mardi 14 avril 2020

Le confinement généralisé serait-il une erreur ?

La moitié de la population de la planète est confinée depuis de longues semaines pour se protéger de la pandémie de coronavirus. Alors que certains pays ont choisi d’autres voies ou sont en train de procéder au déconfinement de leur population. Rares sont ceux qui remettent en cause la stratégie d’enfermement de la population prise par les États. Le confinement serait un postulat face à l’épidémie.

Pourtant, le professeur Jean-François Toussaint, professeur de physiologie, médecin à Hôtel-Dieu et Directeur de l’IRMES scrute avec son équipe de statisticiens, depuis le tout début de l’épidémie, les avalanches de données qui lui arrivent du monde entier. Pour lui, le confinement généralisé serait inefficace et conduirait à des dégâts collatéraux immenses. Preuves à l’appui, Il préconise de sortir du confinement « aveugle » et de nous orienter vers un confinement « personnalisé » qui permettrait de faire repartir le pays avec le minimum de risques.


Tribune


Le système de soin français montre chaque jour admirablement sa capacité à aligner ses escadres face à la tempête, à réorganiser ses unités pour passer l’œil du cyclone et, par la puissance de ses solidarités et la maîtrise de ses équipes de réanimation, sauver le maximum de ceux qui, jeunes ou vieux, se présentent éreintés à ses portes. Aucun de ses membres n’en sort indemne. Plusieurs ne s’en sont pas relevés.

Que leur soit ici rendu l’hommage que tous méritent.

Une décision fondée sur la simulation numérique ou sur la vie réelle ?

Les mesures prises pour freiner les conséquences de l’épidémie sur les systèmes de santé ont été suggérées par un groupe de l’Imperial College de Londres. Tournant le dos à l’adaptation et à l’inventivité différenciées, gages de résilience du vivant, ce cercle a conseillé une réponse uniforme à tous les gouvernements du monde, par le biais de l’OMS, qui se repose sur cette communauté pour développer les modèles mathématiques de prévention des pandémies.

La première estimation des effets de ce confinement, unique dans l’histoire de l’humanité à cette échelle, vient d’être publiée pour l’Europe. On attend les publications suivantes, pour le continent africain notamment.
Selon ces simulations, les mesures auraient contribué à « épargner » 2500 vies en France soit environ le dixième d’une vague qui risque d’en emporter de 25 à 30 000.


Figure 1. Nombre de décès quotidiens en France (barres rouges) et prédictions (en bleu, avec intervalle de confiance) suggérant une faible différence (Source : Flaxman S et al, 2020)

Or certains postulats de ces estimations numériques sont incohérents : les contaminations ne diminuent pas dès le premier jour du confinement (ceci ne s’est vu dans aucun pays) et l’intensité comme la durée de l’effet ne sont jamais les mêmes partout. Ces deux hypothèses sont pourtant à la base des simulations publiées.

Alors que l’on ne connaît toujours pas la diffusion (R* 0 ou taux de reproduction : nombre de personnes contaminées par un porteur) ni la létalité précises (nombre de décès rapporté à la totalité des sujets contaminés par le virus, qu’ils aient été testés et validés ou non) de cette maladie, les auteurs annoncent ainsi 69 vies épargnées au Danemark, proposant des données qui ne font pourtant apparaître aucune différence avec les valeurs rapportées par ce pays et sans intégrer aucune des limites de telles mesures « en vie réelle ».

De la même façon, ce groupe avait prédit un possible total de 70 000 morts pour la Suède. Or, à sa dixième semaine d’épidémie, ce pays n’en est qu’à 870 décès. On a connu démonstrations plus probantes… mais voilà sur quelles erreurs repose la décision de confiner 3 milliards d’humains.

Il faut donc se reporter à la répartition réelle, maintenant bien décrite, de la mortalité du Covid pour comprendre la nature de ces vies numériquement « épargnées ». Dans le récent registre français on retrouve une distribution similaire à celle des patients décédés en Chine ou en Italie, avec un âge moyen proche de 80 ans (un sur six a plus de 90 ans) avec un taux extrêmement faible (0,1 %) pour les sujets de moins de 45 ans sans facteur de risque.

Les cibles du SARS-CoV-2 sont souvent des patients à risque métabolique ou cardio-vasculaire (homme, sédentaire, obèse, diabétique ou hypertendu), ce qui explique les ravages actuels aux États-Unis. On peut donc penser que parmi les 2500 vies « épargnées » par le confinement global, la moitié soit à risque cardio-vasculaire et ait atteint les 80 ans, soit l’espérance de vie des hommes en France.

Vers un confinement personnalisé

La maladie peut être vécue sans grand symptôme chez quatre personnes sur cinq, mais elle tourne à un combat de boxe acharné de 15 jours pour le cinquième. Le but d’une mesure de prévention efficace est alors de proportionner le confinement à ceux qui ne peuvent supporter cette épreuve : personnes de plus de 65 ans, malades cardiaques et vasculaires, insuffisants respiratoires ou rénaux, transplantés, personnes obèses, etc. Ces risques particuliers étaient d’ailleurs déjà présents en 2009 lors de la pandémie H1N1 sans que nous ayons en quoi que ce soit modulé nos conseils de prévention.

Sans immobiliser 80 % de la population active et surtout pas ceux qui en sortent guéris et immunisés après deux semaines — et contribuent, avec les jeunes et les plus actifs, à éteindre l’épidémie en réduisant la taille de la population cible — on peut alors diriger la prévention vers les seules personnes à haut risque, tandis que l’épidémie ralentit, comme elle l’a fait en Chine, Corée et Australie.


