dimanche 2 avril 2017

La croisade des LGBT contre la liberté d’expression et les distinctions linguistiques immémoriales

Les politiques de l’Université de Toronto prévoient que l’étudiant choisisse lui-même le pronom qu’il souhaite qu’on utilise dans ses communications avec lui.

En cela, l’université a cédé à la coterie LGBTTIQQ2SA (lesbiennes, gays, bisexuels, transsexuels, transgenres, intersexuels, « queers », en questionnement, bispirituels, asexuels et alliés) qui tente depuis des années d’imposer aux communs des mortels l’usage de nouveaux pronoms personnels neutres en anglais, en plus des usuels « he » or « she », on tente de faire accepter « ze », « e » ou « they » (au singulier !).

En français aussi

En français, le lobby LGBTTIQQ2SA propose parfois les pronoms artificiels « iel », « yel » ou « ille ».

Radio-Canada nous raconte que l’« on peut lire ce type de phrases : “Ile est heureuxe (il/elle est heureux/heureuse)” ou “Ille est créatifve, mais est fâché.e”. » Le lobby LGBTQ++ suggère d’employer la lettre « t » comme terminaison pour les accords de verbes conjugués avec l’auxiliaire être : « Ille est allet ou Iel est aimeT. » Le mélange des genres peut aussi être accepté : « Sam est un étudiante » ou « Sam est une étudiant ».


L’article de Radio-Canada fait ensuite dans le chantage émotionnel. C’est ça ou le suicide des transgenres insinue la société d’État : « Près de la moitié des personnes trans vont tenter de se suicider. De 70 % à 80 % ont ou ont eu des pensées suicidaires. Ce n’est pas dû à leur identité [affirmation assénée ici sans preuve], mais bien aux barrières auxquelles elles font face », rappelle la coordonnatrice du Centre de lutte contre l’oppression des genres de l’Université Concordia, Gabrielle Bouchard. »

En revanche, pour le linguiste de Radio-Canada Guy Bertrand : « Ça n’a aucun bon sens [d’imposer artificiellement un pronom neutre] parce que c’est complètement artificiel. Il n’y a pas de logique. Ce n’est pas possible. Ça ne verra jamais le jour. Il n’y a personne qui va s’astreindre à un exercice mental aussi difficile pour ménager la susceptibilité d’une [ultra-] minorité. Ce n’est tellement pas nécessaire. On exagère dans la rectitude politique. [...] Ce qui est important, c’est de se battre pour que les gens les respectent. Avoir du respect, ça ne veut pas dire changer la langue pour les accommoder. Avoir du respect, c’est être respectueux envers eux. À mon avis, ce n’est pas dans un changement en profondeur de la langue qu’on va être plus respectueux. C’est dans l’attitude et l’inclusion sociale que ça se fait. »


Imposition dans les universités nord-américaines

Certaines universités américaines, comme l’Université du Wisconsin-Milwaukee, publient des guides pratiques à l’intention des étudiants pour qu’ils utilisent les « pronoms appropriés » lorsqu’ils se réfèrent à d’autres étudiants et aux professeurs...

Un tableau sur le site Web des lesbiennes, des gais, des bisexuels de cette université (LGBTRC) répertorie douze pronoms approuvés à utiliser, y compris « fae », « æ », « e », « ey », « per », « ve », « xe », « ze » et « zie », en plus des traditionnels « he », « she » et « they » mais qui peuvent être utilisées au singulier ou au pluriel. Le tableau répertorie également les variations possessives et réfléchies de chaque pronom. Le tableau est reproduit ci-dessous.


Toutefois, le site souligne qu’il ne s’agit « pas d’une liste exhaustive » de tous les pronoms approuvés. Le site indique, toutefois, que certains élèves préfèrent qu’on utilise leur nom en tant que pronom, tandis que d’autres préfèrent qu’on utilise le « they » pluriel (épicène en anglais, contrairement au français ils/elles) même quand on s’adresse à eux au singulier.

D’autres universités, dont l’Université Harvard, ont aussi des politiques permettant à l’étudiant d’imposer au personnel de l’université le pronom personnel et le genre qu’il choisit.

Aussi à la CSDM (élèves de 4 à 17 ans...)

C’est aussi le cas à la Commission scolaire de Montréal, qui s’est dotée cette année de lignes directrices à l’égard de ses élèves transgenres (on parle des écoliers de 4 à 16-17 ans...).

La CSDM déclare ainsi que « Les élèves ont le droit de s’auto-identifier. Ainsi, tout élève a le droit qu’on s’adresse à lui ou à elle par un prénom et un pronom choisis qui correspondent à [ce qu’il dit être] son identité de genre. » Et gare aux rétifs ! « Le refus intentionnel ou persistant de respecter l’identité de genre d’un élève constitue un déni de son identité et peut être considéré comme une forme de harcèlement ou de discrimination. »

Dans un texte adopté en conseil des commissaires le 23 mars 2016, on lit : « L’élève [qui se déclare] transgenre a le droit d’exiger qu’on s’adresse à lui en utilisant le prénom et le pronom (il, elle ou autre pronom neutre [?]) qui correspond à [ce qu’il dit être] son identité de genre, et ce, indépendamment du fait que l’élève ait obtenu un changement de nom officiel et nonobstant l’impossibilité pour un mineur d’obtenir le changement de mention de sexe au registre de l’état civil [le projet de loi 103 a changé cela, voir la section qui y est consacrée ci-dessous]. Par conséquent, les membres du personnel de l’établissement scolaire doivent systématiquement employer le prénom et le pronom choisis par l’élève. »

Le cas Jordan Peterson

Le professeur Jordan Peterson enseigne la psychologie à l’Université de Toronto depuis 1998. Avant d’y être embauché, il avait été professeur à Harvard. Ce qui est en jeu pour lui, c’est d’abord son emploi et son permis d’exercer la psychologie. Il s’expose également à d’éventuelles poursuites judiciaires.

Le professeur Peterson réclame, au nom de la liberté d’expression et de la liberté de l’enseignement, d’utiliser les pronoms traditionnels. Lors d’une émission de la CBC, il s’est exprimé en ces termes : « Je ne reconnais le droit à personne de choisir les mots que j’emploierai, d’autant que, d’une part, les mots qu’on veut que j’emploie sont des éléments non réguliers de la langue anglaise et que, d’autre part, ces constructions sont la création d’une petite coterie d’idéologues. »

Pour cet universitaire, ce serait céder au correctivisme politique que de se soumettre aux caprices d’une poignée d’activistes, qui ne représentent qu’une infime partie de la population : « J’estime que les mots artificiellement construits comme les pronoms prétendument “neutres” du point de vue du genre, sont la manifestation d’une vague de rectitude politique dont les racines historiques me troublent (marxisme) et dont les motivations psychologiques m’apparaissent douteuses (car elles reposent sur la volonté d’infantiliser et sur un ressentiment intense à l’égard de la réussite, quelle qu’en soit l’origine). » Seuls les États totalitaires ont essayé de régenter de la sorte la langue et le savoir.

Pour Peterson, l’argument du respect dû à la personne transgenre n’est pas convaincant pour imposer une telle réforme linguistique. Non qu’on ne doive pas la respecter ; c’est plutôt que cela n’a rien à avoir avec la question des pronoms : « Le simple fait qu’[une personne transgenre] veuille qu’on s’adresse à elle au moyen d’un pronom particulier ne signifie pas que je sois tenu d’utiliser ce pronom. Cela ne veut pas dire que je nie son existence ou que je nie l’existence de personnes qui ne correspondent pas parfaitement aux catégories binaires de genre. »


Courts extraits de la défense de Jordan Peterson (en anglais)

Rejet de la théorie du genre

Peterson répète qu’il n’est pas un ennemi des personnes transgenres. Il ne nie pas qu’elles peuvent vivre des situations difficiles. Il s’oppose, toutefois, à l’idéologie qui sous-tend l’action des militants LGTBQ++. Il réfute ainsi la conception du genre exagérément malléable qu’elle met de l’avant et qu’on retrouve dans les textes de loi en Ontario et au niveau fédéral canadien : « Je ne crois pas, dit-il, qu’il soit raisonnable pour notre société de saper intégralement le concept de polarité entre les genres, afin de potentiellement satisfaire une infime minorité de la population. »

Il ajoute : « Il n’y a pas assez de preuves permettant d’affirmer que l’identité de genre et la sexe biologique soient des constructions indépendantes l’une de l’autre. En fait, tout porte à croire le contraire. En fait, les personnes transgenres font le même raisonnement que moi. Elles soutiennent qu’un homme peut être né dans le corps d’une femme ; c’est donc un argument qui établit un lien biologique entre l’identité de genre et le sexe biologique. Je ne suis pas hostile aux personnes transgenres. Je m’oppose simplement à des lois mal rédigées et à la promulgation, pour des raisons idéologiques, d’une législation que la population n’est pas prête à accepter. »

Le 30 septembre dernier, lors d’une entrevue radiophonique, le professeur Peterson mettait en garde : « Je dois vous faire part d’une chose qui m’effraie terriblement et à laquelle vous pouvez réfléchir. Je pense que les diktats continus et inconsidérés des radicaux militants de la gauche auront pour effet de réveiller les mouvements droitiers. Vous pouvez considérer cela comme une prophétie de ma part si vous le voulez. Une bête sommeille dans notre société et cette bête a des griffes. Si vous réveillez la bête, la violence éclatera. Je redoute que cette poussée constante par les militants radicaux n’ait comme conséquence de réveiller cette bête. »


Diktats de la hiérarchie, lâché par ses collègues

Dans deux lettres distinctes rendues publiques par Jordan Peterson, ses supérieurs lui ont expressément demandé de ne plus résister aux diktats des lobbys LGBTTIQQ2SA et d’arrêter d’utiliser la langue anglaise comme elle existe, mais de se soumettre aux désirs linguistiques de ces lobbies. La hiérarchie de l’Université de Toronto prétend que le débat qu’il a soulevé — oubliant que la coercition initiale vient de cette même hiérarchie — aurait valu des menaces à des étudiants qui se disent transgenres.

