des désaccords avec eux, mais personne n’a jamais fait quelque chose d’aussi sournois que d’essayer de faire virer quelqu’un à cause d’une chronique.


J’ai énuméré les noms de mes dénonciateurs sur Twitter. J’ai vu que l’un d’entre eux prétend que je les avais « doxxés », ce qui n’est pas le cas car les noms étaient déjà dans le domaine public. J’ai écrit une lettre bouleversante et émouvante aux personnes que je connaissais, leur demandant comment ils avaient pu faire cela. Quel genre de victoire avaient-ils obtenu ?

Je me sentais vraiment mal. Comment vous sentiriez-vous si 338 collègues vous intimidaient ? Mais je suis parti à Amsterdam pour faire une retraite aux champignons [hallucinogènes] parce que la vie continue.

Par erreur, j’ai pensé que mes rédacteurs en chef me défendraient parce que c’était ce qui s’était passé dans d’autres journaux où j’avais travaillé ou bien ils pourraient faire une déclaration publique. Ils ne l’ont pas fait. Il y a eu un courriel interne. Et j’ai entendu dire qu’il a été discuté au Scott Trust qui dirige le journal. Je n’ai vraiment aucune idée de ce que cela signifie. Je ne comprends pas non plus ce que signifie l’indépendance éditoriale. Le comprennent-ils ? Pas selon moi.

Pour moi, ils ont fait preuve d’une lâcheté totale. Ne devraient-ils pas soutenir leurs journalistes ? Mais sur cette question, le Guardian a pris peur. Je pense que c’est en partie à cause du parti pris de l’édition américaine du Guardian et en partie parce que le journal est parrainé par la fondation Open Society [de Sorros], qui promeut les droits des transgenres. […]

Source : Unherd (en anglais).

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Les athées américains plus enclins à se dire blancs que les protestants et les catholiques

Un athée est plus susceptible de s'identifier comme blanc, non hispanique qu'un protestant ou un catholique.

En fait, les jeunes athées sont l'une des catégories « religieuses » les moins diversifiées sur le plan racial aux États-Unis. Seuls les mormons sont en général plus nombreux à se dire « blancs ».


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Explications savantes de l’ancien américain président Obama, le messie métis, sur le succès de Donald Trump auprès des hispaniques :

« … Il y a beaucoup d’hispaniques évangéliques qui, du fait que Trump dit des propos racistes sur les Mexicains ou met des travailleurs sans papiers dans des cages, pensent que c’est moins important que le fait qu’il soutienne leurs opinions sur le mariage gay ou l’avortement. »
Obama semble oublier que les immigrants illégaux (ils ne sont pas des « travailleurs sans papiers ») étaient aussi parqués dans des cages à son époque (même le très démocrate Washington Post doit l'admettre, mais c'était selon lui parce que le nombre d'immigrants illégaux était tellement important qu'il a fallu pallier le manque de place, bref le résultat de la politique migratoire très laxiste d'Obama).

En outre, Trump n'a jamais fait campagne sur une remise en cause du mariage homosexuel, il ne s'est jamais exprimé contre celui-ci. Contrairement à Obama qui, en 2008, s'opposait publiquement au mariage pour les couples de même sexe. Selon David Axelrod, toujours dans le très progressiste Washington Post, Obama aurait menti à l'époque.
 
M. Obama a également déclaré que le parti républicain de M. Trump avait encouragé les hommes blancs à se considérer comme des victimes. “Vous avez vu se créer, dans la politique républicaine, ce sentiment que les hommes blancs sont des victimes”, a-t-il dit. “Ce sont eux qui sont comme attaqués. Ce qui ne concorde évidemment pas avec l’histoire, les données et l’économie.” Voir Espérance de vie baisse chez les hommes en Ontario, en Colombie-Britannique et chez les blancs aux États-Unis, Suicide : déclin mondial, mais augmentation chez les blancs américains et Sans discrimination positive, le poids des minorités [non blanches] diminue dans les universités américaines.
 