Figure 2. Nouvelles contaminations quotidiennes (moyenne glissante sur 5 jours) en Chine (rouge), Corée (violet), Australie (vert) et zoom sur ces 2 pays. La Chine passe le pic aux alentours du 9/2 (avec une relative incertitude sur les données déclarées les 13 et 14/2, ce qui peut avoir modifié la date précise, sans changer la dynamique globale). La Corée passe le 3/3, l’Australie le 30/3.

Transmettre et expliquer cette information maintenant connue de tous, pour que chacun d’entre nous comprenne son risque, l’évalue et décide en conséquence de se confiner ou pas est le meilleur gage de réussite. Il permet aussi de considérer les citoyens français pour ceux qu’ils sont : des adultes responsables en capacité de voter et d’agir.

Car l’épidémie n’a peut-être été ni différente ni mieux contenue en Europe que dans les États n’ayant pas eu recours à ces mesures. La pandémie est en effet tout sauf confinée : elle concerne maintenant tous les pays, toutes les régions et tous les cabinets médicaux (on estime à plusieurs millions le nombre de Françaises et Français ayant été en contact avec le virus).

Alors que la France et le monde ont passé la crête de vague entre le 3 et le 4 avril (et entre le 6 et le 8 pour le nombre de décès dans notre pays), l’issue pourrait donc ne pas même avoir été modifiée : aucune courbe nationale ne montre d’inflexion différenciée, mais un parcours toujours semblable, quelles qu’aient été les décisions prises (seul le masquage des contaminations initiales apparaît dans certains pays comme l’Iran, pour des raisons de politique locale).

Figure 3. En France, le sommet de la courbe des nouvelles contaminations au pas de temps quotidien apparaît entre le 3 et le 4 avril et le maximum de la courbe des décès entre le 6 et le 7 avril 2020.


Les deux pays qui ont refusé la voie du confinement sont en voie de réussir leur pari en 3 semaines, là où les autres ont effectué le parcours en 4 ou 5 (une semaine d’épidémie supplémentaire correspond à 10 fois plus de décès). Les Pays-Bas ont en effet amorcé une décrue le 2 avril rejoignant ainsi la Corée. Pour ces pays, le taux de mortalité au jour du pic est de 25 par million d’habitants contre 177 pour les principaux pays confinés (France, Espagne, Italie).

Quant à l’Allemagne, qui n’a pas confiné toute sa population, elle considère, par la voix de son président Frank-Walter Steinmeier, qu’elle n’est « pas en guerre » (aucune guerre ne laisse survivre 99,4 % de ses soldats [il existe des guerres très courtes... Le Danemark a perdu 26 de ses 13 500 soldats mobilisés avant de capituler aux forces allemandes en 1940]), mais dans un moment révélant notre degré d’humanité. Il est vrai que ce pays disposait avant la pandémie de 22 000 lits de réanimation — contre 5 000 en France (étendu en urgence à 12 000 au cœur de la tempête). Il a pu affronter la vague avec d’autant plus de sérénité et pense donc déjà, comme le Danemark, l’Autriche et l’Espagne, aux étapes d’un très prochain déconfinement.

Or la phase d’extension de la maladie dépend aussi de facteurs environnementaux et populationnels qui n’ont pas été pris en compte dans les modèles. Exemple : des cas sporadiques sont bien rencontrés, mais l’épidémie « ne prend pas » sur le continent africain. L’expansion lente y suit un régime certes exponentiel, mais avec des pentes beaucoup plus faibles qu’en Europe, sans doute pour des raisons climatiques et démographiques.

Figure 4. L’évolution du nombre de décès sur le continent Africain suit, dès le début de l’épidémie, une courbe exponentielle très inférieure à la courbe européenne : au bout de quatre semaines, les valeurs logarithmiques correspondaient à 5260 morts en Europe contre 456 en Afrique (Total actualisé au 6/6/20 : 52 494 décès en Europe ; 501 en Afrique). Même si l’on peut contester l’exactitude du nombre de décès déclarés, on ne peut expliquer les deux ordres de grandeur qui sépare ces chiffres : il s’agit bien du même virome mais sa dynamique est très ralentie non pas par les mesures de confinement, mais en raison d’un environnement physique, biologique et humain très différent et défavorable à la transmission du SARS-CoV2. [Ajoutons que l’on connaît le nombre d’hospitalisations et de décès en Afrique du Sud qui a un système hospitalier fiable, les chiffres connaissent bien une croissance nettement moins forte que dans l’hémisphère Nord]


Les appels au secours pour tenter de « sauver l’Afrique » ont peut-être cherché à servir d’autres agendas, à moins que certains n’aient su se confronter à la réalité pour y observer la très lente ascension de la maladie. Le risque, à ne pas tenir compte de cette réalité, est de détourner les scientifiques et les financeurs de l’objectif principal, car ce continent a plus que jamais besoin d’un soutien massif et constant dans sa lutte contre d’autres prédateurs, à commencer par le paludisme, la tuberculose et le sida. Or ce soutien est d’autant moins assuré que le cadre financier de ses donateurs s’écroule.

Enfin le confinement, appliqué parfois de façon outrancière dans de nombreux autres pays du monde, aura aussi servi au renforcement des régimes autocratiques, jusqu’au cœur de l’Europe. Et malheureusement ce mode de fonctionnement des sociétés humaines prolifère durant leurs effondrements.