« Nous sommes convaincus que vous n’avez pas souhaité avoir ce genre d’impact. En raison de cela, en raison aussi de vos obligations [légales], nous vous demandons d’arrêter d’y aller de telles déclarations. »

— Extrait d’une lettre envoyée à Jordan Peterson

Pour Althea Blackburn-Evans, porte-parole de l’Université de Toronto, le Code des droits de la personne en Ontario interdit toute discrimination liée à l’identité sexuelle. L’Université de Toronto l’interdit aussi.

Près de 250 collègues du professeur Peterson l’ont dénoncé, l’accusant de discrimination envers une minorité vulnérable. Un professeur de l’Université de Toronto, A.W. Peet, rattaché au département de physique, qui est lui-même transgenre, l’a traité de « bigot » et a porté plainte contre lui auprès des autorités universitaires. Peet a déclaré que, bien qu’il soit d’avis que Peterson ait le droit d’exprimer ses idées, il doit assumer, en tant que professeur, certaines responsabilités, notamment celle de prendre soin de l’ensemble du corps étudiant : « Je refuse de passer mon chemin et de le laisser blesser des membres “genderqueer” vulnérables de la communauté universitaire […]. La liberté universitaire n’a jamais été conçue comme un passe-droit qui déchargerait les professeurs des responsabilités qui leur incombent. »

On apprenait cette fin de semaine que, pour la première fois dans sa carrière, le professeur M. Peterson s’est vu refuser des subventions à la recherche. Voir le gazouillis ci-dessous.



La gauche radicale progressiste veut de moins en moins débattre avec la droite conservatrice, elle cherche surtout à la faire taire, selon elle au nom de la tolérance et de la non-discrimination. En réalité, elle use de la force de lois liberticides, de menaces y compris de mettre fin à la carrière d’un professeur jusqu’ici respecté et distingué.

Opposition au projet de loi C-16

Jordan Peterson, dont les nombreuses vidéos sur YouTube sont populaires, utilise aussi sa tribune pour s’opposer au projet de loi fédérale C-16, qui propose de modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne afin d’interdire la discrimination envers les personnes transgenres au pays. Une modification au Code criminel serait aussi apportée afin que les éléments de preuve établissant que la haine fondée sur l’identité ou l’expression de genre, lorsqu’elle motive un crime, soit considérée comme une circonstance aggravante.



Une vidéo de Jordan Peterson (vue près de 300 000 fois), sous-titrée en français, utilisez la mollette si le français n'apparaît pas automatiquement

Pour Peterson, avec un projet de loi comme le C-16, « le gouvernement, influencé par les guerriers de la justice sociale de la gauche radicale, a décidé de ce que devons dire, au lieu de nous indiquer ce que nous n’avons pas le droit de dire. Cela me paraît extrêmement mal avisé. Je crois que c’est une limite injustifiée à la liberté d’expression. » La loi, lorsqu’elle entrera en vigueur, pourrait, en raison de la possibilité bien réelle de poursuites judiciaires, empêcher des débats publics légitimes sur les questions de genre et de sexualité et compliquer le travail des chercheurs sur ces sujets. Le professeur de Toronto compare les réformes apportées par le projet de loi C-16 aux restrictions à la liberté d’expression qui existent dans « les pays autoritaires et totalitaires ».

Le Sénat a donné son premier appui jeudi au projet de loi C-16 au début du mois de mars 2017. Même le conservateur Don Plett, pourtant farouchement opposé à l’initiative, a cru bon donner son feu vert pour que se poursuive la réflexion. M. Plett espère démontrer les risques d’ériger en loi le constructivisme social en citant le cas d’un Torontois cinquantenaire qui se présente maintenant comme une fillette de six ans aimant jouer à la poupée avec les petits-enfants de ses parents adoptifs. Le sénateur Plett fait valoir que « les transgenres sont déjà protégés » par la Charte des droits et libertés qui interdit toute forme de discrimination. Selon lui, l’adoption de C-16 est dangereuse, car elle met « prématurément un terme à un débat sur les genres qui n’est pas réglé et qui repose sur une théorie sociale erronée » à savoir qu’il existe « un spectre infini de genres ». Il estime que le C-16, loin de servir à protéger une minorité, sert surtout à promouvoir un agenda social qui obligera les gens à accepter toutes les identités qu’une personne choisira d’endosser. Il a alors donné l’exemple de Stefonknee Wolscht, un homme qui a quitté sa femme et ses sept enfants pour assumer ce qu’il dit être sa véritable identité : celle d’une fillette de six ans. À 54 ans, il s’habille en enfant, avec sucettes et couettes en prime. « Avec ce projet de loi, nous légitimons et protégeons son faux sentiment d’être une femme, mais pas celui d’être un enfant. Qui sommes-nous pour dire que l’un est plus légitime que l’autre ? », a demandé M. Plett.

Maxime Bernier s’oppose désormais à C-16

Le très libertarien Maxime Bernier, candidat à la chefferie du Parti conservateur du Canada, avait approuvé le projet de loi C-16 à l’automne, car, en ses mots, « je m’oppose à ce que quelqu’un soit victime de haine et de discrimination au motif qu’il fait partie d’un groupe identifiable. [...] Cependant, en plus des nombreux Canadiens qui ont abordé cette question avec moi, j’ai eu l’occasion la semaine dernière de discuter avec le professeur Jordan Peterson de l’Université de Toronto au sujet de ce projet de loi et des conséquences qu’il aura sur la liberté d’expression. Et franchement, j’en ai été consterné. [...] Ce sont plutôt des activistes de la gauche radicale qui tentent de déconstruire les normes sociales traditionnelles et d’imposer leur perspective marginale à tout le monde, y compris en nous forçant à changer notre façon de parler. Et ils semblent avoir une influence indue sur les campus universitaires à travers l’Amérique du Nord, y compris ici, au Canada.
[...]

La liberté d’expression est l’un des droits les plus fondamentaux que nous avons en tant que Canadiens. Le professeur Peterson croit que, si elle est adoptée, la loi C-16, conjointement avec le Code des droits de la personne de l’Ontario, menacera ce droit de manière importante. Chaque fois qu’un droit est violé, notre Constitution exige qu’une telle violation puisse raisonnablement être justifiée dans une société libre et démocratique. [...]

La loi C-16 ne respecte pas ce critère. Elle pourrait forcer les Canadiens à restructurer leur façon de parler et à dire des choses en lesquelles ils ne croient pas.

Nous devons protéger les groupes minoritaires contre la haine et la discrimination. Mais nous devons également nous assurer de protéger nos libertés les plus fondamentales, y compris notre liberté de dire ce que l’on pense et d’utiliser un langage courant sans craindre des conséquences juridiques.

Je regrette ma décision d’avoir voté en faveur du projet de loi C-16. Si le vote était tenu de nouveau aujourd’hui, je voterais contre. J’encourage mes collègues du Sénat à l’empêcher de devenir une loi. Et si cela devient une loi, en tant que Premier ministre conservateur du Canada, je l’abrogerai. »


Maxime Bernier au micro de Mark Steyn sur son le fait qu’il a changé d’avis sur C-16 (à partir de 9 min 7 s, en anglais)

Entretemps au Québec, jamais en reste, le projet de loi 103 adopté sur les chapeaux de roue

Au Québec, le projet de loi 103, adopté en juin, modifie le Code civil du Québec afin de permettre à un enfant mineur d’obtenir le changement de la mention du sexe figurant à son acte de naissance. Adopté à toutes vapeurs, le projet de loi a fait sourciller. Quatorze ans, n’est-ce pas tôt pour changer sa mention de sexe ? Rappelons qu’il n’est pas rare que des transgenres passés sous le bistouri regrettent ce qu’ils perçoivent comme une mutilation peu satisfaisante. Il existe même un site consacré à des témoignages empreints de regrets (http://www.sexchangeregret.com/). On relira aussi à ce sujet l’histoire touchante de Bruce/Brenda/David Reimer. Comme le disait Alan Finch, un ex-transgenre, dans les colonnes du Guardian en 2009 : « Le transsexualisme a été inventé par des psychiatres... Vous ne pouvez pas fondamentalement changer de sexe... La chirurgie ne vous modifie pas génétiquement. C’est une mutilation génitale. Mon “vagin” était juste le sac de mon scrotum. C’est comme une poche, comme un kangourou. Ce qui est effrayant c’est que vous avez toujours l’impression d’avoir un pénis lorsque vous êtes excité sexuellement. C’est comme le syndrome du membre fantôme. Tout cela fut une épouvantable mésaventure. Je n’ai jamais été une femme, je suis tout simplement resté Alan. »

Notons que cet empressement des politiciens québécois à adopter les dernières modes progressistes soutenues par la coterie LGBTQ++ n’est en rien neuf. Rappelons que la gouvernement libéral a déjà adopté en 2009 un plan interministériel de lutte contre l’hétérosexisme (l’idée que l’hétérosexualité serait plus normale que l’homosexualité) et qu’il y a consacré des millions de dollars, notamment dans la rééducation des élèves qui pourraient penser autrement en argüant de la lutte contre « l’homophobie ». À notre connaissance, aucun parti politique ne s’est opposé à cette lutte gouvernementale contre ce qui était encore naguère considéré comme la norme sexuelle, l’hétérosexualité.