Pour a sa part M. Joe Biden semble nommer à son cabinet de nombreux anciens ministres et secrétaires d'État de l'époque d'Obama comme John Kerry, Janet Yellen (ex-Fed), Jake Sullivan  (qui a défendu le dossier Steele, dossier bidon), et Tony Blinken (un faucon dans le domaine de la politique étrangère). La « compétence est de nouveau dans le vent » selon le journaliste Dan Rather
 
Selon le Washington Examiner, Biden révèle les priorités de ses 100 premiers jours. En haut de la liste? Immigration. Citoyenneté pour ceux qui sont ici illégalement. Relance de DACA [amnistie de quelque 11 à 22 millions d’étrangers illégaux vivant aux États-Unis]. Gel de la déportation. Plus besoin d'attendre au Mexique. Ceux qui traversent illégalement restent aux États-Unis. Et «pas un autre pied» de mur en plus (mais garder la barrière existante).

Une Ode américaine, le film que la critique « progressiste » n'aime pas

Tout commence par une autobiographie, Hilbilly Élégie, saluée par la critique quand elle est sortie en 2016. Figurant dans la liste des meilleures ventes du New York Times en 2016 et 2017, le livre écrit par James David Vance séduisit les lecteurs par son habile description de la culture des Appalaches et des problèmes sociaux qui sévissent dans son Ohio natal désindustrialisé et ravagé par le fléau des drogues.

« Là où les Américains voient des Hillbillies [ploucs], des rednecks [bouseux] ou des White trash [racailles blanches], je vois mes voisins, mes amis, ma famille. »

Dans cet ouvrage à la fois personnel et politique, J.D. Vance racontait son enfance chaotique dans l’Ohio, cette région des États-Unis qui a vu l’industrie du charbon et de la métallurgie péricliter. Il décrit avec humanité et bienveillance la rude vie de ces « petits Blancs », ces « péquenots », que l’on dit xénophobes et qui ont voté pour Donald Trump.

Roman autobiographique, Hillbilly Élégie nous fait entendre la voix d’une classe désillusionnée et pose des questions essentielles. Comment peut-on ne pas manger à sa faim dans le pays le plus riche du monde ? Comment l’Amérique démocrate, ouvrière et digne est-elle devenue républicaine, pauvre et pleine de rancune ? La presse française avait acclamé « Un récit poignant, et nécessaire » (Télérama), « Une somme sur l’Amérique qui va mal » (Marianne) et « Le portrait d’une Amérique délaissée, celle qui a voté Trump ».

La trame du film
 
Il y a deux semaines le film, Une Ode américaine, inspiré du livre de J.D. Vance, est sorti dans quelques salles obscures de plusieurs pays. Ce 24 novembre, Netflix le diffuse sur Internet doublé dans une douzaine de langues. Populaire, il est déjà disponible gratuitement sur des plateformes de partage.

 
Bande annonce (VF)

Après une brève introduction sur les racines appalachiennes de la famille, on retrouve quatorze ans plus tard J. D. Vance à deux doigts de décrocher le stage de ses rêves dans un prestigieux cabinet d’avocats. C’est alors que sa sœur l’appelle  : il doit retourner dans sa ville natale afin d’aider sa mère qui a cédé à nouveau à son plus gros vice : la toxicomanie. Si le constat de départ du film semble déprimant, Une ode américaine est une ode à la vie, à la compréhension, à l’entraide et à la responsabilité personnelle. Le passé nous modèle, êtres complexes et faillibles, mais le passé n’est pas qu’une fatalité, un atavisme dont on ne peut s’extraire, nos actions et nos relations changent également le cours de notre destin.

Éreinté par la critique, apprécié par les spectateurs

Selon le site Rotten Tomatoes qui recense les critiques de film et l’avis des spectateurs, ce long métrage est un navet pour les critiques (25 % est une très mauvaise cote), mais très bon pour les spectateurs.