Synchronisations délétères

Pour être utile à la décision publique et proportionner la réponse, les modèles pertinents doivent désormais prendre en compte les émergences et les interdépendances entre tous les niveaux, sus- et sous-jacents, y compris quand elles résultent d’une synchronisation inappropriée entre les États (paniques, confinements, affrontement, effondrement). Car c’est principalement de ce côté que va maintenant croître le décompte des victimes.

Nous nous savions instables face au gouffre. Nous avons cependant enclenché la touche « Faites un pas en avant ». Les centaines de milliards d’euros envolés avec la chute d’une économie, qu’on savait pourtant d’une extrême fragilité, interrompront aussi le flux des financements nécessaires aux équipements des hôpitaux et des autres services publics. Car les équipes de réanimation, de soins et leurs administrations, qui ont contribué à sauver des vies bien réelles méritent toute notre admiration pour l’engagement qui fut le leur, mais elles vont maintenant avoir besoin de moyens pour toutes les autres.

Il faudra donc, après le confinement, également prendre en compte son impact sur les patients souffrant d’une leucémie non diagnostiquée, d’un infarctus pris en charge trop tardivement, d’une drépanocytose mal suivie, parmi toutes les pathologies qui manquent à l’appel. Les effets psychologiques (refus de tout déplacement par peur de la contamination) ou contre-productifs (réduction ou arrêt des consultations) de ces mesures devront se confronter aux choix des Néerlandais et des Suédois qui continuent de vaquer, prudemment certes, mais librement, à leurs occupations. La perte de chance risque d’être lourde.

Les auteurs de ces simulations, tout à la charge de démontrer la qualité de leurs modèles, auront toutes les peines du monde à accepter d’inclure ces dégâts collatéraux auxquels s’ajouteront les conséquences sur la recherche et l’annulation de tous les grands rendez-vous scientifiques, culturels ou climatiques, mais aussi la solitude des artistes qui, de théâtre en scènes musicales, ne trouveront plus les moyens de gagner leur vie ni d’enchanter la nôtre et surtout l’abattement des personnes seules qui se seront laissées glisser lentement dans l’abandon.

Paradoxe que de tenter de sauver des vies par des moyens qui en auront peut-être tout autant détruit.

Jean-François Toussaint, Directeur de l’IRMES, Médecin à Hôtel-Dieu, AP-HP, Université de Paris avec Andy Marc, Chercheur en Biostatistiques à l’IRMES

Source

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Québec songe à rouvrir écoles et garderies avant le 4 mai

Le confinement généralisé, une mesure moyenâgeuse pour pallier nos carences ? 




vendredi 10 avril 2020

Québec songe à rouvrir écoles et garderies avant le 4 mai

« On n’exclut pas de rouvrir les écoles puis les garderies avant le 4 mai », a déclaré aujourd’hui le Premier ministre du Québec, François Legault.

Au bout de quatre semaines de confinement, M. Legault considère que les Québécois ont besoin d’« un peu d’espoir », a-t-il affirmé, pensant entre autres « aux entrepreneurs et aux parents d’enfants turbulents ».

Depuis que les spécialistes de l’Institut national de santé publique du Québec et du ministère de la Santé et des Services sociaux ont annoncé mardi que le sommet de l’épidémie était attendu autour du 18 avril, le Premier ministre se montre plus optimiste que jamais.

Depuis quelques jours, son discours porte surtout sur la réouverture de l’activité sociale et surtout économique de la province.

Vague « moins haute qu’ailleurs », beaucoup de lits vides

« Il y a toutes raisons de croire qu’on est en train d’atteindre le fameux pic, le fameux sommet. Donc, ça va se stabiliser, ensuite redescendre. Puis je pense qu’on va, en tout cas, je l’espère, être capables, dans les prochains jours, de passer à une nouvelle étape », a dit un M. Legault, vendredi, avant de prendre deux jours de congé pour Pâques.

« Ce qu’on voit aussi, puis on est prudents, c’est qu’on est en train d’atteindre le haut de la vague. Les augmentations se stabilisent, donc on est en train d’atteindre le haut de la vague puis en plus, la vague est moins haute qu’ailleurs, est moins haute même qu’on avait anticipé. »

On compte dorénavant 11 677 cas confirmés, dont 733 traités dans nos hôpitaux. Cette fois avec 54 de plus en 24 heures, ce nombre n’a juste jamais pris la tangente exponentielle que les modèles indiquaient au début et pour laquelle le gouvernement avait libéré jusqu’à 8000 lits. Moins de 800 malades pour 8000 lits, un mois après le début du confinement.

À tel point que vendredi, on comptait 186 patients alités aux soins intensifs, 10 de moins que la veille !

Notons que la critique des modèles inexacts qui auraient poussé les gouvernements à agir de manière excessive se fait de plus en plus grande : Inaccurate Virus Models Are Panicking Officials Into Ill-Advised Lockdowns (The Federalist, 25 mars 2020) et How can coronavirus models get it so wrong? (The Guardian, 7 avril 2020) et The Scientist Whose Doomsday Pandemic Model Predicted Armageddon Just Walked Back The Apocalyptic Predictions (The Federalist, 26 mars 2020). Voir les gazouillis du 26 mars 2020 ci-dessous.


« On voit que le nombre de personnes hospitalisées et aux soins intensifs se stabilise encore. Ça commence à faire quelques journées de suite. Évidemment, on va continuer d’avoir des décès. En particulier dans les CHSLD (Centre d’hébergement et de soins de longue durée, maisons de repos)
, parce qu’on a, dans les CHSLD, des personnes qui sont déjà malades, donc qui sont plus vulnérables lorsqu’elles sont atteintes de COVID-19 », constate le Premier ministre.

