mercredi 9 août 2017

Vu de France — l'école québécoise a gavé les jeunes générations « à l’idéal diversitaire »

Extraits d’un article de Causeur assez critique sur l’école et les élites québécoises. Il y a à boire et à manger dans cette critique.

Il s’est récemment constitué au Québec un véritable lobby antiraciste dont la mission est de convaincre les différents paliers de gouvernement d’œuvrer à la reprogrammation complète de la société conformément à ses revendications identitaires pour les immigrants. Il faudrait que le Canada français devienne une page blanche, un Éden entièrement vierge dont les habitants devraient obligatoirement rendre un culte à la déesse Diversité.

Surtout composé de militants anti-laïques, d’universitaires, de journalistes et de fonctionnaires, ce nouveau lobby est parvenu à persuader le gouvernement provincial de mettre en place une grande commission sur le racisme dit « systémique ». Le 20 juillet dernier, le gouvernement du Parti libéral (un parti plutôt favorable à l’immigration massive) annonçait donc officiellement que des séances de consultation sur le sujet allaient se tenir à l’automne.

« Négationnisme », idéal diversitaire et « islamophobie »

Les instigateurs de cette grande mascarade se montrent si radicaux dans leurs prises de position qu’il est facile de prévoir les conclusions qui seront tirées de l’exercice. En mars dernier, le Premier ministre du Québec, Philippe Couillard, affirmait que nier la réalité du racisme au Québec relevait du « négationnisme ». Voilà de quoi donner le ton.


[...]

Le Canada français est longtemps resté catholique, mais à partir des années 1960, il est rapidement devenu hostile au dogmatisme religieux, peu importe sa provenance. Cette méfiance légitime [!?] envers la religion semble toutefois s’atténuer chez les jeunes générations qui ont été gavées à l’idéal diversitaire par le système d’éducation au cours des deux dernières décennies.

Deuxièmement, nous apprendrons que les musulmans font partie des principales victimes du racisme systémique. Bien évidemment, il sera beaucoup question de l’« islamophobie », cette nouvelle épidémie populaire dont il faudrait collectivement guérir. L’islamisme a beau n’avoir jamais fait autant d’adeptes et surtout, de victimes, des associations musulmanes viendront publiquement faire le procès des Québécois sans jamais remettre en cause aucune de leurs pratiques. Pendant ce temps, rien ne sera dit au sujet des communautés asiatiques (chinoise, vietnamienne, indienne, etc.) qui sont pourtant très importantes. Il faut croire que certaines communautés culturelles maîtrisent mieux que d’autres l’art de la victimisation.

[...]

La gauche multiculturaliste introduit le doute et la méfiance

[... C]e qui persiste encore dans tous les pays du monde, ce sont certaines formes de solidarité naturelle, autant dire [pour certains] de xénophobie, qui ne pourront jamais être totalement éradiquées. Claude Lévi-Strauss a montré qu’à moins d’instaurer un régime totalitaire, aucune société ne deviendra parfaitement conforme aux standards xénophiles du multiculturalisme. À moins, bien sûr, que cette société ne souhaite sa propre disparition.

À lire aussi : Au Québec, islamistes et gauche multiculturaliste font bon ménage

Le débat entourant le racisme systémique au Québec est complètement artificiel. Un peu comme en France, où elle fait aussi bien des ravages, la gauche multiculturaliste invente des problèmes de toutes pièces, elle alimente des tensions réelles qui étaient au départ imaginaires. Là où tout allait bien, elle introduit le doute et la méfiance. Ce serait bien qu’on le réalise, avant de détruire ce qu’il reste du « vivre-ensemble ».

jeudi 3 août 2017

Gouvernement Trump veut poursuivre les universités américaines qui discriminent selon la race

Le gouvernement républicain va demander au ministère de la Justice (DOJ) d’enquêter et de poursuivre en justice les universités du pays, dont les politiques d’admission basées sur la discrimination positive portent notamment préjudice aux candidats blancs, révèle le New York Times.

Depuis sa création en 1957, la Division des droits civiques du DOJ a pour mission de s’assurer que les droits civiques et constitutionnels de tous les Américains sont respectés. Sous la direction du secrétaire Jeff Sessions, elle intentera désormais des poursuites contre les universités jugées fautives par les enquêteurs choisis par l’ancien sénateur conservateur d'Alabama.

mercredi 2 août 2017

Recensement 2016 — recul du français, bilinguisme et anglais en hausse au Québec, bilinguisme stable dans le reste du Canada

Selon les données du recensement 2016 de Statistique Canada, l’anglais comme première langue gagne du terrain au Québec (alors qu’il en perd ailleurs au Canada) et le Québec devient de plus en plus anglais et bilingue.

Le Québec reste en effet la locomotive du bilinguisme au pays. On y trouvait ainsi un peu plus de 3,6 millions de personnes bilingues en 2016. Il s’agit d’une augmentation de 8,8 %, soit près de 300 000 personnes, par rapport à 2011 — cela correspond à 64 % de la croissance totale de la population bilingue au Canada, selon Statistique Canada.

La Québec affiche par ailleurs l’augmentation la plus marquée au pays en ce qui a trait au poids démographique de la population de langue maternelle anglaise. En fait, tandis que ce poids chutait dans toutes les provinces au pays pendant la période visée par l’enquête, il enregistrait une croissance dans la province.

Le déclin du poids de la population ayant l’anglais comme langue maternelle dans l’ensemble du Canada, un phénomène notamment attribuable à l’immigration, est donc en quelque sorte atténué par la croissance de l’anglais au Québec, selon ce qui se dégage des données de Statistique Canada.

Entre 2011 et 2016, le pourcentage de population de langue maternelle anglaise au Québec a bondi de 9 à 9,6 %, tandis que pour l’ensemble du Canada, il a fléchi de 58,6 à 58,2 %. En même temps, au Québec, la population qui a déclaré la langue de Molière comme maternelle a chuté de 79,7 à 78,4 %.

Résumé du recensement par le démographe Guillaume :

Les données du recensement de 2016 viennent de sortir. Voici ma première représentation graphique de celles-ci. En bref :
  • Le français diminue non seulement à Montréal, mais aussi en banlieue (et dans tout le Québec). En fait, c’est même à Laval que le français perd le plus de poids.
  • Le déclin du français ne se fait pas seulement au profit des langues allophones, mais aussi au profit de l’anglais. Le poids de l’anglais parmi les langues officielles (anglophones/[francophones+anglophones]) est en hausse partout, et particulièrement Laval.
  • Le bilinguisme anglais-français augmente chez les francophones du Québec, mais demeure stable chez les anglophones du reste du Canada.