Enfin, le nouveau programme d’éducation à la sexualité publié sur le site du Monopole de l’Éducation du Québec se lamente que les jeunes qui sont ouverts et « flexibles » au niveau de l’identité sexuelle sont ramenés par la pression sociale « grandissante » à des rôles et identités stéréotypées « traditionnels » et « nuisibles » (voir ci-dessous). Rappelons qu’« identité » « traditionnelle » veut dire ici « se sentir homme ou femme » et que les versions « traditionnelles » de la masculinité et féminité ont des effets « nuisibles ». Sympa pour les parents traditionnels. On ne sait trop si cette critique va jusqu’à soutenir qu’il existerait une large gamme d’identités sexuées comme le soutient le lobby LGBTTIQQ2SA et qu’il est bon d’en parler à de jeunes adolescents (12 à 15 ans). Mais tout ceci ressemble à s'y méprendre à des jugements de valeur en fonction d’une certaine conception de l’homme et donc à de l’idéologie distillée par un programme d'éducation sexuelle qu’on essaie de vendre en faisant peur aux parents en parlant des ravages (réels) de la pornographie ou les sextos sur les relations des jeunes. La lecture du programme gouvernemental donne parfois l’impression de lire un programme concocté par des officines militantes...


Voir aussi

Le paradoxe de l’égalité entre les sexes c. la théorie du genre

La censure contaminerait les milieux universitaires

Pétition pour amender le nouveau programme québécois d'éducation à la sexualité

La censure contaminerait les milieux universitaires

Article de Jean-François Nadeau dans le Devoir sur un sujet que nous avons déjà abordé ici (voir les liens connexes en bas d’article) : la censure universitaire.

Peut-on discuter de tout à l’université ? De moins en moins, apparemment. Nous entrons dans une ère « de déclin de l’argumentation, de la rationalité et du politique », pense l’historien des sciences de l’UQAM Yves Gingras. « Et l’on n’a encore rien vu ! » ajoute-t-il.

À l’Université McGill, deux professeurs de théologie n’ont pu aborder la question des transgenres, muselés par une trentaine d’étudiants qui les ont interrompus au point où la menace de devoir appeler la police a fini par être brandie. « Dans un monde idéal, l’événement aurait été aboli », a expliqué un des protestataires au journal étudiant McGill Daily.

À l’UQAM, deux débats ont été annulés parce que les organisateurs ont craint des pressions de la part de l’AFESH, une association étudiante. La présence à ces conférences du nationaliste conservateur Mathieu Bock-Côté indisposait des étudiants.

L’association étudiante se refuse à porter le blâme. Dans une déclaration publiée en ligne, l’AFESH affirme avoir un mandat contre « l’instrumentalisation de la liberté d’expression et de la liberté universitaire lorsque celle-ci sert à tenir des propos oppressifs ». Autrement dit, l’association défend ceux qui, par les moyens de leurs choix, empêchent que soient entendues sur le campus des personnes qui disposent déjà d’« une tribune publique importante » quand « leurs propos sont haineux, appellent à la violence, justifient la violence […] ou remettent notre existence en question ». L’affaire a provoqué un véritable emballement sur les réseaux sociaux. La haute direction de l’UQAM n’a pas donné suite à nos demandes d’entrevue.

Sentiments et châtiments

On empêche désormais des gens de parler à l’université « au nom de sentiments que l’on craint de froisser », explique le sociologue Jean-Philippe Warren, de Concordia. À son sens, cette situation n’est pas très présente encore dans les universités francophones, mais percole rapidement vers les universités anglophones, influencées par les États-Unis. « Il y a une incapacité de plus en plus grande à se sentir heurté, à être ébranlé », observe le professeur Warren.

Dans son établissement d’enseignement, dit-il, on a vite intériorisé cette nouvelle façon tout américaine d’envisager la scène universitaire : « Lors d’une présentation, on demande par exemple à l’assistance si quelqu’un risque d’être heurté par la projection d’une image montrant un étal de boucher. Si quelqu’un répond “oui”, on enlèvera sans hésitation l’image », explique le sociologue. Ce discours contrôlé « est parfaitement intériorisé chez les plus jeunes ».

Il est d’abord intégré chez les professeurs, observe l’historien Yves Gingras, citant l’exemple récent d’une jeune professeure de Calgary. En projetant des diapositives de modèles anatomiques en cire centenaires, elle a pris soin de masquer les parties génitales, « par anticipation, à la simple idée que ça pourrait choquer ! »

Une vague

Depuis dix ans aux États-Unis, cette sensibilité aux sentiments privés, inspirée par la psychologie, s’impose peu à peu dans les établissements d’enseignement supérieur. « On commence juste à sentir l’effet de cette vague américaine au Québec », soutient le professeur Warren. Avant d’utiliser certains mots ou certaines images en classe, il y a désormais en classe, avant le début des séances, une mise en garde — le « trigger warning » — pour des objets qui pourraient susciter des réactions, expose Yves Gingras, qui a aussi enseigné à l’Université de Toronto.

À Middlebury, petite ville du Vermont située à 200 km de Montréal, des étudiants en colère s’en sont pris il y a quelques semaines à Charles Murray, politologue qui défend des thèses libertariennes considérées comme racistes. Murray a été empêché de parler d’un tout autre sujet. Un membre de la faculté a été blessé. Plus de cent professeurs de l’établissement ont dénoncé ce coup de force : « Aucun groupe de professeurs ou d’étudiants n’a le droit de déterminer pour toute la communauté si une question n’est pas ouverte aux fins de discussion. »



Longtemps professeur à l’UQAM, Normand Baillargeon a montré du doigt la situation à plusieurs reprises. Il est invraisemblable, soutient Normand Baillargeon, qu’on veuille interdire la parole à des gens à partir d’un jugement a priori. Pour lui, l’université est le lieu dans la société où il doit être possible de discuter de tout. Cette position lui a valu récemment, dit-il, d’être submergé par un torrent de haine, dont une menace de procès et l’annonce de sa mort en ligne sur le site Wikipédia. Joint par Le Devoir à l’étranger, Normand Baillargeon a affirmé qu’il ne voulait plus être cité dans le cadre de cette histoire, désolé de n’avoir pas été davantage soutenu par l’université sur cette question.

Inégalités

Dans une position publiée en ligne, l’AFESH affirme que c’est plutôt la liberté d’expression de ses membres qui est menacée « dans un contexte où nos services sont coupés, où les violences sexuelles sont constantes et impunies et où l’extrême droite raciste s’organise de plus en plus ». En revanche, « celles de Normand Baillargeon et Mathieu Bock-Côté […] nous semblent en très bon état ».

Pour Marcos Ancelovici, titulaire de la Chaire en sociologie des conflits sociaux à l’UQAM, il est faux de penser que toutes les positions jouissent d’une tribune égale. Il reproche notamment à Normand Baillargeon de ne pas tenir compte d’un ensemble d’inégalités préalables. « Si l’on se soucie réellement du pluralisme dans les débats intellectuels et publics, il faut prendre en compte ces éléments. » Refuser d’entendre ceux qui jouissent déjà d’une telle chambre d’échos dans la société ne porte pas spécialement à conséquence, plaide-t-il. « Je ne dis pas qu’il faut interdire la parole de certaines personnes. Je dis que cette parole étant déjà omniprésente, le débat ne souffrira pas forcément d’une manifestation dénonçant cette prise de parole », précise Ancelovici.

Instrumentalisation ?

Sur le thème « Fuck la libârté d’expression », l’AFESH a lancé en mars une campagne d’affichage qui synthétise en une formule-choc cette idée que la liberté d’expression peut être manipulée au profit de ceux qui ont toujours la parole. Ses affiches ont toutes été approuvées pour l’affichage par l’université.



Au même moment, à l’Université de Montréal, un comité organisant une Semaine contre l’apartheid israélien (SAI) a vu son affiche refusée par l’établissement. Les organisateurs plaident que la direction universitaire a toujours entretenu des relations d’opposition avec leur groupe. Au contraire, affirme Geneviève O’Meara, porte-parole de l’Université de Montréal : « On encourage le débat d’idées à l’université, une université, c’est fait pour ça. […] En accord avec notre politique sur l’affichage, on a proposé que le visuel de l’affiche de ce groupe “ne soit pas diffusé tel qu’il est”. » L’affiche montrait des belligérants représentés par de petits personnages aux traits plutôt naïfs et enfantins. L’Université a dit ne pas tolérer les représentations de luttes armées.