« Chômage beaucoup plus élevé »

M. Legault constate aussi que « l’ampleur du chômage est beaucoup plus élevée » que les 8,1 % annoncés jeudi pour le mois de mars au Québec. En février, le Québec montrait son plus bas taux de chômage depuis 1976, 4,5 %.

« On est en train de faire l’évaluation, secteur par secteur, de combien d’emplois ont disparu depuis le début de la crise pour se donner un plan pour rouvrir éventuellement les différents secteurs, a-t-il assuré. »

Mais si on veut retourner des gens au travail, leurs enfants, surtout ceux de l’école primaire, ne peuvent pas rester seuls à la maison. De là l’idée de rouvrir les écoles et garderies avant le 4 mai, deuxième date annoncée il y a déjà deux semaines après celle du 30 mars.

Participer à la hausse de l’immunité collective

Rien n’est encore décidé, mais les enfants sont beaucoup moins à risque face à la COVID-19, insiste-t-il, soulignant au passage que le directeur national de santé publique, Horacio Arruda, devrait au préalable lui donner son aval.

Présent à ses côtés, le principal intéressé a expliqué que la réouverture des écoles et des services de garde ferait en sorte que les enfants, moins vulnérables, participeraient à l’immunisation de la population.

Le Dr Horacio Arruda, directeur national de santé publique, a déclaré que « Plus les enfants vont être immunisés par la maladie [...], moins ils vont devenir des vecteurs actifs pour les personnes plus âgées. »

« Il faut comprendre que les jeunes qui pourraient attraper la maladie, avec presque aucun symptôme, c’est comme si on les vaccinait, a-t-il illustré. C’est la vaccination naturelle qui va s’installer. », a-t-il ajouté.

Rappelons que la Suède (voir le reportage allemand ci-dessous) n’a jamais fermé ses garderies, écoles primaires ou même secondaires inférieures précisément pour ces raisons.



« C’est plus que sérieux », confirme le Premier ministre Legault.

« Il n’y a rien de décidé encore. On va suivre les résultats jour par jour. Mais comme on l’a souvent dit, les enfants sont beaucoup moins à risque. Ce qu’il va falloir s’assurer quand on va rouvrir les écoles puis les garderies, c’est que les enfants ne passent pas du temps proche de leurs grands-parents. C’est malheureux et je sais que les grands-parents aiment ça voir leurs petits-enfants, mais pendant un certain temps, il va falloir absolument éviter ça. Mais vous le voyez, dans les résultats, il y a très peu d’enfants qui subissent des conséquences graves. »

« Il pourrait avoir un scénario où il va avoir une réouverture partielle avec les parents, quand il y a un des deux parents qui peut retourner travailler, ou ceux qui n’ont pas d’enfants jeunes. Et peut-être dans un deuxième temps, une fois les écoles, les garderies ouvertes, rouvrir davantage l’économie. Mais tout ça, ce sont des scénarios qu’on regarde. Ce dont on a besoin, c’est de l’accord de la Santé publique », ajoute-t-il.

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Pandémie : la TÉLUQ prête à admettre de nouveaux étudiants

Le confinement généralisé, une mesure moyenâgeuse pour pallier nos carences ?

jeudi 9 avril 2020

Politiques familiales — hausse des naissances de 9 % en Hongrie, nombre des mariages double

Le déclin de la population de la Hongrie a ralenti de 47 % en janvier 2020, après 9,4 % de naissances supplémentaires et 17 % de décès en moins par rapport à la même période l’an dernier, a déclaré vendredi le Bureau central des statistiques (KSH).

L’indice de fécondité hongrois de 1,6 enfant/femme est désormais le même que celui du Québec, sans aucune politique migratoire.

Le nombre de mariages a presque doublé, avec 2863 couples mariés, par rapport à la même période l’an dernier, et le nombre le plus élevé de janvier depuis 1982.

Au premier mois de l’année, 8 067 enfants sont nés, soit 694 de plus qu’à la même période l’an dernier, tandis que 11 553 personnes sont décédées, 2 356 de moins qu’en janvier 2019. Le communiqué expliquait qu’en janvier, 8 067 enfants étaient nés, ce qui représente de manière significative, 694 nouveau-nés de plus qu’au premier mois de 2019, la valeur la plus élevée de janvier depuis 2009. À titre de comparaison, il est né 6 850 enfants au Québec en janvier 2020. La population du Québec était estimée à 8 485 millions en juillet 2019 alors que celle de la Hongrie était de 9 773 millions au 1er janvier 2019.

La valeur mensuelle estimée de l’indice synthétique de fécondité par femme était de 1,60 contre 1,44 pour la même période de l’année précédente.

Le taux de déclin naturel de la population est tombé à 0,42 % contre 0,79 % en janvier 2019, a indiqué le KSH.

Pour relancer la natalité, le Premier ministre hongrois avait décidé d’attribuer en 2019 une aide de 30 500 euros (44 500 $ canadiens) à chaque couple qui se mariait avant le 41e anniversaire de la femme.

Se dirige-t-on vers un pic de natalité hongrois ? Selon l’agence de presse britannique Reuters à la fin 2019, le nouveau programme nataliste du gouvernement hongrois semblait avoir donné un nouvel élan au nombre de mariages dans le pays en 2019. Il était cependant alors trop tôt pour dire si les bébés suivront.