Graphiques de Guillaume Marois (de sa page Facebook).






Voir aussi

Baisse continue du nombre de naissances au Québec, aucun parti politique n'en parle


Correctivisme LGBTTQQIAAP2S : plus de « mesdames, messieurs » pour les chemins de fer néerlandais

Les passagers des trains des chemins de fer néerlandais (NS) seront accueillis à partir de décembre prochain par un « Chers voyageurs », neutre sexuellement en néerlandais mais pas en français, qui remplace le « Mesdames et Messieurs ».


Environ 24 000 annonces automatiques sont diffusées dans les trains de NS chaque jour. Elles devront être remplacées d’ici le 10 décembre 2017. En outre, les employés des chemins de fer néerlandais réalisent eux-mêmes environ 70 000 annonces. Les textes ont été adaptés pour supprimer toute référence au genre. Les machinistes, conducteurs et annonceurs ont également « été sensibilisés », c’est-à-dire commandés de ne plus utiliser les formules de politesse séculaires.

[…] « Nous voulons que chacun se sente le bienvenu dans nos trains », a commenté le directeur de NS, Roger van Boxtel. Le métro londonien a déjà procédé au même changement au début du mois de juillet, « Mesdames et messieurs » a ainsi été remplacé par « Bonjour tout le monde ! »

Mercredi, la municipalité d’Amsterdam a également décidé de céder à la mode « non genrée ». Les fonctionnaires ont été intimés d’utiliser désormais la formule « Chères personnes présentes » (« geachte/beste aanwezigen ») plutôt que « Mesdames et Messieurs ». La formule fait beaucoup jaser sur les réseaux sociaux.


Source : Métro (Belgique) et NOS (Pays-Bas)

Voir aussi

Londres — Trop « genré », « Mesdames et Messieurs » bientôt banni des annonces sonores


La croisade des LGBT contre la liberté d’expression et les distinctions linguistiques immémoriales

Note :

‡ Ne voulant exclure personne nous avons opté pour LGBTTQQIAAP2S plutôt que le restrictif et rétrograde LGBT.

L: Lesbiennes
G: « Gais »
B: Bisexuels.
T: Transgenres.
T: Transsexuels.
Q: Queer
Q: en Questionnement
I: Intersexuels
A: Asexuels
A: Alliés
P: Pansexuels
2S: Bispirituels.

Mise à jour 

Nous apprenons que la Fédération nationale des enseignants du Québec (FNEEQ) préfère LGBTQ12SNBA+. Elle a même préparé un document essentiel, soyez-en sûr, qui porte ce nom : « LGBTQ12SNBA+ ». Il s’agit d’un guide des « mots de la diversité liée au sexe, au genre et à l’orientation sexuelle ». On y explique toutes les combinaisons possibles d’êtres humains, avec des exemples : « Une femme trans lesbienne ; un homme cisgenre hétérosexuel d’expression de genre plutôt féminine ; une femme bisexuelle qui préfère les femmes dans sa vie amoureuse ; une personne non binaire attirée par les hommes dans sa vie sexuelle et amoureuse ; une femme pansexuelle cisgenre d’expression de genre plutôt masculine ; un homme intersexe hétérosexuel ; une personne asexuelle en relation amoureuse avec une personne hétérosexuelle ».

La FNEEQ prétend que ce fascinant document est censé aider les enseignants à s’y retrouver... Ce sont des notions primordiales évidemment. Votre enfant parlera mal le français, mais il connaîtra toutes les distinctions que la coterie LGBTTQQIAAP2S choie.

mardi 1 août 2017

Un tiers des Américains ont une opinion négative des universités

Aux États-Unis, les électeurs du Parti républicain ont, pour la première fois, une opinion majoritairement négative de l’impact des collèges et des universités sur leur société.

Si la méfiance, voire l’hostilité, à l’égard des institutions en général, ou de « l’establishment », ressort de plus en plus des sondages depuis quelques années, plusieurs observateurs ont été surpris d’apprendre que les institutions d’enseignement s’ajoutaient aussi à la liste.

Selon un sondage du Pew Research Center effectué en juin et publié la semaine dernière, 58 % des Républicains ont une opinion négative des collèges et universités — et seulement 19 % des Démocrates, ce qui totalise tout de même plus d’un tiers des Américains.

À Middlebury, petite ville du Vermont située à 200 km de Montréal, des étudiants en colère s’en sont pris il y a quelques semaines à Charles Murray, politologue qui défend des thèses libertariennes que ces étudiants extrémistes considèrent comme racistes. Murray a été empêché de parler d’un tout autre sujet. Un membre de la faculté a été blessé.

Médias détestés

Cette proportion est en croissance, puisqu’ils n’étaient « que » de 45 % l’an dernier chez les Républicains.

C’est moins que l’opinion négative que se font les Républicains des « médias nationaux » (85 %) — contre 46 % des Démocrates —, mais c’est plus que l’attitude négative à l’égard des syndicats (46 % des Républicains) et des églises (que 14 % des Républicains perçoivent négativement, contre 36 % des Démocrates).

L’écart partisan à l’égard de ces autres institutions ayant continué de s’accroître d’année en année, collèges et universités étaient peut-être voués à franchir tôt ou tard la barre des 50 %.

Mais, selon les auteurs de l’étude, « les attitudes des Républicains sur les impacts des collèges et universités ont changé de façon significative dans un laps de temps relativement court » : de 37 % d’opinions négatives en 2015, cette proportion est passée à 45 % en 2016, puis à 58 % cette année. Et c’est encore plus fort chez ceux qui s’identifient comme « Républicains conservateurs » (65 % d’opinions négatives).

Accélération

À ceux qui seraient tentés d’y voir une réaction aux manifestations anti-Trump sur les campus, le journaliste David Graham rétorque dans The Atlantic que les campus se font reprocher par les mouvements conservateurs d’être des nids de gauchistes depuis les années 1960.

Trump lui-même pourrait être un facteur de l’accélération, mais ce serait écarter un peu vite le fait que cette accélération avait commencé bien avant sa campagne.

Toutefois, quelle qu’en soit la ou les raisons, si plus d’un tiers des citoyens de la première puissance mondiale, et près des deux tiers des partisans du parti politique au pouvoir, considèrent que ces institutions ont un impact négatif sur leur propre pays, il est difficile de ne pas imaginer que cela se traduira tôt ou tard par une baisse des inscriptions dans les universités.