Pour la Boston Review (tirage de 62 000) « L’adaptation Netflix par Ron Howard de Hillbilly Élégie perpétue une longue tradition qui constitue à voir les hillbillies [ploucs des Appalaches] comme un symbole de la blancheur américaine immaculée. C’est la même nostalgie que Trump a mobilisée à l’extrême droite. […] [JD Vance] était là pour dire aux élites côtières pourquoi les petits blancs des zones rurales étaient ravis d’entendre les diatribes pro-industrialisation, pro-américaines et anti-immigrés de Trump. […] La nostalgie blanche est une sacrée drogue. Afin de briser notre dépendance nationale, nous devons apprendre à la reconnaître : pas seulement dans le grondement du flambeau d’un suprémaciste blanc, mais aussi dans ses apparences plus insipides et plus futées sur Netflix. »

Un bon film

Nous avons vu Une Ode américaine. Amy Adams et Glenn Close sont toutes deux formidables. Il s’agit d’un drame familial narré d’une façon poignante. Peu de rebondissements, sans aucun décor grandiose, ni aucun effet spécial si l’on exclut le maquillage qui rend Glenn Close méconnaissable. C’est un film émouvant axé sur les traumatismes de l’enfance et la lutte pour se sortir de la drogue et plus généralement d’un milieu toxique. Le film trace un portrait réaliste, humain et en rien caricatural de ce milieu.

C’est un bon long métrage qui nous permet d’entrer dans la peau de personnages imparfaits, comme nous tous, mais attachants dans leurs luttes et leur volonté de se sortir de situations et de choix calamiteux. Glenn Close est impressionnante dans la matriarche Mémô (Mamaw) crainte et aimée. À la force de ces vieux poignets, cette fumeuse invétérée fait tout pour sauver sa famille et ses petits-enfants.

Parfois, le réalisateur semble faire un peu trop appel aux analepses (retours en arrière) pour expliquer l’enfance difficile de J.D. Vance. Autre petite lacune à nos yeux : le film ne décrit pas assez la ville ou les environs, il reste concentré sur la famille de Vance. C’est sans doute compréhensible pour un film d’un peu moins de deux heures. Le sociologue en nous a cependant trouvé le livre meilleur à ce niveau, car il fournit ce contexte qui enrichit la plongée dans ce monde.

 Humaniser une partie de l’électorat de Trump, c’est mal

Si le livre a d’abord été bien accueilli, il est désormais considéré par les sachants progressistes comme une tentative d’humaniser des « partisans de Trump ». C’est donc devenu un Mauvais LivreMD. Le film doit donc également être MauvaisMD. L’évolution de la critique du livre « Hillbilly Élégie » est fascinante. Le livre est sorti en 2016 et a été un énorme succès de libraire, car il décrivait les pathologies culturelles qui conduisent à la pauvreté à long terme dans certaines communautés rurales blanches. Par la suite, des critiques ont décidé que le livre était MauvaisMD, probablement pour trois raisons :

  • Le livre glorifie une rédemption faite de décisions individuelles — de la part de J.D. Vance et de sa grand-mère — pour échapper à ce qui semble être le déterminisme de mauvais comportements de génération en génération. Quoi pas besoin d’aide sociale et de plans gouvernementaux ?
  • Il traite la culture de la pauvreté et de la dépendance comme d’un problème non intersectionnel (aucun LGBTQ à l’horizon, l’esclavage, la colonisation, la race ne joue aucun rôle : les policiers sont noirs, la fiancée de JD est d’origine hindoue, etc.)
  • Il humanise les pauvres partisans blancs de Trump.
On peut se demander comment le film a réussi à être tourné à Hollywood avec de grosses vedettes alors qu’il est étrillé par les critiques progressistes. Il se peut qu’il ait été approuvé dans la première vague de « cela pourrait expliquer le sentiment de Trump ». Ou alors on pensait pouvoir avec ce film rabaisser cette frange de l’électorat trumpiste. Mais voilà que le film, sans être un chef-d’œuvre, est bon et poignant. Voilà qu’il humanise ces culs-terreux des Appalaches. Quatre ans après l’élection de Trump, il est loin chez les progressistes le temps du premier choc, de l’introspection après la défaite inexpliquée de Hillary Clinton. Lointaine l’idée qu’il fallait essayer de comprendre ce qui s’était passé en Ohio et dans les autres États ouvriers qui votaient machinalement démocrate. Les progressistes militants ont pris le dessus : plus question d’humaniser, de comprendre, il faut vouer aux gémonies ces gens, diaboliser les partisans de Trump. Le film, comme le livre, est donc devenu MauvaisMD.