Fin juillet 2019, pour éviter le déclin démographique qui mine son pays, le Premier ministre Viktor Orban avait annoncé un certain nombre d’avantages fiscaux pour favoriser les familles. Ainsi, depuis le milieu de l’été, un nouveau système offre aux couples qui se marient avant le 41e anniversaire de l’épouse des prêts subventionnés, pouvant atteindre 10 millions de forints, soit 30 500 euros. Un tiers de cette dette sera annulée si le couple a deux enfants et la totalité s’ils en ont trois. Selon le bureau central des statistiques (KSH), le nombre de personnes mariées avait ainsi déjà augmenté de 20 % au cours des neuf premiers mois de 2019. Le nombre de mariages enregistrés est le plus élevé depuis 1990. Pour le seul mois de septembre 2019, la Hongrie avait enregistré 29 % de mariage de plus que l’année précédente sur la même période.

Cette mesure s’inscrit dans la droite ligne de la politique anti-immigration de Viktor Orban, qui souhaite ainsi s’afficher en champion du redressement démographique d’un pays menacé par le vieillissement, et éviter un « grand remplacement ».

Pour stimuler sa population vieillissante, la Hongrie avait lancé en janvier 2020 un nouveau « programme national pour la reproduction » visant à « soutenir financièrement les couples qui n’arrivent pas à avoir d’enfants », 150 000 dans le pays. Le gouvernement souhaitait stimuler le système de fécondation in vitro (FIV) et lutter contre l’infertilité.

À partir de juillet 2020, un régime de gratuité pour les FIV sera mis en place : les 30 % des 3300 euros restant à la charge des familles en traitement de PMA seront remboursés par la sécurité sociale. Par ailleurs, l’État prit le contrôle et assura pendant 3 ans la gestion d’un certain nombre de cliniques privées qui s’occupent de fécondation in vitro. L’objectif étant de limiter rapidement les délais d’attente.

Ces mesures s’inscrivent dans une politique plus large visant à stimuler la natalité. En juillet dernier, un certain nombre d’avantages fiscaux ont été annoncés pour favoriser les familles.



lundi 6 avril 2020

Fable de La Fontaine sur le confinement et l'amitié



Certain ours montagnard,
ours à demi léchéOn croyait que les ourses, en léchant leurs petits, continuaient à les façonner. D’où l’expression « ours mal léché » appliquée à un rustre ou à un personnage aux manières mal dégrossies.
,
Confiné par le Sort dans un bois solitaire,
Nouveau
Bellérophon C’est Bellérophon, ce héros mythologique grec, qui, monté sur le cheval volant Pégase, tua la Chimère. Il était affecté d’un état mélancolique qui le poussait à éviter la société et à vivre dans la solitude.
vivait seul et caché.
Il fût devenu fou : la raison d’ordinaire
N’habite pas longtemps chez les gens séquestrés.
Il est bon de parler, et meilleur de se taire ;
Mais tous deux sont mauvais alors qu’ils sont outrés.
Nul animal n’avait affaire
Dans les lieux que l’ours habitait :
Si bien que, tout ours qu’il était,
Il vint à s’ennuyer de cette triste vie.
Pendant qu’il se livrait à la mélancolie,
Non loin de là certain vieillard
S’ennuyait aussi de sa part.
Il aimait les jardins, était prêtre de
FloreFlore est la déesse des fleurs.
,
Il l’était de
Pomone Pomone est la déesse des fruits.
encore.
Ces deux emplois sont beaux ; mais je voudrais parmi
Quelque doux et discret ami :
Les jardins parlent peu, si ce n’est dans mon livre :
De façon que, lassé de vivre
Avec des gens muets, notre homme, un beau matin,
Va chercher compagnie et se met en campagne.
L’ours, porté d’un même dessein,
Venait de quitter sa montagne.
Tous deux, par un cas surprenant,
Se rencontrent en un tournant.
L’homme eut peur : mais comment esquiver ? et que faire ?
Se tirer en
Gascon Les Gascons passaient pour fanfarons et beaux parleurs.
d’une semblable affaire
Est le mieux : il sut donc dissimuler sa peur.
L’ours très mauvais complimenteur,
Lui dit : « Viens-t’en me voir. » L’autre reprit : « Seigneur,
Vous voyez mon logis ; si vous me vouliez faire
Tant d’honneur que d’y prendre un champêtre repas,
J’ai des fruits, j’ai du lait : ce n’est peut-être pas
De Nosseigneurs les ours le manger ordinaire ;
Mais j’offre ce que j’ai. » L’ours accepte ; et d’aller.
Les voilà bons amis avant que d’arriver ;
Arrivés, les voilà se trouvant bien ensemble :
Et bien qu’on soit, à ce qu’il semble,
Beaucoup mieux seul qu’avec des sots,
Comme l’ours en un jour ne disait pas deux mots,
L’homme pouvait sans bruit vaquer à son ouvrage.
L’ours allait à la chasse, apportait du gibier ;
Faisait son principal métier
D’être un bon
émoucheur Chasseur de mouches. Le mot « émoucheur » a été créé par La Fontaine sur le verbe émoucher. On trouve dans « Pantagruel, XV » un renard émoucheteur.
, écartait du visage
De son ami dormant ce parasite ailé
Que nous avons mouche appelé.
Un Jour que le vieillard dormait d’un profond somme,
Sur le bout de son nez une allant se placer
Mit l’ours au désespoir ; il eut beau la chasser.
« Je t’attraperai bien, dit-il, et voici comme. »
Aussitôt fait que dit : le fidèle émoucheur
Vous empoigne un pavé, le lance
avec roideur Avec rudesse.
,
Casse la tête à l’homme en écrasant la mouche ;
Et non moins bon archer que mauvais raisonneur,
Raide mort étendu sur la place il le couche.
Rien n’est si dangereux qu’un ignorant ami ;
Mieux vaudrait un sage ennemi.

vendredi 3 avril 2020

France — Bac supprimé: une rupture d’égalité inacceptable (m. à j.)