Voir aussi

Les étudiants américains et leur lutte contre les « auteurs blancs décédés » (suite et non fin)

Des universités politiquement correctes qui doivent « protéger » leurs étudiants

Canada — Liberté d’expression et d’opinion menacée dans les universités

La censure contamine les milieux universitaires, À l’école des idées et de la connaissance, certaines opinions sont empêchées d’être débattues


lundi 31 juillet 2017

La forte tentation autoritaire du multiculturalisme pour assurer le « vivre-ensemble »

Début d’un long entretien que Mathieu Bock-Côté a accordé au Figaro.

LE FIGARO — Les députés LREM [parti au pouvoir en France] ont adopté un amendement au projet de loi de moralisation prévoyant une « peine d’inéligibilité » en cas de manquement à la probité. Celle-ci impliquerait « les faits de discrimination, injure ou diffamation publique, provocation à la haine raciale, sexiste ou à raison de l’orientation sexuelle », précise l’amendement.

Mathieu BOCK-CÔTÉ. — Vous me permettrez d’être franc : j’en suis effaré. Évidemment, tout le monde s’entend pour condamner le racisme, le sexisme ou l’homophobie. J’ajouterais que nos sociétés libérales sont particulièrement tolérantes et ont beaucoup moins de choses à se reprocher qu’on veut bien le dire. Mais le problème apparaît rapidement : c’est celui de la définition. À quoi se réfèrent ces concepts ? Nous sommes devant une tentative d’exclure non seulement du champ de la légitimité politique, mais même de la simple légalité, des discours et des idées entrant en contradiction avec l’idéologie dominante. Il faut inscrire cet amendement dans le contexte d’une offensive plus large pour comprendre sa signification. Prenons l’exemple du racisme. Depuis quelques années, on a amalgamé le racisme et la défense de la nation. Pour la gauche diversitaire et ceux qui se soumettent à ses prescriptions idéologiques, un patriotisme historique et enraciné n’était rien d’autre qu’une forme de racisme maquillé et raffiné. Ceux qui voulaient contenir l’immigration massive étaient accusés de racisme. Ceux qui affirmaient qu’il y avait un lien entre l’immigration et l’insécurité étaient aussi accusés de racisme. De même pour ceux qui confessaient l’angoisse d’une dissolution de la patrie.

Cette assimilation du souci de l’identité nationale à une forme de racisme est une des tendances lourdes de l’histoire idéologique des dernières décennies. On l’aura compris, on accuse de racisme ceux qui ne se plient pas à l’idéologie diversitaire. Quel sort sera réservé demain à ceux qui avouent, de manière éloquente ou maladroite, de telles inquiétudes ? Prenons l’exemple du débat sur le mariage pour tous. Pour une partie importante des partisans du mariage homosexuel, ceux qui s’y opposaient, fondamentalement, étaient homophobes. Ils n’imaginaient pas d’autres motifs à leur engagement. Comme toujours, chez les progressistes, il y a les intolérants et les vertueux. Pour eux, deux philosophies ne s’affrontaient pas : il y avait d’un côté l’ombre et de l’autre la lumière. Doit-on comprendre que dans l’esprit de nos nouveaux croisés de la vertu idéologique, ceux qui ont défilé avec la Manif pour tous devraient être frappé d’inéligibilité ?

— Derrière le racisme, c’est le conservatisme qui serait visé ? 

Ce n’est pas d’hier qu’on assiste à une pathologisation du conservatisme, réduit à une série de phobies ou de passions mauvaises. Il est depuis longtemps frappé d’un soupçon d’illégitimité. Il y a une forme de fondamentalisme de la modernité qui ne tolère pas tout ce qui relève de l’imaginaire de la finitude et de l’altérité. Ce n’est pas d’hier non plus qu’on assiste à sa diabolisation : on présente le conservatisme comme une force régressive contenant le mouvement naturel de la modernité vers l’émancipation. D’une certaine manière, maintenant, on entend le sanctionner pénalement. On l’exclura pour de bon de la cité. C’est une forme d’ostracisme postmoderne. Cet amendement crée un climat d’intimidation idéologique grave : il marque une étape de plus dans l’étouffement idéologique du débat public. Et ne doutons pas du zèle des lobbies victimaires qui patrouillent dans l’espace public pour distribuer des contraventions idéologiques. On me dira que l’amendement ne va pas jusque-là : je répondrai qu’il va dans cette direction. À mon avis, derrière cet amendement se manifeste la grande peur idéologique des progressistes ces dernières années. Les intéressés pensaient avoir perdu la bataille des idées. Ils croyaient la France submergée par une vague conservatrice réactionnaire qu’ils assimilaient à une montée du racisme, de la xénophobie, du sexisme et de l’homophobie. D’où leur cri du cœur : « Plus jamais ça ! » Aussi veulent-ils reprendre le contrôle du débat public en qualifiant de langage de l’intolérance la philosophie qui contredit la leur. Il s’agit désormais de verrouiller juridiquement l’espace public contre les mal-pensants.

— On objectera que le racisme n’est pas une opinion, mais un délit. 

La sociologie antiraciste ne cesse d’étendre sa définition du racisme. Elle instrumentalise le concept noble de l’antiracisme à des fins qui ne le sont pas. Deux exemples.

Pour elle, ceux qui s’opposent à la discrimination positive se rendraient coupables, sans nécessairement s’en rendre compte, de « racisme universaliste », qui écraserait la différence et la diversité. Traduisons : la République est raciste sans le savoir, et ceux qui la soutiennent endossent, sans nécessairement s’en rendre compte toutefois, un système raciste. Ils participeraient à la perpétuation d’une forme de racisme systémique.

Inversement, ceux qui soutiendraient qu’une communauté culturelle ou une religion particulière s’intègre moins bien que d’autres à la nation seront accusés de racisme différentialiste, car ils essentialiseraient ainsi les communautés et hiérarchiseraient implicitement ou explicitement les différentes cultures et civilisations. Ainsi, une analyse sur la question ne sera pas jugée selon sa pertinence, mais disqualifiée parce qu’elle est à l’avance assimilée au racisme. En gros, soit vous êtes favorable au multiculturalisme dans une de ses variantes, soit vous êtes raciste. Multiculturalisme ou barbarie ? On nous permettra de refuser cette alternative. Il y a aujourd’hui une tâche d’hygiène mentale : il faut définir tous ces mots qui occupent une place immense dans la vie publique et, surtout, savoir résister à ceux qui les utilisent pour faire régner un nouvel ordre moral dont ils se veulent les gardiens passionnés et policiers. Il faut se méfier de ceux qui traquent les arrière-pensées et qui, surtout, rêvent de vous inculper pour crime de la pensée.