 

Six premières minutes d'Une Ode américaine (VF)


L’Amérique trumpiste ne se résume pas aux Hillbillies

Il faut cependant éviter de caricaturer l’électorat trumpiste. L’Amérique pro-Trump ne se résume pas aux hillbillies et à leurs descendants, bien que beaucoup d’entre eux ont sans doute appuyé Trump. Il existe bien d’autres sous-cultures américaines qui appuient Trump et le trumpisme. Il suffit de penser à celles du Mid-Ouest (plus allemande et scandinave), de l’Utah mormon, de la Floride latine, du Nord du Maine ou même, catégorie plus sociale et non géographique, aux conservateurs universitaires discrets rebutés par la dérive « woke ».

La culture redneck déjà analysée par Thomas Sowell et Charles Murray

L’ouvrage de JD Vance est à rapprocher de Coming Apart : The State of White America, 1960—2010 publié en 2013 par Charles Murray. À ses yeux, la classe supérieure blanche et la classe moyenne-inférieure partagent de moins en moins de valeurs et de comportements, ce gouffre menacerait les fondements mêmes de l’Amérique. Certains traits des hillbillies (patriotisme, loyauté à la famille, entraide), seraient hérités des Scots-Irish qui ont peuplé les Appalaches américaines, en ont fait d’excellents pionniers lors de la conquête de l’Ouest, mais d’autres minent cette communauté (rejet de l’étranger de la région, du horsain, violence, alcool). Notons aussi que la religiosité est en pleine implosion dans ces communautés. Un sondage social général a indiqué dans les années 2000 que près de 32 % des Blancs de la classe moyenne-supérieure, entre l’âge de 30 et 49 ans, allaient régulièrement à l’église, contre seulement 17 % de la classe ouvrière blanche de la même tranche d’âge. J.D. Vance et Charles Murray en ont discuté pendant une heure (vidéo)

Le célèbre économiste noir, Thomas Sowell, s’est également penché sur la culture blanche des Hillbillies. Dans son livre Black Rednecks and White Liberals, Sowell soutient que la culture du ghetto noir trouve son origine dans la culture dysfonctionnelle du redneck blanc du Sud, qui était prédominante dans le Sud avant la Guerre de Sécession (1861-1865). Cette culture serait venue, à son tour, de la « culture Cracker » [une insulte désignant les blancs ruraux] des « Britanniques du Nord », c’est-à-dire des Anglais des marches écossaises, des Écossais des Highlands, des Gallois et des Irlandais protestants qui ont émigré des régions frontalières les plus anarchiques de la Grande-Bretagne au XVIIIe siècle. La Nouvelle-Angleterre a pour sa part été peuplée par des Anglais du Sud. Sowell rappelle que dire « acrost » plutôt que « across » ou « ax » à la place de « ask » sont aujourd’hui considérés comme faisant partie de la manière dont les noirs parlent anglais aux États-Unis. Mais cette façon de parler était courante il y a des siècles dans les régions du Nord de la Grande-Bretagne. Ils n’ont pas apporté que leur propre dialecte. Ils ont également apporté tout un mode de vie qui a rendu les sudistes blancs avant la guerre très différents des Blancs du Nord. La violence était beaucoup plus courante dans le Sud — et dans les régions de la Grande-Bretagne d’où venaient les sudistes. Il en était de même pour les naissances illégitimes, une musique et des danses plus entraînantes et un style d’oratoire religieux marqué par un style oratoire enflammé, des émotions débridées et des images flamboyantes. Tout cela ferait partie de l’héritage culturel des Noirs, qui ont vécu pendant des siècles au milieu de la culture redneck du Sud. 