L’historien des sciences Yves Gingras insiste : « Ce n’est que la pointe de l’iceberg et ce n’est certainement pas à l’UQAM que c’est le pire. »


Voir aussi

UQAM — Débat sur ECR annulé suite à des menaces (m-à-j)

Des universités politiquement correctes qui doivent « protéger » leurs étudiants

Canada — Liberté d’expression et d’opinion menacée dans les universités

La liberté d’expression à l’UQAM

Lois contre « discours haineux » — Employée aborigène poursuit des étudiants pour « embarras et humiliation » (M-à-j)

Les étudiants américains et leur lutte contre les « auteurs blancs décédés » (suite et non fin)

UQAM aurait une mauvaise réputation, à cause de ses professeurs intolérants ?

Le Québec tolérant à l’œuvre : Mathieu Bock-Côté entarté (m. à j. vidéo)

vendredi 31 mars 2017

La tragédie de l'État-providence aux États-Unis par Charles Murray (4 sur 5)

Ci-dessous, la quatrième partie de la série consacrée aux effets de l’État-providence sur le tissu social et moral aux États-Unis selon Charles Murray (voir le premier volet, le deuxième, le troisième).

Toutes ces modifications des règles du jeu — certaines légères, d’autres plus importantes — allaient dans la même direction. Il était plus facile de s’en sortir sans travailler. Il était plus facile pour un homme d’avoir un enfant sans être responsable de son entretien et de son éducation. Il était plus facile pour une femme d’avoir un enfant sans avoir de mari. Il était plus facile d’échapper à la sanction pour les délinquants. Il était plus facile de se procurer de la drogue. Parce qu’il était plus facile de vivre sans travailler il était aussi plus facile de ne rien faire à l’école. Parce qu’il était plus facile de vivre sans travailler il était plus facile de quitter son travail au moindre caprice et de négliger les comportements et les habitudes qui vous font apprécier d’un employeur.

Sur le long terme, la voie la plus facile se révélait une impasse. Celui qui, à vingt cinq/trente ans, s’est bâti un CV montrant qu’il n’est pas un employé fiable et travailleur restera probablement toute sa vie en bas de l’échelle salariale. L’adolescente qui a un enfant et qui vit des aides du Welfare State est presque sûre de rester toute sa vie dépendante de ces aides. Et ainsi de suite.

Mais pour comprendre que cette voie facile est une impasse, il faut une capacité à percevoir les conséquences à long terme de certains comportements qu’il ne serait pas raisonnable d’attendre de la part de gens sans qualités particulières, comme Harold et Phyllis.

En 1960, Harold aurait gardé son travail au pressing, bien que ce travail soit pénible et inintéressant. Au bout de quelques années, parce qu’il se serait montré un employé sérieux, son patron lui aurait peut-être proposé un poste un peu plus intéressant et mieux payé. Petit à petit, en accumulant de l’expérience, en développant quelques compétences, en se bâtissant une bonne réputation, Harold aurait sans doute grimpé dans l’échelle salariale et serait passé d’un emploi précaire, mal payé et pénible, à un emploi relativement sûr, mieux rémunéré et moins désagréable. Sa vie et celle de Phyllis n’auraient pas été une success-story pour autant. Tous deux auraient sans doute continué à vivre petitement jusqu’à la fin de leurs jours. Leur vie aurait simplement été celle d’innombrables générations de travailleurs américains, qui commencent très bas et finissent moins bas, avec l’espoir raisonnable que leurs enfants s’élèveront plus haut qu’eux.

En termes purement économiques, il n’est pas sûr que leur comportement responsable aurait beaucoup rapporté à Harold et Phyllis, même dans le scénario modérément optimiste esquissé ci-dessus.
La vérité est que les motivations tangibles que la société, n’importe quelle société, peut offrir à de jeunes gens pauvres et sans talents pour bien se conduire sont essentiellement basées sur la crainte : « si tu n’étudies pas à l’école, nous t’expulserons ; si tu commets un délit, nous te mettrons en prison ; si tu ne travailles pas, nous rendrons ta vie si misérable que n’importe quel emploi te paraitra préférable. » Promettre davantage serait mentir.

Pourtant nous aurions tort de conclure que la vie d’Harold et Phyllis serait plus heureuse à l’ombre du Welfare State. À partir des années 1970, la charité publique a certes permis à presque tous les Harold et Phyllis de vivre en travaillant moins, voire plus du tout, mais elle a en même temps dégradé la qualité de leur vie d’une manière que les indicateurs économiques ne peuvent pas mesurer. Et nous touchons là au second effet — psychologique — pervers du Welfare State.

La prémisse essentielle qui a guidé la transformation de la charité publique en un État-providence tentaculaire est, nous l’avons vu, la négation de la responsabilité individuelle : ceux qui sont pauvres ne sont pas responsables de leur situation.

Avec cette transformation, les pauvres furent homogénéisés, d’un point de vue moral. Plus de distinction entre les pauvres méritants et les pauvres non méritants. Entre les travailleurs et les paresseux, entre ceux qui s’en sortent par eux-mêmes et ceux qui se laissent aller à dépendre de l’aide sociale, entre ceux qui se conduisent de manière responsable et ceux qui se conduisent de manière irresponsable : les pauvres sont tous des victimes.

Les agents de l’État-providence se mirent donc en devoir d’apprendre aux pauvres que ceux qui sont sans ressources ne sont pas responsables de leur situation, que l’aide sociale est un droit, et qu’il ne faut pas avoir honte de réclamer ses droits.

Mais si être aidé cesse d’être honteux, alors s’en sortir par soi-même cesse d’être honorable. Si ceux qui vivent des aides sociales ne doivent pas être considérés comme responsables de leur situation, alors ceux qui parviennent à se suffire à eux-mêmes ne peuvent pas non plus retirer de fierté du fait d’être indépendants. Autrement dit, l’État-providence a peu à peu ôté aux pauvres honnêtes et travailleurs la principale récompense de leur honnêteté et de leur labeur.

Outre le salaire, la satisfaction morale qui s’attache au fait de subvenir par soi-même à ses besoins et à ceux de sa famille est en effet, la plupart du temps, la seule satisfaction que peuvent procurer les emplois situés en bas de l’échelle salariale. Des emplois qui, en plus d’être mal payés, sont aussi, le plus souvent, répétitifs, salissants, pénibles, voire dangereux.

Cette satisfaction, cette fierté légitime de ne pas dépendre d’autrui, a beau être immatérielle elle n’en est pas moins très réelle, et elle était traditionnellement renforcée par les louanges accordées par la communauté à ceux qui se conduisaient de manière responsable — revers de la désapprobation qui attendait ceux qui se conduisaient de manière irresponsable.

Un homme qui occupait un emploi très subalterne, et qui grâce à cela subvenait aux besoins de son épouse et de ses enfants, pouvait avoir l’impression justifiée qu’il accomplissait quelque chose de réellement important. Qu’il était quelqu’un qui comptait, si bas que puisse être son statut social.

Mais dans la nouvelle configuration de l’État-providence, le message implicite est que celui qui persiste à exercer un emploi au bas de l’échelle plutôt que d’accepter des aides sociales est réellement un naïf ou un idiot, une dupe du « système ». Non seulement il est désormais possible de vivre sans travailler, mais en plus vivre sans travailler a cessé d’être déshonorant.

Cette dé-moralisation de l’indépendance et de la responsabilité individuelle produisit ses effets principalement sur les plus jeunes générations. Les plus âgés étaient relativement immunisés contre le nouveau chant des sirènes par les habitudes contractées au cours d’une vie laborieuse. Les plus jeunes, en revanche, étaient naturellement plus ouverts à la nouveauté et un nombre croissant d’entre eux cessa d’écouter les admonestations démodées de leurs parents. Comme le remarque Charles Murray, l’ironie amère de tout cela est que les parents les plus attachés à la vieille moralité étaient aussi, en général, ceux qui apprenaient à leurs enfants à prendre pour modèles les gens instruits et ayant réussi ; ces mêmes gens instruits qui venaient maintenant répandre la bonne nouvelle qu’il n’est pas honteux de dépendre de la charité publique.

L’État-providence est en général envisagé en termes purement économiques. Il ne s’agit, pensons-nous, de rien d’autre que de demander aux uns une portion de leur superflu pour accorder aux autres le nécessaire, pour reprendre les termes de Tocqueville. Envisagés en ces termes il est effectivement difficile d’opposer des objections sérieuses à l’État-providence. Pour quels justes motifs refuserions-nous d’aider nos frères dans le besoin alors que nous sommes dans l’abondance ? Nous pouvons discuter du montant du chèque, mais guère de son principe.

Cependant les statistiques et les analyses présentées par Charles Murray nous obligent à réaliser que cette manière de concevoir l’État-providence est largement trompeuse. Les transferts opérés par l’État-providence sont en partie des transferts monétaires des catégories plus aisées de la population (en pratique essentiellement les classes moyennes) vers les catégories moins aisées. Mais, bien plus souvent, les transferts sont non monétaires, et ils ont lieu à l’intérieur des catégories défavorisées. Les catégories les plus favorisées ordonnent ces transferts, mais ce sont les pauvres qui doivent en payer le prix.