— Cela rappelle-t-il le politiquement correct nord-américain ? 

Le politiquement correct n’est plus une spécificité nord-américaine depuis longtemps. Pour peu qu’on le définisse comme un dispositif inhibiteur qui sert à proscrire socialement la critique de l’idéologie diversitaire, on constatera qu’il s’impose à la manière d’un nouvel ordre moral et qu’on trouve à son service bien des fanatiques. Ils se comportent comme des policiers du langage : ils traquent les mots qui témoigneraient d’une persistance de l’ancien monde, d’avant la révélation diversitaire. Ceux qui n’embrassent pas l’idéologie diversitaire doivent savoir qu’il y aura un fort prix à payer pour entrer en dissidence. On les traitera comme des proscrits, comme des parias. On leur collera une sale étiquette dont ils ne pourront plus se départir. « Populiste », « réactionnaire », « extrême droite » : les termes sont nombreux pour désigner à la vindicte publique une personnalité insoumise au nouvel ordre moral.

Alors nos contemporains se taisent. Ils comprennent que s’ils veulent faire carrière dans l’université, dans les médias ou en politique, ils ont intérêt à faire les bonnes prières publiques et à ne pas aborder certaines questions. La diversité est une richesse, et ceux qui apporteront des bémols à cette affirmation n’auront tout simplement plus droit de cité. En France, le politiquement correct a pour fonction de disqualifier moralement ceux qui ne célèbrent pas globalement ce qu’on pourrait appeler la société néosoixante-huitarde. Avec cet amendement, le pays fait un pas de plus vers le politiquement correct en le codifiant juridiquement ou, si on préfère, en le judiciarisant : désormais, il modèlera explicitement le droit.

— Comment ce politiquement correct est-il né ?

C’est un des résultats de la mutation de la gauche radicale engagée dans la suite des Radical Sixties, et d’abord aux États-Unis. Il s’institutionnalisera vraiment dans les années 1980, dans l’université américaine. On connaît l’histoire de la conversion de la gauche radicale, passée du socialisme au multiculturalisme et des enjeux économiques aux enjeux sociétaux. La lutte des classes s’effaçait devant la guerre culturelle, et la bataille pour la maîtrise du langage devient vitale. Ce n’est pas surprenant pour peu qu’on se souvienne des réflexions d’Orwell sur la novlangue. Celui qui maîtrise le langage maîtrisera la conscience collective et certains sentiments deviendront inexprimables à force d’être censurés.

Dans les universités nord-américaines, on a voulu s’ouvrir aux paroles minoritaires, ce qui impliquait, dans l’esprit de la gauche radicale, de déboulonner les grandes figures de la civilisation occidentale, rassemblées dans la détestable catégorie des « hommes blancs morts ». Autrement dit, la culture n’était en réalité qu’un savoir assurant l’hégémonie des dominants sur les dominés. On a voulu constituer des contre-savoirs idéologiques propres aux groupes dominés ou marginalisés. C’est une logique bien bourdieusienne. Les humanités ont été le terrain inaugural de cette bataille. Ce serait maintenant le tour historique des minorités (et, plus exactement, de ceux qui prétendent parler en leur nom, cette nuance est essentielle) et ce sont elles qui devraient définir, à partir de leur ressenti, les frontières du dicible dans la vie publique. Ce sont elles qui devraient définir ce qu’elles perçoivent comme du « racisme », du « sexisme », de l’« homophobie ». Et on devrait tous se soumettre à cette nouvelle morale. Mais nous avons oublié qu’il peut y avoir un intégrisme victimaire et un fanatisme minoritaire, qui a versé dans la haine décomplexée de l’homme blanc, jugé salaud universel de l’histoire du monde. La société occidentale est soumise à un procès idéologique qui jamais ne s’arrête. Je vous le disais tout juste : ces notions ne cessent de s’étendre et tout ce qui relève de la société d’avant la révélation diversitaire finira dans les déchets du monde d’hier, dont il ne doit plus rester de traces.

— À l’ère de Donald Trump, ce phénomène est-il toujours aussi fort ? 

En ce moment, l’université nord-américaine, qui demeure la fabrique institutionnelle du politiquement correct, est rendue très loin dans ce délire : on connaît le concept de l’appropriation culturelle qui consiste à proscrire les croisements culturels dans la mesure où ils permettraient à l’homme blanc de piller les symboles culturels des minorités-victimes. On chantait hier le métissage, on vante désormais l’intégrité ethnique des minorités victimaires. La mode est désormais, dans les universités, de multiplier les « safe spaces », qui permettent aux minorités victimaires de transformer les établissements d’enseignement supérieur en un espace imperméabilisé contre les discours qui entrent en contradiction avec leur vision du monde. C’est sur cette base que des lobbies prétendant justement représenter les minorités-victimes en ont appelé, à plusieurs reprises, à censurer tel discours ou tel événement. Pour ces lobbies, la liberté d’expression ne mérite pas trop d’éloges, car elle serait instrumentalisée au service des forces sociales dominantes. Ils ne lui reconnaissent aucune valeur en soi et croient nécessaire de transgresser les exigences de la civilité libérale, qui permettaient à différentes perspectives de s’affronter pacifiquement à travers le débat démocratique. Ces lobbies sont animés par une logique de guerre civile.

J’ajouterais une chose : les gardiens du politiquement correct ne se contentent pas d’un ralliement modéré aux thèses qu’ils avancent : les intéressés exigent de l’enthousiasme. Il faut manifester de manière ostentatoire son adhésion au nouveau régime diversitaire en parlant son langage. Bien des journalistes militants se posent aussi en inquisiteur et veulent faire avouer aux hommes politiques ou aux intellectuels leurs mauvaises pensées. Ils les testent sur le sujet du jour en cherchant la faute, en voulant provoquer la déclaration qui fera scandale. Ils veulent prouver qu’au fond d’eux-mêmes, ce sont d’horribles réactionnaires.

— Le « politiquement correct » est-il le corollaire du multiculturalisme ? 