Le ministre de l’Education nationale a déclaré au 20h que tout élève disposant d’un livret scolaire est éligible au contrôle continu pour le diplôme du baccalauréat : établissements publics, sous contrat et hors contrat.






En France, le ministre de l’Éducation, Jean-Michel Blanquer, a annoncé ce matin que les élèves de première et terminale passeraient le bac (et le brevet) en contrôle continu en juin, à l’exception des élèves des établissements privés hors contrat, et de ceux du CNED et de l’école à la maison qui le passeraient en septembre sous la forme d’épreuves finales (en présentiel).

Cette décision est fortement rejetée par les élèves, familles et établissements scolaires scolaires concernés (bac général, technologique et professionnel, brevet) car :

  • Il sera bien plus difficile d’obtenir son baccalauréat ainsi, mais ce sera pourtant officiellement le même bac (discrimination).
  • Les élèves du hors-contrat passeront en dernier dans le système Parcoursup (l’absence de validation du bac en juin bloquant leur dossier) et n’auront que très peu de chances de pouvoir accéder à l’établissement supérieur qu’ils souhaitent. C’est une discrimination dans l’accès au service public de l’enseignement supérieur.
  • Les élèves et les professeurs du hors contrat vont devoir travailler tout l’été et enchaîner sans repos l’année scolaire suivante, après un troisième trimestre déjà éprouvant.
  • Il n’est pas certain que les conditions sanitaires soient réunies en septembre pour que le bac ait effectivement lieu, ce qui fait peser une incertitude supplémentaire.
  • Les élèves du hors-contrat vont commencer leur année scolaire prochaine en retard et fatigués, ce qui les pénalisera.
  • Les élèves du hors-contrat n’auront pas de système de rattrapage (alors que les autres élèves auront l’oral de rattrapage de juillet et celui de septembre). Psychologiquement, faire passer le bac aux élèves du hors-contrat en septembre en même temps que les élèves en rattrapage leur renvoie une image dégradée d’eux-mêmes.
L’association Créer son école demande que le gouvernement revienne sur sa décision très vite et fasse passer le bac pour cette année en contrôle continu aux élèves du hors-contrat. Dans la mesure où les établissements privés hors contrat sont désormais contrôlés très sérieusement (depuis la loi Gatel d’avril 2018), il est absurde qu’on ne reconnaisse pas la capacité de ces établissements à délivrer des notes dans le cadre du contrôle continu. D’ailleurs, c’est bien sur la base de ces notes de contrôle continu que Parcoursup et l’intégration dans le cadre de l’enseignement supérieur se réalisent déjà.

Elles peuvent donc servir sans problème de base pour la délivrance du bac ou du brevet en contrôle continu dans le hors-contrat !

Cette décision inique pénalise gravement les lycées hors contrat, alors que les circonstances exceptionnelles invitent à une attitude magnanime traitant tous les enfants de France de la même manière. Elle requiert une réaction énergique tant sur le plan politique et contentieux.

Créer son école appelle à l’union tous les acteurs éducatifs et proposera demain un plan d’action pour obtenir tous ensemble un traitement respectueux et équitable des élèves des lycées hors contrat.

Anne Coffinier, présidente de Créer son école

Axelle Girard, directrice d’EducFrance

Voir aussi

France — dédoublement des classes en banlieues, fermeture de 200 à 300 classes en milieu rural

mercredi 1 avril 2020

Le confinement généralisé, une mesure moyenâgeuse pour pallier nos carences ?

Le confinement général, une mesure moyenâgeuse pour pallier nos carences ?


Pourquoi la Suède et les Pays-Bas ne confinent-ils pas entièrement ? Les écoles suédoises (le primaires et le secondaire inférieur/collège en France) ne sont par exemple pas fermées... Les Pays-Bas confinent cependant de plus en plus.



Ci-dessous reportage allemand sur la Suède qui privilégie l'immunité de groupe, le confinement des seules personnes à risques (vieux, autres personnes en mauvaise santé). On voit des terrasses pleines, des classes d'école normales. Une des raisons données en Suède : il faut penser à quand il faudra rouvrir les écoles et les bureaux, or en augmentant l'immunité de groupe cela sera d'autant plus rapide, le pari est que cette souplesse n'augmentera pas le nombre de décès par rapport aux pays où l'activité économique s'est arrêtée.



lundi 30 mars 2020

Mise en ligne de ecoleouverte.ca, la plateforme scolaire québécoise en ligne

Le ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur a mis en ligne lundi un site vers lequel les parents et étudiants peuvent se diriger pour trouver certains outils éducatifs.

Pour l’instant, « L’école ouverte » (ecoleouverte.ca*) est essentiellement d’un répertoire de sites internet qui ont été vérifiés par le ministère. En sciences et technologies, par exemple, on renvoie les élèves du secondaire vers le site Allô Prof ou encore sur la section pour les étudiants du site de l’Agence spatiale canadienne.



« Ça facilite la navigation des élèves et des parents, ça empêche de tomber sur des sites plus ou moins fiables, plus ou moins appropriés, et ça classifie les apprentissages en fonction du niveau des élèves et de la matière dans laquelle ils souhaitent faire des exercices », explique en entrevue le ministre de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur, Jean-François Roberge.

Ce site sera « enrichi de jour en jour », ajoute le ministre.