Prenons le cas de la modification des règles scolaires. Ces modifications, rendant beaucoup plus difficile de punir et d’expulser les élèves perturbateurs, étaient motivées officiellement par le désir d’aider ces élèves perturbateurs, qui étaient considérés avant tout comme des victimes. Leur comportement s’expliquait, disait-on, par la situation socialement défavorisée qui était la leur et les punir pour ce comportement revenait à les punir pour être pauvres. Les élèves indisciplinés devaient donc rester à l’intérieur de l’école. La conséquence évidente est que la discipline à l’intérieur des salles de classe accueillant ces élèves « issus de milieux défavorisés » s’est beaucoup dégradée, pour ne pas dire que dans trop de cas elle a purement et simplement disparu et qu’il y est devenu impossible d’enseigner et d’apprendre.

Cette modification des règles ne coûte a priori pas d’argent à la collectivité, et cependant un transfert a bien été effectué. Pour améliorer la situation des élèves perturbateurs, nous dégradons la situation des élèves travailleurs et disciplinés. Nous opérons un transfert immatériel des bons élèves vers les mauvais élèves. Les mauvais élèves restent à l’école, mais les bons élèves ont plus de difficulté à apprendre puisque l’ambiance de la classe s’est dégradée.

En pratique ce transfert a presque toujours lieu des enfants issus des catégories défavorisées vers d’autres enfants des catégories défavorisées. Le fils de pauvre, qui est disposé à écouter ses professeurs, à travailler et à apprendre, doit abandonner l’occasion de s’instruire et de s’élever par l’école pour que le fils de pauvre qui n’est pas disposé à travailler et à apprendre puisse rester dans la même école que lui. Il ne saurait en effet être question de bâtir des filières différentes pour ces deux types d’élèves : les mêmes principes qui ont conduit à modifier les règles de la discipline scolaire conduisent aussi à refuser toute « ségrégation » scolaire, c’est-à-dire à séparer les bons élèves des mauvais.

Ces transferts des pauvres vers les pauvres sont au cœur de l’État-providence.

Lorsque des délinquants issus de milieux défavorisés, selon l’expression consacrée, sont laissés en liberté sous prétexte qu’ils sont avant tout des victimes du « système », les risques d’être victime de la criminalité augmentent avant tout pour les gens pauvres qui vivent dans les mêmes quartiers que ces délinquants. Ce sont eux, et non pas les catégories favorisées de la population, qui doivent abandonner une large part du bien que l’on nomme « sécurité » afin que les jeunes délinquants n’aient pas à être punis. Lorsque les programmes de formation professionnelle sont conçus en fonction des capacités des plus médiocres, ce sont les pauvres les plus capables qui doivent abandonner l’opportunité de développer leur potentiel professionnel. Lorsque les politiques sociales instillent l’idée que certains emplois sont trop dégradants pour être occupés, ce sont les pauvres qui préfèrent occuper ces emplois plutôt que de dépendre de la charité publique qui doivent abandonner une partie de ce qui faisait leur dignité personnelle.

D’une manière générale, l’État-providence, à partir du milieu des années 1960, a effectué des transferts considérables entre les pauvres, des pauvres les plus capables vers les pauvres les moins capables, des pauvres les plus honnêtes vers les pauvres les moins honnêtes, des pauvres les plus responsables vers les pauvres les moins responsables. En retour, l’État-providence a uniquement donné à ces pauvres méritants la seule chose qu’ils n’auraient jamais demandé : un accès plus facile à la charité publique.

Voir aussi

Idées reçues sur les blancs américains, écart moral et culturel croissant des classes sociales


Le financement des écoles dites privées au Québec et au Canada

Le philosophe Guy Durand écrit au Devoir :

Dans le texte intitulé « La nouvelle croisade », paru le 28 mars, le journaliste [du Devoir] Michel David donne des chiffres peu fiables, voire inexacts et susceptibles de fausser le débat sur le financement des écoles privées.

Il s’appuie d’abord sur le rapport Champoux-Lesage (2013) pour affirmer que les écoles privées au Québec sont subventionnées à 75 %. Or, selon les données du ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur (MEES), la contribution de l’État représente plutôt environ 42 % des revenus totaux des écoles privées (Indicateurs de gestion 2013-2014 : établissements d’enseignement privés, page 8). Dans les faits, l’État verse aux écoles privées subventionnées 60 % de ce qu’il verse aux commissions scolaires pour les services éducatifs. Mais, une école dépense plus que des services éducatifs, par exemple, le coût d’entretien des bâtiments et équipements, les frais des divers services de soutien aux élèves, etc. D’où le 42 % du MEES.

Plus loin, le journaliste écrit que l’école privée n’est financée par l’État que dans quatre autres provinces canadiennes, l’Ontario et le Nouveau-Brunswick ne donnant aucune subvention. Effectivement, le rapport de Pierre Fortin et Marc Van Audenrode (sept. 2013) met le Manitoba, la Saskatchewan, l’Alberta et la Colombie-Britannique dans la même catégorie que le Québec, mais pour dire qu’elles subventionnent de 40 % à 50 % des coûts totaux des écoles privées (page 14). Et en Ontario, les écoles privées ne reçoivent rien, mais tout le réseau des écoles séparées (Roman Catholic Schools) est subventionné à 100 %.

jeudi 30 mars 2017

Québec — La maternelle 4 ans n’a pas atteint ses objectifs, selon une étude

Voici une nouvelle qui ne surprendra pas les lecteurs de ce carnet au vu des études précédentes qui tendent à montrer que l’éducation formelle très précoce a — en général — peu d’effets à long terme. Les gains observés en maternelle s'atténuant au bout d'une année d'école. Voir Maternelle publique et gratuite : sans effet sur les résultats au primaire, « Le système de garderie universel en Suède forme des enfants moins instruits » et Les CPE ont échoué sur le plan pédagogique... comportemental et démographique. Ceci dit dans certains cas avec des enfants très défavorisés et des programmes de très bonnes qualités, on peut obtenir de bons résultats. Mais cela ne s’applique pas à un grand nombre d’enfants, il faut vraiment que les enfants viennent de milieux dysfonctionnels ou qui ne permettraient pas à l’enfant d’apprendre la langue d’enseignement avant qu’il ne rentre à l’école.

La réponse du milieu éducatif à cet échec était prévisible, pavlovienne : il faut plus de moyens, plus de subventions. Plus d’argent donc, mais au dépens de qui ? De quels autres enfants ?

Ceci dit nous ne sommes pas contre l’aide ponctuelle à des enfants très défavorisés, car ces enfants méritent d’être aidés. Mais, il faudrait aussi se demander qui sont ces enfants défavorisés ? Ceux de familles pauvres, de familles immigrées ne parlant pas le français, de familles monoparentales ? Et si l’on tentait également de réduire ce bassin de familles défavorisées ? En favorisant le développement économique, en limitant l’immigration de personnes ne parlant pas le français, en valorisant la stabilité des couples ?



Une première étude sur la qualité éducative de la maternelle quatre ans, depuis son déploiement en 2013, démontre qu’elle n’a pas atteint ses objectifs.

Ceci s’explique par un manque de qualité, selon la psychologue et professeure Christa Japel au Département d’éducation et formation spécialisées de l’UQAM, qui a piloté l’étude.

La conclusion de son étude est sans équivoque : l’initiative a raté sa cible, puisqu’elle ne réussit pas à favoriser la préparation à l’école des enfants issus de milieux défavorisés.

« On n’a pas alloué assez d’argent aux enseignants pour mettre en place un milieu qui est stimulant et accessible pour les enfants de quatre ans », explique Christa Japel, qui épingle au passage le manque de formation ciblée des enseignants.

La psychologue ne recommande pas pour autant l’abolition du service. Elle suggère plutôt au gouvernement de bonifier la qualité des services. « J’aimerais bien mettre en perspective le résultat parce que je veux bien qu’il serve à améliorer les maternelles, pas à les abolir, ce serait vraiment dommage », conclut-elle.

Le gouvernement a implanté la maternelle quatre ans en milieu défavorisé pour réduire l’écart entre les enfants de ce milieu et ceux qui sont plus nantis lorsqu’ils commencent leur scolarisation à cinq ans.

Dans leur méthodologie, la psychologue et son équipe ont choisi quelque 300 enfants dans 30 écoles différentes en milieu rural et urbain. L’année suivante, ces mêmes enfants ont été comparés avec un groupe témoin issus des mêmes écoles et des mêmes quartiers, qui n’avaient pas fréquenté la maternelle quatre ans. Les chercheurs n’ont observé aucune différence entre les deux groupes.

La psychologue salue l’énergie et les efforts du personnel de ces maternelles, mais constate que près d’un quart des enseignants n’a pas suivi de cours spécifiques en enseignement préscolaire. Elle note également le manque de personnel et de soutien matériel.

Le ministre de l’Éducation du Québec, Sébastien Proulx, appuie le programme. « Ce que j’entends c’est que c’est un bon programme et qu’il faut continuer, dit-il, mais s’intéresser à la qualité. C’est ce que je fais en service de garde, c’est ce que je fais à l’école, c’est ce que je vais faire en maternelle tant quatre ans que cinq ans dans notre système. »

Il promet même d’augmenter prochainement le nombre de classes pour les enfants de quatre ans.

Quant au chef du Parti québécois, Jean-François Lisée, il estime que le gouvernement doit réinvestir dans le programme de maternelle quatre ans en milieu défavorisé.