Le multiculturalisme est traversé par une forte tentation autoritaire, pour ne pas dire plus. Il ne fait pas bon ménage avec la liberté d’expression. La cohabitation entre différentes communautés présuppose une forme de censure généralisée où chacun s’interdit de juger des traditions et coutumes des autres. On appelle cela « le vivre-ensemble » : c’est une supercherie grossière. Certaines communautés (ou ceux prétendant parler en leur nom et les prenant en otage) veulent faire inscrire dans le droit leur conception du blasphème ou du moins obliger l’ensemble de la société à respecter leurs interdits moraux, ainsi qu’on a pu le voir dans l’affaire des caricatures. Le génie propre de la modernité, c’est le droit d’examiner et de remettre en question n’importe quelle croyance, sans avoir à se soumettre à ses gardiens qui voudraient nous obliger à la respecter. Ce sont les croyants qui doivent accepter que des gens ne croient pas la même chose qu’eux et se donnent le droit de moquer leurs convictions les plus profondes, sans que cette querelle ne dégénère en violence. Or, on nous demande de respecter la sensibilité des uns et des autres, comme s’il existait un droit de ne pas être vexé et un droit de veto accordé à chaque communauté pour qu’elle puisse définir la manière dont on se la représente.


mercredi 26 juillet 2017

Transition énergétique : les besoins colossaux en métaux

Les technologies requises pour limiter le réchauffement du climat feront grimper la demande de ressources naturelles. C’est, selon la Banque mondiale, un risque majeur pour l’environnement.

Un avenir bas carbone ne se construira pas sans minerais ni métaux. Tant s’en faut. Pour contenir le réchauffement planétaire sous les 2 °C, comme ambitionné par plus de 170 pays signataires de l’Accord de Paris fin 2015, il faudra en fait en extraire d’énormes quantités, avance la Banque mondiale dans un rapport sur le rôle primordial que jouera le secteur dans une telle économie « verte »

Le constat paraît sans appel. « Le rapport montre clairement que la composition des technologies supposées alimenter le passage à une énergie propre–éolien, solaire, hydrogène et systèmes électriques — nécessite en fait significativement PLUS [sic] de ressources que les systèmes d’alimentation en énergie traditionnels », écrivent les auteurs qui se sont penchés sur trois grandes technologies renouvelables : l’éolien, le solaire et les batteries de stockage d’énergie.

Les besoins futurs ne seront absolument pas les mêmes selon que le réchauffement de la planète est limité à 2 °C, ou qu’il atteigne 4 °C voire 6 °C, les trois scénarios envisagés par l’organisation. Sans surprise, le premier scénario se révèle le plus « ressourçovore ». La demande de métaux pourrait doubler avec l’essor des technologies éoliennes et solaires, dit la Banque mondiale. Mais c’est dans les accumulateurs électriques que l’exemple est le plus frappant : leur développement pourrait entraîner un bond de 1 000 % de la demande de lithium, si le monde prend les mesures requises pour contenir l’élévation de la température nettement en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels.





Choix politiques

La Banque mondiale a listé les ressources clefs de la transition énergétique, à l’instar du cuivre, de l’argent, de l’aluminium (bauxite), du nickel, du zinc et, probablement, du platine. Des marchés qui devraient donc bénéficier d’un virage vert. Elle cite aussi les terres rares, neodymium et indium.

Évidemment, beaucoup dépendra du nombre de turbines, de panneaux solaires ou encore de véhicules fabriqués — et donc des choix politiques des gouvernements. Le type de technologies déployées dans chacun de ces segments sera également déterminant. « Les technologies renouvelables qui émergeront comme les plus adaptées et les plus avantageuses seront essentielles pour définir le marché des matières premières sur les cinquante prochaines années », estiment les auteurs.

En se fiant aux tendances actuelles, le Chili, le Pérou et, potentiellement, la Bolivie auront un rôle majeur à jouer en fournissant du cuivre et du lithium ; le Brésil avec la bauxite et le fer ; l’Inde pour le fer, l’acier, le titane ; l’Afrique australe et la Guinée seront « incontournables » pour répondre aux besoins grandissants en platine, manganèse, bauxite et chrome ; et la Chine pour à peu près tous les produits. La Banque mondiale cite en outre la Nouvelle-Calédonie française et ses « réserves massives de nickel », matière première utilisée aujourd’hui dans les batteries pour voitures électriques. La République démocratique du Congo regorge également de minéraux, souvent pillée aujourd’hui avec la complicité de pays voisins comme le Rwanda dirigé d’une main de fer par le président Kagamé, dans des conditions écologiquement et humainement dégradantes.

Jusqu’à présent, peu d’analyses du genre ont été faites sur les implications matérielles d’un adieu aux systèmes fondés sur les combustibles fossiles. Avec ce rapport, la Banque mondiale met en garde sur l’impact que peut avoir une économie bas-carbone sur l’environnement.

Compléter et non pas concurrencer

« Si elle n’est pas correctement gérée, cette croissance de la demande de minerais et métaux pourrait aller à l’encontre des efforts et des politiques des pays riches en ressources pour atteindre les objectifs qu’ils se sont fixés en matière de changement climatique », préviennent les auteurs. Une attention particulière devra également être portée pour que l’eau utilisée par les communautés locales et les écosystèmes ne soit pas trop fortement touchée.

Le directeur du pôle mondial d’expertise en énergie et industries extractives du Groupe de la Banque mondiale, Riccardo Puliti, plaide pour l’ouverture d’un « dialogue entre les groupes d’intérêt sur le climat, l’énergie verte et les industries extractives ». Pour cela, les pays doivent intégrer que « le développement d’une ressource naturelle vient compléter et non pas concurrencer un avenir plus vert et plus durable ».

Source : Les Échos

L’inquiétant recul du quotient intellectuel

Le quotient intellectuel (QI) moyen français a décliné de 3,8 points entre 1999 et 2009 pour chuter à 97,3, indique une récente étude de deux chercheurs britanniques, publiée dans la revue Intelligence.

Toutefois, la diminution semble globale et touche aussi la Norvège, le Danemark, le Royaume-Uni, les Pays-Bas, l’Australie, la Suède et la Finlande, mais pas les États-Unis.


En 2015, Edward Dutton (université d’Oulu, Finlande) et Richard Lynn (université d’Ulster, Royaume-Uni) publiaient, dans la revue Intelligence, une étude, passée inaperçue, mais dont les journaux auraient, peut-être, pu faire quelques manchettes. L’affaire est en effet d’une importance cardinale : les deux chercheurs documentaient, pour la première fois, une chute du quotient intellectuel (QI) moyen en France. Selon leurs estimations, ce dernier aurait perdu près de quatre points entre 1999 et 2009. À l’échelle d’une population, c’est énorme.

L’étude des deux chercheurs britanniques mérite toute notre attention.