À compter de la semaine prochaine, les élèves de la province doivent recevoir des « listes d’activités hebdomadaires » qui seront adaptées à leur niveau. Elles seront envoyées par courriel ou par la poste.

Ces activités ne sont pas obligatoires et ne peuvent faire l’objet d’évaluations.

* Notons que les accents sont permis dans les noms de domaine depuis plus de 10 ans (écoleouverte.ca est donc permis), Québec semble l’ignorer...

vendredi 27 mars 2020

L’école à l’heure du coronavirus

Anne Coffinier s’entretient avec Guillaume Bonnet de l’hebdomadaire France Catholique, au sujet des mutations de l’école...

Et si la crise du Covid-19 était l’occasion de repenser le système éducatif ? La fermeture des établissements ouvre de multiples perspectives, estime Anne Coffinier, présidente de l’association Créer son école.

Depuis le 16 mars, 12 millions d’élèves travaillent à domicile. Quels fruits ce confinement peut-il porter ?


Anne Coffinier : Notre vision sera nécessairement modifiée en profondeur. Nous allons sans doute comprendre que huit heures de cours par jour ne sont pas forcément nécessaires, que la structuration des journées n’est pas intangible, que les parents doivent redevenir décideurs dans le domaine éducatif en tissant des relations nouvelles avec les professeurs, que le fameux socle éducatif [la partie imposée par l’État à toutes les écoles, mêmes celles dites libres] est en réalité un mammouth qu’il serait souhaitable de réduire à l’indispensable pour cultiver les passions de l’enfant. Les pistes sont très nombreuses.

Le confinement peut-il rendre les Français plus pragmatiques ?

Le cas français est atypique, voire bizarre. Ne pas choisir l’école publique serait faire montre d’antirépublicanisme et menacerait le «  vivre-ensemble  ». Cette approche idéologique pourrait être fragilisée par ce confinement qui rend obligatoire l’école à la maison, pourtant considérée en France avec méfiance par l’État… C’est l’occasion de changer les regards et de rappeler qu’il existe mille manières de faire l’école à la maison et d’articuler ce mode éducatif avec les autres approches.

Du pragmatisme, mais aussi de la souplesse ?

Observons l’approche anglo-saxonne. C’est souvent en utilisant les passions des enfants qu’on développe le goût du dépassement et de l’excellence, qu’il est ensuite plus simple de décliner dans les autres disciplines. Il s’agit aussi d’un univers dans lequel les jeunes sont responsabilisés tôt et invités à participer à la vie de leurs établissements. Enfin, l’école y est considérée comme une communauté de valeurs à part entière qui prépare à servir la communauté nationale une fois adulte.

Quels conseils donneriez-vous aux parents confinés et à la peine ?


Ce n’est pas un drame si les élèves ne parviennent pas à suivre tous les cours et à réaliser l’ensemble des exercices. Cette parenthèse est l’occasion de se concentrer sur les bases comme le calcul et la dictée, souvent fragiles, en utilisant les bons vieux classiques comme le Bled ou le Bescherelle. Pour les collégiens et lycéens, on peut lire du théâtre en famille ou apprendre de la poésie. C’est l’occasion de transmettre ce qui fait la force de notre patrimoine culturel. J’invite enfin les parents à se rendre sur le site educfrance.org pour y découvrir de nombreuses vidéos pour apprendre à faire de l’exercice sans matériel et dans un espace restreint.

Face à cette crise sans précédent, certains élèves sont moins égaux que d’autres…

Les écoles hors-contrat [privées non subventionnées] ont été fermées, comme les autres établissements, sur décision gouvernementale. Mais nous faisons face à une rupture d’égalité. Souvent, ces écoles ne disposent pas d’espaces numériques de travail (ENT) et n’utilisent que les courriels pour communiquer. Nous demandons donc au ministre un accès gratuit au CNED et à ses «  classes virtuelles  » ou l’octroi de subventions pour équiper les écoles hors-contrat avec des ENT classiques. Enfin, nous demandons un soutien pour équiper les familles avec des ordinateurs et des tablettes durant la durée de la crise. Sur le site educfrance.org, chacun peut signer la lettre ouverte que nous avons adressée en ce sens au ministre.

Source : france-catholique.fr, « L’école à l’heure du coronavirus », entretien avec Anne Coffinier, présidente de Créer son école. Propos recueillis par Guillaume Bonnet.

dimanche 22 mars 2020

Pandémie : la TÉLUQ prête à admettre de nouveaux étudiants

L’université à distance du Québec (TÉLUQ) dit être en mesure d’accueillir de nouveaux étudiants dans le contexte où le gouvernement du Québec autorise les institutions d’enseignement supérieur à maintenir la formation à distance.



«En tant qu'université entièrement à distance et leader dans ce créneau depuis près de 50 ans, notre corps professoral, nos personnes tutrices et chargées d'encadrement sont en mesure de poursuivre notre mission d'enseignement auprès de nos étudiants», a dit vendredi le directeur général par intérim, André G. Roy, par communiqué.

«Avec nos 125 programmes et plus de 450 cours, nous permettons déjà à des milliers de personnes d'obtenir un diplôme universitaire à distance», a-t-il ajouté.

Les admissions et les inscriptions à la TÉLUQ peuvent se faire à tout moment, et les cours se déroulent sans contrainte de distance et d'horaire, rappelle-t-on. Les étudiants peuvent donc faire leur formation à leur propre rythme.

La TÉLUQ rappelle par ailleurs qu’elle «offre son soutien à toute autre université au Québec, au Canada, et même ailleurs dans le monde».