Sources : Le Devoir et Radio Canada

Le programme Head Start aux États-Unis

Head Start est un programme du Département de la Santé, de l’Éducation et des Services sociaux des États-Unis qui fournit une éducation complète, des services d’implication parentale, de santé, de nutrition, aux enfants à faibles revenus et à leurs familles. Head Start a été créé en 1965 et fut modifié par le Head Start Act de 1981. Ce programme a été profondément refondu en décembre 2007. C’est aussi le programme ayant la plus grande longévité parmi ceux destinés à régler la pauvreté systémique aux États-Unis. De 1965 à 2005, plus de 22 millions d’enfants en âge préscolaire avaient participé au programme Head Start. Le budget de 6,8 milliards de dollars en 2005 a permis d’offrir ces services à plus de 905 000 enfants, 57 % d’entre eux avaient quatre ans ou plus, et 43 % en avaient trois ans ou moins.

Selon l’histoire administrative du Bureau des Opportunités économiques, les enfants qui terminent le programme Head Start et qui sont placés dans des écoles défavorisées ont de moins bons résultats que leurs homologues dès la deuxième année du primaire. Ce n’est qu’en isolant ces enfants, par exemple en les dispersant et en les envoyant dans des écoles plus performantes que les gains acquis en maternelle pourraient être maintenus par rapport à leurs homologues.

Dans un article publié par le New York Times en 2009 et intitulé « Head Start Falls Further Behind » (Head Start prend encore du retard), Besharov et Call discutent une évaluation de 1998 qui a conduit à une réévaluation nationale du programme. Les auteurs déclarent que la recherche concluait que le programme actuel avait peu d’impact significatif.

En 2011, le chroniqueur du magazine Time, Joe Klein, a appelé à l’élimination de Head Start, en citant un rapport interne selon lequel le programme est coûteux et a un impact négligeable sur le bien-être des enfants au fil du temps. Klein a écrit :
« Prenez environ un million d’enfants de 3 et 4 ans parmi les plus pauvres, mettez-leur le pied à l’étrier sur le plan de la socialisation et de l’instruction en leur fournissant gratuitement un enseignement préscolaire, si cela fonctionne, cela permet d’économiser de l’argent en produisant moins de criminels et moins de bénéficiaires de l’aide sociale... Voilà 45 ans que ce programme a été introduit. Nous consacrons plus de 7 milliards de dollars à Head Start auprès de 1 million d’enfants chaque année. Nous avons finalement des preuves indiscutables quant à l’efficacité du programme, preuves fournies par le ministère de la Santé et des Services sociaux : Head Start ne fonctionne tout simplement pas. »

Toutefois, pour W. Steven Barnett, directeur de l’Institut national pour la recherche de l’éducation de la petite enfance à l’Université Rutgers, « Si l’on considère toutes les preuves et pas seulement celles citées par des partisans d’un côté ou de l’autre, la conclusion la plus précise est que Head Start produit des bénéfices modestes, y compris quelques gains à long terme pour les enfants »

Enfin, les chercheurs Fryer et Levitt n’ont trouvé aucune preuve selon laquelle la participation à Head Start avait un effet durable sur les résultats scolaires pendant les premières années à l’école.


Harcèlement scolaire: le cauchemar des bons élèves

On parle souvent de harcèlement à l’école. Curieusement on ne dit rien du phénomène suivant qui est pourtant très bien documenté et inquiétant et dont les professeurs ont souvent fait état dans l’indifférence générale : dans beaucoup de collèges et de lycées, ce sont les bons élèves, les “intellos” qui font l’objet de harcèlement.


“Marion, 13 ans pour toujours” : un téléfilm choc sur le harcèlement scolaire en France Un film sur l'histoire vraie de Marion, une collégienne qui s'est suicidée à l'âge de 13 ans parce qu'elle ne supportait plus les agressions verbales et physiques de ses camarades.

Sur ce sujet, silence des défenseurs des droits des enfants et de ceux qui militent à juste titre contre les horribles discriminations. La discrimination dont font l’objet les bons élèves, ceux qui travaillent, écoutent le professeurs, la discrimination, parfois des élèves “intelligents” ou doués, la discrimination des élèves précoces, des élèves qui lisent : personne n’en parle, ou si peu !

La stigmatisation des “intellos”

Il est évoqué en long et en large le rejet de la différence physique, les facteurs ethniques, territoriaux, religieux, sociaux qui peuvent expliquer une forme de rejet ou d’intolérance et on ne parle guère de ce rejet, pourtant hautement inquiétant au sein d’une institution qui serait censée promouvoir les qualités intellectuelles : le rejet et la discrimination des élèves différents parce qu’ils aiment lire ou parce qu’ils veulent travailler, parfois parce qu’ils sont doués pour les études, bref parce qu’ils sont des “intellos”.

Ce terme est là, bel et bien pour stigmatiser, souvent violemment, une catégorie particulière et quand même très bien représentée, d’élèves pas tout à fait acquis à la violence (qui parfois prévaut dans les établissements scolaires) et mal intégrés au caïdat local que font régner une poignée de meneurs. Je pense notamment aux lycées professionnels où l’on a pu voir des élèves pétitionner pour… pouvoir simplement étudier dans le calme: leur seul tort est de vouloir travailler, d’avoir parfois la tête dans les nuages de la culture, de l’histoire, des mathématiques, d’être de doux rêveurs dans un monde de rapports de force et de compétences strictement utilitaires.

J’ajouterai que ces élèves, nombreux, viennent de tous les milieux sociaux. Tous ! Ils peuvent être fils de femme de ménage, enfants d’ouvriers immigrés, jeune fille musulmane souhaitant s’émanciper par le travail d’un milieu qui n’encourage guère les femmes à faire des études, fils d’instituteurs, de cadres : tout le monde peut faire l’objet de ce bannissement abject.

Discrimination passée sous silence, car peu exploitable politiquement ?

Mais curieusement ce “racisme” là ne trouve guère d’écho. Personne n’en fait la phénoménologie naïve, en s’étonnant, en mesurant, en circonscrivant, puis enfin en s’indignant qu’une telle chose ait pu surgir au sein de… l’école de la République: le sanctuaire du savoir ??

Pas sociologiquement correcte ? pas redevable d’une explication marxiste en terme de lutte des classes ? Non inscriptible dans la lutte “anti-raciste” ? Non rabattable dans les plis de la “pensée politique” préformée ? Ne s’inscrivant pas suffisamment dans l’opposition dominants vs dominés ? Stigmatisant (ce serait un comble, mais je m’attends toujours au pire avec notre “intelligentsia” !) les caïds des collèges, ratonneurs d’intellos, peut-être, mais qui sont eux-mêmes des “victimes du système” venant de couches défavorisées??

Étonnant silence. Indécent oubli ! Criminelle abstention. Le harcèlement, les études le montrent, concernent très souvent de bons élèves parfois de brillants élèves et qui viennent assez souvent de milieux défavorisés. Ces élèves ni leurs parents n’ont les moyens, matériels et moraux, de se défendre ou de soustraire leur fils ou leur fille à ce qui peut parfois devenir un enfer. Cela est-il acceptable ?

Boucs émissaires faciles

Une anecdote qui en dit long pour terminer: dans un bon collège avec des enfants de cadres supérieurs, un élève me cite lors d’un débat une émission qu’il a vu sur Arte parlant d’égyptologie. Les moqueries de ses camarades fusent : “Arte !?! tu regardes ça! Trop mort de rire ! Le bouffon !”

Inutile de préciser que j’ai vertement mouché les aboyeurs. Formé à l’école de Meirieu, j’aurais sans doute remis vertement en place… mon intello : “Mounir ce n’est pas bien d’essayer d’intimider tes camarades et de te placer en position de supériorité ! Est-ce que tu arrives à comprendre pourquoi c’est une forme de violence ?? Te crois-tu supérieur parce que tu regardes Arte ? Fais ton auto-critique devant la classe !” Je n’exagère nullement. Ce sujet ne prête pas à rire.

Les profils du bouc-émissaire sur qui la violence collective se déchaîne parfois (les meneurs entraînant les autres) sont multiples mais catégorisables. Bien entendu il y a des élèves médiocres aussi dont le seul tort est d’être en surpoids, d’avoir la mauvaise couleur de peau, de religion, les mauvais vêtements le mauvais accent ou d’être… une fille gentille. Mais il y a aussi beaucoup d’élèves rejetés parce qu’ils montrent des aptitudes intellectuelles, un goût pour l’étude, le travail, que certains cadors jugent “un truc de pédale” (expression entendue!).

Anxiété, dépression, décrochage scolaire et pour finir..échec scolaire, finissent par être leur lot et ce, dès le collège, si la discrimination et les intimidations ont commencé à l’école primaire.

Cumulant les “handicaps” de plusieurs profils de bouc émissaire, on n’ose pas imaginer ce qu’il advient, parfois, dans l’école d’aujourd’hui, dans certains “endroits” oubliés par la République, des filles intellos, lectrices, soucieuses de bien faire, timides, anxieuses mais aussi en surpoids, n’ayant pas le bon profil ethnique ou religieux et n’ayant, pour faire valoir auprès de l’établissement et de l’institution scolaire, leur droit à la paix, la sécurité, parfois simplement leur droit à l’existence, qu’une mère agent d’entretien qui parle mal le français…


Les petits grammairiens, les petits latinistes, les petits collectionneurs de noms de dinosaures, les petits joueurs d’échecs : potentiellement presque tout le monde, si l’on ne s’employait pas à écrêter les aspirations à l’élévation…les départs de lumière.