Plusieurs raisons à cela. La première est que, s’il est reproduit et confirmé par d’autres études, ce résultat signale la première inversion, en France, de la tendance séculaire qui voit augmenter régulièrement l’indice d’intelligence individuelle — c’est-à-dire, pour éviter de parler d’« intelligence », de l’amélioration des compétences cérébrales, au sens quasi mécanique du terme. La deuxième raison de prendre au sérieux les résultats de MM. Dutton et Lynn est que cette inversion de la tendance à l’augmentation du QI est également constatée en Norvège, au Danemark, au Royaume-Uni, aux Pays-Bas, en Australie, en Suède...

Dans de nombreux pays où les données peuvent s’étudier avec un recul historique suffisant, une légère érosion des facultés cognitives est mesurée, environ depuis le milieu des années 1990. Il y a toujours, bien évidemment, des biais possibles, des erreurs, des effets d’échantillonnage... Mais, même en Finlande, où la conscription donne lieu à des tests de QI standardisés, pratiqués sur toute une génération ou presque (25 000 jeunes par an sont testés depuis 1988), une étude des deux mêmes auteurs, publiée en 2013, montre une chute de deux points de QI entre 1997 et 2009, mesurée avec une grande précision. Les trois fonctions cognitives testées (représentation des formes, arithmétique, raisonnement verbal) sont toutes en régression.

Les Britanniques raisonnent moins bien et plus lentement aujourd’hui

Plus troublant encore, contrairement à ce que pourrait faire croire l’avènement du numérique et des jeux vidéo, les temps de réaction à un stimulus ont augmenté : non seulement les sujets de Sa Gracieuse Majesté raisonnent moins bien que leurs ancêtres de l’ère victorienne, mais ils pensent aussi plus lentement !

Cette baisse, amorcée au tournant des années 1990 et 2000, constitue un reflux dans la mesure où elle fait suite à une augmentation généralisée des QI moyens sous l’effet des progrès des conditions sanitaires et sociales tout au long du XXe siècle. Un effet établi en 1987 par un spécialiste néo-zélandais des recherches sur l’intelligence, James R. Flynn, et connu sous le nom d’« effet Flynn ». Le même James R. Flynn, aujourd’hui professeur émérite à l’université d’Otago de Dunedin en Nouvelle-Zélande, a été l’un des premiers à tirer la sonnette d’alarme en pointant du doigt le renversement de tendance.

« Nous sommes sortis d’un siècle de croissance rapide du QI moyen au cours duquel l’effet Flynn a joué à plein », constate le prospectiviste Laurent Alexandre, qui met ces années de croissance au crédit notamment de la diminution radicale des accidents obstétricaux entraînant une mauvaise oxygénation du cerveau et de la fin des carences en iode — élément chimique nécessaire au développement harmonieux du cerveau — dans les régions éloignées du littoral comme les Alpes. L’expression « crétin des Alpes » provient d’ailleurs des nombreux enfants de cette région condamnés au XIXe siècle au crétinisme faute d’avoir reçu dans leur alimentation suffisamment d’iode.

Quant aux causes du retournement constaté ces quinze dernières années, elles sont multiples, et leur poids relatif dans le phénomène n’est pas aisé à déterminer. Difficile d’incriminer en bloc les systèmes éducatifs, puisque les pays touchés par cette baisse de QI en possèdent de très différents, certains de ces pays étant par ailleurs bien classés dans les études PISA. Il en va de même pour un autre facteur régulièrement avancé, l’importance prise par le numérique chez les plus jeunes, puisque parmi les pays aux QI moyens les plus élevés figurent des pays d’Asie très technophiles.


Impact de l’immigration ?

Les causes pourraient être liées à la baisse qualitative de la nourriture et de l’éducation, du goût pour la lecture, à la hausse du nombre d’enfants par femme et à l’immigration. « Il se pourrait que ce soit l’augmentation du nombre d’immigrés au QI bas dans la population française qui explique ce déclin. Elle a eu lieu dans toute l’Europe occidentale et un nombre conséquent d’études a démontré que les immigrés d’Afrique du Nord et du Sud-Ouest asiatique ont typiquement un QI moyen compris entre 85 et 90 », notent-ils.

Très faible natalité des diplômés ?

Une autre explication politiquement incorrecte serait que les personnes les plus instruites ont tendance à retarder le moment d’avoir un premier enfant, notamment pour pouvoir poursuivre leurs études, et en font donc moins que celles appartenant aux couches plus défavorisées de la population. « C’est ce que le grand biologiste Jacques Monod écrivait déjà en 1970 dans “Le Hasard et la Nécessité” », rappelle Laurent Alexandre, qui cite à l’appui de cette hypothèse une étude génétique menée sur plus de 100 000 Islandais nés entre 1910 et 1990 et parue en décembre 2016 dans la revue « PNAS ».

« Cette étude a mis en évidence un ensemble de variantes génétiques appelé PolyEDU, lequel est fortement corrélé avec un bon niveau d’études. Or cette analyse montre que ces “bons” variants sont soumis au fil des décennies à une accumulation croissante de mutations génétiques défavorables, du fait de l’absence de sélection naturelle » — en clair, le fait moralement bienvenu que les personnes dotées de faibles capacités cognitives n’aient pas une descendance inférieure à ceux ayant des capacités cognitives plus importantes. Ces facteurs dits « dysgéniques », si tant est qu’ils existent, ne sont évidemment pas les seuls à jouer.

Utilisation de drogues ?

Un autre élément d’explication est la relative banalisation du haschisch, dont les études ont montré que, contrairement à d’autres drogues comme la cocaïne, par exemple, sa prise répétée avait un impact négatif sur le cerveau (les gros consommateurs auraient en moyenne 8 points de QI de moins que les autres).

Perturbation du système hormonal ?

Pour d’autres, les causes seraient environnementales. Dans Le Cerveau endommagé (Odile Jacob, 416 p., 39,90 euros), la biologiste Barbara Demeneix (CNRS/Muséum national d’histoire naturelle) montre comment la perturbation du système hormonal par une multitude de substances présentes dans notre environnement domestique (solvants, plastiques, etc.) ou dans la chaîne alimentaire (pesticides, additifs, etc.), peut altérer la construction de certaines structures cérébrales, notamment au cours de la période intra-utérine.