Cette culture ne mettait pas l’accent sur l’éducation et était peu portée sur la recherche intellectuelle en général. L’analphabétisme était beaucoup plus répandu chez les Blancs du Sud avant la Guerre de Sécession que chez les Blancs du Nord, et bien sûr, les Noirs tenus en esclavage dans le Sud étaient pratiquement tous analphabètes. Selon Sowell, au début du XXe siècle, les Blancs du Sud avaient de moins bons résultats aux tests d’intelligence mentaux que les Blancs des autres régions du pays, comme les Noirs continuent d’en obtenir. Pour l’économiste, de nombreux aspects de la vie du Sud que certains observateurs ont attribué à la race ou au racisme, ou encore à l’esclavage, étaient communs aux Noirs et aux Blancs du Sud — et étaient communs dans les parties de la Grande-Bretagne d’où venaient les Blancs du Sud, où il n’y avait pas d’esclaves et où la plupart les gens n’avaient jamais vu un noir.

mardi 24 novembre 2020

Employés de Penguin RH en pleurs parce que l'éditeur publiera le prochain livre de Jordan Peterson

Plusieurs employés de Penguin Random House Canada se sont effondrés en pleurant parce que leur employeur publie le prochain livre de Jordan Peterson. 

Peterson, 58 ans, professeur de psychologie à l’Université de Toronto s’est opposé au correctivisme politique. Il est devenu une célébrité quasiment instantanée quand il a publié, en septembre 2016, une vidéo où il se disait opposé à ce que le gouvernement impose des pronoms « non genrés ». Toutefois, il ne s’est pas dit opposé à le faire par courtoisie envers des personnes qu’il rencontrerait. Il s’est donc opposé au projet de loi C-16 qu’il considère comme liberticide. Voir La croisade des LGBT contre la liberté d’expression et les distinctions linguistiques immémoriales.

Lundi, Penguin Random House Canada, le plus grand éditeur de livres au Canada et une filiale de Penguin Random House, a annoncé qu’elle publierait Beyond Order : 12 More Rules for Life du professeur Jordan Peterson, qui sortira en mars 2021. Le livre sera publié par Portfolio aux États-Unis et Penguin Press au Royaume-Uni, tous deux faisant partie de l’empire Penguin Random House.

Quatre employés de Penguin Random House Canada, qui ne refusaient d’être cités nommément ont déclaré que la société avait tenu une assemblée publique à propos du livre lundi, au cours de laquelle les dirigeants ont défendu la décision de publier Peterson tandis que des employés ont fait part de leurs préoccupations d’ouvrir ainsi un porte-voix à ce que ces employés affirment être « quelqu’un qui est populaire dans les cercles d’extrême droite ».

« C’est une icône du discours haineux et de transphobe et le fait qu’il soit une icône de la suprématie blanche, quel que soit le contenu de son livre, je ne suis pas fier de travailler pour une entreprise qui le publie », de déclarer à Vice World News un employé subalterne, militant LGBTQSAI+, qui a assisté à la réunion publique.

Un autre employé a déclaré que « des gens pleuraient lors de la réunion sur la façon dont Jordan Peterson avait affecté leur vie. » Ils ont déclaré qu’un collègue avait discuté de la façon dont Peterson avait radicalisé leur père.

Jordan Peterson a rassemblé 3,25 millions d’abonnés sur YouTube. Son précédent livre, 12 Règle pour une vie : un antidote au chaos s’est vendu à plus de 5 millions d’exemplaires dans le monde, selon Penguin Random House.

 

Voir aussi
 

Jordan Peterson : La théorie du genre n’a pas sa place en classe (M-à-j : poursuite judiciaire)

Jordan Peterson et l’égalité des sexes : députée et ex-ministre suédoise à du mal à comprendre