Peut-être pourrait-on concevoir une école qui protège toutes les intelligences et tous les talents du massacre ? Après tout dans l’expression “lieu de vie” chère aux réformateurs il y a tout de même le mot “vie” qui peut ménager une petite place à la vie de l’esprit ?

Source (légèrement modifiée et raccourcie): Le Causeur

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Écoliers du primaire intimidés et traumatisés lors d'un atelier pour lutter contre l'« intimidation »

Cégeps : légère baisse chez les francophones, lègere hausse chez les anglophones

Légère baisse chez les francophones, petite hausse chez les anglophones, augmentation pour les techniques et mini désintérêt pour les programmes préuniversitaires, notamment en sciences humaines… Voilà quelques grandes tendances qui se dégagent des données préliminaires compilées au terme du premier tour des demandes d’admission dans les cégeps.

Suivant la courbe démographique, les 32 établissements collégiaux francophones du Service régional d’admission du Montréal métropolitain (SRAM) font face à une légère baisse des demandes d’admission (-1,8 %), plus marquée en région (-2,4 %). « C’est ce à quoi on s’attendait, on n’est pas en hausse démographique », constate Geneviève Lapointe, directrice des communications au SRAM. « Pour nous, une baisse de 1,8 %, c’est 1143 dossiers de moins. Peut-être qu’elle ne sera plus là au terme des 2e et 3e tours. » Le portrait est encore incomplet. Et les demandes d’admission ne se traduisent pas nécessairement en inscriptions, insiste-t-elle.

Hausse à Dawson

Contrairement au réseau collégial francophone, le cégep Dawson, le plus gros établissement collégial anglophone et l’un des plus populeux du Québec, voit ses demandes d’admission augmenter de +2,3 %, malgré la courbe démographique. Quoique petite, l’augmentation de la clientèle semble se confirmer si l’on se fie aux données des dernières années. « Pour nous, la hausse des demandes d’admission se passe en majorité dans les programmes techniques, c’est pour nous une surprise parce que ce n’est généralement pas le cas », explique Donna Varrica, responsable des communications. C’est d’ailleurs une nouveauté, les années précédentes ayant été marquées par un plus grand engouement pour les programmes préuniversitaires. « Je ne peux pas vous expliquer pourquoi, on n’a pas fait de sondages auprès des étudiants. […] Il y a eu beaucoup de travail sur la promotion des programmes techniques parce qu’ils permettent d’accéder rapidement au marché du travail, mais n’empêchent pas d’aller à l’université. Ça ouvre deux portes au lieu d’une. »

Moins de préuniversitaires, plus de techniques

Toujours à Dawson, les programmes préuniversitaires en sciences humaines et arts, lettres et communication suscitent moins d’intérêt. C’est d’ailleurs aussi le cas une grande partie des cégeps francophones ailleurs au Québec. « Il y a eu une diminution en sciences humaines, tous profils confondus », confirme Mme Lapointe, du SRAM. « C’est l’endroit où on a constaté la plus grande diminution, mais elle est de l’ordre de 3,6 %. Ce n’est pas alarmant. » Les techniques sont quant à elles au même niveau que l’an dernier (51 %).

Selon le service régional d’admission au collégial de Québec (SRACQ), les demandes pour les programmes techniques dans les cégeps de la région de la Capitale-Nationale ont augmenté de 1 %, alors que le secteur préuniversitaire a été légèrement plus populaire (2 %).

Fait à noter : les techniques des arts et des communications graphiques connaissent une hausse marquée de près de 10 %. À Québec comme à Montréal, les techniques de l’administration (comptabilité, gestion, etc.) semblent également très à la mode. Le SRACQ rapporte une hausse de 6,3 % en techniques administratives et le SRAM, une hausse de 22 % pour la Technique de comptabilité de gestion.

Source : Le Devoir

« Si j’étais ministre de l’Éducation... » de Mathieu Bock-Côté

Mathieu Bock-Coté (MBC) se met dans la peau d’un futur ministre de l’Éducation. Nous sommes d’accord sur de nombreux constats et vœux, mais nous pensons que son programme a peu de chances d’être mis en place à cause de l’inertie bureaucratique et syndicale. Tout vouloir changer sera trop difficile et une œuvre de trop longue haleine alors que les ministres de l’Éducation ont historiquement des mandats très courts. En outre, philosophiquement, faut-il que toutes les écoles se ressemblent ? Nous pensons qu’elles doivent être plus libres et permettre à certaines écoles de mettre en place des écoles nettement plus libres qui pourraient mettre en place le programme MBC, le tout subventionné directement (comme actuellement avec les écoles dites « privées » au Québec) ou indirectement (chèque-éducation ou déduction fiscale par enfant inscrit à l’école).



Carlos Leitao a réussi à faire passer son message : son budget de mardi était celui de l’espoir retrouvé en éducation.

D’un chroniqueur à l’autre, on l’en félicite. Bravo pour ces millions ! On aurait envie de jouer de la trompette avec eux.

Je persiste à croire une chose, toutefois. En éducation, l’argent à lui seul ne fait pas le bonheur.

On aurait beau rajouter mille milliards de dollars par année, sur le plan des principes, il y aurait encore quelque chose de déréglé dans notre système d’éducation.

Mission

Quoi donc ? Notre vision de l’école, justement.

Qu’attendons-nous d’elle ? Quelle mission voudrait-on qu’elle joue ? Quelle philosophie l’anime ? Ce sont des questions essentielles.

Traditionnellement, l’école devait transmettre une culture. Elle devait inscrire les nouvelles générations dans une civilisation et les familiariser avec son histoire, sa géographie, ses grandes œuvres et ses savoirs fondamentaux.

Elle devait apprendre à lire, à écrire, à parler, et pourquoi pas, à bien parler. Elle devait donner aux jeunes esprits le goût de la culture et du silence méditatif.

L’école a renoncé à cette philosophie. Elle l’a fait sous la double pression de la droite économique et de la gauche politiquement correcte.

La première voulait que l’école forme de futurs travailleurs malléables et adaptés au marché.

La seconde rejetait massivement notre héritage de civilisation. Elle voulait plutôt que l’enfant construise lui-même son propre savoir, sans être « écrasé » par le monde d’hier. Il fallait alors couper les liens avec le passé. Nous avons mutilé les âmes.

Je cède un instant à un fantasme : je m’imagine ministre de l’Éducation.

Je m’efforcerais de rétablir le sens de la transmission culturelle.

Je reconnecterais l’enseignement du français à celui de la littérature.

Je délivrerais l’enseignement de l’histoire du politiquement correct. On y raconterait l’histoire du peuple québécois et de la civilisation occidentale sans cette étrange manie culpabilisante qui pousse la jeune génération au déracinement.

On l’aura compris : mes premières décisions ne seraient pas budgétaires. Je voudrais réformer culturellement l’école. J’y rétablirais le culte du silence, de la concentration.
Chaque jour, les élèves liraient une bonne heure en silence.

À l’école, pas de textos, mais des grands textes.

J’apprendrais aux élèves à admirer les grands ancêtres et les grandes œuvres. Je leur inculquerais la passion de l’histoire, de la géographie, des sciences naturelles.

Rupture


Il y aurait une grande rupture : assez de l’obsession des nouvelles technologies. Assez des nouvelles méthodes pédagogiques où les connaissances sont sacrifiées aux compétences.

Le professeur en pleine maîtrise de sa matière serait de retour. Mais je m’assurerais aussi que les professeurs soient formés en conséquence.

L’école ne traiterait plus les élèves comme des cobayes au service des savants fous du ministère de l’Éducation, mais comme de futurs citoyens appelés à enrichir l’héritage légué par leurs devanciers.

Pour cela, il faut moins des milliards que des idées claires et du courage politique. Ces dernières ressources sont encore plus rares que les milliards.

Voir aussi

Pas de classiques de la littérature, mais la lutte contre l’hétérosexisme en classe de français, d’anglais, d’histoire et de mathématiques

Pour la lecture des classiques : « On est un meilleur ouvrier si on a lu Montaigne ou Proust »

Très forte chute des résultats en lecture pour les élèves québécois francophones entre 2007 et 2010

Dépenser plus en éducation, est-ce la solution ?


mardi 28 mars 2017

Hausse record de la natalité en Pologne

Le journal Dziennik Gazeta Prawna annonce que la Pologne est en bonne voie pour dépasser cette année la barre des 400 000 naissances, ce qui serait une première depuis 2010.

Selon le journal, le nombre de bébés nés a été en constante augmentation depuis octobre l’année dernière, atteignant un sommet de sept ans en janvier.

Le quotidien ajoute que la raison du boom pourrait être le programme « 500+ » du gouvernement, qui fournit à toutes les familles de deux enfants ou plus une somme de 500 PLN (130 $) par mois par enfant.

L’article indique également que le dynamisme du marché du travail polonais est un facteur important dans la croissance du nombre de naissances.

Sources : Radio Pologne et Le Petit Journal

Voir aussi

Démographie — Nouvelle petite chute de la natalité québécoise en 2016 (7e année de suite)


Extrait d’un reportage qui parle de l’attrait de la politique nataliste du PIS au pouvoir en Pologne. Cette émission d’Arte (chaîne franco-allemande très européiste) est critique des gouvernements « populistes » d’Europe centrale, mais il laisse parler les partisans des partis populistes.