La chercheuse, dont les travaux sur le système thyroïdien sont mondialement reconnus, travaille depuis plus de dix ans sur la question. Elle a ratissé toute la connaissance, de l’épidémiologie à l’épigénétique en passant par l’endocrinologie et la biologie du développement ; elle conclut à un lien fort entre l’exposition généralisée de la population aux perturbateurs endocriniens — ces substances capables d’interférer avec le système hormonal — et l’augmentation d’une variété de troubles neuro-comportementaux (trouble de l’attention, hyperactivité, autisme, etc.). Depuis longtemps, elle s’attend à ce que ses idées soient confortées par un début de baisse, dans la population générale, des capacités cognitives. Désormais, nous y sommes, même si d’autres causes que les contaminants chimiques ne sont pas à exclure...


Sources : Valeurs actuelles, Le Monde, Les Échos

Voir aussi

Une étude souligne les effets néfastes du cannabis sur le cerveau des adolescents

mardi 25 juillet 2017

Les Français veulent le retour à l'uniforme et la promotion du latin et du grec

Qui a dit que les Français n’étaient pas prêts pour les réformes ? Ceux qui ont été interrogés par l’IFOP pour le Journal du Dimanche ont en tout cas dit tout le bien qu’ils pensaient de changements au sein de l’institution.

Elle doit être le lieu de « transmission des connaissances et des savoirs ». C’est en tout cas ce que pensent 52 % des personnes interrogées par l’IFOP au sujet de l’école. Publiés le 23 juillet dans le JDD, les résultats de cette enquête réalisée auprès de 960 personnes selon la méthode des quotas tendent à prouver le contraire de ce qui se répète depuis bien longtemps. Non, les Français ne sont pas allergiques aux réformes quand il s’agit de l’Éducation nationale.

Pour preuve : la quasi-intégralité des mesures proposées (13 sur 14) — dont certaines sont déjà en place — est adoubée par les sondés.

Les Français interrogés souhaiteraient également que le latin et le grec soient davantage promus (63 %) et que l’enseignement de l’histoire et de la philosophie des religions intervienne dès le collège (62 %). Autre retour en arrière ? La tenue vestimentaire. Le retour de l’uniforme obligatoire en primaire et au collège est plébiscité par 56 % des sondés. Les changements souhaités passent également par le baccalauréat, que les sondés voudraient voir profondément modifié « avec davantage de contrôle continu » (80 %).

Les Français sont également massivement (69 %) d’accord pour qu’on dépiste l’usage du cannabis dans les lycées. Ils sollicitent à 84 % l’autorisation de l’apprentissage dès 14 ans.

Par contre, seuls 24 % sont pour la suppression du redoublement.


dimanche 23 juillet 2017

Thèse doctorale — Des enseignants d’éthique loin d’être neutres ?

Des enseignants d’éthique et culture religieuse ne se gêneraient pas pour faire l’éloge du végétarisme ou étaler leurs convictions politiques devant leur classe, révèle une nouvelle étude.

« Qu’ils soient athées ou croyants, les enseignants font très attention de ne pas transmettre leurs croyances religieuses à leurs élèves. Mais quand vient le temps d’enseigner la portion “éthique”, beaucoup d’entre eux vont donner leurs opinions personnelles », a dit Stéphanie Gravel, une étudiante au doctorat en sciences des religions à l’Université de Montréal.

[Note du carnet : Comme l’a écrit Luc Phaneuf, enseignant d’ECR, dans le NIC du 21 mars 2010 : « Un prof convaincu et habile fera des miracles avec ce cours dans les consciences des jeunes, surtout les incroyants agnostiques. » Pour lui, avec un bon professeur, avec de bonnes notes de cours, le cours peut être bénéfique et servir d’éveil spirituel à ces très nombreux jeunes qui auparavant n’entendaient pas parler de la religion. Cet enseignant modèle posera les bonnes questions, abordera des sujets peu fréquents, éveillera les consciences... Mais voilà, Luc Phaneuf est un catholique convaincu. Que pense-t-il qu’il arrivera avec un professeur athée ou agnostique qui posera les bonnes questions ? Quid des sujets éthiques ? Les professeurs ne laisseront-ils vraiment pas paraître leurs opinions (souvent très politiquement correctes) dans leurs encouragements, leurs questions, les thèmes qu’ils choisiront de discuter ou non...? On peut en douter à la lumière de certains témoignages qui nous sont parvenus. Voir la liste des liens connexes.]


Le cours d’éthique et culture religieuse (ECR), qui remplace depuis 2008 l’enseignement confessionnel et moral dans les classes du Québec, a soulevé la controverse à maintes reprises.

Tandis que les détracteurs du programme disent généralement craindre l’endoctrinement religieux des élèves, la thèse de doctorat de Mme Gravel souligne que c’est plutôt le volet « éthique » qui pourrait poser problème.

[Note du carnet : Loyola s’opposait au volet éthique dès mai 2008. L’apprentissage des faits sur d’autres religions au secondaire ne la gênait pas vraiment puisqu’elle le faisait déjà, Loyola trouvait le volet religieux ECR trop superficiel cependant. Le collège répètera cette opposition devant la Cour suprême : comment une école catholique peut-elle rester neutre dans des discussions éthiques sur la malhonnêteté, une vie dissolue, la pornographie ? Lors d’une réunion de parents tenue à Valcourt en septembre 2008 avec des représentants du Monopole de l’Éducation, on avait également souligné des problèmes avec le volet éthique. Le professeur Douglas Farrow de McGill s’était également opposé, en août 2008, dans les colonnes du National Post, à la volonté sous-jacente dans ce programme de créer chez les élèves captifs du cours ECR une distance critique envers les préceptes moraux de leurs parents. Dans l’ensemble, nous ne sommes pas sûrs qu’une bonne éducation soit assurée par un enseignement éthique impartial, neutre ou objectif. Les parents cherchent plutôt que leurs enfants soient éduqués avec certaines valeurs morales précises à transmettre. Devant la multiplicité de ces choix, il faut abolir le programme ECR ou pour le moins permettre des mises en œuvre très différentes de celui-ci en accord avec les parents et la direction de chaque école.]

Pendant plus d’un an, Stéphanie Gravel a observé 12 enseignants et enseignantes d’ECR dans autant d’écoles secondaires francophones québécoises.

Dans cet échantillon se trouvaient des personnes catholiques, protestantes, bouddhistes, syncrétistes, athées et agnostiques.

« Je pense qu’il y a un consensus social selon lequel l’école n’est pas là pour te transmettre ta croyance ni pour t’endoctriner. Et ça, c’était unanimement appliqué chez les enseignants, peu importe, leur religion », a indiqué Mme Gravel.