«Nous accueillons annuellement plusieurs milliers d'étudiants par entente interuniversitaire et nous croyons que notre formule d'admission, d'inscription et de cours en continu offre une flexibilité unique qui permettrait d'accueillir rapidement des étudiants qui souhaitent éviter les impacts des situations exceptionnelles comme celles causées par la COVID-19», a-t-on indiqué.

Québec — Un réseau collégial de plus en plus anglophone

Ce texte fait partie du cahier spécial Francophonie du Devoir.

L’annonce au début du mois de mars de la création d’un nouveau cégep [fin du lycée] bilingue à Vaudreuil-Dorion a suscité une levée de boucliers dans certains milieux au Québec. Un mois plutôt, la pression avait été mise sur le cégep de la Gaspésie et des Îles pour qu’il revoie le fonctionnement de son antenne montréalaise, qui offre depuis 2015 des cours uniquement en anglais à des étudiants étrangers venus surtout de l’Inde et de la Chine. Certains voient là une pente très glissante vers l’anglicisation de Montréal et la relégation du français au Québec.

Une situation d’autant plus tendue que l’on constate depuis plusieurs années qu’un nombre grandissant d’étudiants francophones optent pour les cégeps de langue anglaise, déjà très prisés des allophones. Entre 2013 et 2018, selon le ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur, tous les établissements francophones de Montréal ont vu leur effectif étudiant à temps plein diminuer (en excluant la formation continue).

Du côté anglophone, ceux du collège Dawson — le plus gros au Québec — et du collège John Abbott ont plutôt progressé. Seul Vanier enregistrait une petite baisse de moins de 1 %. On retrouve actuellement 19 % des places d’études de niveau collégial dans le réseau anglophone, alors que cette communauté représente environ 8 % de la population québécoise.

Double impact


Pour Yannick Lacroix, professeur de philosophie au cégep de Maisonneuve, cette tendance génère deux effets néfastes. Le premier est quantitatif puisque les deux réseaux se trouvent en concurrence et que la popularité des établissements de langue anglaise tend à réduire le nombre d’étudiants dans les établissements de langue française. Or, le financement se distribue en fonction de l’effectif. Le déclin du réseau francophone s’accompagne donc de sa paupérisation. Le deuxième effet négatif est qualitatif, car les cégeps anglophones peuvent choisir les meilleurs candidats. Les cégeps anglophones comptent sur 20 % de francophones et 38 % d’allophones.

Ce glissement est également de mauvais augure pour l’épanouissement de notre communauté francophone. « Le cégep est le lieu par excellence de la passation de la culture en français au Québec, avance Yannick Lacroix. Le déclin du réseau collégial français m’inquiète donc beaucoup, à la fois comme professeur et comme citoyen québécois. » Il indique qu’au rythme où vont les choses, le préuniversitaire en français risque de devenir minoritaire sur l’île de Montréal d’ici trois ans.

Un argument souvent entendu, notamment de la bouche de l’ex-Premier ministre du Québec Philippe Couillard, est celui selon lequel il est souhaitable que les jeunes Québécois deviennent bilingues. Aller apprendre l’anglais dans un cégep serait donc une bonne chose. Mais Yannick Lacroix rappelle que l’immense majorité des Montréalais du réseau francophone parlent bien l’anglais dès la fin du secondaire. Selon lui, s’ils choisissent le collégial en anglais, c’est pour intégrer cette communauté. « Ils perçoivent l’anglais comme la langue du succès ; elle a pour eux une valeur marchande et symbolique plus élevée », estime-t-il.

Pour contrer cette tendance, Yannick Lacroix juge que le gouvernement du Québec doit intervenir en étendant les dispositions scolaires de la loi 101 aux cégeps. « C’est une question de cohérence, croit-il. La politique linguistique du Québec est d’ériger le français en langue commune, et la promotion de cette langue constitue l’une des missions importantes des cégeps. Or, en ce moment, le système d’éducation public s’en éloigne. »

Financer sa marginalisation

Une position que partage entièrement Robert Laplante, directeur de la revue Action nationale. Cette publication a consacré de nombreux articles à ce sujet, dont un récent signé Frédéric Lacroix qui illustre très bien, chiffres à l’appui, les tendances à l’œuvre dans l’anglicisation de l’enseignement collégial, notamment à Montréal.

M. Laplante s’élève contre un autre argument maintes fois entendu : celui du libre choix des étudiants. « Il ne s’agit pas d’interdire le cégep en anglais, mais d’empêcher l’argent public de servir à la déstructuration du réseau collégial francophone, soutient-il. Nous devons donner le signal clair que la majorité francophone ne financera pas sa propre marginalisation. »

Selon lui, l’offre de services éducatifs en anglais, qu’il ne remet pas en cause, devrait être financée à la hauteur du poids démographique des anglophones et de ceux qui ont droit à ces services, comme défini par la loi 101. Il considère comme une aberration que le collège Dawson constitue le plus gros cégep du Québec en raison d’étudiants francophones et allophones, alors qu’il devrait servir la minorité anglophone.

Il juge que la tendance actuelle contribuera à dévaloriser la langue française et à réduire notre capacité à la préserver comme langue du travail au Québec. Il assure que l’on s’illusionne si l’on croit que les deux langues peuvent se voisiner dans les établissements d’enseignement. « L’histoire l’a maintes fois démontré, lorsqu’une langue dominante cohabite avec une langue minoritaire, cette dernière tend à devenir de plus en plus marginale, affirme-t-il. Le bilinguisme au cégep produira le même effet au Québec. »