« Le sexe à l’école. L’amour nulle part. »


Extraits d’un billet de Brigitte Bédard, chroniqueuse au Verbe :

Lise Ravary du Journal de Montréal a écrit un billet hier sur le sujet, et je me dois d’écrire ici ce que je serais allé dire ce soir-là en studio.

Lise affirme que ce sont les parents « surtout dans les domaines religieux » qui ont contesté le cours obligatoire d’éducation sexuelle très explicite que l’Ontario s’apprête à donner en septembre, dès le primaire.

D’abord, le fait que ce soit surtout les parents religieux qui s’y opposent n’enlève rien au fait que ce cours soit une mauvaise idée. Rappelons-nous que c’étaient surtout les parents étiquetés « religieux » qui contestaient l’obligation du cours d’éthique et de culture religieuse au Québec à partir de 2008 ; ce n’est qu’en 2015 que la Cour suprême, ainsi que bien des chroniqueurs vedettes et une partie de la population, commence à se réveiller sur cet endoctrinement.

Le parent « religieux » n’est pas exempt de raison. Les parents « religieux » offrent la possibilité de voir les choses sous un autre angle, un angle qui tente de préserver ce qu’il y a de sacré : la vie, la mort, l’amour, la sexualité, la foi, la conscience, la famille, les plus faibles, les conditions de vie humaines et sociales des personnes, l’environnement et la nature.

[...]

Lise Ravary y va avec statistiques sur les infections transmises sexuellement (ITS) pour justifier le cours d’éducation sexuelle. Elle le justifie aussi du fait que les jeunes d’aujourd’hui sont alimentés sexuellement « par la porno sur Internet et le récit des aventures de leurs pairs » qui eux, croient tout savoir.

Aucune preuve que davantage de cours d'éducation sexuelle au Canada réduise les ITS

Notons que la lutte contre les maladies vénériennes est une vieille scie. On l’utilise depuis que les cours d’éducation sexuelle ont été introduits dans les années soixante sans que ces infections ne diminuent...

L’Ontario a déjà, depuis de nombreuses années, un cours d’éducation sexuelle (un cours à part et non enseigné de manière transversale) où l’on informe les élèves des maladies vénériennes et des moyens de s’en protéger. Est-ce que cela veut dire que l’Ontario a connu une moindre augmentation dans les infections transmises sexuellement que le Québec ? La réponse courte est non. Ces infections sont en hausse dans tout le Canada, avec une plus grande fréquence pour la chlamydia et la gonorrhée dans certaines régions peuplées par de nombreux Amérindiens et Inuits. Et bien sûr ces infections touchent toujours d’abord les jeunes dans nos sociétés à la sexualité permissive et précoce. Ce n’est pas une nouveauté ni une « catastrophe » récente.

Les cas d’infections sexuellement transmissibles augmentent dans les milieux homosexuels (mâles). Qui peut prétendre que c’est par « ignorance » des moyens prophylactiques ?

Taux et cas signalés d’infection à Chlamydia trachomatis, d’infection gonococcique et de syphilis infectieuse (pour 100 000 habitants) 2002, 2010 et 2011, Canada
Année  Infection à Chlamydia   Infection gonococcique   Syphilis infectieuse 
Cas Taux Cas Taux Cas Taux
2002 56 266   179,5  7 365   23,5 482  1,5 
2010 93 329   273,7  10 743   31,5 1 698  5,0 
2011 100 044   290,4  11 397   33,1 1 757  5,1 

Des augmentations similaires des taux d’infections transmissibles sexuellement à déclaration obligatoire étaient observées en Australie, en Angleterre et aux États-Unis des pays avec des programmes scolaires et d’éducation sexuelle très divers. Les campagnes de prévention hédoniste comme celle de 2009 ci-dessous ne semblent pas avoir d’effet, ce n’est pas étonnant.


Extrait de Chlamydia au menu (vos impôts québécois à l’œuvre !)



Hausse de 35 % des cas de chlamydia en Ontario entre 2008 et 2012...


La hausse du taux d’infection est constante depuis de nombreuses années


Chlamydia frappe les jeunes en Ontario aussi

Il en va de même pour la gonorrhée en Ontario, malgré (?) les cours d’éducation sexuelle


Forte augmentation des cas de syphilis infectieuse en Ontario depuis 2008 (près de deux fois plus en 2012 qu’en 2007)

De même en Suède, malgré l'éducation sexuelle très explicite, on assiste à une recrudescence des maladies vénériennes.




Brigitte Bébard poursuit :

Si la porno est si populaire, et même devenue banale (elle est présente dans les films, les téléséries, la pub, les médias), c’est au monde adulte que nous le devons. Si les jeunes ont accès à des sites pornos, ce sont les adultes qui leur donnent l’occasion de les visionner en toute liberté, en leur offrant des appareils sans filtre et en ne légiférant pas sur la porno. Si les pairs croient tout savoir et racontent leurs exploits, c’est qu’ils ont été éduqués par des adultes sans éducation, eux-mêmes accros à la porno ou libertins assumés et revendiqués.

Qu’entendent les enfants dans leur maison à propos de la sexualité ? À propos de l’amour ? Voient-ils leurs parents s’aimer ? Ont-ils des conversations sérieuses, avec un parent, dans l’intimité, sur la sexualité et l’amour, sur la responsabilité, sur la joie d’apprendre à faire l’amour pendant toute une vie avec la même personne, dans l’abandon à l’autre, dans le don de soi ? Ont-ils des moments de complicité avec leur père sur les émissions nocturnes ? Ou encore, les filles, un moment de grâce avec leur maman au sujet de la beauté du cycle féminin, si parfaitement réglé ?

Les enfants ne font qu’imiter les parents, ainsi que tout le monde adulte qu’ils côtoient chaque jour. Comment oser leur demander d’agir mieux que nous-mêmes ? « Faites ce que je dis, pas ce que je fais », c’est ça ? C’est absurde. Ne sommes-nous pas là pour les guider, leur donner le goût de vivre, d’aimer, de se donner, de donner la vie, de porter du fruit, de montrer l’exemple ?

Ils entendent et voient que le sexe se vit sans amour. Ils entendent et voient que le « pseudo-amour », ça se protège. Elles entendent et voient que si elles deviennent enceintes, elles peuvent se faire avorter. Ils entendent et voient qu’avec un condom, il n’y aura pas de risque. On leur dit que si elles reçoivent un vaccin, elles ne courent plus de risque.

Des bidules, des machins et l’amour vrai lui ?

S’il y a davantage d’ITS, c’est simplement parce qu’il y a davantage d’actes sexuels qui se produisent sans amour vrai. Ça ne prend pas la tête à Papineau pour comprendre ça ! Moins il y aura d’actes sexuels sans amour vrai, moins il y aura d’ITS ou d’avortement.

Lise Ravary se moque de l’idéologie du genre — théorie qui fait partie intégrante du cours d’éducation sexuelle ontarien — mais elle est d’accord avec l’approche explicite des cours d’éducation sexuelle dès le primaire : « nommer les choses », « orientation sexuelle », « puberté », « système reproducteur », « stéréotypes », « consentement », « sexe anal », « sexe oral », « abstention ».

Quel beau programme de techniques, de résultats, de statistiques, de bidules et de machins.

Consommation ! L’idéologie du genre n’est autre chose que l’aboutissement de ce raisonnement consumériste de la sexualité. La sexualité « enseignée » à l’école, sera pour les enfants, comme elle l’est déjà partout, une activité récréative que chacun peut vivre au gré de ses pulsions et de ses idées du moment, totalement désacralisée, séparée de l’amour, de l’engagement à l’autre, de la communion à l’autre, de la fidélité à l’autre, et de la fécondité avec l’autre dans le but de fonder une famille.

Demandez à toutes les petites filles de 7, 8, ou 9 ans, et à toutes celles de 15, 16 ou 17 ans que vous connaissez et elles vous diront que ce qu’elles veulent, c’est l’amour, le grand, le vrai. Moi, je leur dis que ça existe. Et qu’il faut savoir attendre, car ce n’est que dans leur incommensurable soif d’amour, partagé avec l’homme de leur vie, que leur si fort et si grand désir sexuel s’épanouira, se nourrira et grandira sans jamais se lasser.

Notons que le nouveau programme québécois d’éducation à la sexualité semble aussi chercher à explorer des normes en matière de sexualité qui vont au-delà de celle des parents... Au nom de quoi ? On sent bien le dérapage possible, exploitable par des lobbys ultra-minoritaires qui viendront en classe aider les élèves captifs « à explorer » et les aider à déconstruire « les stéréotypes sexuels » (voir ci-dessous).






Voir aussi

Un enseignement de la sexualité dès la maternelle

Pétition pour amender le nouveau programme québécois d'éducation à la sexualité

Danemark — Imposition de l'éducation sexuelle pour « des raisons de santé publique » en 1976 (historique juridique)

Nouvelle offensive de la Manif pour tous sur l'éducation sexuelle

Québec — Le nouveau programme d’éducation sexuelle prônerait l’exploration sexuelle...?

Éducation à la sexualité : pourquoi aucune école pilote dans la ville de Montréal ?

Du grand journalisme : « Les Ontariens et le sexe »