Végétarisme et carré rouge

L’étudiante de l’Université de Montréal a même remarqué qu’une enseignante très croyante, qui porte quotidiennement un collier avec une croix, dissimulait son pendentif lorsqu’elle donnait son cours, par souci de neutralité.

« Par contre, la surprise que j’ai eue, c’est que, pour la partie “éthique” du programme, la plupart des enseignants me disaient en entrevue que ça devenait moins important pour eux de ne pas donner leurs points de vue aux élèves », a dit Mme Gravel.

Par exemple, la chercheuse a été témoin d’une discussion entre un enseignant végétarien et des élèves qui cherchaient à savoir pourquoi il ne consommait jamais de viande lors des sorties scolaires. L’enseignant s’est alors lancé dans un discours en faveur du végétarisme, n’exposant que les arguments écologiques liés à cette pratique alimentaire.

« Il aurait pu présenter les mêmes arguments, mais sans parler de sa propre opinion et en abordant aussi les autres points de vue qui existent », a noté Mme Gravel.

Un carré rouge

Un autre enseignant arborait fièrement le carré rouge sur son sac, en refusant d’y voir un manque d’impartialité.

« Il m’a expliqué qu’il ne disait jamais aux élèves qu’il était athée, mais le port du carré rouge, c’était fondamental pour lui. À son avis, ça rejoignait les valeurs de la société, alors c’était correct. »

Résumé de Stéphanie Gravel de sa thèse
(disponible ici)

Le programme québécois non confessionnel d’Éthique et culture religieuse (ECR) exige de ses enseignants une posture professionnelle d’impartialité et d’objectivité. Cette dernière suscite une controverse sociale et des poursuites judiciaires. Les détracteurs du programme, comme ses défenseurs, invoquent l’impartialité de l’enseignement pour justifier leur position, mais en y conférant un sens différent. Malgré l’importance de cette question, aucune recherche empirique ne propose d’analyser l’impartialité des enseignants. Sur le plan théorique, on rencontre une diversité d’usages des concepts. Cette thèse propose une clarification de la question, tant sur le plan théorique que pratique. Une analyse approfondie de la posture professionnelle d’impartialité exigée en ECR est effectuée en première partie. S’ensuit une clarification des concepts d’impartialité, d’objectivité et de neutralité. Si le terme neutralité semble dominer la littérature en éducation et en politique, l’objectivité est principalement utilisée pour définir la posture du chercheur scientifique et le savoir qu’il produit. De son côté, l’impartialité est le parent pauvre de la littérature, particulièrement en éducation. Elle se trouve mieux définie dans le domaine de la justice et du droit, qualifiant surtout l’impartialité du juge.

Dans la deuxième partie de cette thèse, la méthodologie, les résultats d’analyse d’entrevues et ceux des observations sont présentés en examinant comment les enseignants d’ECR problématisent et négocient avec l’exigence d’impartialité professionnelle. La thèse innove aussi en analysant tant le propos que la mise en pratique de cette exigence d’impartialité en ECR chez 12 enseignants « typiques » ou « exemplaires » au secondaire provenant de milieux socioculturels différents (écoles privées confessionnelles ou publiques non confessionnelles de milieu multiculturel ou non multiculturel), répondant aux questions suivantes : Comment les enseignants conçoivent-ils l’impartialité exigée en ECR ? Comment l’impartialité exigée en ECR est-elle mise en pratique dans l’enseignement d’ECR au secondaire ? Réalisées à partir d’une approche déductive thématique, les analyses transversales des observations non participantes en classe et des entrevues semi-directives d’enseignants permettent de cerner les liens existant entre l’analyse théorique des prescriptions du programme ECR réalisée en première instance et les données qualitatives recueillies en deuxième instance.

Dans la discussion sont présentés les six principaux résultats se dégageant des analyses des 12 enseignants participants. Proposant une réflexion critique sur l’impartialité exigée en ECR, les résultats empiriques sont approfondis par les analyses théoriques, contribuant aussi à éclairer la question dans les domaines préoccupés par des défis professionnels similaires. Le premier résultat indique qu’il n’y a aucune influence des variables personnelles ou professionnelles des enseignants participants sur leur compréhension et leur mise en pratique de l’impartialité professionnelle exigée en ECR. Le deuxième rappelle qu’il existe une polysémie et une confusion conceptuelle entre les termes neutralité, impartialité et objectivité, tant chez nos enseignants que dans la littérature. La thèse propose à ce sujet des voies de clarification utiles. S’appuyant sur une typologie de l’impartialité élaborée en première partie, le troisième résultat explique que l’impartialité absolue ou « axiologique » est généralement rejetée. Le quatrième résultat rappelle que la notion de distance critique s’avère être le fondement de l’impartialité exigée en ECR. Le cinquième montre les différences entre l’impartialité religieuse et éthique, les questions d’endoctrinement religieux et d’expression ou non des croyances religieuses personnelles dominant la question de l’impartialité. Quant au sixième résultat, il résume les nombreux problèmes associés à l’exigence d’intervenir à partir des finalités du programme, ces finalités renvoyant à des concepts polysémiques et flous pour les enseignants.


Voir aussi

ECR — Marie s’est fait violer, elle a inventé l’histoire du Saint-Esprit, Joseph a gobé son histoire.

Enseignante d’ECR déguisée en curé... enfin pas dans la Voix de l’Est

« La vérité sur le cours ECR », une nouvelle catéchèse politiquement correcte ?

ECR — vingtaine d’adolescents dansent en récitant le mantra des Hare Krishna

Nouveau dérapage en cours d’ECR : un autre questionnaire explicite sur la sexualité

Cours d’ECR : les enseignants « marchent sur des œufs »

ECR — Les moines et les élèves ont dansé pour « éveiller la conscience de Krichna »... « Quelle belle rencontre de valeurs ! »

Chasser la religion et la remplacer par la spiritualité (suite)

Denise Bombardier sur ECR : cours de l’insignifiance, du fourre-tout politiquement correct ?

Après « Youpi, ma religion ! », « Ma religion de rêve »

Table ronde sur le matériel pédagogique ECR

Cahier ECR : « je suis un garçon, une fille, je ne sais pas encore »
Le cours ECR, école de l'unanimisme politiquement correct

ECR 2.0 ou élimination du programme ? Des enseignants en ECR essaient-ils de protéger leur poste ?

Formateur de formateurs en ECR à L’ACFAS : beaucoup de résistances, faible réceptivité, obstacles

Pas de classiques de la littérature, mais la lutte contre l’hétérosexisme en classe de français, d’anglais, d’histoire et de mathématiques et bien sûr... ECR !